Les fondements théoriques de l’audit interne

Les fondements théoriques de l’audit interne

Partant des réflexions et des avancements théoriques au sujet de l’audit, la littérature permet de constater que la fonction de ce mécanisme peine à élaborer une définition unanime dans le domaine des sciences de gestion. En effet, ce constat découle du fait que la fonction d’audit renferme plusieurs disciplines qui servent comme des facteurs explicatifs à son rôle dans le développement de l’entreprise. Il en suit aussi que des différences de perceptions à ce sujet, de fortes disparités peuvent surgir si l’on tient compte de la diversité des théories financières et comptables. Les chercheurs trouvent difficile de délimiter de l’audit interne à travers une approche qui consisterait à analyser simultanément son rôle et son impact sur la performance financière de l’entreprise. Les prémisses des études, qui tient compte de l’impact réciproque de l’audit interne sur la gouvernance et réciproquement, ont commencé à se cristalliser dans la pensée de plusieurs chercheurs. En vue d’exhiber l’importance du rôle de l’audit, il est judicieux de poser les fondements explicatifs et théoriques à l’étude du concept mobilisé dans la présente étude (1.). A cet égard, la théorie des droits de propriété (1.1.), la théorie de l’agence (1.2.), la théorie des coûts de transaction et celle du signal apporteront des arguments qui identifient le rôle de l’audit dans le développement des entreprises. Les fondements théoriques de l’audit interne 29 1. L’audit interne à la lumière du courant contractuel de la firme L’examen de l’audit interne s’effectue à la lumière de la théorie des droits de propriété (1.1.). La théorie de l’agence (1.2.), la théorie des coûts de transaction (1.3.) et la théorie du signal (1.4.) apportent davantage un éclairage sur les avantagés que sa fonction contribue au mode de fonctionnement de l’entreprise. 

La théorie des droits de propriété et la gouvernance d’entreprise

 Dans les entreprises patrimoniales, les propriétaires exercent les fonctions de contrôle et de décision. Implicitement, ils exercent aussi la fonction d’audit du moment où ces derniers persévèrent à la poursuite de leur objectifs organisationnels qui se chevauchent avec leurs intérêts personnels. En effet, c’est la nature du capital de l’entreprise qui définit les enjeux qu’encourt une entreprise. Cependant dans le cas où le capital d’une organisation est détenu entre plusieurs actionnaires, la fonction de gestion individuelle ne peut plus être efficiente étant donné que la représentativité des détenteurs d’actions devient plus large et les intérêts ne sont plus les mêmes. A cela s’ajoute le pouvoir de décision qui émane des prérogatives du dirigeant et qui peuvent, dans certains cas, diverger des intérêts des actionnaires7 . Partant de cette perspective, une firme peut être considérée comme un ensemble de contrats qui établissent une certaine structure de droits de propriété. Dans ce sens, la théorie des droits de propriété ainsi que celle de l’agence assimilent la firme à un nœud de contrats. Ce courant théorique appuie cette vision de la prise en compte de l’ensemble des partenaires (Hill et Jones, 1992) dont chacun fait partie d’un nœud de contrat qu’il soit implicite ou explicite. Les principaux. La fonction des droits de propriété privés est de fournir aux individus des incitations à créer, conserver et valoriser des actifs (Coriat et Weinstein, 1995). La manière de les répartir a donc un impact sur la performance des entreprises. Nombre d’auteurs ont étudié le lien entre la géographie de la propriété et la performance des entreprises (Charreaux, 1991). Demsetz avance que « la propriété d’une chose est assimilée dans son essence à un pouvoir, à une faculté des individus, chaque droit sera spécifié par le contenu de ce pouvoir » (1967, p.359). Selon Alchian et Demsetz (1972), « le courant des droits de propriété paraît approprié à l’étude des entreprises puisqu’il met justement en évidence l’impact de la nature des droits de propriété sur l’efficacité et le comportement de ces entreprises » (p.789). A savoir que la structure de la propriété est considérée comme un mécanisme important de gouvernance d’entreprise (Fama et Jensen, 1983a,b) (Jensen et Meckling, 1976). Appliqués au thème de l’audit interne, les droits de propriété se manifestent à travers la transparence de l’information financière qui doit être révélée au profit des parties prenantes et plus précisément au profit des actionnaires en vue d’afficher la performance de l’entreprise et d’établir aussi une meilleure visibilité stratégique pour le conseil d’administration et l’instance dirigeante. Ceci dit que dans le cas d’une concentration du capital entre les mains d’un actionnaire majoritaire, la propriété est considérée comme un facteur de domination managériale où elle empêche le conseil d’administration de remplir ses responsabilisées (Ruiz-Barbadillo, Biedma López et Gómez-Aguilar, 2007). Cette conception révèle l’importance de la théorie des droits de propriété en tant qu’une théorie générale des relations sociales et des institutions (Coriat et Weinstein, 1995). Selon les mêmes auteurs, le type et la répartition des droits de propriété qui assurent l’efficience la plus grande tendent à s’imposer. 31 Contrairement aux thèses de (Berle & Means, 1932), la théorie des droits de propriété met l’accent sur les avantages d’une absence de séparation entre la fonction de dirigeant et d’actionnaire. Pour être efficaces, ces droits de propriété doivent être d’un part exclusif, et d’autre parts transférables. Pour Furubotn et Pejovich (1972), les droits de propriété d’un actif consistent en : * « un droit d’usage de l’actif (usus) ; * un droit à s’approprier les revenus qu’il génère (fructus) ; * un droit à lui changer de forme ou de substance » (abusus) » (p.1140). En effet, selon Alchian et Demsetz (1972, p.783), deux dimensions essentielles caractérisent l’analyse des droits de propriété : l’allocation du rendement résiduel et la détention du contrôle résiduel. Selon Coriat et Weinstein, « le droit de contrôle résiduel est « le droit de prendre toute décision concernant l’utilisation de l’actif qui n’est pas explicitement exclue par la loi ou spécifiée dans le cadre de rapports contractuels » (1995, p.87). Dans les entreprises privées, les propriétaires ne sont pas tous identifiables aux droits du rendement résiduel. En ce sens, les propriétaires ne peuvent pas pourvoir leurs droits comme dans le cas d’une entreprise patrimoniale ou familiale. Leur propre responsabilité ne peut pas être exercée dans ce sens du moment où l’instance dirigeant est « garante » de tous les stratégies entreprises et des résultats obtenus. Ainsi, le fonctionnement organisationnel repose sur l’allocation de deux types de décisions tels que définis par (Fama et Jensen, 1983a,b) : * les droits liés à la gestion de la décision * les droits de contrôle des décisions  . L’efficience de la firme dépend alors de l’allocation optimale des droits à un individu de manière à maximiser l’impact de ses décisions et de conduire, en cela, à réduire les coûts qui peuvent subvenir lors de l’établissement de contrats entre propriétaires et dirigeants. Alors le pouvoir incitatif des droits de propriété résiderait, dans ces conditions, selon Milgrom et Roberts (1992), « dans le couplage étroit du droit de contrôle résiduel et du droit au rendement résiduel. » Pour Alchian et Demsetz (1972), la nature de la firme sur la base d’une association des droits de propriété et du contrôle. Certains auteurs soulignent l’inefficacité des entreprises du moment où le capital est fractionné entre les mains de plusieurs actionnaires et il serait difficile d’effectuer un contrôle continu, surtout dans des contextes difficiles. Cela s’explique en partie à travers l’effet incitatif que se manifestent les droits de propriété. En effet, Coriat et Weinstein précisent que « le dirigeant (détenteur du droit de contrôle résiduel) est bien incité à veiller à la meilleure utilisation possible des ressources, ce qui permet de résoudre les problèmes d’information imparfaite et de risque moral propres à la production en équipe » (1995, p.99), c’est-à-dire à aller dans le sens des intérêts des propriétaires, ou encore à maximiser le profit de l’entreprise. Dans le cadre des entreprises multinationales, et plus précisément dans celui des entreprises privées, le cas diffère complètement dans la mesure où le rôle de l’audit interne et du comité d’audit apparaît essentiel pour pallier aux problèmes d’information imparfaite et de risque moral. Dans le cadre de la théorie d’agence, le rôle de l’audit est considéré comme un mécanisme d’alignement des intérêts entre les propriétaires et les actionnaires de l’entreprise. 

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La théorie de l’agence et le rôle de l’audit interne

Partant des conclusions de l’étude de (Berle et Means, 1932), la théorie de l’agence, fondée sur l’intérêt personnel, repose sur la séparation entre la propriété et le management. Pour Ross (1973), « la théorie de l’agence se traduit par le fait que le propriétaire (principal) abandonne ses prérogatives sur la direction de l’affaire et délègue son pouvoir (l’usus de son droit de propriété) à un manager professionnel (agent) qui doit, à priori, agir dans le sens des intérêts de ce propriétaire » (p.134). Dans cette acception, chaque entreprise doit assurer un système de gouvernance d’entreprise spécifique pour favoriser l’alignement des intérêts des managers sur ceux des actionnaires. En cela, il est désormais possible aux investisseurs, nationaux et étrangers de réaliser les transactions financières sans aucunes contraintes. Seulement, il n’en demeure pas moins que, pour éviter les problèmes d’agence, le choix des meilleures stratégies d’investissement dépend de plus en plus de la qualité de l’information financière et comptable et du degré de sa transparence, ce qui implique nécessairement la mise en place de mécanismes de bonne gouvernance (Jensen et Meckling, 1976). L’objectif consiste à réduire les coûts d’agence du fait que les droits de propriété ne sont plus réservés aux agents de décisions internes. En effet, les conflits d’intérêts entre dirigeants et actionnaires naissent à la suite d’une séparation entre la propriété et le contrôle de l’entreprise (Berle et Means, 1932). Ceci dit que dans le cas d’une dispersion du capital entre plusieurs actionnaires, les dirigeants sont amenés à utiliser les actifs de l’entreprise dans leurs propres intérêts. A ce stade de séparation, chacun des partenaires poursuit ses propres intérêts. Conséquemment, des conflits d’intérêts potentiels entrainent une forte asymétrie entre actionnaires et dirigeants. Autrement dit, au moins un des partenaires dispose des informations privilégiées qui font que l’autre est dans l’incapacité d’observer avec 10 Supposés opportunistes. 34 précision son comportement, ce qui aboutit à des dysfonctionnements (Wirtz P. , 2008). En ce sens, les droits de propriété tendent à influencer l’incitation et le comportement. Favorisant la qualité de gouvernance et la transparence envers les parties prenantes, les rapports d’audit interne augmentent la confiance des actionnaires (Archambeault, DeZoort et Holt, 2008). Alors l’audit interne promeut un contrôle efficace et contribue à atténuer les coûts qui peuvent être supportés par les actionnaires. Alors la recherche de maximisation de la valeur et l’analyse de risque pour les actionnaires constitue l’objectif primordial de la stratégie des entreprises. En revanche, nombreuses sont les recherches qui ont étudié la relation entre la théorie de l’agence et l’audit interne. Selon Adams (1994), la théorie de l’agence explique le rôle crucial de l’audit interne, quant à la nature de sa fonction et les perspectives adaptées par les auditeurs internes dans leur travail. En revanche, la théorie de l’agence examine l’influence de la gouvernance de l’entreprise sur la prise du risque interne (Wiseman et Gomez-Mejia, 1998).

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