LES DIFFICULTES DE L’ENSEMBLE DES FINANCES PUBLIQUES JUSTIFIENT UN EXAMEN APPROFONDI DE LA CROISSANCE DES DEPENSES LOCALES
Pourquoi parler aujourd’hui de maîtrise et de pilotage de la dépense publique locale ? Certes, la situation d’ensemble de nos finances publiques est préoccupante : dette publique multipliée par cinq au cours des vingt-cinq dernières années pour atteindre fin 2005 plus de 1 138 milliards d’euros, soit les deux tiers du produit intérieur brut (A). Mais, en première analyse, les collectivités locales, faiblement endettées et obéissant à des règles financières plus strictes que celles applicables à l’Etat, ne semblent pas concernées (B 1). Pourtant, la croissance des dépenses locales (dont le financement repose soit sur une augmentation de la fiscalité, soit sur un poids croissant pour le budget de l’Etat) ainsi que l’augmentation structurelle des dépenses sociales, nous obligent à reconsidérer cette question (B 2). L’analyse des principaux faits marquants du dynamisme des dépenses locales depuis les premières lois de décentralisation confirme la pertinence de la question (C). – depuis 25 ans, la dette financière des administrations publiques augmente sans cesse. Au cours de cette période, elle a été multipliée par cinq pour atteindre plus de 1 138,4 milliards d’euros fin 2005, soit 66,6% du produit intérieur brut (PIB) et près de 18 000 euros par habitant. Les charges de la dette représentent désormais 14% du budget de l’Etat ; – comme le montre le graphique suivant, la récurrence des déficits est imputable au fait que chaque année le montant des dépenses est supérieur à celui des recettes. Quasiment égales au début des années 1980, les dépenses et les recettes publiques n’ont par la suite pas évolué au même rythme. In fine le poids des dépenses publiques dans le PIB est passé de 44,0% à 53,8% entre 1978 et 2005 et celui des recettes de 42,7% à 50,9%.
Dette et déficit au sens des règles européennes
Les administrations publiques (APU) sont classées traditionnellement en quatre catégories : Chaque année, ces administrations publiques perçoivent des ressources (impôts et taxes, autres recettes non fiscales) et payent des dépenses pour la collectivité (salaires, fournitures, prestations, etc.). Lorsque ces dépenses sont supérieures aux recettes, un déficit est constaté. Dette et déficit au sens des règles européennes Si les administrations publiques sont en déficit pendant plusieurs années, leur dette augmente. En revanche, si elles sont capables de dépenser moins qu’elles n’ont de ressources, elles ont un excédent, ce qui leur permet d’émettre un montant d’obligations inférieur à celui des obligations arrivant à échéance cette année là ou de rembourser plus qu’elles n’empruntent. Dans ce cas, l’encours des obligations, c’est-à-dire le montant de la dette, diminue. En France, lorsqu’on évoque la dette publique, on fait le plus souvent référence au Traité de Maastricht de 1992 établissant l’euro comme monnaie unique, et au Pacte européen de stabilité et de croissance (PSC) de 1997 par lequel ont été précisées les règles que les Etats membres de la zone euro devaient respecter. Pour mettre en place la monnaie unique, il fallait en effet que les pays de l’Union monétaire respectent un minimum de règles budgétaires et financières communes. Celles-ci sont apparues indispensables pour assurer la force et la crédibilité de l’euro et empêcher certains pays de bénéficier du cadre de la monnaie unique tout en pratiquant des gestions peu rigoureuses (comportements dits de passager clandestin). Le Pacte de stabilité a fixé une valeur de référence en matière d’endettement (60% du produit intérieur brut, c’est-à-dire, la production nationale de richesses). Il a aussi fixé un plafond pour le déficit des administrations publiques (3% du PIB). Pour s’assurer que tous les pays s’efforcent de le respecter dans les mêmes conditions, il a également donné sa définition du déficit et de la dette.
La dette au sens du Pacte de stabilité et de croissance mesure l’ensemble des engagements financiers bruts des administrations publiques. Le terme brut, signifie que les avoirs des administrations publiques (dépôts monétaires du Trésor auprès de la Banque de France, pensions, participations de l’Etat, placements en valeur mobilières des caisses de retraite) ne viennent pas en déduction de la dette. Par analogie avec la dette d’un foyer, cela signifie que la valeur de la dette du foyer ne serait pas diminuée des biens que ce dernier possède (par exemple, sa maison ou sa voiture). Par ailleurs, la dette au sens du PSC est une dette consolidée, ce qui signifie qu’elle exclut les dettes contractées entre administrations publiques, notamment les dépôts des collectivités locales auprès du Trésor public. Toujours par analogie avec un foyer, la dette du foyer, entendue au sens du PSC, serait la somme de la dette totale des personnes composant ce foyer sans prendre en compte les sommes qu’elles se seraient éventuellement prêtées entre elles. La dette des APUL a même diminué en montant entre 1996 et 2002. Si, du début des années 1980 à la première moitié des années 1990, les APUL ont contribué au déficit public au sens de Maastricht (accroissement de l’endettement), elles ont dégagé à partir de 1996 un excédent qui s’est maintenu jusqu’en 2003.