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Les approches de diagnostic
Ce paragraphe dresse un état de l’art des méthodes de diagnostic dont le domaine d’étude concerne les systèmes embarqués. Les approches proposées dans la littérature se définissent comme étant des approches de diagnostic embarqué mais peu d’entre elles ont réellement été mises en place sur ce type de système. Néanmoins nous faisons ici une synthèse des différentes approches afin de déterminer celles qui sont les plus pertinentes ainsi que les systèmes sur lesquels elles sont appliquées.
Les systèmes embarqués sont des objets complexes qui s’appuient sur des équipements relevant de plusieurs domaines de la physique (électronique, mécanique, hydraulique, aéro-dynamique, thermodynamique. . . ). Les approches proposées essayent d’être de plus en plus innovantes et performantes car les méthodes traditionnelles telles que les AMDECs (Analyse des Modes de Défaillance, de leurs Effets et de leur Criticité), les arbres de diagnostic. . . ne sont plus suffisantes. Les approches de diagnostic diffèrent assez largement selon les connais-sances mises en jeu. Trois grandes classes se distinguent : l’approche basée connaissances, l’approche à base de modèles, et l’approche à base de données. La classification (figure 1.1) est reprise de (Venkatasubramanian et al., 2001). Cette classification ne prétend pas être ex-haustive mais nous permet de situer les différents travaux et de nous positionner par rapport ceux-ci.
L’approche basée connaissances
L’approche basée connaissances est très peu exploitée pour un diagnostic embarqué et est surtout utilisée comme complément en diagnostic hors-ligne (Murphy et Hershberger, 1996; Bobi et al., 2001; Papadopoulos, 2003). Le principe d’une telle approche est d’associer les causes et les symptômes. Elle peut s’exprimer sous divers formalismes : dictionnaires de pannes, Analyse des Modes de Défaillance, de leurs Effets et de leur Criticité (AMDEC), systèmes à base de règles, arbres de défaillances.
Les AMDEC ont été employées pour la première fois à partir des années 1960 dans le domaine aéronautique pour la sécurité des avions (Recht, 1966). Cette méthode permet une analyse systématique et très complète, composant par composant, de tous les modes de dé-faillances possibles et de leurs effets sur le système (Villemeur, 1988). La démarche consiste à définir le système, ses fonctions et ses composants. Ensuite, l’ensemble des modes de dé-faillances des composants doit être établi. L’ensemble des causes susceptibles de provoquer ces défaillances est déterminé. Finalement, les effets sur le système sont étudiés pour chaque mode de défaillance et chaque cause. Le tout est présenté sous forme d’un tableau récapitulatif. Les AMDEC sont donc utilisées de façon déductive dans un objectif de diagnostic i.e. que l’on part des effets observés pour remonter aux causes de défaillances possibles (Zwingelstein, 1995). Cette approche est très efficace grâce à ses relations de causes à effets. Néanmoins, les limites d’une telle approche résident dans le fait que les défaillances doivent être définies a priori. Le recensement préalable de ces défaillances ne peut pas être exhaustif et nécessite une longue expérience. Le coût de construction des AMDEC est donc très élevé car cette construction peut être longue et très difficile à mettre en place. En outre, toute évolution ou modification du système implique une réécriture du tableau.
Un arbre de défaillances est une méthode qui permet de déterminer les chemins critiques dans un système (Villemeur, 1988). Elle définit les différentes combinaisons possibles d’événe-ments qui entrainent l’apparition d’un événement non désirable et unique. Cette approche est représentée par une structure arborescente (un arbre) dont le sommet est l’événement indési-rable. Il est établi sous forme d’un diagramme logique. Les causes immédiates qui produisent l’événement indésirable sont hiérarchisées par des symboles ET et OU logiques. De cette fa-çon, l’arbre est créé au fur et à mesure pour atteindre des événements dits élémentaires. Le problème de ce type d’approche est leur forte dépendance aux erreurs du concepteur. De plus, comme pour les AMDEC, les défaillances doivent être déterminées a priori et l’évolution du système nécessite une reconstruction de l’arbre de défaillance.
Dans les systèmes à base de règles nous retrouvons les systèmes experts (Buchanan et Shortliffe, 1984). Ce sont des approches qui consistent à reproduire les connaissances et le raisonnement d’un expert dans l’accomplissement d’une tâche. La connaissance utilisée dans ces systèmes est représentée par un ensemble de règles qui sont enchaînées pour simuler le raisonnement de l’expert. Ces règles décrivent les relations fonctionnelles entre les différents composants et les relations causales entre les défaillances et leurs effets. Un moteur d’inférence est ensuite utilisé pour établir un diagnostic à partir des connaissances contenues dans la base de connaissances. Nous retrouvons deux méthodes de raisonnement. Le chaînage avant qui, à partir d’une déviation, permet d’activer certaines règles dont les conséquences deviennent de nouveaux faits qui activent de nouvelles règles. Le processus s’arrête lorsqu’il n’y a plus de règles à activer. Le chaînage arrière quant à lui permet, à partir d’un fait, de rechercher toutes les règles dont il est la conclusion. Les antécédents de ces règles deviennent des faits à partir desquels le raisonnement se poursuit. Dans le domaine automobile, ce système a été largement utilisé dans le but d’un diagnostic plus systématique et plus précis car en plus de localiser les composants défaillants et leurs causes, le système propose des actions pertinentes pour corriger les défaillances (Gelgele et Wang, 1998). La difficulté des systèmes experts est de pouvoir formaliser sous forme de règles toutes les propriétés d’un système et par conséquent de l’expérience que nous pouvons en avoir (Papadopoulos et MacDermid, 2001). De plus, comme pour les autres approches, les systèmes experts sont basés sur la connaissance que nous avons des défaillances du système. Ils restent également très dépendants du système et par conséquent nécessitent la réécriture des règles et la ré-acquisition de la connaissance des dysfonctionnements du système (Davis et Hamscher, 1988).
Nous avons ici fait une rapide synthèse sur les méthodes à base de connaissances. Ces méthodes ne font pas l’objet d’étude sur les systèmes embarqués. Leur forte dépendance aux systèmes, qui lorsqu’il s’agit de systèmes embarqués peuvent évoluer régulièrement, rend diffi-cile leur utilisation. Nous pouvons remarquer que ces approches nécessitent une connaissance préalable de l’ensemble des défaillances qui peuvent survenir sur le système mais c’est aussi ce qui fait qu’elles sont très efficaces. Néanmoins ces approches sont surtout utilisées pour un diagnostic hors-ligne, après détection d’un symptôme, afin de localiser les composants défaillants et la nature de leur défaillance. Elles sont peu adaptées pour la détection et la localisation en ligne des défaillances.
L’approche à base de modèles
Les approches à base de modèles dans un objectif de diagnostic embarqué sont très lar-gement répandues dans la littérature scientifique. L’approche à base de modèles exploite un modèle du fonctionnement explicite du système à diagnostiquer. Elle fonde la détection des défaillances sur la constatation de discordances entre le comportement prédit par le modèle et le comportement réellement observé, et la localisation sur le recoupement des groupes de composants impliqués dans chacune de ces discordances.
Selon la connaissance que nous avons du système, il est possible de définir deux approches différentes : l’approche FDI (Fault Detection and Isolation) issue de la communauté auto-matique et dont le principe repose sur des modèles quantitatifs, et l’approche DX issue de la communauté de l’intelligence artificielle et dont le principe repose sur des modèles qualitatifs.
L’approche DX
La méthode, dite de diagnostic à base de modèles, ou encore diagnostic à partir des principes premiers, a vu le jour au milieu des années 70 et a été formalisée au début des années 80. Un nombre croissant de travaux a été mené depuis et cette problématique est devenue un domaine de recherches à part entière de l’I.A. Les articles les plus marquants jusqu’à 1991 sont regroupés dans (de Kleer et Williams, 1989; de Kleer et al., 1992), (Hamscher et al., 1992) ou encore dans (Console et Friedrich, 1994). Une synthèse de ce domaine est faite par P. Dague dans le chapitre 1 de l’ouvrage de (Dubuisson, 2001).
Les connaissances incluses dans les modèles utilisés décrivent la structure (connexions entre composants) du système à diagnostiquer et son comportement (en termes du com-portement des différents composants intervenant dans le système). Seules les connaissances structurelles sont spécifiques au système en question ; les connaissances comportementales, idéalement issues des lois de la physique, sont génériques et ne dépendent que du domaine (électronique, thermodynamique, hydraulique, mécanique, etc.).
Ce qui distingue cette approche est qu’il n’est pas nécessaire de raisonner sur des mo-dèles de fautes mais sur les modèles de bon comportement pour déterminer si le système sort de celui-ci. Plus besoin d’anticiper les défauts ou dysfonctionnements pouvant affecter un système et leurs effets pour pouvoir les détecter et les localiser : modéliser le comportement correct est suffisant. L’idée fondamentale est de comparer le comportement réel du système tel qu’il peut être observé par l’intermédiaire des capteurs et son comportement attendu tel qu’il est prédit grâce aux modèles de bon comportement. Toute incohérence entre les observations et les prédictions déduites des modèles est interprétée comme la manifestation d’un dysfonc-tionnement, i.e. la présence d’un ou plusieurs défauts. Ceci est bien sûr conditionné par le fait que les modèles soient corrects, c’est à dire qu’ils représentent réellement le comportement du système.
Conflits et diagnostics La présence de défauts est détectée par l’observation d’une in-cohérence entre les observations et les prédictions. Cette incohérence met en évidence qu’un composant ou plusieurs, utilisés pour faire la prédiction, ne suivent plus le modèle de bon comportement. L’un d’entre eux est nécessairement défectueux. L’ensemble de ces compo-sants forme un conflit. La localisation se fait en recoupant les différents conflits obtenus à partir des observations sur le système et des prédictions faites à partir des modèles.
Ensuite, l’objectif est de rétablir la cohérence en faisant des hypothèses sur le fonction-nement des composants. Un diagnostic est l’ensemble des composants qui supposés en fautes permettent de rétablir la cohérence avec les observations. C’est pourquoi le terme de diag-nostic à base de cohérence est également employé.
Finalement, lorsqu’il y a plusieurs diagnostics, un raffinement des candidats pourra être utilisé. Modèles de fautes Dans certains cas, la connaissance de modèles de fautes permet d’enri-chir le diagnostic dans la mesure où elle nous permet d’aller plus loin que la simple localisation c’est-à-dire l’identification. Aussi, des extensions du formalisme furent proposées pour per-mettre d’utiliser des modèles de faute : GDE+ (Struss et Dressler, 1989) et Sherlock (de Kleer et Williams, 1989) sont les travaux les plus marquants.
Aux deux modes de comportement correct et incorrect utilisés précédemment s’ajoutent les modèles des modes de fautes connus, considérés deux à deux exclusifs, ainsi qu’un mode Inconnu sans modèle associé qui représente tous les modes de faute non anticipés.
Les approches de diagnostic
Ainsi un conflit représente une incohérence entre les observations et les prédictions faites à partir des assignations de modes comportementaux à certains composants. Un diagnostic est le rétablissement de la cohérence par assignation de modes comportementaux à tous les composants du système. La génération des diagnostics étant un problème NP-difficile, diverses techniques de localisation furent proposées (de Kleer, 1991) pour ne générer que les diagnostics préférés selon certains critères (diagnostics les plus probables (de Kleer, 1990), diagnostics explicatifs (Console et Torasso, 1990; Console et Torasso, 1991; de Kleer et al., 1992). Nous retrouvons ces travaux, dans un objectif embarqué, dans (Steinbauer et Wotawa, 2005) par exemple.
L’approche FDI
L’application de l’automatique dans un objectif de détection et de diagnostic est appa-rue dans les années 70 (Rosembrock, 1970). Plusieurs articles de synthèse sont disponibles, notamment (Gertler, 1998), (Isermann, 1997), et (Dubuisson, 2001).
Les modèles sont construits à partir des lois fondamentales (physiques. . . ), et sont décrits par des modèles analytiques. Le principe de détection consiste en la génération d’indicateurs de défauts, appelés résidus. Les systèmes embarqués font appel à des modèles aussi bien linéaires que non linéaires.
La surveillance comprend deux phases :
– le calcul des résidus
– l’évaluation des résidus
Les résidus représentent la différence entre le comportement réel du système et celui prédit par le modèle. Dans le cas nominal, la valeur du résidu est nulle et non nulle lors de la présence d’une défaillance. L’expression des résidus est obtenue a priori, comme une fonction des grandeurs observables (phase de calcul des résidus). Elle est ensuite évaluée en utilisant les mesures (phase d’évaluation des résidus). Une procédure de décision, prenant en compte les caractéristiques statistiques des bruits de mesure et les erreurs de modélisation est en général nécessaire pour évaluer les résidus, c’est-à-dire décider si l’écart par rapport à zéro est significatif.
La génération des résidus à partir des modèles analytiques fait l’objet de nombreuses études. Deux grandes approches se distinguent. La première consiste à surveiller les variables utilisées dans la description du système qui peuvent évoluer au cours du temps. Il s’agit des approches basées sur l’estimation des sorties et celle de l’espace de parité. L’autre approche consiste à estimer les paramètres structuraux du système. Ces paramètres sont généralement constants. Par exemple, dans les systèmes embarqués, les techniques de filtrage de Kalman sont largement employées. Le filtre de Kalman est un filtre récursif qui estime les paramètres structuraux ou de sorties d’un système à partir de mesures incomplètes et bruitées comme c’est généralement le cas dans les systèmes embarqués. Nous pouvons citer les travaux de (Li et Goodall, 2003; Li et Goodall, 2004; Mirabadi et al., 1998) pour le domaine ferroviaire, (Washington, 2000; de Freitas, 2002; Hutter et Dearden, 2003) pour le domaine aéronautique.
Une autre approche utilisant le filtre de Kalman est appelée “interacting multiple models”. Cette technique consiste à utiliser un banc de filtres de Kalman où chaque filtre représente un mode de fonctionnement du système. Cela permet d’estimer l’état du système sous une ré-duction significative du bruit. Une probabilité pour chaque modèle est calculée pour indiquer le mode courant (Zhang et Li, 1997; Roumeliotis et al., 1998; Hwang et al., 2003).
Le filtre de Kalman s’applique pour des systèmes linéaires. Or les systèmes actuels ne sont pas linéaires. Une variante du filtre de Kalman a été développée, appelée filtre de Kalman étendu, pour les systèmes non linéaires mais linéarisables localement. Nous retrouvons ce genre d’approche dans les systèmes aéronautiques (Chingiz et Fikret, 2005).
D’autres approches et notamment le filtrage particulaire ont été mises en place pour les systèmes non linéaires et non linéarisables. Elles sont basées sur des simulations et des techniques statistiques. Ces travaux sont repris dans le domaine ferroviaire (Li et Goodall, 2004; Li et al., 2007) et le domaine aéronautique (Verma et al., 2004; de Freitas, 2002; Hutter et Dearden, 2003). D’autres techniques, pouvant utiliser les filtres de Kalman, reconstruisent l’état du sys-tème représenté sous forme de représentation d’états. Il s’agit des observateurs d’états. Les travaux reposant sur des observateurs sont publiés dans (Venkateswaran et al., 2002; Jen-sen et Wisniewski, 2002; Steinbauer et Wotawa, 2005; Kashi et al., 2006) pour les domaines aéronautiques, et dans (Chang et al., 2000; Straky et al., 2002; Shraim et al., 2006) pour le domaine automobile. Lorsqu’il existe plusieurs modèles (de fautes et de bon fonctionnement), une fusion floue des observateurs peut être appliquée comme dans (Patton et al., 1998) pour le domaine ferroviaire. Nous retrouvons également un observateur basé sur l’apprentissage itératif pour les systèmes non linéaires comme les moteurs automobiles (Chen et Saif, 2003).
Pour la localisation, différents types de résidus sont générés : les résidus structurés et les résidus directionnels.
Les résidus structurés sont conçus pour que chaque résidu soit sensible à un sous-ensemble de fautes et insensible aux autres. Aussi, quand une faute survient, certains résidus répondent et d’autres restent à zéro : ceci constitue la signature de la faute. L’ensemble des signatures prédéfinies pour les différentes fautes à considérer constitue la matrice de signatures.
Les résidus directionnels sont conçus de telle sorte que, lorsqu’une faute survient, le vecteur de résidus soit confiné suivant une direction particulière de l’espace des résidus.
Notons qu’en pratique, l’objectif est de structurer ou d’orienter au mieux un ensemble de résidus en minimisant/maximisant la sensibilité des résidus par rapport à divers sous-ensembles de fautes. Par ailleurs, il est préférable de rendre les signatures de faute insensibles aux perturbations. Ainsi, cela revient à résoudre un problème d’optimisation global de ma-nière à construire des résidus sensibles aux défaillances de manière structurée, et robustes vis-à-vis des perturbations et incertitudes du modèle.
Il se peut également que les résidus soient corrélés entre eux. Pour remédier à ce problème, la méthode du maximum de vraisemblance généralisée est usuellement employée. Il s’agit d’une technique qui, sous l’hypothèse que les variables ont une distribution connue, permet d’estimer les paramètres d’un modèle (d’une équation ou d’un système, linéaire ou non) avec des restrictions sur des paramètres (cœfficients, matrices de variances ou covariances) ou non. Cette technique est également utilisée dans le domaine aéronautique (Gomez et al., 2000; Wu et Campion, 2004).
Les approches de diagnostic
Le point fort de cette approche, qui la distingue des autres, est qu’elle peut accomplir la détection et, dans une large mesure, la localisation de fautes en se fondant uniquement sur un modèle de bon fonctionnement du système, à l’exclusion de toute connaissance préalable sur les fautes ou les modes de défaillances. Les modèles de fautes ne sont pas nécessaires (pour le diagnostic purement fondé sur la cohérence, qui permet la localisation de fautes) mais ceux qui existent peuvent être efficacement pris en compte (extension au diagnostic abductif, qui permet l’identification des fautes et l’explication des symptômes).
Conclusion
Le diagnostic à base de modèle pour les systèmes embarqués est très largement étudié dans la communauté de diagnostic. Nous n’avons pas voulu établir une liste exhaustive de toutes les approches qui existent mais plutôt d’en dégager le maximum d’information concer-nant le diagnostic à base de modèle pour les systèmes embarqués. Les approches à partir de filtre de Kalman, d’observateurs d’état et d’estimation de paramètres sont les plus cou-ramment étudiées. Les approches proposées apportent de très bon résultats mais nécessitent la connaissance du modèle du système à surveiller. Ce système correspond généralement à un ensemble particulier comme les systèmes de suspension, les pneus, les amortisseurs, les moteurs, capteurs, actionneurs. . . La connaissance du système est très précise. Elle permet de connaître par avance les défaillances qui peuvent apparaître sur ces systèmes. L’ensemble des approches considèrent comme acquis la connaissance des fautes. Néanmoins, l’approche à base de modèle nous permet de faire au moins de la détection si aucune connaissance sur les fautes est établie et notamment les approches par estimation paramétrique permettent de déterminer les variables du système qui sont en fautes.
L’approche à base de données
La complexité que l’on retrouve dans les systèmes surveillés que ce soit en aéronau-tique, dans le ferroviaire ou l’automobile, rend difficile l’obtention de modèles. Il a donc été développé des techniques ne faisant pas appel à la connaissance des modèles mais se basant sur des données précédemment recueillies.
L’approche à base de données procède par apprentissage numérique et classification en exploitant les données existantes, à l’exclusion de toute forme de modélisation (analytique, symbolique ou autre) et peut aussi se fonder sur des techniques d’apprentissage et de classi-fication symboliques (apprentissage par similarité).
Ces approches permettent d’associer un ensemble de mesures (continues ou discrètes) ef-fectuées sur le système à des états de fonctionnement connus. Elles permettent d’avoir une relation d’un espace caractéristique vers un espace de décision, de façon à minimiser le risque de mauvaise classification. Une première technique est une technique classique de discrimi-nation basée sur les outils de la probabilité. Cette technique peut se montrer insuffisante car elle suppose une connaissance a priori de tous les états de fonctionnement et ne prend pas en compte l’évolution du système. D’autres techniques de discrimination reposent sur l’intel-ligence artificielle. Ces techniques ont l’avantage de ne pas se baser sur les connaissances a priori des états de fonctionnement mais plutôt sur une phase d’apprentissage. Les techniques de reconnaissance des formes par réseaux de neurones (Bishop, 1995; Ripley, 1996) et de reconnaissance des formes par la logique floue (Zadeh, 1965; Takagi et Sugeno, 1985; Yager et Filev, 1994) sont celles qui sont les plus utilisées.
Les réseaux de neurones sont des outils de l’intelligence artificielle, capables d’effectuer entre autres des opérations de classification. Leur fonctionnement est inspiré par les prin-cipes de fonctionnement des neurones biologiques. Leur principal avantage par rapport aux autres outils est leur capacité d’apprentissage et de généralisation de leurs connaissances à des entrées inconnues. Le processus d’apprentissage est une phase très importante pour qu’une classification puisse se faire avec succès. Plusieurs types de réseaux de neurones et plusieurs algorithmes d’apprentissage existent dans la littérature. Une des qualités de ce type d’outil est son adéquation pour la mise au point de systèmes de surveillance modernes, capables de s’adapter à un système complexe avec reconfigurations multiples. L’expert humain joue un rôle très important dans ce type d’application. Toute la phase d’apprentissage supervisé du réseau de neurones dépend de son analyse des modes de fonctionnement du système. Chaque mode doit être caractérisé par un ensemble de données recueillies sur le système. A chaque mode est associé une expertise faite par l’expert. Cette association (ensemble de données – modes de fonctionnement) est apprise par le réseau de neurones. Après cette phase d’appren-tissage, le réseau de neurones associe les classes représentant les modes de fonctionnement aux formes d’entrée caractérisées par les données du système. Pour les systèmes embarqués, nous pouvons citer les travaux de (Sharkey et al., 2000; Bobi et al., 2001) pour le domaine ferro-viaire, (Chen et Lee, 2002) dans l’aéronautique, ou (Poulard, 1996; Jakubek et Strasser, 2002) pour le domaine automobile.
En plus de leur utilisation pour l’estimation de classes, les réseaux de neurones sont également largement utilisés pour l’estimation de paramètres. L’objectif est d’établir une estimation de paramètres afin de voir s’ils correspondent au bon fonctionnement du système (valeurs seuils. . . ). De nombreux travaux se basant sur ce type d’approche sont publiés, et notamment dans (Debiolles et al., 2004; A.Debiolles et al., 2006) pour le domaine ferroviaire, (Chen et Lee, 2002; Al-Malki et Gu, 2003; Fekih et al., 2006; Al-Malki et Gu, 2006; Fellouah et al., 2006) dans l’aéronautique, ou encore (Schwarte et Isermann, 2002; Kimmich et al., 2005; Nitsche et al., 2004; Capriglione et al., 2003; Capriglione et al., 2007) pour le domaine automobile.
En reconnaissance des formes par approche floue, les classes sont représentées par des sous-ensembles flous. Une fonction dite d’appartenance quantifie le degré d’appartenance entre les mesures et les classes. La mise en œuvre d’une méthode de classification floue implique deux étapes : la construction des fonctions d’appartenance et la définition des règles de décision. Dans les systèmes embarqués, nous pouvons citer les travaux de (Skarlatos et al., 2004) pour le domaine ferroviaire, (Ganguli, 2003; Yu et al., 2004) pour le domaine aéronautique et (Murphey, 2002; Boatas et al., 2000; Boatas, 2001; Crossman et al., 2003; Lu et al., 2003) pour le domaine automobile.
Conclusion
Là encore, nous n’avons pas voulu établir une liste exhaustive de toutes les approches à base de données pour le diagnostic embarqué. Nous avons essentiellement voulu avoir un perçu général des méthodes employées. Notons que les réseaux de neurones restent l’ap-proche la plus employée même si d’autres approches comme la reconnaissance de forme par logique floue est également très utilisée. L’avantage de ces approches reste l’absence de mo-dèle du système qui n’est pas forcément connu. Elles ne nécessitent aucune connaissance du modèle du système. Les réseaux de neurones sont utilisés dans beaucoup de domaines et d’approches, notamment pour l’estimation de paramètres, l’estimation de classes. . . Les sys-tèmes considérés restent identiques à ceux des approches basées modèles c’est-à-dire moteurs, capteurs, actionneurs. . . Là encore, les auteurs ont connaissance des défaillances qui peuvent survenir dans le système. Néanmoins, ces approches permettent de détecter des défaillances sans en avoir une quelconque connaissance. Dans ce cas, lors de la phase d’apprentissage, le modèle est obtenu uniquement à partir des données de bon fonctionnement. Ce modèle sert de référence, ce qui permet à ces approches de déterminer par la suite si le système est dans le bon fonctionnement ou non. Cependant, le système surveillé reste limité à un système particulier.
L’objectif de ce chapitre était de faire un tour d’horizon des approches de diagnostic dans les systèmes embarqués et plus spécifiquement dans les domaines de l’aéronautique, l’aérospa-tial, le ferroviaire, et l’automobile. De nombreuses études ont été menées dans ces domaines et il est difficile d’en faire une synthèse exhaustive. Cependant, nous avons voulu ici établir une liste des approches les plus couramment utilisées dans ces différents domaines. Nous pou-vons néanmoins remarquer que les études menées traitent de systèmes assez variés mais que ceux-ci restent spécifiques. En effet, les systèmes qui sont étudiés sont, la plupart du temps, des systèmes dont le comportement est connu, tout comme les défaillances qui peuvent s’y produire. Or, actuellement, l’industrie automobile connait de profonds changements qui im-pliquent des modifications dans l’architecture du véhicule, dans les composants utilisés, dans les fonctions proposées. . . Les systèmes retrouvés dans un véhicule sont perpétuellement en train de se renouveler dû en grande partie aux progrès de l’électronique et de son utilisation croissante dans les systèmes embarqués du véhicule. Or les approches développées sont très dépendantes des systèmes étudiés et doivent donc être modifiées à chaque fois que le système change. En outre, les défaillances considérées sont propres au système et les techniques déve-loppées sont propres à ces défaillances. Or qu’en est-il des systèmes comme une automobile, où il peut exister des défaillances dont l’origine est inconnue ? Quels sont les systèmes qui doivent être surveillés ?
Les approches sont nombreuses et celles à base de modèles restent les plus couramment utilisées. Elles nécessitent par définition un modèle dont l’obtention n’est pas évidente pour plusieurs raisons :
1. les modèles peuvent être difficiles à obtenir dans le sens où le système surveillé est complexe à modéliser ou peut être trop coûteux ;
2. les modèles des systèmes automobiles appartiennent aux constructeurs et il est difficile de les obtenir ;
3. les modèles ne correspondent plus à l’implémentation faite dans le véhicule (évolution des modèles, différence entre modèle et implémentation. . . ) ;
4. les modèles de fautes dépendent des connaissances que nous avons du système surveillé ;
5. les fautes sont également difficiles à modéliser.
Les approches basées modèles sont très performantes car elles permettent de surveiller le système et de suivre le bon comportement de celui-ci. La connaissance des défaillances dans un système et mieux encore le modèle de celles-ci est un atout certain. Malheureusement, la progression de l’électronique dans les véhicules a fait apparaître de nombreuses défaillances inconnues. Si une telle connaissance existe alors les approches basées modèles sont celles qui donnent les meilleurs résultats. Cependant, ces approches peuvent être utilisées pour la surveillance ou l’estimation de paramètres. Cela ne nécessite aucune connaissance sur les défaillances.
En l’absence de modèle, les réseaux de neurones semblent donner les meilleurs résultats même si leur phase d’apprentissage reste délicate. Mais là encore, les approches à base de données sont utilisées pour classer le système dans un certain mode de fonctionnement et notamment de fautes, ce qui présuppose la connaissance des défaillances qui peuvent survenir sur le système. Néanmoins, ces approches peuvent servir également pour la détection et avoir un mode inconnu par exemple, ou bien dans l’estimation de paramètres.
Pour conclure, la plupart des approches portent sur un système spécifique, connu, et cherchent à détecter et à localiser des défaillances également connues sur le système. Finale-ment, l’approche à employer dépend de la connaissance ou non du modèle, de sa précision, de la connaissance des fautes sur le système ou encore de la possibilité d’effectuer la phase d’apprentissage.
Table des matières
Introduction
1 Problématique et contexte
1.1 Concepts généraux
1.2 Les approches de diagnostic
1.2.1 L’approche basée connaissances
1.2.2 L’approche à base de modèles
1.2.2.1 L’approche DX
1.2.2.2 L’approche FDI
1.2.2.3 Conclusion
1.2.3 L’approche à base de données
1.2.3.1 Conclusion
1.3 Conclusion
2 Contexte automobile
2.1 Évolution des véhicules
2.1.1 La partie commande
2.1.2 La partie opérative
2.1.2.1 Les capteurs
2.1.2.2 Les actionneurs
2.1.3 Architecture générale d’un réseau
2.2 Le diagnostic dans le domaine automobile
2.2.1 Les fautes/pannes dans le domaine automobile
2.2.2 Le diagnostic en garage
2.2.2.1 Les différentes sources de connaissances
2.2.2.2 Les différentes sources d’informations provenant du véhicule
2.3 Le projet MODE
2.3.1 Structure générale
2.3.2 Les différents projets de recherche de MODE
2.3.2.1 Le projet OBIR : Ontology Based Information Retrieval
2.3.2.2 Le projet MBR : Model Based Reasoning
2.3.2.3 Le projet RDF : Reconnaissance Des Formes
2.3.2.4 Le projet DDP : Diagnostic Distribué Préventif
2.3.3 Conclusion
3 Diagnostic à base de modèle pour les systèmes à événements discrets
3.1 Approches de diagnostic à base de modèles de bon comportement
3.2 Approches de diagnostic à base de modèles de fautes
3.3 Diagnostic des défaillances intermittentes
3.4 Synthèse et contribution de notre travail dans le diagnostic des SED
4 Détection et diagnostic de fautes intermittentes
4.1 Le modèle de bon comportement
4.1.1 Modèle global des fonctions
4.1.1.1 Les fonctions
4.1.1.2 Les différents formalismes utilisés
4.1.1.3 Représentation de la fonction
4.1.2 Projection du modèle sur les observables
4.1.2.1 Mécanisme d’abstraction
4.1.3 Aspects temporels
4.2 Surveillance et détection
4.2.1 Détection des fautes intermittentes et fugitives
4.2.1.1 Définitions
4.2.1.2 Principe de détection
4.3 Réinitialisation
4.4 conclusion
5 Approche par glissement de fenêtre
5.1 Longueur de fenêtre
5.1.1 Détermination de la longueur de la séquence à partir du marquage
5.1.1.1 Cas d’une seule trajectoire
5.1.1.2 Cas de plusieurs trajectoires à partir d’un même marquage
5.1.1.3 Généralisation à plusieurs trajectoires
5.1.2 Détermination en ligne de la longueur à conserver
5.2 Principe de localisation
5.2.1 Insertion d’un événement
5.2.2 Absence d’un événement
5.3 Conclusion
6 Approche diagnostiqueur : les automates
6.1 Modèles de Classe de Fautes
6.1.1 Le modèle
6.1.2 Exemple
6.2 Modèles incluant des défaillances génériques
6.2.1 Modèle pour l’absence d’événement
6.2.2 Modèle pour l’insertion d’événement
6.2.3 Exemple
6.3 Produit synchronisé des modèles
6.3.1 Rappels
6.3.2 Les modèles synchronisés
6.3.3 Exemple
6.4 Les Diagnostiqueurs
6.4.1 Absence d’un événement : construction de Γ− Diag
6.4.2 Insertion d’un événement : construction de Γ+ Diag
6.4.3 Exemple
6.4.3.1 Diagnostiqueur absence :
6.4.3.2 Diagnostiqueur insertion :
6.5 Conclusion
7 Approche diagnostiqueur : les réseaux de Petri
7.1 Modèles de Classe de Fautes
7.1.1 Le modèle
7.1.2 Exemple
7.2 Modèles incluant des défaillances génériques
7.2.1 Modèle pour l’absence d’événement
7.2.2 Modèle pour l’insertion d’événement
7.2.3 Exemple
7.3 Synchronisation des modèles
7.3.1 La synchronisation des modèles
7.3.2 Exemple
7.4 Les Diagnostiqueurs
7.4.1 Algorithme de Karp et Miller
7.4.2 Absence d’un événement
7.4.2.1 Principe
7.4.2.2 Formalisation
7.4.3 Insertion d’un événement
7.4.3.1 Principe
7.4.3.2 Formalisation
7.4.4 Exemple
7.4.4.1 Diagnostiqueur absence
7.4.4.2 Diagnostiqueur insertion
7.5 Conclusion
8 Application de l’approche diagnostiqueur au domaine automobile
8.1 Application
8.1.1 Le banc de test
8.1.2 Le diagnostic dans les véhicules de transport
8.1.3 Une fonction : la fonction d’accès rampe pour handicapés
8.2 Applications développées
8.2.1 Structure générale
8.2.2 L’application Roméo
8.2.3 L’application DDP
8.2.4 Construction des différents modèles
8.3 Scenarii de fautes
8.3.1 Limite du diagnostic des véhicules de transport
8.3.2 Détection et localisation de base
8.3.2.1 Défaut sur le capteur de rentrée de la rampe
8.3.3 Localisation à partir du diagnostiqueur
8.3.3.1 Défaut sur le capteur de rentrée de la rampe
8.3.3.2 Défaut sur le capteur de sortie de la rampe
8.3.3.3 Limitations
8.4 Conclusion
Conclusions, discussions et perspectives
8.1 Conclusions
8.2 Discussions et perspectives
Bibliographie