LES COMMUNAUTES BACTERIENNES DANS LES PRODUITS CARNES ET PLUS
PARTICULIEREMENT DANS LE JAMBON
La notion de diversité bactérienne
Etudier l’écologie microbienne d’un environnement revient à identifier quels micro-organismes sont présents, se développent et interagissent entre eux et avec cet environnement. La colonisation microbienne d’un environnement résulte de phases de compétitions entre différents microorganismes. Ainsi, les espèces les moins compétitives sont peu à peu dominées par les espèces les plus adaptées. Pour analyser les comportements microbiens et leur dynamique, il est nécessaire de recenser les espèces présentes et d’avoir accès à leur abondance dans la communauté. La diversité bactérienne est définie par la richesse, c’est-à-dire le nombre d’espèces, et par l’équilibre des abondances(evenness) de ces espèces (Heip et al., 1998 ; Tuomisto, 2012).
Méthodes culturales classiquement utilisées pour l’identification d’isolats
Classiquement, l’analyse des bactéries présentes dans un environnement nécessite une phase d’isolement sur milieu de culture. On cherche ensuite à identifier ces bactéries. Or, du fait de la petite taille des cellules bactériennes, l’identification basée sur des critères morphologiques est limitée (Emerson et al., 2008). Les attributs bactériens métaboliques étant multiples, les bactéries peuvent également être identifiées selon des critères biochimiques, sur la base d’activités métaboliques ou en fonction de leur capacité de croissance sur des milieux plus ou moins sélectifs, mais ces techniques ne permettent pas d’identifier tous les micro-organismes et nécessitent qu’ils soient préalablement cultivés.
Méthodes d’identificationà partir des acides nucléiques
Dans les années 1990, les progrès en biologie moléculaire ont permis d’identifier les bactéries présentes dans un échantillon à partir de leur ADN (Erlich et al., 1988). Cette reconnaissance repose sur le principe que chaque groupe bactérien a un génome qui lui est propre (résultant de mutations progressives au cours de l’évolution). La phylogénie permet de distinguer les génomes bactériens, de retracer leur origine généalogique et la taxonomie prend en compte la classification de séquences génomiques en différents niveaux phylogénétiques. Les bactéries sont ainsi classées en règne, domaine, phylum, classe, ordre, famille, genre et espèce (du plus vaste au plus spécifique).
L’identification bactérienne s’effectue généralement sur la base d’un fragment d’ADN correspondant à une séquence signature, caractéristique d’un groupe bactérien donné. Ainsi, l’identification peut être effectuée directement à partir des ADN des bactéries récoltées d’un échantillon, sans nécessiter d’étape préalable de culture. Cette approche a révélé l’existence de taxons qui n’avaient encore jamais été isolés sur les milieux de culture utilisés. C’est le cas par exemple d’une espèce rencontrée dans les produits de la mer altérés, appartenant à la famille des Fusobacteriaceae (Chaillou et al., 2015). Parmi les méthodes d’identification fréquemment utilisées, on trouve des méthodes ciblant des taxons bactériens spécifiques comme l’hybridation in situ en fluorescence (FISH), la PCR quantitative avec des amorces spécifiques des taxons recherchés ou encore les micropuces à ADN (Justé et al., 2008). Pour une analyse plus globale, à l’échelle d’une communauté bactérienne dont on ne connait pas forcément toutes les espèces, l’électrophorèse sur gel en gradient dénaturant (DGGE), l’analyse du polymorphisme de longueur de fragments terminaux (T-RFLP) ou encore le séquençage d’amplicons sont des techniques fréquemment utilisées (Justé et al., 2008). Pour augmenter la quantité d’ADN bactérien et cibler certaines régions d’ADN préalablement à l’identification, une phase d’amplification par PCR (Polymerase Chain Reaction) est généralement nécessaire avant l’application de ces techniques.