Qu’il s’agisse des entreprises ou des États, la compétitivité est de plus en plus fondée sur les connaissances détenues par les personnes et les organisations. Drucker (1991) note que la « société de la connaissance » sera plus compétitive que n’importe quelle autre société, puisque la connaissance sera accessible partout. Dans le même sens, une étude a démontré que 70 % des écarts de développement entre les États s’expliquent par des facteurs intangibles, dont la connaissance (Prax, 2000).
Selon Zanin (2004), le développement durable est fondé sur l’économie de la connaissance et de l’innovation. Celle-ci implique, entre autres, un enseignement supérieur permettant de transférer des connaissances et des compétences aux acteurs économiques et sociaux. Dans ce cadre, l’enseignement supérieur est considéré comme l’un des piliers principaux du développement de tous les pays.
Toutefois, si la création des connaissances en général et dans l’enseignement supérieur en particulier est une condition nécessaire pour contribuer à l’amélioration de la compétitivité des organisations et, au-delà, de celle des nations, elle demeure insuffisante et dépendante de la qualité des connaissances créées et utilisées, d’où l’importance des démarches qualité appliquées à l’enseignement supérieur.
Le développement de la qualité dans l’enseignement supérieur s’inscrit dans le cadre de la dynamique de la qualité des services. En fait, historiquement, la qualité s’est développée d’abord dans le secteur industriel, notamment automobile. Cela s’expliquait essentiellement par le rôle économique important de l’industrie. Ce n’est plus le cas de nos jours où le secteur tertiaire représente, depuis la fin des années 90, plus de la moitié du PIB d’un pays comme la France (Kotler et Dubois, 2000).
Toutefois, la littérature sur le management de la qualité ne tient pas compte, sauf quelques exceptions, des spécificités de la qualité des services et se focalise essentiellement sur l’industrie, malgré le développement de la certification ISO 9001 dans les services (Kaziliūnas, 2010 ; Lee et coll., 2009 ; Jougleux, 2006). Ce n’est qu’au début des années quatre-vingt que certains chercheurs ont commencé à s’y intéresser sérieusement. Cela est dû essentiellement au développement du secteur des services qui emploie actuellement plus de 60% de la population active de la plupart des pays industrialisés (Kaziliūnas, 2010).
Face à cet accroissement du rôle économique des services, les managers ont commencé la recherche des outils permettant d’orienter et de contrôler un organisme de services. C’est ce qui a donné naissance à la démarche qualité dans les services.
Dans le cadre de cette dynamique de la qualité dans les services, et face à une concurrence internationale, la mise en place d’une démarche qualité dans les établissements d’enseignement supérieur (que l’on désignera par la suite par l’abréviation EES) est devenue une nécessité pour leur développement et leur pérennité.
Ceci dit, si l’enseignement supérieur a été influencé par le développement des démarches qualité dans les services en général, il n’en demeure pas moins que ce secteur a ses propres enjeux qui sont assez particuliers par rapport aux autres services.
En Europe, la convention de Lisbonne sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne a joué un rôle important dans le développement de l’utilisation des normes qualité dans les EES. Ainsi, l’article VIII.1 de ladite convention mentionne « la nécessité d’introduire des normes de qualité dans les EES ».
Pareillement, le conseil européen de Barcelone (mars 2002) a demandé que « les systèmes européens d’enseignement et de formation deviennent, d’ici 2010, une référence de qualité mondiale ». Dans ce cadre, il est attendu de chaque EES, dans l’Union européenne, qu’il puisse mettre en œuvre une assurance qualité interne (processus de Bologne, Berlin 2003, Bergen 2005).
Au Maroc, notre terrain de recherche, le secteur de l’enseignement supérieur a connu plusieurs évolutions depuis le début des années 2000. Il s’agit notamment de l’adoption d’un plan d’urgence pour l’enseignement supérieur public, de l’apparition des universités privées et de la mise en place d’un système d’accréditation des EES privés (Argos, 2013). Outre cela, le statut avancé accordé au Maroc par l’Union européenne en 2008 exige un « rapprochement du système d’Enseignement Supérieur et de Recherche et de formation professionnelle marocain à l’espace européen d’Enseignement Supérieur et de Recherche Scientifique et de formation professionnelle ».
Dans le cadre de ce rapprochement, le Maroc a adopté le système LMD et a encouragé l’adéquation de ses cursus universitaires à ceux de l’Union européenne. Ce rapprochement se matérialise aussi par des programmes de coopération visant une amélioration de la qualité de l’enseignement supérieur marocain, tel que le programme TEMPUS. Ce dernier « s’attache surtout à favoriser la coopération institutionnelle entre les universités européennes et leurs homologues des pays voisins, ce qui le distingue d’autres initiatives internationales de développement » . Le programme TEMPUS a financé ainsi, entre autres, quelques démarches qualité au sein des EES marocains. Dans cette course à la mise en place de démarches qualité, les certifications sont devenues un élément important, qui peut permettre une amélioration de la notoriété de l’établissement d’enseignement supérieur. Quel que soit le référentiel adopté, une reconnaissance de la démarche qualité constituera un avantage pour l’EES vis-à-vis des parties prenantes. Trois types principaux de reconnaissance sont possibles : l’évaluation interne ou externe, la certification et l’accréditation. La certification est le résultat d’un processus d’audit du système de management mis en place selon le référentiel choisi. C’est le cas notamment pour la norme ISO 9001. Pour ce qui est de l’évaluation interne ou externe et l’accréditation, Zanin (2004) souligne qu’il ne faut pas confondre ces deux concepts.
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