LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA VENTE D’IMMEUBLE
LA VENTE D’IMMEUBLE, PERMETTANT DE CONCILIER LES INTERETS DES DIFFERENTES PARTIES EN CAUSE
La formation du contrat de vente d’immeuble obéit au régime de droit commun, bien quelle soit assortie de spécificités, propres au droit immobilier. La convergence des intérêts patrimoniaux des parties au contrat s’appréhende d’abord, par le biais de la conclusion de contrats préparatoires à la vente elle-même (Chapitre I), puis par la conclusion de l’acte définitif de vente (Chapitre II). Chapitre I : La conclusion en amont de contrats préparatoires, gage de réussite de l’opération Pour que les parties puissent aboutir à un accord sur le bien à vendre, elles peuvent opter, soit pour un avant-contrat (Section I), sorte de pourparlers contractuels en vue de préparer la conclusion d’un contrat définitif ; soit opter pour des conventions accessoires mais utiles aux parties, répondant à des besoins spécifiques (Section II).
Section 1ère : Le rôle accru de la volonté des parties dans le choix d’un avantcontrat
Il conviendrait tout d’abord, avant de se pencher sur la question, d’évoquer que le contrat se forme progressivement. En effet, à la lumière des enseignements tirés de la doctrine, le contrat se forme par « couches successives », ou encore « point par point »7 sur tels éléments de la convention. Ainsi, la vente obéirait préalablement à la rencontre d’une offre et d’une acceptation, seulement ni l’offre, ni l’acceptation sont des avant-contrats. A cet égard, les articles 81 et 7 A.Rieg : « La punctation, contribution à l’étude de la formation progressive du contrat », in mélanges Jauffret, LGDJ 1974. 5 suivants de la loi sur la Théorie Générale des Obligations régissent cette question. Mais il faudrait dépasser le simple cadre du droit commun pour révéler certaines spécificités du droit immobilier. Pour illustrer le propos, il existe une offre de vente, où le vendeur propose à une personne déterminée ou indéterminée, en faisant paraître dans un journal le bien à vendre ; ou encore en recourant au service d’un professionnel de l’immobilier. Bien que l’offre soit en principe rétractable (tant qu’elle n’est pas acceptée), elle ne l’est plus si l’offrant s’est engagé à la maintenir dans un certain délai8 . Aussi, le bien, objet de la vente, et son prix doivent être déterminés ou déterminables. Dans le même ordre d’idée, l’offre d’achat est un pourparler contradictoire : l’acquéreur propose une offre de prix au vendeur. Elle obéit au même régime que l’offre de vente, mais s’en différencie par son contenu moins exhaustif. Après ce préalable non négligeable et nécessaire, il nous faudrait s’attarder sur les promesses de contrat, qui permettront aux parties d’exprimer leur volonté afin d’aller de l’avant dans cette phase contractuelle. §1- Promesse unilatérale d’Achat : flexibilité du choix d’un acquéreur par le vendeur Avant d’examiner le bien fondé de cet avant-contrat par rapport à l’opération, il nous semble nécessaire d’évoquer son fondement, son contenu et son régime. A. Appréhension de la notion de promesse unilatérale d’achat par le prisme du droit commun des contrats 1. Fondement Curieusement, la loi sur la TGO n’envisage pas les promesses de contrat, car l’intention du législateur malgache était de limiter la sphère d’autonomie dont pourrait disposer les parties quant à la faculté d’exprimer leur choix, sur tel ou tel avant-contrat qui leur conviendrait le plus, 8 Civ, 3e , 25 mai 2005 Bull civ III, n°117 6 et ce, afin d’éviter éventuellement une trop grande complexité des opérations contractuelles. Ainsi, il faudrait se référer à certains articles du code civil français. La promesse unilatérale d’achat est un contrat par lequel, le promettant s’engage à acquérir un bien ; le propriétaire vendeur disposera alors d’un certain délai, et la discrétion de lui vendre la chose. Cette définition fait transparaître que la promesse est un véritable contrat, car faisant naître des obligations, dont le non respect, serait source de responsabilité. Dans le même ordre d’idée, dans ce contexte, une seule partie s’oblige tandis que l’autre conserve toute latitude pour s’engager ou non. Ainsi appliquée à la vente immobilière, le promettant acheteur s’engage à acquérir le bien, tandis que le propriétaire vendeur dispose d’un certain délai pour se prononcer sur la vente.
- Eléments du contrat
La promesse unilatérale d’achat, bien qu’elle soit un contrat, n’en demeure pas moins unilatérale, car seul le promettant-acquéreur s’oblige à acquérir, tandis que le propriétaire bénéficie d’un droit d’option à l’issu duquel il doit se prononcer.
Accord des parties : traduction de l’autonomie de la volonté
Par la force de l’autonomie de la volonté, le promettant-acquéreur s’engage à acquérir le bien. Sur ce point, deux précisions méritent d’être évoquées : d’une part, la partie qui s’engage doit avoir la capacité requise. Ainsi, le domaine de l’incapacité, en général, recouvre : l’incapacité de protection, qui protège certaines personnes présumées incompétentes, en raison de leur âge (mineur) ou de leur faculté (aliéné). Le mineur ne pourra pas s’engager à acquérir ; l’incapacité de jouissance 9 qui prive l’incapable de certains droits ou de certaines activités juridiques, interdit par voie de conséquence, tout acte d’administration sur ses biens ; l’incapacité 9 Article 1123 et suivants du code civil 7 d’exercice, par contre, prive l’incapable d’agir. Cette impossibilité n’interdit cependant pas la mise en œuvre de ce droit, mais impose, pour reconnaître sa validité, la représentation de l’incapable dans certains actes. D’autre part, le promettant-acquéreur disposerait – du moins en droit français- d’un droit de rétractation ou d’un délai de réflexion . Le droit de rétractation, est le droit absolu pour le promettant de remettre en cause le contrat, et de revenir sur sa décision de s’engager à acquérir. Cette prérogative, ne peut cependant être utilisée qu’une seule fois : Pour illustrer le propos, si dans le cadre d’une promesse unilatérale d’achat sous seing privée, le promettant exerce son droit de rétractation, il ne peut plus l’exercer dans l’acte authentique de vente. Par ailleurs, si le promettant s’est rétracté, il ne peut plus revenir sur sa rétractation , et s’il souhaite toujours acquérir le bien, il doit conclure une nouvelle promesse. Aussi, la mise en œuvre de ce droit, suppose logiquement la notification du contrat à l’acquéreur, et le promettant exercera son droit dans un délai de 7 jours. Notons que le bénéficiaire de la promesse doit être informé de cette décision. Parallèlement, on remarque une certaine analogie entre le délai de réflexion et le droit de rétractation ; cependant, le délai de réflexion s’opère avant la signature de l’acte définitif de vente. Mais, si un droit de rétractation a été déjà exercé au stade de la promesse unilatérale, le délai de réflexion ne peut plus être exercé au stade du contrat définitif. C’est dire que ces deux prérogatives du promettant-acquéreur ne peuvent jouer cumulativement.
Le droit d’option du bénéficiaire vendeur
Cette prérogative du bénéficiaire s’exerce, soit à travers la levée d’option où le vendeur accepte la vente ; soit à travers la renonciation à la vente. Il conviendrait d’envisager distinctement ces deux hypothèses. D’une part, si le bénéficiaire lève l’option, la promesse unilatérale devient synallagmatique. L’option n’obéit pas à des conditions de formes particulières et se peut se prouver par tout moyen. D’autre part, si le bénéficiaire ne lève pas l’option, la promesse devient caduque. Il faudrait noter qu’à travers la position de la jurisprudence , que la levée d’option irrégulière ou non conforme aux stipulations contractuelles ne rend pas la promesse caduque, si ce délai d’option n’est pas expiré. le juge voulant préserver l’économie du contrat, en évitant tout litige éventuel sur le remboursement des sommes d’argent versées (à titre de garantie au profit du promettant acquéreur). Quant au délai d’option, le rôle de l’autonomie de la volonté y trouve son compte, car ce délai peut être conventionnellement fixé par les parties. On préconise souvent qu’il ne peut être supérieur à 18 mois, car un délai d’option supérieur à 18 mois, serait jugé trop long et inopportun. Il faut noter, que le droit malgache et le droit français adoptent la même limite temporelle, quant à la durée de l’exercice de l’option. Par ailleurs, si les parties n’arrivent pas d’un commun accord à fixer le délai d’option, la jurisprudence permet au bénéficiaire d’opter dans un délai raisonnable que le juge détermine . Mais ne serait-ce pas trop excessif de confier cette prérogative au bénéficiaire vendeur (s’il est un professionnel) face à un acquéreur (non professionnel) en position de faiblesse ? Enfin, le point de départ de l’option coïncide souvent avec la date de conclusion de la promesse unilatérale. 3. Régime juridique Dans le cadre d’une promesse unilatérale d’achat, le promettant acquéreur a le privilège de recevoir une somme d’argent versée par le bénéficiaire vendeur à l’occasion de l’exécution de la promesse. Il s’agit d’un « dépôt de garantie ». Sur cette question, il conviendrait de nuancer les positions divergentes entre le droit malgache et le droit français. En effet, le droit malgache conserve toujours l’application de ce dépôt de garantie, et même, si le bénéficiaire ne lève pas l’option, le promettant conserve les sommes en numéraire versées. Alors que le droit français, soucieux d’un certain ordre public de protection et voulant préserver un certain équilibre contractuel pécuniaire, a supprimé cette pratique depuis 200015. Le nouveau code civil français y va dans le même sens : notamment, l’article 1589-1 stipule : « est frappé de nullité tout engagement unilatéral souscrit en vue de l’acquisition d’un bien ou d’un droit immobilier pour lequel il est exigé ou reçu de celui qui s’engage un versement, quelle qu’en soit la cause et la forme ». Le champ d’application de cet article semble étendu, car touche tout type de bien immeuble, quel qu’en soit la destination ou la qualité des parties (professionnels ou particuliers). 13 Article 123 LTGO 14 Civ 3ème, 24 avril 1970, Bull civ III, n° 279 15 Loi française n° 2000-1208 du 13/12/00, relative à la solidarité et au renouvellement urbain 9 Outre ces questions, qu’en est-il de l’exécution de la promesse ? Nous avons déjà évoqué un peu plus haut, que la promesse unilatérale se transforme en promesse synallagmatique lors de la levée d’option. Il semble logique que les parties prennent respectivement la qualité de vendeur et d’acquéreur. Par ailleurs, certaines difficultés peuvent surgir : si le promettant acquéreur ne respecte pas son engagement avant la levée d’option, il engage sa responsabilité et allouera des dommages et intérêts. Après la levée d’option, il devra s’exécuter en nature ou par équivalent. D’autres difficultés peuvent apparaître quant à l’application de la théorie des risques et à la disparition de l’immeuble. En effet, on applique la règle res perit domino : les risques sont supportés par le propriétaire de l’immeuble ; si ce dernier venait à disparaître à la suite d’un événement de force majeure, le propriétaire doit en supporter la perte. Appliquée à la promesse unilatérale, si l’immeuble est détruit, la promesse devient alors caduque. A la lumière de ces propos, il conviendrait d’analyser le bien fondé d’ordre pratique de cette promesse, qui conditionnera le succès de la vente immobilière
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