Analyse d’un problème
Le domaine électromagnétique des hyperfréquences est un vaste domaine qui recouvre une large bande de fréquence — typiquement de 1 GHz à 100 GHz — et qui trouve de nombreux types d’applications. Aussi, il est important d’être capable de modéliser avec précision les dispositifs hyperfréquences et leurs interactions dans l’environnement de façon à parvenir à une mise au point rapide de ces systèmes. Il existe une grande variété de méthodes car il n’exite pas de méthode universelle capable de résoudre l’ensemble des problèmes électromagnétiques. Dans ce contexte, il est essentiel de considérer attentivement le problème à résoudre avant d’envisager un quelconque processus de résolution : un problème bien posé est un problème à moitié résolu. Le choix d’une méthode plus qu’une autre nécessite donc une bonne connaissance des différents choix possibles et une bonne analyse du problème afin d’en définir clairement les contours. De plus, ce choix est intimement lié à la géométrie de la structure étudiée. De nombreuses méthodes ont été développées pour résoudre des problèmes électromagnétiques. Elles se justifient par un certain nombre de critères qui doivent permettre d’identifier et de formuler clairement le problème posé : • type de structure ⇒ antenne, circuit, cavité, guide d’onde, . . . • type de régime ⇒ statique, quasi-statique, dynamique • structure ouverte ou fermée • géométrie de la structure : · simple ⇒ formes parallélépipédiques, polygonales (arêtes, coins) · complexe ⇒ formes polygonales, courbes • rayonnement en zone de champ proche / lointain, CEM, . . . • type de milieu ⇒ linéaire, dispersif, à pertes, anisotrope, . . . • domaine d’analyse ⇒ temporel ou fréquentiel Toutes ces questions doivent permettre de choisir une voire plusieurs méthodes, c’està-dire celle(s) la (les) mieux adaptée(s) pour résoudre le problème à traiter. Une méthode repose sur deux notions fondamentales, la formulation d’une part et le domaine d’analyse d’autre part. La formulation est une étape incontournable dans l’application de la méthode de résolution tandis que le domaine d’analyse constitue le domaine de résolution du problème. L’ensemble de la démarche doit reposer sur une définition rigoureuse des concepts et fournir une méthodologie pour construire un modèle de phénomèmes naturels, et en ce qui nous concerne, la modélisation de phénomènes électromagnétiques. 1.1 Formulation La formulation d’un problème permet de déterminer les caractéristiques d’une méthode, à savoir ses avantages, ses inconvénients, ses limitations et la procédure qui devra ensuite être appliquée pour résoudre le problème posé. En électromagnétisme, nous cherchons principalement à déterminer les champs électromagnétiques dans un milieu ou les courants circulant à la surface d’un objet. La géométrie va donc avoir un rôle quant au choix et au type de formulation. Cette formulation est issue d’un ensemble d’hypothèses et d’une manipulation des équations de Maxwell menant à une forme, généralement simplifiée, et appropriée à certains types de problèmes. Elle peut également porter sur un certain nombre de concepts tels que celui des rayons et non plus sur une résolution numérique des équations de Maxwell. Les formulations les plus courantes sont : • les approches numériques basées sur . les équations de Maxwell sous forme intégrale (fonction de Green) . les équations de Maxwell sous forme différentielle • les approches asymptotiques basées sur . la théorie géométrique . la théorie physique • les approches hybrides et le couplage de méthodes Aussi, la formulation d’un problème est définie dans un certain domaine d’analyse, domaine dans lequel le problème va être résolu.
Domaine d’analyse
Le domaine d’analyse est le domaine de résolution du problème. Il peut être classé en deux domaines, temporel ou fréquentiel, chacun ayant ses « propres » caractéristiques. Il existe un lien étroit entre ces deux domaines, le passage de l’un à l’autre s’effectuant par une transformation de Fourier ; ils possèdent donc des caractéristiques communes. Cependant, ces deux domaines temps-fréquence sont à la fois distincts et duals, les avantages de l’un sont souvent les inconvénients de l’autre. Ceci à pour conséquence de conditionner les phénomènes électromagnétiques observables. L’analyse fréquentielle fut la première à se développer pour une raison simple, il est très difficile d’interpréter et d’exploiter les informations provenant d’un signal temporel avant d’en avoir effectué une transformée de Fourier. Aussi, l’analyse dans l’un ou l’autre des domaines permet de recouvrir l’ensemble des phénomènes électromagnétiques et ainsi d’en cerner les différents aspects ce qui en fait une parfaite complémentarité pour l’analyse électromagnétique de dispositifs hyperfréquences. C’est pour cette raison que généralement la plupart des méthodes développées possèdent une formulation dans ces deux domaines bien que certaines soit mieux adaptées à l’un ou à l’autre. La dualité temps-fréquence est une des raisons principales pour lesquelles il n’y a pas de méthode universelle capable de modéliser l’ensemble des phénomèmes électromagnétiques.
Les méthodes fréquentielles
Les méthodes basées sur l’analyse fréquentielle sont plus efficaces pour analyser des milieux dispersifs ou à pertes, c’est-à-dire des milieux dont les paramètres dépendent de la fréquence. Elles sont aussi mieux adaptées à la caractérisation sur une bande étroite. Cependant elles sont peu efficaces pour la caractérisation sur une large bande de fréquences, ce qui nécessiterait plusieurs exécutions pour compléter le domaine spectral. De plus, elles ne sont pas adaptées aux problèmes non-linéaires et non-stationnaires.
Les méthodes temporelles
Contrairement aux méthodes fréquentielles, les méthodes temporelles sont particulièrement bien adaptées à la caractérisation sur une large bande de fréquences, et aussi pour les problèmes non-linéaires et non-stationnaires. Cependant, il devient plus compliqué de tenir compte de milieux dont les paramètres dépendent de la fréquence. En effet, ceci nécessite l’application de convolutions ou de techniques de filtrage qui peuvent s’avérer assez complexes à mettre en œuvre et coûteuses en terme de ressources informatiques. De plus ces méthodes peuvent nécessiter un nombre d’itérations prohibitif si le maillage est très fin (dans le cas de méthodes numériques). Il faut ajouter également que les résultats obtenus par ce type de méthodes ne sont pas interprétables avant d’en avoir effectué une transformée de Fourier, opération peu coûteuse. Les différents avantages et inconvénients propres à chacun de ces deux domaines d’analyse mettent bien en évidence leurs spécificités et leur complémentarité pour traiter de problèmes électromagnétiques. Il est temps maintenant de rappeler quelques équations de l’électromagnétisme, à savoir les équations de Maxwell, sur lesquelles reposent les différentes formulations des méthodes de modélisation que nous verrons dans les chapitres suivants.
Les équations de l’électromagnétisme
Les phénomènes électromagnétiques et leur nature ondulatoire sont décrits par les équations de Maxwell [Max73]. Ces équations relient les champs électrique E~ et magnétique B~ aux sources de champs, à la densité de charge ρ et à la densité de courant J~. Par la suite nous omettrons les termes de sources et considérerons des milieux linéaires, homogènes et isotropes (hypothèse de milieux LHI). La dualité de ces équations permet de déterminer le champ électromagnétique, caractérisé par le couple (E, ~ H~ ), à partir de l’un ou l’autre de ces champs vectoriels. Connaissant le champ électrique E~ (respectivement magnétique H~ ), on peut en déduire le champ magnétique H~ (respectivement électrique E~ ). Dans les équations de Maxwell qui vont être établies dans les Tab. 1.1 et 1.2, ε0 et µ0 sont respectivement la permittivité et la perméabilité du vide.
Les équations de Maxwell sous forme locale ou différentielle
Sous la forme différentielle (Tab. 1.1), ces équations expriment des relations entre des variations spatiales et temporelles de champ électromagnétique. En tout point de l’espace qui n’est pas situé sur une surface de séparation entre deux milieux, ces équations s’écrivent : ∇ × ~ E~ = − ∂B~ ∂t (1.3.1) ∇ × ~ H~ = µ0 J~ + µ0ε0 ∂E~ ∂t (1.3.2) ∇ · ~ E~ = ρ µ0 (1.3.3) ∇ · ~ H~ = 0 (1.3.4) Table 1.1 – Forme différentielle des équations de Maxwell. 1.3.2 Les équations de Maxwell sous forme globale ou intégrale Sous la forme intégrale (1.2), elles expriment les champs électromagnétiques dans des volumes, sur des surfaces et le long de contours, cf. Fig. 1.1, et décrivent les relations entre les champs vectoriels et les densités de courant et de charge dans une région de l’espace [Gar96]. Ces équations s’obtiennent à partir de leur forme différentielle en utilisant les théorèmes de Stokes 1 et d’Ostrogradski 2 . 1. La circulation d’un champ vectoriel A~ le long d’un contour fermé C est égale au flux de son rotationnel à travers la surface S s’appuyant sur le contour C. Le flux d’un champ vectoriel A~ à travers une surface fermée S est égal à l’intégrale sur le volume V délimité par S de sa divergence,