LES MOYENS D’EXISTENCE A KOLDA
Kolda, de par sa situation géographique dans une zone à forte pluviométrie, est une région à vocation agricole. Elle est la deuxième région agricole du Sénégal après Kaolack.
D’ailleurs jusqu’au recensement de 1976, plus de 94,4% de sa population s’adonnaient à l’agriculture.
La promotion de la ville en capitale régionale devrait être un tournant dans la diversification des activités orientées vers le secteur tertiaire.
Paradoxalement, selon une étude de la Banque Mondiale : « la région de Kolda compte le ratio de ménages pauvres le plus élevé du Sénégal, avec 52,6% contre une moyenne nationale de 27,5%. En effet, sur 60 692 ménages recensés, 31 892 sont classés pauvres, avec des revenus mensuels par habitant inférieurs à 3324 f Cfa .
Cette situation régionale ne va pas manquer de se refléter sur l’état social des ménages de la capitale régionale koldoise.
Les conditions d’existence des ménages
Hormis sa fonction de reproduction des générations, le ménage est le lieu de la production des biens et de la consommation.
En milieu urbain, le citadin voit sa possibilité de subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille s’élargir. Il n’est plus condamné à s’adonner uniquement à l’agriculture.
A Kolda l’agriculture tient encore une place très importante dans la vie de ses habitants. Toutefois, il n’est pas dit que la multiplicité des opportunités de trouver du travail offerte par la ville, est un gage de bonnes conditions de vie pour les ménages.
Ce tableau ci-dessus en est une parfaite illustration, où une frange non négligeable des citadins déclare avoir un revenu insuffisant soit 31,7% des chefs de ménage contre 68,3% qui déclarent le contraire.
Ce tableau ne traduit pas la situation de pauvreté dans laquelle on semble confiner les populations de la région y compris celles de la commune de Kolda. Dans notre échantillon d’enquête, 68,3% des chefs de ménage déclarent avoir un revenu suffisant pour subvenir à leurs besoins primaires (nourriture, logement, soins de santé, éducation).
Nous pouvons, en opposant ces résultats à ceux d’autres sources d’investigation, déduire que certains enquêtés ont sûrement eu un scrupule à annoncer leur pauvreté.
Une de ces sources vient confirmer la précarité des conditions d’existence dans plusieurs ménages koldois. Il s’agit d’une étude faite par l’UNICEF dans la commune, en septembre 2001 dans laquelle, il ressort le taux de malnutrition chez les enfants âgés de 0-5 ans serait de 30%58.
En plus de cette étude, nous pouvons nous appuyer, dans une certaine mesure, sur les équipements domestiques disponibles au sein des ménages pour juger de la précarité des conditions de vie des koldois.
A la lecture de ce tableau, il apparaît nettement qu’une majorité des ménages rencontrés, c’est à dire 61,4% ne sont pas équipés en robinet contre 38,6%. Ce résultat reflète un mode de vie solidement ancré à Kolda qui est de s’approvisionner en eau à partir des puits. Il suffit de visiter les quartiers et les maisons de la ville pour s’en convaincre.
Au-delà du manque de moyens pour se connecter au réseau d’adduction d’eau potable, le recours aux puits peut s’expliquer par le souci des citadins de réduire leur facture d’eau.
Signalons que nombreuses sont les maisons qui disposent des deux types d’approvisionnement de ce liquide précieux ; l’existence du puits se justifiant par la faible profondeur de la nappe phréatique.
Nous pouvons aussi constater, à travers ce tableau, qu’aucune catégorie professionnelle ne dépasse les 50% de ménages équipés en robinets hormis les agents de l’Etat (60.4%) et les retraités (58.8%),
Ces deux catégories constituent une classe sociale qui a pu bénéficier ou bénéficie encore d’un revenu plus ou moins suffisant et stable pour se doter d’un robinet.
Au bas de l’échelle, nous retrouvons les artisans avec un pourcentage de 93,8% des ménages qui ne sont pas équipés en robinet, et 71,4% en ce qui concerne les sans emplois.
Il existe d’autres indices qui témoignent du niveau disponibilité des équipements domestiques au sein des ménages enquêtés. Il est de :
21,4% pour le téléphone fixe,
77,2% pour électricité,
64,2% pour la télévision,
29% en magnétoscope,
autres59.
Si la plupart des ménages enquêtés dispose de l’électricité et possède un poste téléviseur, il n’ en est pas de même pour l’équipement en téléphone fixe et en magnétoscope, avec un taux inférieur à 30%.
Bref, 103/114 parmi les chefs de ménage à revenu insuffisant, soit 90,35% avouent bénéficier d’une aide financière. Cette aide provient de sources variées indiquées dans le tableau ci dessous :
Les activités économiques à Kolda
Pendant très longtemps, la ville a exercé une attraction sur son environnement, notamment sur les populations rurales qui désaffectent de plus en plus leur terroir.
Elles s’y rendent à la recherche d’un travail susceptible d’améliorer leurs conditions de vie rendues difficiles par la péjoration des conditions climatiques.
C’est ainsi qu’ils vont tenter de s’insérer dans les différentes sphères de la vie urbaine.
A Kolda, l’agriculture, le commerce, l’artisanat et la fonction publique, constituent les principaux secteurs pourvoyeurs d’emplois.
La fonction publique, l’agriculture et le commerce sont les trois secteurs-clés qui pourvoient en emplois les citadins de Kolda. Ils occupent ensemble 62,8% des enquêtés.
Et, ils sont 21,4% à s’adonner à l’agriculture comme moyen de subsistance dans une ville érigée en capitale régionale.
A y voir de près, les quartiers périphériques de Kolda donnent l’image d’un prolongement du monde rural, comme du reste l’atteste notre descente sur le terrain qui nous a permis d’observer des espaces cultivés dans des surfaces habitées.
A ce propos, signalons qu’en 1992, les habitants de la ville s’étaient vivement soulevés contre l’interdiction par le service d’hygiène de la culture de maïs dans les maisons violant ainsi de façon flagrante une disposition du code de l’hygiène.
Cette présence de l’agriculture est d’autant plus perceptible que Kolda est entourée de vergers et de rizières dans ses parties inondables (Hilèle, Gadapara).
Le maraîchage, culture de décrue, est pratiqué par les femmes sur la vallée du fleuve Casamance durant la saison sèche.
En plus de l’agriculture, les autres secteurs d’activités qui offrent de l’emploi aux koldois sont le commerce et l’artisanat avec respectivement 14,7% et 8,1% des enquêtés.
L’activité commerciale se présente sous deux aspects : l’un qui obéit à une structuration plusou moins formelle, l’autre est caractérisé par une organisation informelle.
Le secteur formel comprend :
le commerce du demi- gros,
les détaillants et
le commerce spécialisé.
Le commerce du demi-gros est presque entièrement entre les mains des Peul Fouta venus de la Guinée Conakry.
Le commerce au détail emploie et les Peul Fouta (près de 300 personnes) et les Wolof notamment au marché central.
Le commerce spécialisé : c’est un secteur en plein expansion qui s’active dans le domaine du service : l’hôtellerie, la distribution des médicaments, la restauration, la vente de carburant, l’approvisionnement en boissons.
Dans ce secteur, Kolda compte :
3 hôtels
7 pharmacies
3 restaurants
3 stations services
2 grossistes
En ce qui concerne l’informel, il est le secteur qui emploie le plus grand nombre de personnes.
Il regroupe une importante masse féminine spécialisée dans le commerce de légumes, bref de produits issus du maraîchage ou de la culture sous pluie.
Une partie non négligeable des acteurs de ce petit commerce sont des femmes qui proviennent des villages environnants. Après vente de leurs marchandises, elles achètent des produits qui n’existent pas dans leur village.
L’autre composante de ce secteur informel est constituée par les marchands ambulants et certains artisans tels que les mécaniciens, les électriciens etc.
Il apparaît, ainsi, que le commerce est l’un des secteurs les plus dynamiques au niveau de Kolda. A travers cette activité, la ville parvient à polariser de grandes aires géographiques en favorisant un échange entre milieu urbain et monde rural.
Il existe un mouvement croisé dans le flux des échanges matérialisé d’une part par le déplacement des ruraux vers la ville pour s’approvisionner en articles manufacturés et d’autre part par celui des commerçants de Kolda vers la campagne à la recherche de produits divers (miel, huile de palme, pain de singe etc.) pour alimenter le marché local.
Le commerce se développe dans la région dans de nombreux villages sortis de l’anonymat par l’existence de leur marché hebdomadaire. Parmi ces villages, nous pouvons citer, en indiquant le jour du marché :
Bref, le principal problème auquel est confronté le secteur du commerce demeure celui de l’acheminement des marchandises. L’état défectueux des routes reliant Kolda à son arrièrepays et à Dakar en est la cause.
Pire encore, cette difficulté d’accès à la commune fait que, très souvent, les agglomérations du département de Kolda ont tendance à se rabattre vers les pays frontaliers pour leur approvisionnement au détriment des commerçants de la ville. Ce qui constitue un manque àgagner considérable.
Par contre, pour ce qui est de l’artisanat, 8,1% des chefs de ménages déclarent s’activer dansce secteur. Il n’en participe pas moins à résorber le chômage qui est du reste important au regard de ce tableau car il concerne 15,6% des enquêtés. Mais, il faut dire que, c’est la forte présence des femmes au foyer qui contribue à élever ce nombre de sans emplois.
Ce secteur de l’artisanat est essentiellement tourné vers les métiers de la menuiserie ébéniste (qui doit son essor aux importantes ressources en bois dont regorge le département de Kolda), de la maçonnerie et de la menuiserie métallique dont la plupart des acteurs sont originaires duNord du pays et dans une moindre mesure de la région de Ziguinchor.
Par ailleurs, s’il y a un secteur qui est presque inexistant dans la ville de Kolda, c’est bien sûr celui de l’industrie qui se résume à l’usine de la SODEFITEX (société de développement et des fibres textiles).
Toutefois, depuis quelques années, l’on note l’émergence de nouvelles PME (petites et moyennes entreprises) évoluant dans le domaine de la transformation et de la vente de lait.