Les chalcopyrites ternaires

Structure électronique

La parenté existant du point de vue structural entre les chalcopyrites ternaires semiconducteurs et les composés binaires II-VI dont la structure est de type zinc-blende, suggère une relation étroite entre les structures de bandes d’énergie de ces matériaux. C’est en effet ce sur quoi se fonde l’approche utilisée par Shay et Wernick[4] pour modéliser la structure des bandes d’énergie des chalcopyrites ternaires. Pour chaque composé ternaire I-III- VI2, ils définissent un composé binaire analogue II-VI: P ar exemple CdSe pour AgInSe2, Zn0,5Cd0,5Se pour AgGaSe2 et CuInSe2, ZnSe pour CuGaSe2. Le modèle de bandes obtenu par cette approche prévoit 3 transitions de la bande de valence à la bande de conduction résultant de la triple levée de dégénérescence due aux effets conjugués du champ cristallin (Δcf) et de l’interaction spin-orbite (Δso).
Des mesures d’électroreflectance sur un grand nombre de ces composés ont confirmé les prévisions issues de ce modèle[4].
Cependant, les observations expérimentales ont permis, à d es degrés divers, de faire les constats suivants (Tableau I-2):
– l’énergie des gaps directs des composés I-III-VI2 est faible par rapport à l’énergie des gaps des composés binaires analogues correspondants.
– la valeur expérimentale du paramètre d’interaction spin-orbite, Δso est plus faible que la valeur prévue théoriquement et celle des composés binaires analogues.
Ce phénomène s’expliquerait par le fait que les bandes de valence de la plus part des composés binaires zinc-blende analogues des composés I-III-VI2 sont composées d’orbitales de types s et p tandis que les niveaux supérieurs des bandes de valence des composés I-III-VI2 sont fortement influencés par la proximité des niveaux d du métal noble A[6]. Il en résulte une hybridation p-d entre les niveaux p de l’anion C et les niveaux d du métal noble A. C’est cette interaction dans la bande de valence des composés I-III-VI2 qui serait à l ’origine de ces anomalies[4,6]. Les estimations quantitatives du caractère d se situent entre 16% et 45% dans la série de composés étudiés[6] ( tableau I-2)
Le paramètre d’interaction spin-orbite ΔSO théorique étant plus faible pour les sulfures que les séléniures, cette interaction entre différents niveaux énergétiques dans la bande de valence conduit à des valeurs proches de zéro pour les sulfures, d’où l’observation pour ces derniers composés de deux transitions au lieu de trois comme les séléniures(Tableau I-2).

Propriétés électriques

Les propriétés électriques des composés ternaires I-III-VI2 ont fait l’objet de nombreuses études. Celles-ci montrent que les propriétés électriques de ces co mposés sont dominées par des défauts structuraux dans le réseau cristallin de ces matériaux. Ces défauts natifs électriquement actifs résultent généralement des écarts à la stœchiométrie. Selon le type de défauts présent, le matériau peut avoir une conductivité de type n ou p ou même être isolant.
On montre que ces p ropriétés électriques peuvent être contrôlées par un certain nombre de paramètres. En particulier pour les sulfures et les séléniures, les propriétés électriques peuvent être contrôlées par des conditions de traitement thermiques convenables. Ainsi on montre[4] que les sulfures et séléniures à base de cuivre, recuits à des températures comprises entre 600 et 800 °C pendant 24 he ures, sous pression maximale de chalcogène (S ou S e) donnent une conductivité de type p. Par contre, lorsque le traitement thermique est effectué sous pression minimale du chalcogène, les composés à large gap deviennent très résistants et les composés à faible gap donnent une conductivité de type n. Les sulfures et séléniures à base d’argent ne donnent par contre pas de conductivité de type p; ils sont généralement, quelques soit les conditions de traitement thermique, très résistants (semi-isolant) ou de type n.

Le diséléniure de cuivre et d’indium

Dans les recherches sur les chalcopyrites semi-conducteurs ternaires, le diséléniure decuivre et d’indium CuInSe2 (CIS) occupe une place de choix. Cet intérêt du CIS se justifie surtout par les performances obtenues par ce matériau dans la réalisation de cellules photovoltaïques couches minces.

Caractéristiques électro-optiques

A partir des observations expérimentales issues d’études optiques réalisées sur le CIS, des informations concernant les transitions A, B, et C ainsi que les éclatements dus au champ cristallin et au champ d’interaction spin-orbite ont été obtenues mais aussi la différences d’énergie ECA entre les transitions A et C et EBA entre les transitions A et B. Les études effectuées sur des monocristaux en particulier montrent que le CIS est un semi-conducteur à bande électronique interdite directe et que les énergies des transitions permises A, B et C sont respectivement 1,04 eV, 1,04 e V et 1,27 e V[4,6,7]. Le paramètre d’interaction spin-orbite observé est de 0,23 eV.
Ainsi, à l’instar des sulfures I-III-VI2 et contrairement à tous les séléniures étudiés, le CIS ne présentent que deux transitions directes permises; les transitions A et B étant identiques. Les différences d’énergie entre les transitions A et B et les transitions C et A sont respectivement :

Propriétés photovoltaïques

Pour réaliser une cellule couche mince, il faut une couche absorbante à grand coefficient d’absorption dans le domaine du visible. Il faut donc de préférence utiliser un semiconducteur ayant une bande électronique interdite directe (et non indirecte comme le silicium) et dont la valeur est adaptée au spectre solaire (de l’ordre de 1,1 – 1,7 eV). Ces matériaux permettent une absorption de tout le spectre solaire dans une épaisseur relativement faible (de l’ordre de 1 µm). Cette faible profondeur d’absorption présente l’avantage de rendre la cellule relativement tolérante aux défauts qui agissent comme des centres de recombinaison des porteurs de charges.
Ces propriétés correspondent à celles du CIS. Evidemment sa bande interdite est un peu plus faible (Eg ≈ 1,04 eV) mais des pistes d’optimisation de celle-ci existent.
Ces atouts du CIS pour la réalisation de cellules photovoltaïques et les progrès constamment enregistrés ( figure I-4) dans ce domaine font de la filière CIS l’une des filières de référence.

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Les méthodes de préparation du CIS

Plusieurs techniques ont été utilisées pour la croissance en couches minces du diséléniure de cuivre et d’indium (CIS). Chacune de ces techniques de dépôt et les paramètres associés à son processus ont un effet caractéristique sur la nucléation, la microstructure de la croissance des couches, leur composition donc sur les propriétés physiques de celles-ci. Le choix de la méthode de croissance est donc une étape importante dans l’élaboration de matériaux de haute qualité et donc dans la réalisation de cellules photovoltaïques performantes.

La co-évaporation sous vide

L’évaporation d’un matériau suppose que celui-ci soit porté à une température suffisamment élevé pour produire la pression de vapeur souhaitée. Le principe de la méthode consiste alors à mettre dans un creuset soit un cristal de CIS soit des sources indépendantes des trois éléments (Cu, In, et Se) et à porter ce creuset à une température T convenable. Les vapeurs de ces trois éléments ainsi produites peuvent réagir pendant leur transport de la source vers un substrat ou à la surface de ce substrat qui, lui aussi est chauffé. On obtient ainsi par condensation une couche mince de CIS à la surface du substrat. Cette technique a permis de réaliser des couches minces de CIS de très bonne qualité[6,9,14-21,29-42]. et demeure aujourd’hui celle qui a conduit aux cellules photovoltaïques en couches minces détenant le meilleurs rendement de conversion. Elle soufre cependant de la difficulté de produire de grandes surfaces de matériaux. Cet handicap est surtout dû à la difficulté d’obtenir des flux uniformes des espèces chimiques sur une grande surface.

La sélénisation de précurseurs métalliques

La sélénisation d’un alliage de cuivre et d’indium est une méthode très prometteuse pour former des couches minces de CIS de bonne qualité[22-24,43,44]. Il s’agit d’un procédé à deux étapes. La première étape correspond à la formation de l’alliage métallique précurseur et la deuxième, à la sélénisation proprement dite. Pour la formation de l’alliage, on réalise sur un substrat approprié les dépôts successifs d’une couche de cuivre et d’une couche d’indium. Ces dépôts sont effectués par évaporation au faisceaux d’électrons ou par évaporation thermique.
La bi-couche ainsi obtenue est ensuite soumise à un premier traitement thermique. Après ce traitement de recuit, elle est placée sur un plateau dont la température est graduellement augmentée jusqu’à 600°C dans une atmosphère de sélénium, pour une durée variant de 45 à 60 mn. Après cette étape de sélénisation, la couche de CIS est de nouveau soumise à un deuxième traitement thermique.
Dans cette technique de préparation du CIS, toutes les deux étapes revêtent une importance capitale pour la qualité et l’adhérence du CIS au substrat. En particulier, le degré de formation de l’alliage Cu-In, la morphologie et l’uniformité de la composition dans l’alliage précurseursont les facteurs déterminants pour la qualité du CIS après sélénisation.

La pulvérisation cathodique (sputtering)

Le principe de cette méthode consiste à bombarder, par des ions issus d’un plasmas de gaz rare, la surface d’un matériau cible appelé cathode. Ce bombardement arrache à la cible des atomes qui viennent se condenser à la surface d’un substrat pour former un film. Pour la formation du CIS on utilise deux cibles dont l’une est en cuivre et l’autre en indium dans une atmosphère de sélénium.

Le dépôt chimique en solution

Le CIS peut être préparé en couches minces dans une solution aqueuse à basse température par réaction chimique entre des précurseurs dissous ( ions ou molécules décomposables) en situation métastable[25,27]. Cette technique, appelée méthode de dépôt chimique en solution (CSD pour chemical solution deposition ou C BD pour chemical bath deposition est, sur le plan du principe, l’équivalent en solution de la technique CVD (chemical vapour deposition) en phase gazeuse. Elle a été utilisée avec beaucoup de succès pour le dépôt de plusieurs chalcogénures tels que CdS, CdSe, ZnS,..
Pour le dépôt du CIS, les solutions à utiliser sont constituées d’un sel de Cu(I), d’un sel de In(III), d’agents complexant et d’une espèce chimique libérant des ions séléniures.
En pratique, une poudre de sélénium est dissoute dans une solution aqueuse de sulfate de sodium à 90°C pour former le composé instable Na2SeSO3. Cette solution est mélangée à une solution de tétraamine de cuivre Cu(NH3) 2+
4 puis ajoutée à une solution contenant un complexe d’indium et de citrate. Dans le bain chimique ainsi constitué, Na2SeSO3 donne des ions Se2- et SO 2−
3 . Les ions sulfites réduisent alors Cu(NH3) 2+
4 et génèrent des ions Cu+. La température de la solution est fixée à 40°C et un film mince de CIS est obtenu sur un substrat.

Le déplacement chimique rédox ou « electroless »

Il s’agit d’un « dépôt électrochimique non extérieurement assisté « . Cette technique est particulièrement intéressante pour le développement de films minces de CIS. Son principe consiste à immerger un s ubstrat ( verre conducteur ou m étal noble) que l’on connecte à un métal facilement oxydable (Al, Cd par exemple) dans une solution contenant les ions convenables[45,46]. On forme ainsi une cellule locale court-circuitée suivant la réaction :

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