Les différentes théories de la décision et de l’action

ANALYSE BIBLIOGRAPHIQUE ET PRESENTATION DE LA RECHERCHE

Avant de développer l’objet de la recherche et les questionnements qui la motivent, il parait important d’appréhender certaines notions parmi lesquelles la rationalité, le rapport affectif, l’habiter et la thématique des personnes âgées qui sont au cœur de cette étude. En premier lieu, il convient d’approfondir les différentes théories de la décision et de l’action à travers le couple rationalité/affectivité pour ensuite analyser comment s’opèrent ces choix au niveau du logement (l’habiter) et en particulier chez les personnes âgées. Les choix et les actions que fait une personne ne sont généralement pas le fruit du hasard mais sont guidés par un raisonnement plus ou moins conscient qui fait intervenir certains facteurs. Il est intéressant de les étudier pour comprendre le mécanisme qui permet à une personne de prendre une décision ou de faire une action. On parle souvent d’actions ou de choix rationnels ou irrationnels. Ces deux termes opposés sont complexes et plusieurs théories tentent de les définir.  La rationalité est une notion difficile à appréhender car elle possède plusieurs sens en sciences sociales. Boudon et Bourricaud en font l’étalage dans le Dictionnaire critique de la sociologie1. Ils rappellent la pensée de Pareto (Traité de sociologie générale) qui voit l’action rationnelle comme une action objectivement bien adaptée au but poursuivi par le sujet. En d’autres termes, cela signifie qu’une personne, pour arriver à ses fins, trouve les moyens adaptés qui lui permettront d’atteindre le ou les buts recherchés. Les concepts du Zweckrationnell de Weber (rationnel par rapport aux fins), de l’instrumental (Parsons) et du Wozu-Motive (Schütz) sont tous synonymes de la pensée de l’action logique de Pareto.

Les économistes modernes soulèvent l’idée que l’individu fait un choix rationnel lorsqu’il choisit l’action qu’il préfère parmi toutes celles qu’il peut accomplir. Weber, lui, introduit le concept de Wertrationnell (rationnel par rapport aux valeurs) qui amène la notion d’action adaptée à des valeurs et non pas à des fins. Toujours est-il qu’avec ces différents concepts, la définition de la rationalité n’apparaît pas évidente. Boudon et Bourricaud pensent qu’ « il existe un ensemble fini de moyens pour parvenir à une fin, si ces moyens peuvent être totalement ordonnés par rapport à un critère (ce critère pouvant être par exemple le coût, la pénibilité, l’accessibilité de chaque moyen), l’action rationnelle est celle qui utilise le moyen le meilleur par rapport à ce critère. » Le problème qui se pose alors est que les conditions ne sont pas toujours toutes réunies pour que le choix rationnel se réalise ainsi. Par exemple, la personne qui doit faire un choix ou une action peut ne pas avoir la connaissance de tel ou tel moyen qui lui permettrait d’arriver à sa fin, elle va donc choisir un moyen qui fait partie de ses connaissances mais qui ne sera pas forcément le meilleur moyen, celui le mieux adapté à la situation. Plusieurs attitudes peuvent être observées chez une personne qui fait un choix ou une action rationnelle en fonction des données dont elles disposent. Celles-ci sont dépendantes de la situation d’incertitude, c’est-à-dire des données manquantes par rapport au choix à faire et qui, si elles n’étaient manquantes, permettraient à la personne concernée de faire le meilleur choix possible. Ces attitudes sont d’une part « la minimisation des risques ou ‘’regrets ‘’ encourus » (critère de Wold) ou bien « la maximisation des gains possibles » (critère de Savage). Boudon et Bourricaud (Dictionnaire critique de la sociologie) exposent les grands modèles existant sur la rationalité : le modèle homo oeconomicus et le modèle de l’homo sociologicus. Le premier modèle considère les individus comme interchangeables et dotés d’une rationalité identique, c’est-à-dire que chaque personne réagirait de la même façon face à une même situation. Le deuxième modèle introduit lui les caractéristiques sociales de l’acteur et les valeurs auxquelles croit celui-ci en avançant que la rationalité en serait dépendante. Toutes ces théories ou concepts plus ou moins proches les uns des autres n’aident pas à simplifier la définition de la rationalité. A ces difficultés s’ajoute la variété des situations rencontrées et donc des mécanismes qui permettent de faire un choix : « Dans certains cas, on peut trancher sans difficulté mais dans beaucoup de situations, il est difficile de déterminer le choix susceptible d’aboutir aux conséquences les plus conformes à ses préférences. »

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