Les dynamiques territoriales de la perte de la centralité initiale

Les dynamiques territoriales de la perte de la centralité initiale

Marseille traverse de 1960 à 1990, une phase de perte de centralité, à tous les niveaux, qui provoque une dégradation de l’attractivité de son territoire. (Fig. 26 ) La façade maritime se modifie sous l’effet du décentrage de l’interface. Les fonctions logistiques se modernisent rapidement par le recours à la conteneurisation du fret maritime. La métropole pâtit du glissement des activités portuaires en périphérie, autour de l’étang de Berre, à Fos-sur-Mer et du terminal de Lavera. Cette rupture géoéconomique et géopolitique n’altère pas l’imaginaire marseillais, qui perdure au-delà, tant la relation avec le lointain paraît consubstantielle. La disparition du système colonial et la dissolution de l’ordre colonial, conduisent les territoires de la périphérie lointaine vers l’Indépendance. Les fonctions de commandement s’atrophient, la Chambre de Commerce ne bénéficie plus de l’avantage décisif de la centralité initiale. Le quartier du Panier, perd sa relation privilégiée avec les activités portuaires et logistiques, de La Joliette. L’interface inactive produit un territoire répulsif, le quartier se dégrade, la population vieillit, les commerces disparaissent. Au niveau global, les flux migratoires subissent l’attraction des cités industrielles du nord et de l’est de la France, ils ne réalisent plus qu’un transit au sein du territoire de la métropole. Le système migratoire de la noria, se développe, avec une succession de mouvements pendulaires entre les anciens territoires coloniaux devenus indépendants et le territoire national. Les populations émigrées vivent dans le mythe du retour. La différenciation spatiale de la métropole se renforce. Les espaces centraux se dépeuplent rapidement. Les habitants qui restent au Panier subissent la relégation au sein de leur quartier devenu progressivement répulsif. Les cités de transit et les grands ensembles, deviennent les territoires de résidence de catégories sociales populaires. La différenciation socio-spatiale se renforce marquée par une stricte dichotomie entre le nord qui concentre les quartiers populaires et le sud résidentiel aisé, sauf le quartier du Panier et les espaces centraux investis par les migrants. Ainsi la métropole de Marseille, perd son avantage de situation de centralité au bénéfice d’autres espaces, ce qui désarticule progressivement les relations entre la ville et le niveau régional. Cette dégradation a des répercussions sur le quartier du Panier, qui subit une perte de centralité, une dégradation progressive de son bâti, une dépopulation accélérée, une altération des relations sociales de proximité, qui le rendent progressivement répulsif. La métropole de Marseille ne bénéficie plus d’une position de centralité, son interface se désactive, le centre ancien se dégrade. 

Les dynamiques territoriales de la reconquête d’une nouvelle centralité 

La métropole de Marseille entreprend de 1990 à 2010, notamment à travers le projet Euroméditerranée, une reconquête radicale de ses espaces centraux (Fig. 31 ). L’interface de la façade maritime bénéficie de l’émergence et de la diversification de nouvelles fonctions de prestige : économiques, financières, tertiaire supérieur et de la rénovation de la fonction résidentielle, par l’installation de résidence de standing, notamment autour de la rue de la République et de La Joliette. Les activités de tourisme : croisières, balnéaires et de la culture : spectacle, littérature, cinéma intègrent l’innovation fonctionnelle : l’information et l’image : par exemple le pôle de la Belle-de-Mai favorisent l’émergence d’une interface immatérielle. La métropole de l’Arc Méditerranéen reconquiert par la diversification fonctionnelle et une solide articulation au niveau mondial, une nouvelle centralité. Les espaces centraux bénéficient des fonctions de création : artistiques, de design, d’innovation : le technopôle de Château Gombert et de commandement : le quartier des Docks à la Joliette, les friches industrielles : le front de mer du port Autonome, intègrent une nouvelle territorialité. Les technologies de l’information : Internet, téléphonie favorisent les activités nomades et toutes les formes de mobilité matérielle et immatérielles des nouveaux urbains qui convergent vers la métropole méditerranéenne. La culture, ressource latente, confère à la ville une identité singulière qui articule avec brio, au niveau mondial : les cultures urbaines de la ville, la proximité et le lointain. La société de l’information renforce l’interdépendance des fonctions métropolitaines supérieures de la métropole au niveau mondial. Le quartier du Panier reconquiert une centralité renouvelée, par une succession de cycles de renouvellement urbain, une patrimonialisation sélective confère une nouvelle attractivité à son territoire. L’attractivité de la métropole se réalise par la captation de flux d’une nouvelle population, qui séduite par un nomadisme urbain fondé sur l’association entre l’immatérialité de l’héliotropisme et l’ubiquité de la ligne à grande vitesse, invente une nouvelle habitation du territoire. 26 L’articulation du niveau mondial, les innovations fonctionnelles matérielles et immatérielles conduisent à une métropolisation du territoire de l’aire métropolitaine de Marseille. Les documents suivants (Fig. : 29-30), illustrent l’axe, en rouge, de reconquête de la centralité au niveau de la métropole, avec le périmètre Euroméditerranée en orange. Au niveau du quartier du Panier, l’axe suit la reconquête de la rue de la République, le tracé du tramway qui relie le Vieux-Port au nouveau quartier des affaires de la Joliette.La mondialisation des sphères matérielles et immatérielles favorise un polycentrisme réticulaire, qui insère le territoire métropolitain de Marseille au niveau mondial dans un archipel urbain. La différenciation spatiale se renforce au sein du quartier du Panier : les motivations de localisation hédonistes, ajoutées à une valorisation immobilière exponentielle conduisent à la gentrification de notables fractions des espaces centraux. Les prodromes d’une nouvelle gouvernance territoriale émergent qui répondent aux aspirations de nouveaux urbains pour un nouveau contrat géographique qui conduise avec prudence le ménagement du territoire métropolitain vers la promotion d’une habitation durable des territoires. 27 La métropole de Marseille, renoue de nouvelles relations avec son interface portuaire. L’opération Euroméditerranée, initiée par l’Etat en 1995, entreprend la reconquête du front de mer sur un modèle (le water front) venu des Etats-Unis. Ce modèle associe la récupération de foncier laissé vacant par les délocalisations des fonctions portuaires et l’attraction de fonctions métropolitaines de prestige : économique, touristiques, culturelle, à qui la métropole proposent des localisations avantageuses. Le quartier du Panier, bénéficie de ce renouvellement de la centralité, les opérations de rénovation transfigurent l’espace bâti et proposent à de nouveaux résidents, des localisations en position de centralité, un patrimoine qui garantisse une authenticité, dans une image renouvelée de cet espace redevenu attractif. Pourtant cette mue, entraîne des processus de ségrégation spatiale, au détriment des habitants traditionnels, qui subissent parfois les expulsions. La gouvernance des territoires du centre ancien gagnerait à mieux intégrer toutes les catégories de populations dans une optique de durabilité spatiale. En 2008, la métropole de Marseille, reconquiert une position de nouvelle centralité, dans ce contexte, le centre ancien fait l’objet de rénovations et d’un réappropriation symbolique.

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