Les banques d’investissement

L’industrie bancaire aux États-Unis

On dénombre environ 7 300 banques commerciales à l’heure actuelle aux États-Unis. Ce nombre a considérablement diminué depuis une vingtaine d’années en raison des faillites et des fusions. Le montant de leurs actifs dépasse les 11 milliards de dollars.
Il est courant de classer les banques commerciales en fonction de l’importance de leurs activités, ce qui peut aboutir à la classification suivante :
– les community banks dont l’actif est inférieur à un milliard de dollars et qui sont spécialisées dans les activités de banques à réseau ou de détail (retail or consumer banking) : octroi de garanties et de prêts à la consommation… Elles représentent environ 90 % du nombre de banques mais seulement 10 % des actifs détenus par celles-ci ;
– les wholesale banks dont le total de l’actif est supérieur à un milliard de dollars et qui ont une activité de banques de gros : prêts à la consommation et à l’habitat, prêts aux activités industrielles et de services (C&I loans). Elles ont une activité régionale (regional banks), pluriré-gionale (superregional banks) ou nationale. Elles ont accès au Federal Funds Market. Les plus grandes banques possèdent à leur passif une proportion importante de fonds empruntés et leur activité est indépendante du montant des dépôts reçus. En outre, leurs sièges sociaux se trouvent dans les grands centres financiers comme New York et Chicago et leurs ressources proviennent des marchés financiers américains ou étrangers. Elles ont un rôle déterminant sur le marché des changes. On retrouve les noms bien connus de l’industrie bancaire, Bank of New York, Deutsche Bank, CitiGroup, JP Morgan, Chase et HSBC North America. L’ensemble de ces banques représente 7 % du nombre de banques du pays et possède près de 88 % des actifs de l’industrie.
Il convient également de mentionner ici l’existence des banques industrielles (industrial banks). Il s’agit de sociétés de prêts à agrément étatique non soumises à la réglementation du Fed, instau-rées au début du XXe siècle pour offrir des crédits à la consommation aux ouvriers (blue-collar workers). Il n’en reste que quelques-unes.

L’organisation des banques commerciales

On distingue souvent :
– les correspondants (correspondant banks) qui sont des banques possédant un compte dans chacune d’elles. Elles sont très utilisées pour les opérations de change ;
– les bureaux de représentation (representative offices) qui assistent les clients dans une région ou dans un État et qui sont ouverts par la maison-mère ;
– les agences bancaires à l’étranger (foreign branchbanks) qui agissent comme une banque locale mais sont soumises aux lois du pays de la maison-mère, c’est-à-dire ici le Federal Reserve Act et la Federal Reserve Regulation K. En revanche, elles ne sont pas soumises aux obligations américaines de constitution de provisions auprès de la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC). Les banques étrangères sont soumises à l’International Banking Act of 1978. Elles doivent respecter la réglementation du Fed et constituer des réserves ainsi que respecter le Fed Reserve Requirements on Deposits ;
– les filiales de banques étrangères. On distingue les subsidiary banks, qui sont des banques locales détenues minoritairement par une banque étrangère, et les affiliate banks dont le capital est détenu majoritairement par la banque étrangère. Dans tous les cas, elles sont soumises à la législation américaine. Les filiales de banques étrangères se trouvent surtout en Californie, en Floride, en Géorgie, en Illinois (Chicago) à New York et au Texas ;
– les Edge banks du nom du sénateur Edge qui fit voter la loi correspondante : ce sont des filiales de banques agréées (federally chartered subsidiaries of US banks) implantées aux États-Unis et autorisées à assurer la totalité des activités internationales assurées par une banque. Ces banques doivent se trouver dans un État différent de celui de la maison-mère de façon à échapper à l’Interstate Branch Banking Regulation. Elles sont autorisées à acquérir une partie du capital des entreprises. Dans la pratique, c’est par leur intermédiaire que les banques commerciales peuvent acquérir des participations dans celles-ci ;
– les centres bancaires off-shore (off-shore banking centers) : ce sont des États où le système bancaire est tel que l’activité des banques étrangères dépasse largement les besoins normaux de l’État. C’est le cas de l’État du Delaware ;
– l’International Banking Facility IBF de 1981 : une IBF est un ensemble de comptes d’actifs et de passifs qui ne figurent pas dans les livres de la banque mère (set of assets and liabilities accounts that are segregated on the parent’s books). Une IBF agit comme une banque étran-gère, elle n’est pas soumise à la législation sur les réserves ou aux obligations de l’Organisation fédérale de garantie des dépôts (Federal Deposit Insurance Corporation FDIC) (voir III). Elle reçoit des dépôts des seuls citoyens non américains et ne peut octroyer des prêts qu’à des étrangers.

Les organismes assurant la règlementation

On dénombrait en 2010 quatre organismes chargés de la réglementation, nombre jugé souvent excessif mais que la loi de juillet 2010 a laissé inchangé.
■ L’Organisation fédérale de garantie des dépôts (Federal Deposit Insurance Corporation FDIC) L’Organisation fédérale de garantie des dépôts a été créée en 1933 après la vague de faillite des banques au début des années 1930. C’est une agence indépendante du gouvernement fédéral dont le siège se trouve à Washington DC. Elle est dirigée par un conseil d’administration de cinq membres nommés par le président des États-Unis et confirmés par le Sénat. L’organisation assure les dépôts des particuliers (deposits), à concurrence de 250 000 dollars, auprès des banques commerciales et des institutions d’épargne, ce qui représente un ensemble de 5 250 institutions environ. Depuis 2008, elle garantit jusqu’à 1 400 milliards de dollars de dettes des institutions financières du pays, ce qui élargit sa gamme d’activités. En revanche, elle n’assure pas les fonds de placement décrits dans le chapitre suivant.
Ses ressources sont les primes reçues et des revenus provenant des investissements en valeurs du Trésor. Par ailleurs, la FDIC gère un fonds d’assurance des dépôts (Deposit Insurance Fund). Elle effectue des contrôles et est habilitée à agir en tant que liquidateur en cas de faillite d’une banque.
La FDIC contrôle la Resolution trust Corporation(RTC), une agence chargée de la liquidation des savings and loans associations défaillantes, et la Savings Association Insurance Fund (SAIF) qui assure les sociétés d’épargne dont nous reparlerons par la suite.
■ L’Office du contrôleur de la monnaie (Office of the Comptroller of Currency -OCC)
Il fut créé en 1864 pendant la guerre de sécession (Civil War) (1861-1865) par le National Currency Act pour assurer la supervision des banques nationales et des filiales des banques étran-gères. C’est un bureau indépendant du Département du Trésor (US Departement of the Treasury) dont le siège se trouve à Washington DC et qui possède quatre offices régionaux à New York, Chicago, Dallas et Denver. Il autorise l’ouverture et la fermeture des banques nationales et est habilité à vérifier si elles respectent effectivement la réglementation bancaire. Il bénéficie d’ailleurs depuis 2003 d’un droit de préemption sur l’acquisition, en cas de cession, des banques et de leurs filiales. Il peut s’opposer aux fusions entre des banques. La loi de 2007 a accru ses pouvoirs en lui confiant la surveillance des banques nationales au détriment des États qui en étaient chargés. Il faut cependant ajouter que les banques peuvent échapper au contrôle de l’OCC en se faisant agréer (to charter) uniquement par un État. Les banques agréées par les États (state-chartered banks) sont en général soumises à une réglementation plus souple que celle émise par l’État fédéral. De cette possibilité de choix résulte la particularité du système bancaire aux États-Unis, la dualité (dual banking system). Certaines banques, environ 1 700 (23 %), sont des banques à agré-ment fédéral (nationally chartered banks) comme CitiBank. Les autres, environ 5 700, sont des banques agréées par un État de l’Union (state chartered banks).
■ Le Système de réserve fédérale des États-Unis (Fed)
Toutes les banques ayant un agrément fédéral (nationally chartered banks) sont membres du Federal Reserve System et soumises aux obligations émises au niveau fédéral.
La description des organismes de contrôle serait incomplète sans la mention de l’existence relative-ment brève d’une agence fédérale, l’Agence de supervision de l’épargne (Office of the Thrift Supervision -OTS). Elle avait été créée en 1989 et était placée sous l’autorité du département du Trésor. Ses ressources provenaient des banques et des associations d’épargne fédérale (federal savings association, federal savings banks) dont elle exerçait la surveillance. La loi de 2010 la fait fusionner avec l’OCC, le législateur ayant voulu simplifier le contrôle du système bancaire et ayant jugé son fonctionnement insuffisant. Cependant, la loi maintient l’autorisation, pour les petites banques seules, de choisir l’agence qui les contrôle, ce qui garantit l’existence future de l’OTS.
La loi de 2010, sans revenir sur la convergence des activités des banques et reprendre la philoso-phie de la loi Steawell-Glass de 1933, instaure néanmoins la scission de certaines activités des banques : elles ne sont plus autorisées à faire du trading pour leur propre compte sauf si elles investissent aux côtés d’un client. Elles ne pourront prendre des participations dans les fonds d’investissement et dans les fonds alternatifs que dans la limite de 3 % de leurs fonds propres durs (Tier-1) ; elles ne pourront excéder 3 % du capital du fonds. Elles devront enfin filialiser les activités dans les dérivés les plus risqués et conserver 5 % des crédits titrisés dans leurs bilans.
■ Le contrôle par les États, l’exemple du New York State Banking Department
Enfin, les États assurent la surveillance des banques agréées par eux en fonction le leur propre législation. Il existe dans chaque État une autorité d’agrément et de contrôle des banques agréées par ce dernier. La plus connue est le New York State Banking Department. La Conférence des contrôleurs bancaires étatiques (Conference of State Bank Supervisors) est un forum de discus-sion entre ces derniers. Toute banque peut changer de statut et demander à être agréée par l’OCC. Elle s’attache à la protection du corps social en général de façon à en maintenir la cohésion et, surtout, la confiance dans le système. La loi Dodd-Frank a confirmé cette orientation. Elle prend en compte deux aspects : la protection directe des prêteurs et des emprunteurs contre le risque de faillite des banques, essentiel depuis la crise de 1929, et la réglementation des activités des banques, qui assure une protection indirecte des premiers. Enfin, l’adhésion du pays à l’Associa-tion de libre-échange nord-américain (ALENA) entraîna la mise en place de certaines dispositions.
■ La protection des prêteurs et des emprunteurs contre le risque de faillite
Elle prend en compte six points :
– les banques doivent diversifier leurs investissements. Elles ne doivent pas effectuer des prêts d’un montant supérieur à 10 % de leur capital social à un même emprunteur. Elles doivent également conserver leur ratio Capitaux propres/Actifs risqués à un niveau satisfaisant. Les banques doivent constituer une provision auprès du Deposit Insurance Fund mentionné au paragraphe précédent. Elles sont sujettes à une surveillance particulière et régulière de la part du FDIC ;
– la réglementation de la quantité de monnaie en circulation : le Fed impose le respect de ratios relatifs au pourcentage des réserves en liquidités à conserver (cash reserves) par rapport aux dépôts (deposits). Les banques acceptent de conserver ces réserves, même si elles ne sont pas rémunérées, de façon à faire face aux besoins de leurs clients ;
– la réglementation relative à la distribution du crédit : la législation vise à favoriser l’octroi de prêts à des secteurs économiques importants tels que l’agriculture ou le bâtiment. De nombreux États imposent des taux d’intérêt maxima pour les prêts à ces secteurs économiques ;
– la protection des consommateurs : elle est en partie assurée par le Community ReInvestment Act de 1977 et par le Home Mortgage Disclosure Act de 1975 qui interdit aux banques commerciales d’effectuer tout type de discrimination fondé sur l’âge, le sexe, la race et le revenu pour accorder des prêts. La loi de 2010 prévoit la création d’un organisme au sein du Fed (Bureau of Consumer Financial Protection) de protection des consommateurs et des investis-seurs pour éviter les abus en matière de prêts et de ventes de produits financiers. Cette activité était auparavant décentralisée au sein de divers régulateurs ;
– la protection des investisseurs : elle concerne le délit d’initié, l’information à fournir aux inves-tisseurs et le rôle des banques face aux fonds d’investissement et aux fonds de pension ;
– la création des banques : diverses lois réglementent les ouvertures de banques en imposant des restrictions aux activités exercées par d’éventuels nouveaux entrants dans le secteur.
■ La réglementation des activités bancaires

La loi de 1933

La loi Glass-Steagall de 1933 imposait une séparation stricte entre les activités commerciales (dépôts et prêts) et les activités d’investissement des banques : souscription, émission et vente des titres. Elle admettait cependant des exceptions qui permettaient aux banques commerciales d’assumer, sous certaines conditions, des fonctions théoriquement réservées aux banques d’investissement.

L’évolution durant les années 1970

Diverses lois votées à la fin des années 1970 et durant les années 1980 (Deregulation and Mone-tary Control Act of 1980, Competitive Equality Banking Act of 1987…) ainsi que la loi Riegle-Neal
CHAPITRE 2 – Les banques commerciales 39
de 1994 assouplirent la loi de 1933 en autorisant les banques américaines et étrangères à conso-lider les bilans de leurs filiales détenues dans d’autres États de l’Union et à acquérir des banques dont le siège social se trouvait dans un État autre que celui de l’acquéreur.

L’abrogation de la loi de 1933

Finalement, la distinction perdit toute son importance pratique en 1997 lorsque le Fed et l’OCC autorisèrent les banques commerciales à acquérir des banques d’investissement ; il en résulta une série de fusions. Le Financial Services Modernization Act of 1999 (ou Gramm-Leach-Blilet Act) annula formellement la loi de 1933 en supprimant la distinction entre les deux catégories de banques. En outre, elle autorisa les compagnies d’assurance à fonder des banques commerciales et les banques d’investissement à ouvrir des filiales spécialisées dans les assurances. Elle autorisait également les banques commerciales à investir pour une durée limitée dans les sociétés non finan-cières sous réserve de ne pas participer à leur gestion. Les dénominations subsistent néanmoins.
■ Le rôle de l’Organisation fédérale de garantie des dépôts (Federal Deposit Insurance Corporation-FDIC)
La FDIC a pour objectif la préservation de la confiance des Américains dans leur système financier. Les primes versées au fond par les banques varient en fonction de leur notation effectuée en prenant en compte six variables résumées dans l’acronyme CAMELS (Capital adequacy, Asset Quality, Management, Earnings, Liquidity, Sensitivity to Market Risks) ainsi que la valeur prise par cinq ratios financiers depuis le vote du Federal Deposit Insurance Reform Act of 2005.
La note octroyée à chaque variable varie entre 1 et 5. La note 1 s’applique aux institutions les mieux gérées, la note 5 à celles ayant une probabilité élevée de se trouver en situation de faillite. Le montant de la prime versée s’élevait à 23 cents par 100 dollars de dépôt pour les institutions notées 1 et de 31 cents pour celles notées 5.
■ Les contraintes internationales
Les institutions financières américaines devraient respecter le contenu des accords de Bâle II. L’application avait été reportée à 2009 en raison de divergences entre le Federal Reserve System et plusieurs grandes banques. En attendant l’approbation des accords de Bâle III, les contraintes relatives à la solvabilité continuent d’être définies par le FDIC Improvement Act (FDICIA) de 1991.
La signature de l’accord de libre-échange nord-américain (ALENA) en 1994 et les attentats du 11 septembre 2001 ont provoqué un durcissement de la législation relative aux banques afin de lutter contre le blanchiment de l’argent sale (money laundering) et le financement des activités terroristes. Le US Patriot Act of 2001 interdit aux banques américaines de fournir des services aux banques dites fictives (shell banks), c’est-à-dire qui n’ont pas de siège social dans un pays. Il donne également aux autorités fédérales le pouvoir de citer à comparaître des banques américaines correspondantes de banques étrangères et de présenter les documents comptables suspects. Il oblige également les banques à améliorer leur contrôle sur l’origine de fonds déposés auprès d’elles.
L’accord de Bâle II n’a guère été appliqué pour plusieurs raisons :
– sa mise en place relève de plusieurs organismes, le Federal Reserve System, la FDIC et l’OCC, qui se trouvent souvent en opposition. Une proposition de mise en application (Notice of Proposed Rulemaking) fut rédigée en 2006 ;
– les accords de Bâle II s’appliquaient aux principales banques ou filiales de banques, ce qui les mettait en difficulté par rapport aux autres banques, en particulier les banques étrangères.
Les accords de Bâle II devaient être mis en application en 2009. Les accords de Bâle III doivent leur succéder et il est probable que leur mise en place sera longue.

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