Biologiquement, l’âge idéal pour concevoir et bien porter à terme une grossesse se situe entre 20 et 30 ans. Dans le cas où cette dernière se déroule avant 20 ans, les risques sont surtout d’ordres social, économique et psychologique. Dans certaines sociétés, les grossesses avant 20 ans sont néanmoins fortement encouragées et soutenues malgré les risques (Pasini, Béguin, Bydlowski & Papiernick, 1993).
En comparaison avec la Suisse, les grossesses précoces sont beaucoup plus fréquentes en Amérique Latine. Le pays avec le taux le plus élevé est le Nicaragua où 28% des femmes accouchent avant leurs 18 ans. Les pays en voie de développement en Amérique Latine ont un taux de fécondité des adolescentes qui est préoccupant. En revanche, tomber enceinte avant 20 ans en Suisse est un phénomène qui diminue depuis les années 1970 : actuellement, le taux de femmes qui accouchent avant leurs 20 ans, est de 1% (Gindroz, 2014).
Selon l’Organisation des Nations Unies (ONU, 2013), citée dans caracol.co, les causes du taux aussi élevé de grossesses précoces, sont le manque d’éducation sexuelle tant de la part des parents que des institutions, le manque d’informations relatives aux méthodes contraceptives et à la planification familiale.
L’éducation sexuelle s’avère être une prévention efficace contre les grossesses précoces (Delgrande Jordan & Inglin, 2012).
Selon Tessier (2012), l’éducation en santé est à la base de tout type de prévention. L’éducation individuelle et l’animation de groupes sont deux moyens pour atteindre les objectifs éducatifs. L’approche individuelle se montre plus efficace quand on parle « d’éducation thérapeutique », dans le contexte où un individu avec toutes ses caractéristiques individuelles doit faire face à une situation spécifique. L’animation collective, au contraire, est utilisée pour des problèmes sociaux et/ou communautaires. Cette approche permettra de se détacher des problèmes individuels, de travailler sur des représentations partagées, de construire un discours commun, d’identifier des ressources (surtout des personnes-ressources dans le groupe) et de dédramatiser les situations rencontrées.
Dans l’éducation à la santé, plusieurs intervenants peuvent entrer en jeu. Les enseignants, surtout pendant la scolarisation obligatoire, y ont un premier rôle en offrant une éducation informelle à la santé. Les parents, et la famille dans un sens plus large, ont un rôle encore plus crucial dans ce type d’éducation. Pour ce faire, les parents doivent recevoir les bonnes informations afin de se créer des représentations correctes qu’ils peuvent ensuite transmettre (Tessier, 2012).
Toujours selon Tessier (2012), l’éducation correspond à un processus pédagogique qui utilise plusieurs méthodes et techniques. Elle a pour but d’aider la personne à se construire une image positive d’ellemême et de sa propre santé globale en construisant des connaissances spécifiques qui lui permettront de faire des choix favorables à sa propre santé dans un sens large. La réflexion éthique et le travail sur les représentations personnelles sont indispensables.
L’éducation à la santé est une forme de prévention et de promotion de celle-ci. Ces deux derniers concepts seront présents tout au long de ce travail, il est donc impératif de les définir.
Selon bdsp.fr (2015), la prévention se définit comme des :
« Actions visant à réduire l’impact des déterminants des maladies ou des problèmes de santé, à éviter la survenue des maladies ou des problèmes de santé, à arrêter leur progression ou à limiter leurs conséquences. Les mesures préventives peuvent consister en une intervention médicale, un contrôle de l’environnement, des mesures législatives, financières ou comportementalistes, des pressions politiques ou de l’éducation pour la santé. »
Plus spécifiquement, toujours selon bdsp.fr (2015), la prévention primaire est définie comme des :
« Actions visant à réduire la fréquence d’une maladie ou d’un problème de santé dans une population saine, par la diminution des causes et des facteurs de risque. »
En ce qui concerne la promotion de la santé, selon bdsp.fr (2015), elle consiste en un :
« Processus apportant aux individus et aux communautés la capacité d’accroître leur contrôle sur les déterminants de la santé et donc d’améliorer leur santé. Ce concept inclut la promotion des modes de vie aussi bien que l’amélioration des conditions de vies, des facteurs sociaux, économiques et environnementaux qui déterminent la santé.
La charte de la promotion de la santé d’Ottawa (1986) identifie trois stratégies de base : plaidoirie, facilitation, médiation. A ces stratégies correspondent cinq domaines d’actions : établir des politiques visant la santé, développer les aptitudes et les ressources individuelles, renforcer l’action communautaire, créer un environnement favorable à la santé, réorienter les services de santé. »
L’importance d’une éducation à la santé comme à l’éducation sexuelle est soulignée par le fait que, selon durex.com (S.d), le bien-être sexuel rejoint les facteurs physiques, émotionnels et sociologiques. Ce bienêtre fait partie du bien-être fondamental et de la santé de chacun.
Synthèse des résultats en lien avec le cadre théorique
a) Le « coping » et le développement
Selon McGill, le coping et le développement sont les deux dimensions qui définissent le concept de la santé. Le coping représente la maîtrise de problèmes, voire la résolution de ces derniers (et non pas « seulement » une réduction de tension). Le développement en revanche, est le processus qui cherche à accomplir les buts visés pour atteindre un plus haut niveau de satisfaction dans la vie (Pepin & al., 2010).
Si on considère la différenciation des rôles des deux sexes, dans la culture latine, elle peut amener à adopter un coping inefficace face à certaines situations concernant la sexualité. Les hommes sont considérés comme plus autoritaires et ont ainsi souvent plus de pouvoir décisionnel. Ceci a comme conséquences que certaines jeunes filles ont des rapports sexuels précoces suite au désir de l’homme. Elles n’osent pas le lui refuser (Barbosa de Sousa, Pinto Fernandes & Teixeira Barroso, 2006 ; Larson, 2009).
b) Le « readiness »
Le readiness ou “réceptivité” est défini comme l’empressement de la personne/famille à réaliser des activités d’apprentissage ou à s’engager (Paquette-Desjardins & Sauvé, 2008). Plusieurs facteurs culturels qui influencent la santé sexuelle des adolescents d’origine latine sont mis en évidence. Il est donc intéressant de les prendre en considération pour adapter les interventions auprès de cette population.
Dans la culture latine, plusieurs aspects ont une influence sur les interventions d’éducation sexuelle. Par exemple, la réceptivité des adolescents à ces interventions est freinée par le fait que la sexualité est un tabou dans la culture latine. Ceci diminue voire élimine la communication à ce sujet tant entre parents et adolescents que dans la fratrie. Les parents se retrouvent dans une certaine ambivalence, car ils reconnaissent que c’est important de parler de sexualité entre autre pour éviter des grossesses précoces, mais en même temps ils ont peur de favoriser l’activité sexuelle de leurs enfants au cas où ces derniers n’auraient pas déjà commencé leurs vie sexuelle (Barbosa de Sousa & al., 2006 ; Rouvier & al., 2011). Dans la majorité des familles, les enfants n’osent pas non plus aborder le sujet de la sexualité avec leurs parents, par crainte que ces derniers les soupçonnent de déjà avoir une vie sexuelle active (Larson & al., 2014).
c) L’apprentissage
L’apprentissage correspond à l’adoption d’un nouveau comportement ou à la modification d’un comportement que la personne/famille a déjà (Paquettes-Desjardins & Sauvé, 2008). La personne/famille doit être active dans les soins pour qu’un changement puisse avoir lieu (Pepin & al., 2010).
Les grossesses à l’adolescence sont un phénomène connu dans la culture latine. Des différentes études, il ressort que très souvent déjà les mères des jeunes filles enceintes ont vécu la même expérience pendant leur adolescence. L’exemple que représente la mère pour une adolescente et l’influence directe qu’elle a sur son comportement sexuel sont donc bien visibles (Barbosa de Sousa & al., 2006 ; Larson, 2009). Ceci est démontré par l’absence d’utilisation de moyens contraceptifs modernes dû au fait que l’adolescente n’ait jamais vu ni sa sœur, ni sa mère y recourir (Barbosa de Sousa & al., 2006).
d) Contexte sociodémographique
Le contexte sociodémographique ressortait en tant que facteur déterminant pour la santé sexuelle dans plusieurs articles. En plus, selon la théorie de McGill, les habitudes de santé s’apprennent aussi dans l’environnement (Pepin & al., 2010). Il est donc intéressant de faire le lien avec ces facteurs.
En ce qui concerne l’éducation scolaire des adolescentes, il est dit qu’un niveau plus élevé diminue les grossesses précoces non-planifiées, car il diminuerait la peur d’infertilité et augmenterait ainsi l’utilisation correcte des méthodes contraceptives (Gonçalves & al., 2011 ; Samandari & Spelzer, 2010). En revanche, il y a une certaine incompatibilité entre la parentalité et la réalisation professionnelle des femmes assurant leur indépendance financière : pour poursuivre leur éducation, les jeunes filles doivent repousser la maternité à l’âge adulte (Gonçalves & al., 2011). Cependant, un niveau d’éducation bas, associé à un statut socio-économique bas et le fait de vivre dans une région urbaine, favoriseraient des relations amoureuses et des rapports sexuels précoces avec une mauvaise, voire insignifiante utilisation des moyens contraceptifs (Samandari & Spelzer, 2010).
1. INTRODUCTION |