Selon une perspective écologique, on considère que le rétablissement résulte de l’interaction entre des facteurs individuels, environnementaux et cliniques (Onken et al., 2007). Ces facteurs interagissent entre eux de façon à favoriser ou à nuire au rétablissement. Ils seront discutés dans les prochaines lignes.
Les facteurs individuels
Les facteurs individuels renvoient aux caractéristiques ontosystémiques de la personne telles que son état de santé générale, ses compétences et habiletés et ses limites. Dans les écrits sur le rétablissement, différentes caractéristiques individuelles ont été identifiées comme ayant une influence sur le rétablissement. Ici ne seront décrites que celles ayant reçu le plus d’appuis scientifiques soit : a) l’espoir et l’optimisme, b) le sens de soi, c) l’insight et la prise de conscience de son potentiel, d) les buts, le travail et autres activités professionnelles et e) l’autodétermination et l’appropriation du pouvoir.
L’espoir et l’optimisme sont l’un des grands thèmes du rétablissement (Resnick, Fontana, Lehman, & Rosenheck, 2005; Ridgway, 2001). Selon plusieurs auteurs, l’espoir est le concept central, car il peut être vu comme la phase initiale amorçant le processus de rétablissement (Deegan, 1996; Ridgway, 2001). En effet, après avoir reçu un diagnostic de trouble mental, la personne peut sentir une période de désespoir liée aux craintes et aux stéréotypes concernant la maladie mentale. Le rétablissement est alors caractérisé par l’émergence d’un nouveau sens de l’espoir (Ridgway, 2001). La personne doit croire en sa capacité d’atteindre ses buts et de se rétablir (Resnick et al., 2005). Cet espoir se développe grâce aux interactions que l’individu entretient avec son environnement. En effet, il peut survenir en participant à des programmes de SM (Ridgway, 2001) ou en ayant la preuve que le rétablissement est possible en côtoyant les pairs (Resnick et al., 2005; Ridgway, 2001). Il peut aussi être encouragé par la présence de la famille, d’amis ou de professionnels qui partagent avec la personne un optimisme réaliste (Resnick et al., 2005; Russinova, 1999). Ces résultats rejoignent ceux de Cormier (2009), qui indique que les principales sources d’espoir d’un mieux-être pour les personnes ayant des symptômes apparentés à la schizophrénie sont le soutien social de la famille et des intervenants, le travail, avoir un domicile, les relations amoureuses et la présence d’enfants et de petits enfants.
Avec le rétablissement vient le développement d’un nouveau sens de soi et cet aspect se construit tout au long du processus (Young & Ensing, 1999). Davidson et Strauss (1992) voient dans la découverte d’un nouveau sens de soi, le cœur du processus de rétablissement et un fil conducteur qui relie tous les autres facteurs. Par les habiletés d’appropriation du pouvoir et d’optimisme et par ses caractéristiques personnelles comme la curiosité et le sens de l’humour, la personne apprend à passer d’un sens de soi passif à un sens de soi actif (Schön, Denhov, & Topor, 2009; Tooth, Kalyanasundaram, Glover, & Momenzadah, 2003). Par contre, les auteurs ne s’entendent pas sur le rôle que prend la maladie dans le développement du sens du soi. Certains affirment que la maladie doit être considérée comme une entité séparée de la personne afin de faire surgir un nouveau sens de soi (Davidson & Strauss, 1992), d’autres croient qu’il faut l’intégrer au nouveau soi afin de développer une identité autre que celle de « malade » ou de «patient » (Young & Ensing, 1999).
Un autre des facteurs individuels influençant le rétablissement est l’insight et la prise de conscience de son potentiel. L’insight peut se définir comme : La capacité de reconnaître et la prise de conscience d’avoir une maladie. [traduction libre] (Greenfeld, Strauss, Bowers, & Mandelkern, 1989, p. 246)
En réponse au diagnostic, la personne expérimente une période de crise caractérisée par le déni de la maladie, la confusion et le désespoir (Baxter & Diehl, 1998). Le déni est donc une étape importante du rétablissement et une réaction normale à une situation accablante. Dans le rétablissement, les personnes apprennent à comprendre et à accepter les défis engendrés par la maladie. S’engager dans un processus de rétablissement implique aussi que la personne croit en la capacité de changer. Cette prise de conscience amène la personne à embrasser l’idée que son futur peut être différent des circonstances présentes (Onken et al., 2002).
Par ailleurs, le rétablissement dépend partiellement de l’habileté de la personne à se trouver et à poursuivre des buts. Cette habileté se développe par des interactions entre les motivations internes de l’individu, le soutien et les possibilités que lui offre son environnement (Onken et al., 2007). Occuper un emploi ou une autre activité professionnelle est un bon exemple de but productif que la personne peut poursuivre dans le cadre de son rétablissement. Effectivement, le travail est fortement lié à la réadaptation et au rétablissement des personnes atteintes de TMG (Sullivan, 1994) et en est même parfois considéré comme la pierre angulaire (Corbière, 2012). De plus, comme les personnes qui sont atteintes d’un trouble mental sont souvent victimes de marginalisation et d’exclusion sociale, l’accès à un travail leur redonne de la dignité et la possibilité d’exercer une activité socialement valorisante, ce qui favorise leur rétablissement (Bizier & Lirette, 2006; Corbière, 2012). Le travail est aussi lié : a) à la réduction des symptômes psychiatriques, b) à l’organisation de son temps, c) à l’augmentation de l’estime de soi, d) au développement d’un réseau social, e) à l’activation du pouvoir de consommation des personnes et f) à la consolidation d’une identité socioprofessionnelle (Corbière, 2012).
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