Les bases neurobiologiques de la dyslexie

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Les bases cognitives de la dyslexie

Les principaux axes de recherche concernant les dysfonctionnements cognitifs liés à la dyslexie s’articulent majoritairement autour des fonctions visuelles et auditives. En effet, la lecture étant un processus liant des objets auditifs a` des stimuli visuels, il est ainsi naturel d’investiguer dans ce sens. Les deux théories majeures concernant la dyslexie sont donc celle du déficit phonologique et celle du déficit visuel.
Une première hypothèse a` développer serait celle du déficit visuel dans la dyslexie. En effet, historiquement, il s’agit de la première hypothèse proposée, en 1896, puisque la dyslexie est alors définie comme une ”cécit´ congénitale du mot” (congenital word blindness en anglais) par William Pringle-Morgan. Cette première hypothèse s’est développée et a donné naissance a` la théorie dite magnocellulaire car basée sur une partie du système visuel spécialis´ dans l’analyse primaire des stimuli visuels et dans la détection des mouvements et des changements rapides. En effet, les individus dyslexiques semblaient avoir de moins bonnes performances lors de tests de détection de contrastes (Livingstone et al., 1991).
Plus récemment, on a vu émerger l’hypothèse d’un déficit visuo-attentionnel suite a` l’observation de difficultés d’orientation de l’attention chez des enfants dyslexiques (Facoetti et Molteni, 2001; Hari et Forss, 1999; Hari et Renvall, 2001). Ces difficultés semblent ˆetre présentes au niveau visuel mais aussi au niveau auditif (Facoetti et al., 2005). De fait, il arrive souvent que les déficits visuels soient observés couplés avec un déficit phonologique, rendant difficile la détermination de la cause des difficultés d’apprentissage de la lecture (Ramus et al., 2003c,b).
La théorie du déficit phonologique est la plus largement supportée a` ce jour. Cette hypothèse se base sur le fait que, le plus souvent, les enfants dyslexiques présentent des déficits de conscience phonologique, de mémoire verbale a` court terme et de mobilisation lexicale rapide (Kronbichler et al., 2002; Ramus et al., 2003a,b,c; Landerl et al., 2013; White et al., 2006). Ces déficiences peuvent ˆetre mises en évidences mˆeme avant l’apprentissage de la lecture, par exemple en ce qui concerne le déficit de conscience phonologique (Wimmer, 1996; Scarborough, 1998; Sprenger-Charolles et al., 2003), grˆace a` des jeux utilisant le concept de rimes ou nécessitant la manipulation de phonèmes, comme les contrepèteries (la conscience phonologique étant définie comme la capacité de percevoir et de manipuler les sons des mots, c’est a` dire les phonèmes (Liberman et Shankweiler, 1985)). Le mˆeme genre d’observations a pu ˆetre fait concernant la mobilisation lexicale en utilisant des tˆaches de dénomination rapide (rapid automatized naming, ou RAN). Des études récentes suggèreraient que, en fait de la qualité des représentations phonologiques, ce pourrait ˆetre leur accès ou leur stockage qui pourrait ˆetre déficients dans la dyslexie (Ramus et Szenkovits, 2008).
En parallèle du déficit phonologique, on peut supposer l’existence d’un déficit de trai-tement auditif, influen¸cant potentiellement la qualité des représentations phonologiques. En effet, dès 1980, l’équipe de P. Tallal a etudi´ les capacités de traitement auditif d’enfants dys-lexiques par des tˆaches de perception auditive non-verbale, o`u les dyslexiques ont en moyenne obtenu des scores plus faibles que les contrˆoles (Tallal, 1980). A alors emerg´ l’hypothèse d’un déficit de perception auditive touchant le traitement auditif rapide chez les enfants dys-lexiques, et plus précisément un déficit de traitement des changements rapides dans le signal de parole (Tallal, 2004). Par exemple, si l’on considère les syllabes /ba/ et /da/, les indices permettant de les différencier se rencontrent au niveau de transitions de formants pendant les 40 ms initiales. Si certaines études ont pu retrouver ces résultats (Cohen-Mimran et Sapir, 2007) et apporter des arguments neurobiologiques (Gaab et al., 2007; Raschle et al., 2011), de nombreuses autres n’ont pas pu les répliquer (Agus et al., 2014; Chiappe et al., 2002).
Une autre hypothèse concernant un déficit de traitement auditif concerne la détection des changements d’amplitudes sonores (Goswami et al., 2002). De fait, certaines études ont pu montrer que les enfants dyslexiques avaient plus de mal a` percevoir des modulations d’amplitude lentes, affectant potentiellement la détection du rythme de la parole et de la prosodie (Leong et Goswami, 2014a,b). Des hypothèses traitant des causes sous-jacentes au niveau neurobiologique ont alors et´ proposées suite a` ces travaux (Goswami, 2011)

Traitement auditif et oscillations corticales

Certains travaux récents portant sur les oscillations corticales rejoignent les réflexions précédentes sur le traitement auditif. En effet, en s’intéressant aux réponses oscillatoires du cortex auditif a` des stimuli modulés en amplitude (en anglais auditory steady-state responses, ou ASSR), on peut émettre l’hypothèse d’une perturbation de ces réponses dans certaines bandes de fréquences importantes pour le traitement de la parole (Goswami, 2011; Giraud et al., 2007; Giraud et Poeppel, 2012) mˆeme si les bandes concernées sont encore largement discutées (Lehongre et al., 2013, 2011; Lizarazu et al., 2015; Poelmans et al., 2012; Ham¨al¨ainen¨ et al., 2012). De plus, de telles études utilisant de la parole comme stimulus n’ayant pas encore eté réalisées, nous ne pouvons pas nous prononcer pour l’instant sur un lien potentiel entre oscillations du cortex auditif et traitement de la parole.
Par ailleurs, il a et´ montré en magnéto-encéphalographie (MEG) que le cortex auditif gauche des personnes dyslexiques n’oscille pas autant que celui des personnes contrˆoles à la fréquence de 30 Hz, fréquence pertinente pour le traitement des phonèmes (Lehongre et al., 2011). Dans la mˆeme étude, le cortex auditif gauche des volontaires dyslexiques était plus facilement entrain´ que celui des contrˆoles aux fréquences supérieures a` 60 Hz. Ces premiers résultats ont apporté une première base a` l’hypothèse selon laquelle le siège de la différence entre sujets contrˆoles et dyslexiques serait situé au sein du cortex auditif gauche et pourrait correspondre a` un déficit de traitement des unités ayant une taille proche de celle des phonèmes.
Des résultats similaires ont et´ obtenus par une équipe indépendante en electroencé-phalographie (EEG) (Poelmans et al., 2012) et par notre équipe en imagerie par résonance magnétique (IRM) fonctionnelle combinée à l’EEG (Lehongre et al., 2013), semblant abonder dans le sens d’une différence de traitement aux fréquence proches de 20-30Hz et des traite-ments similaires aux basses fréquences (1-7 Hz). Toujours en EEG, une étude de Ham¨al¨ainen¨ et al. (2012) a montré une différence de traitement de stimuli a` 2 Hz dans l’hémisphère droit, sans aucune autre différence par ailleurs. Concernant les études en MEG, Lizarazu et al. (2015) ont montré une différence d’asymétrie des réponses chez les individus dyslexiques a` 30 Hz, mais aussi a` 4 Hz. Malheureusement, a` l’heure actuelle, les résultats sont difficilement comparables, que ce soit en terme de méthode utilisée (MEG ou EEG), de stimuli (des sons ou de la parole) ou d’ˆage des participants (enfants ou adultes).
Cet échantillonnage temporel a` des fréquences diverses pourrait soit participer a` la construction des unités phonologiques de différentes tailles (phonèmes, syllabes), soit contri-buer a` les rendre plus accessibles pour des tˆaches cognitives. La jonction est donc possible avec les deux principales manières de considérer le traitement auditif dans la dyslexie (Giraud et Ramus, 2013). Ces différences notables entre individus contrˆoles et dyslexiques au niveau fonctionnel laissent alors imaginer l’existence de modifications des structures sous-jacentes au niveau anatomique. Une méthode populaire pour l’analyse des images obtenues en IRM est, de par sa simplicité et sa rapidité, l’analyse de morphométrie basées sur les volumes (soit voxel-based morphometry, ou VBM). Un grand nombre d’études sur la dyslexie basées sur cette méthode peuvent donc ˆetre décomptées (Richlan, 2012; Kronbichler et al., 2008; Silani, 2005; Steinbrink et al., 2008; Vinckenbosch et Eliez, 2004; Brambati et al., 2004; Brown et al., 2001; Dole et al., 2013; Eckert et al., 2005; Evans et al., 2014; Hoeft et al., 2007; Jednor´og et al., 2014, 2015; Krafnick et al., 2011, 2014; Kronbichler et al., 2008; Menghini et al., 2008; Pernet et al., 2009; Raschle et al., 2011; Silani, 2005; Siok et al., 2008; Steinbrink et al., 2008; Tamboer et al., 2015; Vinckenbosch et al., 2005). Cependant, cette méthode présente un certain nombre de limites, et notamment le fait que lors de l’analyse, tous les cerveaux doivent ˆetre transformés pour correspondre à un modèle commun, ce qui efface un grand nombre de différences morphologiques entre les individus. Une possibilité pour limiter cet effet est la création d’un modèle propre à l’étude en utilisant tous les cerveaux a` analyser pour créer une moyenne (Marchewka et al., 2014).
Les différences rapportées se situent dans les régions postérieures temporales et temporo-pariétales gauches (o`u l’on peut trouver les deux tendances de différences entre contrˆoles et dyslexiques au niveau du volume de matière grise) (Brambati et al., 2004; Hoeft et al., 2007; Silani, 2005; Steinbrink et al., 2008), dans le gyrus inférieur frontal gauche (avec un volume de matière grise réduit chez les participants dyslexiques) (Brown et al., 2001; Eckert et al., 2005), dans les régions occipito-temporales quelque soit l’hémisphère (Eckert et al., 2005; Brambati et al., 2004; Kronbichler et al., 2008; Raschle et al., 2011) et dans le cervelet (également avec une réduction du volume de matière grise chez les participants dyslexiques) (Brown et al., 2001; Brambati et al., 2004; Eckert et al., 2005; Kronbichler et al., 2008). Mais la cohérence de ces résultats a et´ discutée (Jednor´og et al., 2015), laissant penser que cette méthode n’est pas suffisamment fiable, notamment du fait des suppressions de détails au niveau individuel, de trop faibles effectifs au sein des groupes ou d’absence de correction pour tests multiples.
D’autres méthodes ne nécessitant pas de transformation des images ont également et´ employées, par exemple dans des études se basant sur des différences de surfaces ou d’épaisseur corticales en délimitant manuellement certaines régions du cerveau. La plus etudiée et la mieux connue aujourd’hui est le planum temporale, triangle de cortex auditif primaire situé sur la partie inférieure de la vallée sylvienne, pour laquelle on trouve une asymétrie de surface vers la gauche pour 65% de la population générale (Geschwind et Levitsky, 1968). Dès les premières études de neuroanatomie post-mortem de la dyslexie, Galaburda et son équipe ont observ´ une asymétrie altérée chez les sujets dyslexiques (Galaburda et al., 1985). Cette aire corticale a depuis et´ etudiée in vivo lors de nombreuses études en IRM mais une majorité n’a pas montré de résultats semblables (Best et Demb, 1999; Bloom et al., 2013; Heiervang et al., 2000; Larsen et al., 1990; Robichon et al., 2000; Semrud-Clikeman et al., 1996). Seules cinq études du planum temporale ont retrouv´ une asymétrie contraire (vers la droite) ou une absence d’asymétrie dans la surface de cette aire corticale (Altarelli et al., 2014; Bloom et al., 2013; Hynd et al., 1990; Larsen et al., 1990; Semrud-Clikeman et al., 1996). Ces incohérences entre les différentes études peuvent ˆetre expliquées par un certain nombre de facteurs. Tout d’abord, les critères choisis pour délimiter le planum temporale varient d’une étude a` l’autre, ne permettant pas une comparaison fiable entre les différentes études. Un deuxième facteur déterminant est le nombre de participants aux différentes études, souvent faible (15 en moyenne), avec des critères d’inclusions variables pour le groupe dyslexique et sans appariement d’intérˆet avec le groupe contrˆole (ˆage, QI non verbal…) et donc diminuant également la robustesse des résultats. La seule étude a` ce jour ayant pris soin de réutiliser les mˆemes critères de délimitation du planum temporale et d’apparier les groupes en matière d’ˆage, de sexe, de QI non verbal et de latéralit´ manuelle a globalement pu montrer des résultats allant dans le mˆeme sens que ceux de Galaburda et al. (1985), c’est a` dire que l’on retrouve une asymétrie vers la gauche chez les sujets contrˆoles et une asymétrie vers la droite chez les sujets dyslexiques, en tout cas chez les gar¸cons (Altarelli et al., 2014).
Au niveau des différences d’épaisseur corticale, on notera par exemple l’étude d’Altarelli et al. (2013), o`u une différence a et´ décrite dans l’aire de la forme visuelle des mots (VWFA) entre les filles contrˆoles et les filles dyslexiques, les filles dyslexiques ayant une surface corticale réduite par rapport aux filles contrˆoles autour de la zone la plus activée lors de la lecture de mots.
L’imagerie de diffusion (soit diffusion tensor imaging, ou DTI) permet, quant a` elle, d’étudier les différences potentielles de connectivit´ structurale. Des études d’anisotropie frac-tionnelle ont pu montrer quelques différences dans les faisceaux de fibres reliant les aires anté-rieures et postérieures impliquées dans le réseau de la lecture (Klingberg et al., 2000; Deutsch et al., 2005; Niogi et McCandliss, 2006; Steinbrink et al., 2008; Odegard et al., 2009). Les études de tractographie permettent, quant a` elles, de reconstruire les faisceaux de fibres. Ce type d’étude suggère l’implication du faisceau arqué, reliant les aires supérieures temporales postérieures et le gyrus frontal inférieur (Vandermosten et al., 2012; Zhao et al., 2016). Des corrélations entre l’intégrit´ des fibres de ce faisceau et les capacités de lecture ont de plus et´ établies, mˆeme dans des échantillons n’incluant que des lecteurs normaux, renfor¸cant l’idée de l’implication du faisceau arqué dans le processus de lecture, et donc l’implication potentielle de son altération dans la dyslexie (Vandermosten et al., 2012).
Cependant, toutes ces structures cérébrales sont relativement plastiques et susceptibles d’ˆetre modifiées lors des processus d’apprentissage. De fait, des différences entre les groupes au sein de ces structures pourraient plutˆot refléter les conséquences d’une mauvaise lecture tout autant que les causes sous-jacentes de la dyslexie (Dehaene et al., 2010; Carreiras et al., 2009; Thiebaut De Schotten et al., 2012)
Les sillons corticaux, en tant qu’objets facilement observables et classifiables, ont et´ etudiés dans la population générale comme dans un certain nombre de pathologies. Les prin-cipaux sillons du cerveau sont ainsi bien décrits dans la littérature actuelle. Par exemple, de nombreuses études se sont intéressées à la forme de la scissure sylvienne (Barta et al., 1995; Beaton, 1997; Eckert et al., 2002; Jancke¨ et Steinmetz, 1993; Karbe et al., 1995; Ku-lynych et al., 1993; Moffat et al., 1998; Preis et al., 1999; Steinmetz et al., 1989; Westbury et al., 1999; Kulynych et al., 1994; Leonard et al., 1998; Jancke¨ et al., 1994; Steinmetz et al., 1990a,b,c), décrivant précisément les configurations possibles et les asymétries existantes de ce sillon. Des descriptions similaires existent pour le sillon central (Cykowski et al., 2008) et pour le sillon temporal supérieur (Glasel et al., 2011; Ochiai et al., 2004; Leroy et al., 2015; Segal et Petrides, 2012).
Les formes et caractéristiques des sillons etudiés en tant qu’objets sont spécifiques. En effet, si l’on étudie les sillons corticaux, ils peuvent ˆetre classés séparément selon leur hémisphère d’origine (Duchesnay et al., 2007) ou selon le sexe du sujet (Duchesnay et al., 2004, 2007).
Les sillons ont et´ etudiés dans un certain nombre de pathologies spécifiques. Des études ont notamment etudi´ la morphologie des sillons dans la maladie d’Alzheimer, montrant des différences avec des populations contrˆoles au niveau de la profondeur et de courbure moyenne des sillons, principalement dans le lobe temporal (Im et al., 2008), des différences d’asymétrie, par exemple dans la scissure sylvienne (Thompson et al., 1998), ainsi que des corrélations entre la forme des sillons et les performances cognitives (Mega et al., 1998).
La schizophrénie a également et´ un sujet d’études de la forme des sillons, montrant des différences notamment dans la largeur des sillons, les individus schizophrènes ayant souvent des sillons plus larges (Rieder et al., 1979; Pfefferbaum A et al., 1988; Weinberger DR et al., 1979) mais globalement un indice de sulcation moins important (Fujiwara et al., 2007; Cachia et al., 2008) que les individus contrˆoles. Une étude a également mis en évidence une différence entre individus contrˆoles et individus atteints de schizophrénie au niveau de la jonction du sillon temporal supérieur et de sa branche terminale la plus antérieure (Plaze et al., 2009).
On dénombre également quelques études des sillons dans le spectre autistique, réperto-riant des différences de profondeur des sillons, notamment des régions insulaires antérieures et de l’operculum frontal (Dierker et al., 2015), ou de la jonction temporo-pariétale (Dierker et al., 2015; Brun et al., 2016), avec une profondeur des sillons réduite dans les échantillons autistes. Un déplacement général des sillons vers la partie antérieure du cerveau a également pu ˆetre rencontr´ chez les sujets atteints d’autisme (Levitt et al., 2003). Enfin, Auzias et al. (2014) ont montré de nombreuses différences entre participants contrˆoles et atteints d’autisme dans le sillon central, le sillon intrapariétal et le sillon frontal médian en utilisant des critères de description géométriques de ces sillons.
Enfin, les sillons ont également et´ etudiés chez les individus atteints d’épilepsie, mon-trant des différences de rapports entre l’épaisseur corticale et la profondeur des sillons pre-centraux et post-centraux (Tosun et al., 2015), ainsi que des différences d’organisation gén´-rale des sillons dans la région occipito-temporale (Kim et al., 2008).
Un des sillons ayant et´ le plus etudié, notamment dans les questions de latéralit´ manuelle, est le sillon central. En effet, il a et´ établi par un certain nombre d’études des différences de forme et de dimensions de ce sillon entre les droitiers et les gauchers (Cykowski et al., 2008; J. F. Mangin et al., 2004; Amunts et al., 2000a; Kloppel¨ et al., 2010; White et al., 1994; Hopkins et al., 2010). De fait, dans la plupart des cas, le sillon central est plus profond et plus large dans l’hémisphère non dominant (soit dans l’hémisphère gauche chez les droitiers et dans l’hémisphère droit chez les gauchers) (Herv´ et al., 2006). On note également des différences au niveau de la forme du sillon. En effet, si l’on considère la position du ”nœud de la main” (ou hand knob en anglais), on observe qu’il est situé plus haut sur le sillon dans l’hémisphère non-dominant (Sun et al., 2012). Un fait notable dans cette étude est que chez les gauchers contrariés (ie les gauchers qui ont et´ forcés d’écrire de leur main droite), la profondeur et la taille du sillon se rapprochent de celles des droitiers, mais le noeud de la main est positionné au mˆeme endroit que chez les gauchers, appuyant l’idée que la forme des sillons est effectivement fixée en amont des processus d’apprentissage.
Enfin, la formation des sillons, soit l’émergence du plissement cortical, peut ˆetre due a` un certain nombre de facteurs, par exemple l’expansion différentielle des différentes couches du cortex (Richman et al., 1975; Kriegstein et al., 2006), la croissance corticale (Toro et Burnod, 2005), ou encore la tension potentiellement engendrée par les fibres de matière blanche entre les différentes aires corticales (Van Essen, 1997; Hilgetag et Barbas, 2006). Tous ces processus sont susceptibles d’ˆetre altérés chez les individus dyslexiques, notamment en conséquence de l’altération de la migration neuronale. Enfin, concernant le sillon central, Le Goualher et al.(2000) ont pu montrer une influence génétique sur la forme générale du sillon.
Ces observations nous ont amen´ a` nous interroger sur les formes des sillons dans la dyslexie. Puisque la forme des sillons peut ˆetre en partie conditionnée par la génétique et puisque les formes des sillons sont fixées antérieurement aux processus d’apprentissage, peut-ˆetre que la forme de certains sillons situés dans les aires spécifiques de la lecture pourrait-ˆetre un bon marqueur de facteurs de risques de la dyslexie.
Cette étude a donc porté sur l’analyse de la morphologie de sillons d’intérˆet dans la dyslexie et a et´ réalisée à l’aide des logiciels BrainVISA et Anatomist, et plus particuliè-rement de la méthode décrite dans l’article de Mangin et al. (2004). Les analyses ont et´ effectuées sur des images pondérées en T1 obtenues lors de différents projets de recherche en IRM, nous permettant de rassembler un total de 248 sujets divisés en deux groupes : un groupe d’enfants dyslexiques et un groupe contrˆole.

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Allemands

De mˆeme, deux groupes d’enfants ont participé a` l’expérience. Un premier groupe était composé de 16 contrˆoles (9 gar¸cons) et 10 dyslexiques (9 gar¸cons). Un deuxième groupe était composé de 10 contrˆoles (7 gar¸cons) et 35 dyslexiques (15 gar¸cons).
Aucun enfant ayant eu des troubles neurologiques ou psychiatriques ou présentant des troubles auditifs ou visuels non corrigés n’a et´ inclus. Le QI non verbal devait ˆetre dans la moyenne (QI non verbal général supérieur a` 80).
Pour le premier groupe, les enfants étaient considérés comme des lecteurs normaux si leur score de lecture au test standard allemand ”Wurzburger¨ Leise Leseprobe” (Kuspert¨ et Schneider, 1998) était au dessus du 25èME percentile. Les autres enfants ont et´ considérés comme dyslexiques. Pour le deuxième groupe, les enfants dyslexiques ont et´ diagnostiqués par le personnel de l’étude en se basant sur le test de lecture standardisé allemand ”Salzburger Lese Screening” (SLS) (Mayringer et Wimmer, 2003). Les enfants ayant obtenu un score en dessous de 1.5 déviation standard de moins que la moyenne ont et´ considérés comme dyslexiques. De plus, les enfants dyslexiques ont en moyenne obtenu des performances moindres à des tests de conscience phonologique et/ou des tests d’attention standards.
Les enfants et leurs parents ont donnée leur consentement informé par écrit avant les tests. Toutes les procédures expérimentales ont et´ approuvées par le comité d’éthique local (Faculté de médecine, RWTH Aachen University).

Polonais

Aucun enfant ayant eu des troubles neurologiques ou psychiatriques ou présentant des troubles auditifs ou visuels n’a et´ inclus. Le QI non verbal devait ˆetre dans la moyenne (QI non verbal général supérieur a` 85). La plupart des enfants avaient déjà re¸cu un diagnostic de dyslexie développementale indépendamment.
Les capacités de lecture ont et´ evaluées à l’aide de la batterie de tests stantardisés uti-lisée en Pologne pour le diagnostic de la dyslexie (Bogdanowicz et al., 2008). Les participants devaient lire à haute voix des mots isolés aussi rapidement et précisément que possible. Une mesure du nombre de mots lus correctement par minute a alors et´ utilisée.
L’étude a et´ approuvée par le comité d’éthique de l’Université médicale de Varsovie et les enfants et leurs parents ont donné leur consentement informé par écrit.

Table des matières

1 Introduction 
1.1 La dyslexie
1.2 Les bases cognitives de la dyslexie
1.3 Traitement auditif et oscillations corticales
1.4 Les bases neurobiologiques de la dyslexie
1.5 L’étude des sillons corticaux
1.6 Les sillons d’intérˆet dans la dyslexie
2 Matériel et méthodes 
2.1 Participants
2.1.1 Fran¸cais
2.1.2 Allemands
2.1.3 Polonais
2.1.4 Résumé
2.2 Procédure d’imagerie
2.2.1 Fran¸cais
2.2.2 Allemands
2.2.3 Polonais
2.3 Reconstruction des images corticales
2.4 Reconnaissance des sillons et extraction des données
2.5 Statistiques
3 Mesures globales et analyses préliminaires 
4 Le sillon central 
4.1 Mesures quantitatives
4.2 Observations morphologiques
5 La scissure sylvienne 
5.1 Mesures quantitatives
5.2 Observations morphologiques
6 Le sillon temporal supérieur 
6.1 Mesures quantitatives
6.2 Observations morphologiques
7 Discussion 
7.1 Description des motifs chez les groupes contrˆoles et dyslexiques
7.2 Différences d’asymétrie et interactions avec le sexe
7.3 Comparaisons avec d’autres résultats et limites de l’étude
7.4 Conclusion
Perspectives
Annexes 
Annexe 1 : Oscillations dans le cortex auditif
7.1 Introduction
7.2 Matériel et méthodes
7.2.1 Participants
7.2.2 Tests cognitifs
7.3 Organisation
7.3.1 Procédures d’imagerie
7.3.2 Prétraitements des données
7.4 Discussion et perspectives
Annexe 2 : Extraits du protocole du projet DysBrain
Annexe 3 : Article scientifique
Morphometry of three sulci in developmental dyslexia
Figures complémentaires
Bibliographie 

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