Les décisions de la CPTAQ et l’étalement urbain
Pour bien saisir la portée des décisions rendues par la CPTAQ, nous avons procédé à l’analyse d’une quarantaine de dossiers des archives numériques de la commission, et ce pour chacune des municipalités. L’objectif de ce travail est de présenter des cas où une décision de la commission risque d’entraîner l’empiètement de l’espace urbain sur une partie du territoire agricole de la municipalité. Puisqu’il existe plusieurs centaines de dossiers à analyser pour chaque ville, nous avons d’abord effectué une sélection de cas pertinents par la sélection d’un groupe témoin pour chacune d’entre elles.
Pour la constitution de nos groupes témoins, nous avons localisé sur une carte les terrains concernés par une demande de changement de zonage. Sur cette carte, nous avons superposé une photographie aérienne de la ville pour faire une sélection des cas en fonction d’éléments particuliers.
Un premier élément qui a influencé la sélection des dossiers est la taille du terrain visé par la demande. Nous avons sélectionné les terrains ayant une superficie substantielle. Un second élément concerne la localisation des terrains, notamment lorsqu’ils se trouvent près des rivières, des autoroutes ou de toutes autres routes principales. Enfin, nous avons superposé dans un logiciel de SIG (Arcgis) la zone agricole comme elle était avant la révision des années 1990 et la zone agricole actuelle . De cette façon, il est possible de voir les zones qui étaient agricoles autrefois et qui font maintenant partie de la zone urbaine. Lors de l’analyse de nos groupe témoins, nous avons relevé des cas qui se démarquaient parmi les autres. C’est donc sur ces cas que notre analyse portera principalement. Toutefois, les cas les plus fréquents, et ce, surtout durant les premières années d’existence de la commission, sont ceux portant sur l’exclusion de la zone agricole d’un lot pour permettre la construction d’une résidence. Parmi ces cas, nous y retrouvons les demandes venant d’un particulier qui souhaite souvent construire une habitation pour un membre de la famille ou pour simplement profiter de l’espace disponible entre deux maisons, et les demandes des promoteurs qui avaient un projet domiciliaire en cours au moment de l’ application de la LPTA. Un autre type de demande qui se retrouve en grand nombre concerne des demandes d’empiètement sur la zone agricole par les entreprises locales qui se trouvent circonscrites et qui ont besoin de plus d’espace pour assurer leur développement, cet espace se trouvant en zone verte. D’autres acteurs que nous retrouvons fréquemment parmi les demandeurs sont les municipalités concernées, par le simple fait qu’elles doivent gérer un territoire qui comprend des terres agricoles protégées. Ainsi, il arrive souvent qu’un projet d’envergure municipale, par exemple l’implantation d’une usine d’épuration des eaux, fasse en sorte que les municipalités remplissent une demande.
Premiers constats, les années 1980
La majorité des 84 dossiers que nous avons analysés ne présentent pas des cas méritant d’être abordés en détail. Néanmoins, la somme des demandes d’exclusion de la zone agricole d’un lot pour permettre la construction résidentielle illustre les effets des décisions de la commission sur la dynamique d’étalement urbain des villes de SaintHyacinthe et de Saint-Jean-sur-Richelieu. En effet, nous retrouvons une multitude de décisions où nous constatons un impact sur la zone agricole et sur le cadre bâti du territoire de la municipalité.
Pour rendre ses décisions, la commission se base sur les directives de la loi qui changent selon l’époque. À ses débuts, à la fin des années 1970, la CPTAQ reçoit beaucoup de demandes en lien avec l’ exclusion du zonage agricole aux fins de développement résidentiel. Ces demandes illustrent les pressions qu’exerce la spéculation foncière à cette époque, car plus le temps passe, plus ces demandes faites par des particuliers et non par la municipalité ou la MRC déclinent .
Au cours de la période 1978-1989, la commission refuse la plupart des demandes concernant le développement résidentiel (mis à part le dossier 015796 où les commissaires acceptent partiellement une demande de dézonage). Les demandes acceptées sont de manière générale des causes où la partie demanderesse plaide le droit acquis L’autre type de cause qui marque cette époque, et que nous retrouvons toujours dans les périodes plus récentes est la demande pour le morcellement des terres. C’est dans ce type de demande que nous retrouvons le plus de disparités dans la justification des décisions ‘rendues. En effet, ces cas sont les plus représentatifs du quotidien de la commission qui se doit de faire une analyse au cas par cas, ce qui dépend généralement de l’emplacement du lot en question. Par exemple, si un promoteur fait une demande pour un lot situé dans une zone jugée irrécupérable pour l’agriculture (par exemple un terrain dans un développement qui a débuté avant la mise en application de la LPTA), la décision sera différente d’un cas où le terrain visé se situe en zone complètement agricole.
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