LES INDUSTRIES TEXTILES TRADITIONNELLES EN SÉNÉGAMBIE

LES INDUSTRIES TEXTILES TRADITIONNELLES EN
SÉNÉGAMBIE

LES ACTIVITÉS INDUSTRIELLES

Dans ce chapitre, on étudiera les différents arts et métiers en Sénégambie. Pour cela on utilisera les documents d‟archives et les récits de voyage des Européens. Ces derniers nous donnent des informations très détaillées sur les activités de production de ces populations sénégambiennes. Ainsi, nous ferons au cours de ce chapitre l‟étude détaillée des différentes activités socioprofessionnelles qui existaient dans cette partie de l‟Afrique Occidentale. I. LES ACTIVITÉS SOCIOPROFESSIONNELLES En Sénégambie, la société était divisée en plusieurs classes sociales spécialisées dans un domaine d‟activité bien déterminé. Parmi ces groupes sociaux nous avons les gens de caste qui pratiquaient la plupart des travaux manuels. Par exemple, la forge, la cordonnerie, le tannage, le tissage, la teinture, l‟orfèvrerie, etc. Ces activités socioprofessionnelles permettaient aux populations d‟acquérir des moyens de subsistance. Les documents ayant étudié ces activités socioprofessionnelles sont nombreuses et variés. Cependant, nous disposons de récits de voyage européens faits dans le continent africain et particulièrement en Sénégambie. Ces derniers nous donnent des informations très détaillées sur ces différentes professions. Ces écrits sont en majeure partie l‟œuvre des explorateurs qui ont traversé le continent noir à partir du XVe siècle à la quête de nouvelles terres et à la découverte des voies pour le développement du commerce entre Européens et Africains. Néanmoins, certains de ces écrivains n‟avaient jamais mis les pieds en Afrique et se sont contentés de reproduire les récits des missionnaires, des soldats, des navigateurs, etc. Tout d‟abords, parmi les auteurs qui n‟ont pas fait le voyage en Afrique nous pouvons citer Jean-Baptiste Labat. Mais sa description sur les contrées occidentales de l‟Afrique reste très importante. Il donne la description géographique de ces lieux, des gouvernements, de l‟habillement, des mœurs et coutumes des populations. Il évoque également les différents métiers des indigènes ainsi que leurs manières de travailler et les objets produits. Selon ses mots « on ne voit d’autres ouvriers parmi eux que des Tisserands, des Taillandiers et des Potiers de terre… Les Taillandiers sont chez eux Orfèvres, Couteliers, Fourbisseurs, Forgerons, Maréchaux, Chaudronniers, en un mot ils réunissent dans un seul corps, tous les 14 ouvriers qui se servent du marteau et de l’enclume. »9 Mais l‟auteur critique les objets fabriqués par les artisans et impute cette médiocrité de leur travail par leur paresse. Toutefois, certains auteurs ne manquent pas de signaler le talent et l‟adresse de ces artisans. Car selon eux « ces manufactures … suffisent à leurs besoins sous le rapport de l’habillement et des ustensiles nécessaires à leur ménage, ils fabriquent des instruments aratoires, des outils nécessaires aux charpentiers, aux forgerons et aux tanneurs, ils font des aiguilles, des pointe de flèches très-aigues, des étriers, des mords, des lances, des pinces et autres outils. La manière dont tous ces ouvrages sont finis annonce du goût et de l’intelligence de la part des ouvriers qui les fabriquent ». Plus haut, nous avons fait allusion aux écrivains qui ont parcouru le continent africain à la découverte de nouvelles terres non exploitées et des richesses. Ces voyages ont aussi permis à ces auteurs de relater des informations détaillées sur les mœurs et coutumes des populations rencontrées, ainsi que leurs manières de vivre, leurs physionomies, leurs gouvernements, etc. En premier lieu, nous avons le récit de voyage de S.-M.-X. Golbéry, Fragments d‟un voyage en Afrique : fait pendant les années 1785, 1786, 1787, dans les contrées occidentales de ce continent, comprises entre le Cap-blanc de Barbarie… et le Cap de Palme. Dans cet ouvrage, l‟auteur énumère les différentes industries des Maures qui habitent aux bords du fleuve Sénégal, à savoir l‟orfèvrerie, le tannage, le tissage mais également le commerce des objets fabriqués. Il évoque les industries des habitants de Bambouk en ces termes : …ils ne connaissent, à proprement parler, que deux métiers, celui de maréchal ou forgeron, et celui d’ouvrier en cuir… Tous les habitans du pays sont potiers ;… les femmes travaillent quelques hardes et des bonnets, des paniers, des nattes en pailles de riz, teintes en différentes couleurs, et d’un gout parfait. 

L’ARTISANAT TEXTILE EN SÉNÉGAMBIE 

En ce qui concerne l‟étude des arts textiles en Sénégambie, nous allons utiliser les sources archivistiques, les récits de voyage européens, les études faites pendant la colonisation et après l‟indépendance des différentes colonies de la Sénégambie et enfin les ouvrages récemment parus qui font l‟analyse de ces activités.

Les matières premières

 Dans cette partie nous allons étudier les fibres textiles qu‟utilisaient les artisans pour travailler les tissus. Ces fibres étaient en général du coton mais associé souvent avec la laine ou la soie. Cette dernière était souvent exportée par la population indigène. Dans ce cas il sera important d‟analyser la production de ces fils. 

Le coton

 Les études sur la culture du coton en Sénégambie sont nombreuses. Tout d‟abord, nous disposons de documents d‟archives. Ces derniers datent de la colonisation et étaient l‟œuvre des commandants de cercles, des chefs de services de l‟agriculture, des Lieutenants, des gouverneurs, des scientifiques, etc., travaillant pour le compte de l‟Administration coloniale. Ces documents, conservés aux Archives Nationales du Sénégal, sont repartis dans plusieurs séries. En premier lieu, nous allons nous intéresser à la série G : Politique et administration générale. Celle-ci est ensuite divisée en plusieurs sous-séries et nous avons choisi la 1G intitulée Études générales : missions, notices et monographies de 1818 à 1921. Les auteurs de ces documents font la description des populations, de leurs milieux et étudient les possibilités de développer les ressources naturelles des régions situées en Afrique Occidentale. Ces écrits comportent plusieurs études et rapports concernant la culture du coton par les indigènes. La culture du coton par l‟indigène est attestée, tout d‟abord, par le Commandant du cercle de Sédhiou, Falin, dans une lettre adressé au Commandant de Gorée le 23 janvier 1861. Dans son rapport, il donne la description d‟un village de Sédhiou du nom de Boudhié-Karantaba habité par des Soninkés et des Mandingues qui cultivent le coton que les femmes filent, et avec lequel ils font des pagnes…  Non loin de ces lieux, plus précisément dans le Fouladou, cette plante textile était aussi cultivée. Selon l‟Administrateur de La Roncière, comme le pays se suffit à lui-même, il cultive la plante nécessaire à son habillement, le coton.Ce coton était dénommé « otollo » de l‟espèce « N‟dargou» blanc éclatant, à courte soie. Il est semé annuellement entre les rangées de mil, dès que celles-ci atteignent 1,50 m, les jeunes plantes sont ainsi protégées… La récolte se fait à partir de mars. Le bassin de la Kandaya et la Haute-Casamance sont particulièrement propices à cette culture16 . On retrouve également cette même espèce de coton dans le cercle de Niani-Ouli où Il fait l’objet d’un trafic local assez important… Chaque village possède au moins un champ de coton ; les indigènes attachent un soin particulier à sa culture. On le sème particulièrement au commencement de juillet dans les lougans de sounas, entre les tiges de mil et bien aligné. La récolte se fait vers le mois de décembre, puis, l’année suivante les tiges sont arrachées, enlevées, le champ nettoyé et on sème à nouveau. 17 L‟une des séries traitant spécialement de la culture du coton est la série R: Agriculture, Élevage, Eaux et Forêts, Pêche. Il en existe deux, l‟une étudiant l‟Afrique Occidentale Française de 1820 à 1959 et l‟autre la colonie du Sénégal de 1864 à 1959. La sous-série 1R qui traite sur l‟agriculture contient des rapports et des études analysant la culture du coton dans les différentes colonies de l‟Afrique Occidentale Française.

La laine 

Les sources concernant l‟emploi et la production de la laine en Sénégambie ne sont pas aussi prolifiques que celles du coton. Les documents d‟archives dont nous disposons font l‟analyse de la laine du Soudan et du Niger où la production était très importante. Deux sous-séries font l‟étude de cette laine. La première est la 2G 6 versement 19 ; celle-ci regroupe des rapports sur l‟agriculture ; ainsi que des études sur les stations agronomiques et culturales mises en place par les colons. Elle reprend également un rapport d‟Yves Henry sur les productions naturelles et les produits susceptibles d‟être cultivés en Afrique Occidentale Française. Ce rapport a été publié en 1907 et édité par Augustin Challamel à Paris. Il compte 370 pages avec 4 cartes hors texte, 8 planches et 62 figures. Le texte fournit des données sur l‟élevage du mouton à laine au Soudan et donne des informations sur la production et l‟utilisation de ce produit par les indigènes. Sur ce point, l‟auteur écrit : Les Foulbés n’emploient qu’une petite quantité de la laine de leurs troupeaux. Ils confectionnent avec elles des couvertures blanches dites kassas, parfois ornées de dessins assez habilement brodés en noir, jaune et rouge, des tentures tissées en fils de différentes couleurs, désignées sous le nom d’arkilé qui tiennent lieu de moustiquaires, des vêtements d’homme (saké kassa) et des pagnes (diolarré). Ils en utilisent aussi une certaine quantité pour rembourser leurs selles.   L‟autre sous-série qui étudie la laine est la 2R 15 versements 139. Elle traite aussi sur l‟élevage du mouton à laine. M. Wilbert indique, dans une monographie, que les moutons à laine étaient surtout nombreux dans les cercles de Djenné, de Bandiagara et d‟Issa-Ber et dans le cercle annexe de Goundam. Il existait aussi des troupeaux importants dans les cantons de Dia et de Monempé du cercle de Sokolo.

Table des matières

DÉDICACES
REMERCIEMENTS
INTRODUCTION GÉNÉRALE
PREMIÈRE PARTIE : LES INDUSTRIES EN SÉNÉGAMBIE
CHAPITRE I : LES ACTIVITÉS INDUSTRIELLES
CHAPITRE II : L‟USAGE DE L‟ÉTOFFE EN SÉNÉGAMBIE
CONCLUSION PARTIELLE
DEUXIÈME PARTIE : L‟ORIGINE DU TISSAGE EN SÉNÉGAMBIE
CHAPITRE I : L‟ORIGINE DU TISSAGE DANS LA TRADITION ORALE
CHAPITRE II : LES SOURCES ÉCRITES
TROISIÈME PARTIE : ÉVOLUTION ET CRISES DES INDUSTRIES TEXTILES EN SÉNÉGAMBIE
CHAPITRE I : CRISES DES INDUSTRIES TEXTILES
CHAPITRE II : ÉVOLUTION DES INDUSTRIES TEXTILES LOCALES
CONCLUSION GÉNÉRALE
ANNEXES
ILLUSTRATIONS
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES ANNEXES
TABLE DES ILLUSTRATIONS
TABLE DES FIGURES
TABLE DES TABLEAUX
TABLE DES CARTES
GLOSSAIRE
SIGLES

 

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