Bornes minimales d’estimation
Les bornes minimales d’estimation sont des minorants de l’EQM. Elles fournissent des indications sur les performances ultimes qu’un estimateur peut espérer atteindre pour un modèle d’observation donné. En conséquence, elles sont utilisées comme “benchmarks” afin de jauger les performances d’un estimateur et de savoir si, à partir d’un cahier des charges donné, une amélioration est possible. La borne de Cramér-Rao (BCR) est la borne la plus utilisée par la communauté du traitement du signal et fait encore, à l’heure actuelle, l’objet de nombreux travaux tant théoriques, en particulier au travers des variétés différentielles en géométrie Riemannienne (voir, par exemple, [SM93] [XB04b] [XB04a] [Man04] [Smi05b] [Smi05a]) que pratiques (voir, par exemple, [DA04] [DA05] [CLF05] [ZLO06] [YN06]). Le principal argument généralement avancé en faveur de la BCR est sa simplicité de calcul. Nous pensons que la BCR jouit surtout de son antériorité historique, c’est-à-dire qu’en tant que première borne minimale elle a souvent été préférée aux autres bornes minimales. Il existe en effet une pléthore d’autres bornes minimales d’estimation qui ont été dérivées depuis plus de soixante ans à l’aide de différentes inégalités mathématiques telles que : l’inégalité de Cauchy-Schwartz, l’inégalité de Kotelnikov, l’inégalité de Hölder, l’inégalité de Ibragimov-Hasminskii, l’inégalité de Bhattacharyya, l’inégalité de Kie- fer, etc…. Cette profusion désordonnée a nuit à l’utilisation et à la dissémination de ces bornes puisqu’il devenait difficile pour le chercheur non spécialiste de discerner les différents concepts théoriques sous-jacents à leur l’établissement permettant de les retranscrire dans le contexte d’un problème d’estimation spécifique. Cependant, nous montrerons dans ce chapitre que toute ces bornes sont plus pertinentes que la BCR, justifiant largement le surcroît d’efforts induits.
Les bornes minimales d’estimation se classent en deux catégories distinctes : les bornes déter- ministes lorsque les paramètres θ sont supposés déterministes et les bornes bayésiennes lorsqueles paramètres θ sont supposés aléatoires avec une densité de probabilité a priori p (θ). Les bornes déterministes sont : la borne de Cramér-Rao [Fis22] [Dug37] [Fre43] [Dar45] [Rao45] [Cra46], la borne de Bhattacharyya [Bha46] [FG52], la borne de Chapman-Robbins [Ham50] [CR51] [Kie52], la borne de Barankin [Bar49] [MS69], et la borne d’Abel [Abe90] [Abe93]. Les bornes bayésiennes se sub-divisent en deux catégories : les bornes de la famille Ziv-Zakaï qui dérivent d’un problème de test d’hypothèse binaire (et plus généralement d’un test d’hypothèses M -aires) et les bornes de la famille Weiss-Weinstein qui dérivent, comme les bornes déterministes, d’un principe d’in- égalité de covariance. La famille Ziv-Zakaï est composées de la borne de Ziv-Zakaï [ZZ69], de la borne de Bellini-Tartara [BT74], de la borne de Chazan-Zakaï-Ziv [CZZ75], de la borne de Weinstein [Wei88], de la borne de Bell-Steinberg-Ephraim-VanTrees [BSET97] et de la borne de Bell [Bel95]. La famille Weiss-Weinstein est composée de la borne de Cramér-Rao bayé- sienne [Van68], de la borne de Bobrovsky-MayerWolf-Zakaï [BMWZ87], de la borne de Bhat- tacharyya bayésienne [Van68], de la borne de Bobrovsky-Zakaï [BZ76], de la borne de Reuven- Messer [RM97] et de la borne de Weiss-Weinstein [WW85].
L’objectif de ce chapitre est de présenter une unification des bornes déterministes et des bornes bayésiennes de la famille Weiss-Weinstein à l’aide d’un même formalisme s’appuyant sur un problème d’optimisation sous contraintes. Cette unification permettra non seulement de mieux comprendre les hypothèses sous-jacentes à l’établissement de chaque borne mais nous servira également d’outil pour présenter deux nouvelles bornes minimales d’estimation : la borne d’Abel bayésienne et la borne de Weiss-Weinstein déterministe. Nous présenterons également une unification des bornes de la famille Ziv-Zakaï issues des travaux de Kristine Bell [Bel95]. Les résultats proposés dans ce chapitre sont essentiellement théoriques, c’est-à-dire qu’ils exposent les fondements sur lesquels reposent les bornes minimales d’estimation. Nous verrons dans le chapitre suivant comment ces bornes peuvent être utilisées d’un point de vue opérationnel. qu’un estimateur vérifiant les contraintes de la forme (3.4) peut espérer atteindre. Nous allons voir dans la suite que les bornes déterministes sont obtenues comme solution de (3.5) lorsque les contraintes sont relatives au biais de l’estimateur. représente la variance de l’estimateur. L’une des qualités désirées pour un estimateur est un biais nul sur tout le support Θ. Pour se rapprocher de ceci, nous utiliserons les trois types de contraintes sur le biais de l’estimateur., h), d’un estimateur ponctuellement sans biais en deux points. Dans ce cas, l’utilisation de (3.15) et (3.16) en un point dans (3.4).