Les écrevisses marbrées dans la plaine de Betsimitatatra
Inégale répartition des précipitations dans l’année
La quantité de pluie dans l’année n’est pas similaire pour tous les mois, elle connaît un grand déséquilibre. 85% des précipitations sont concentrées en quatre mois (décembre à mars). Les 15% restants sont distribués pour les 8 mois. On note une amplitude annuelle de 287,30 mm. Janvier est le mois le plus humide, il détient le maximum de précipitation avec 291,63 mm au pluviomètre. Juillet, par contre, ne reçoit que 4,89 mm de précipitation et constitue ainsi le mois le plus sec.Quatre mois excèdent la moyenne annuelle (94,3 mm) dont décembre, janvier, février et mars ; ils composent la saison pluvieuse. De mai à octobre s’étale une saison plus ou moins sèche avec des précipitations inférieures à 94,3 mm. Les deux sont séparées par deux mois transitoires, le mois d’avril nous emmène d’une saison pluvieuse à une saison sèche et inversement avec le mois de novembre. La plaine ne connaît pas de microclimat donc la durée de l’inondation3 devrait être la même dans la plaine. Pourtant ce n’est pas le cas, en fonction des endroits de la plaine, l’inondation persiste entre 5 mois pour Ambavahaditokana, sept mois du coté de Soavimasoandro et Ambohitrimanjaka et six mois pour le reste de la plaine. Divers éléments conditionnent cette durée de l’inondation, tel que l’existence d’infrastructure hydroagricole ou une inégalité de la topographie. La durée de l’inondation dans la plaine est de six mois. C’est le cas des rizières près du fokontany d’Ankasina et d’Andohatapenaka, d’Ambohimanarina et de Laniera. Le tarissement 3 Inondation ici qualifie l’envahissement de la plaine par les eaux lors des saisons des pluies. 14 des rizières dans ces différents quartiers est occasionné par la présence de station de pompage. Pour ce qui est de la partie comprise dans la limite administrative de la CUA, le drainage est assuré par la seule station de pompage de l’APIPA. Quant à Laniera elle est pourvue également d’une station de pompage, mais le recours à son utilisation ne s’effectue qu’occasionnellement, c’est-à-dire lorsque le niveau de l’eau dans le canal de drainage est supérieur à celui de Laniera. Dans la partie de la plaine comprenant la commune rurale d’Ambavahaditokana Itaosy, la durée de l’inondation est inférieure à la moyenne, elle est de cinq mois (décembre à avril). La raison de cette courte durée réside dans la topographie. Le complexe Ambohidrapeto-Itaosy relié à la Sisaony par l’îlot d’Andohatanjona forme une zone relativement cloisonnée. Avec les canaux de drainage qui se déversent dans la Sisaony, le tarissement des rizières s’effectue aisément. Il en résulte une courte durée de l’inondation. Ceci pose un grand problème pour la riziculture irriguée puisque les riziculteurs devraient attendre la saison des pluies pour tous les travaux relatifs à son activité.
Planche 1 : Les niveaux de l’eau dans la plaine Cliché de l’auteur
Cliché de l’auteur Cliché de l’auteur Ambohimandroso, Ambavahaditokana Itaosy : Cette photo a été prise pendant la deuxième semaine du mois de mai 2008 Les rizières sont asséchées Soavimasoandro : Des rizières encore inondées la photo a été prise pendant la première semaine du mois de mai 2008 Ambohitrimanjaka : Le niveau de l’eau dans les rizières permet encore le déplacement en pirogue cette dernière photo a été prise pendant la première semaine du mois de mai 2008 également. 15 Afin de remédier à ce problème, un barrage hydroagricole est en construction sur la Sisaony actuellement, pour irriguer les rizières dans cette commune. La gestion de l’eau dans la plaine est donc un réel problème chronique. L’eau fait défaut dans une partie de la plaine tandis qu’elle est en excès dans d’autres parties. C’est le cas pour la commune rurale d’Ambohitrimanjaka et d’une partie de la plaine du coté du fokontany de Soavimasoandro. Dans ces deux sites, l’inondation persiste jusqu’à 7mois. Prenons en premier lieu, la Commune rurale d’Ambohitrimanjaka. Comme le montre le croquis n°3, les trois rivières à savoir, la Mamba, l’Ikopa et la Sisaony défilent au nord et au sud pour se rejoindre un peu plus au nord-ouest de la dite commune. Cette jonction, a mis en place la formation d’une légère élévation topographique. De ce fait, le drainage des eaux dans cette partie de la plaine tarde d’un mois par rapport à la moyenne. Pour la partie de la plaine du coté du fokontany de Soavimasoandro, une buse d’évacuation chargée de drainer les rizières joue le rôle de goulet d’étranglement et retarde l’inondation jusqu’à sept mois également. Normalement, cette partie bénéficie de l’influence de la station de pompage de l’APIPA à Ambodimita, mais, la buse d’évacuation est assez petite, avec un diamètre de 50 cm. Ce diamètre n’arrive pas à évacuer des eaux de cette partie de la plaine comme le montre la photo N°2. Cette photo a été prise en saison sèche, et déjà la buse d’évacuation des eaux est immergée à 50 cm en dessous de l’eau. Alors qu’en saison pluvieuse, l’eau monte jusqu’à 1 m au-dessus du niveau actuel. Vu la superficie de cette partie, la buse suffirait à évacuer l’eau, l’excès d’eau dans cette partie de la plaine résulte de l’engouffrement des eaux en provenance d’Ankadikely et de Sabotsy Namehana. En effet, lors de la saison des pluies, le niveau de l’eau dans cette partie de la plaine monte quand il pleut en amont de la Mamba. Chaque année les rizières dans cette partie de la plaine sont toujours envahies par les eaux, seul le niveau de l’eau varie d’une année à l’autre en fonction des précipitations. Cette longue explication est nécessaire puisque la durée de l’inondation dans la plaine est déterminante dans la vie des êtres aquatiques de la plaine et des activités économiques qui y sont pratiquées. Les EMs s’adaptent également à cette durée de l’inondation. Quelques remarques émises par les personnes enquêtées nous ont aidés à voir les répercussions de cette durée de l’inondation sur la vie des EMs. Les pêcheurs à la nasse ont remarqué qu’aux mois de mai et d’octobre, les EMs abondent dans des nasses placées dans des rizières. Entre ces deux mois, c’est-à-dire, la période correspondant à la saison sèche, les EMs se font rares et seul les étangs et mares en abritent. Par contre en dehors de cette période, de novembre à avril, les EMs sont en foison dans les rizières et font l’objet d’une pêche diurne et nocturne. Des laboureurs nous ont également fait part d’une remarque. En retournant la terre ils ont découvert des écrevisses marbrées engourdies et inertes. A première vue, ces écrevisses semblent être mortes mais en réalité, une fois qu’elles atteignent l’eau, elles nagent tout de suite. La profondeur à laquelle ces écrevisses ont été découvertes varie d’un site à l’autre, elle varie de 30 cm à 150 cm. A Laniera par exemple, cette profondeur est en moyenne à 100 cm, à Ambohitrimanjaka tout comme à Soavimasoandro, elle est de 20 à 30 cm, et à Ambavahaditokana les écrevisses ne sont présentes que dans les pépinières rizicoles et étangs. Si nous résumons la situation, les EMs connaissent une période de vie normale pendant laquelle elles sont actives d’octobre à mai et une période d’inactivité de juin à septembre. Cette durée varie d’un endroit à l’autre en fonction de la durée de l’inondation de la plaine. Plus l’inondation persiste, plus la période d’inactivité est courte et inversement. Dans ce même sens, la profondeur de la galerie est 17 également en fonction de cette durée de l’inondation. Dans les endroits où la durée de l’inondation est inférieure à 7 mois, les galeries ont une profondeur supérieure à 100 cm. Par contre dans les deux sites où les inondations persistent jusqu’à 7 mois, les galeries ont une profondeur moyenne de 20 cm. Les écrevisses ont toujours besoin d’une galerie, elle leur sert de refuge toute l’année. En effet, durant leurs périodes d’activités, les EMs se réfugient dans ces galeries pendant le jour afin de se protéger contre les prédateurs, et une fois la nuit tombée elles sortent pour chasser. Tandis qu’en saison sèche, les galeries servent de refuge contre le froid et la sécheresse. En cette période, la majeure partie de la plaine est tarie. Il en résulte une raréfaction de la nourriture accompagnée d’une baisse de la température. Face à une telle situation, les écrevisses entrent dans un état de torpeur dans leur galerie en attendant la saison des pluies. La figure N°2 nos résumera l’influence du climat sur la vie de ces écrevisses.