LES ANTI MIGRAINEUX

LES ANTI MIGRAINEUX

Physiopathologie de la migraine

Peu d’affections ont donné lieu à autant d’hypothèses physiopathologiques que la migraine. La diversité de sa présentation clinique et des facteurs déclenchant des crises, jointe à la multiplicité des anomalies biologiques ou fonctionnelles décrites chez les migraineux ont donné lieu à une vingtaine de « théories» de la migraine : théories vasculaires, neuronales, alimentaires, mitochondriales, hormonales, etc. Cette époque est maintenant révolue car nul ne conteste qu’il existe à la fois au cours des crises de migraine des modifications du débit sanguin cérébral, un dysfonctionnement cellulaire neuronal et extra-neuronal (plaquettes et mastocytes), un dysfonctionnement sub-cellulaire, notamment mitochondrial et enfin l’implication de nombreuses molécules telles que la sérotonine, les neuropeptides vaso-actifs, l’histamine, le monoxyde d’azote, la dopamine, les acides aminés neuroexcitateurs, etc. Les avancées les plus importantes dans la compréhension de la physiopathologie des crises sont venues des études du débit sanguin cérébral et du développement chez l’animal d’un modèle de céphalée migraineuse: l’inflammation neurogène (7,22). 1- La théorie vasculaire : La céphalée migraineuse est la conséquence de la vasodilatation artérielle méningée avec activation secondaire des afférences nociceptives qui empruntent le nerf trijumeau, alors que l’aura s’explique par une vasoconstriction intracrânienne consécutive à la libération de la sérotonine à partir des plaquettes sanguines (3,100). 2- La théorie neuronale : Les études de débit sanguin cérébral (DSC), durant l’aura migraineuse retrouvent une hypo-perfusion, pouvant aller de 20% à 40% de réduction du DSC. La description la plus précise du déroulement temporal et spatial de cette hypo-perfusion provient des études de l’équipe d’Olesen (13,41). L’hypo-perfusion apparaît dans la partie toute postérieure de l’hémisphère, dans le cortex visuel (exceptionnellement dans le cortex frontal), avant même le début des troubles cliniques. Elle progresse ensuite lentement vers l’avant, à la convexité du cerveau, à une vitesse de 2 à 3 mm/min (7,13). Depuis longtemps également avait été observée une remarquable analogie entre la vitesse de propagation corticale de l’aura migraineuse calculée à partir de l’évolution du scotome scintillant et celle de la dépression corticale propagée (spreading dépression) de Léao, phénomène neuronal décrit chez l’animal en 1944, et qui consiste à stimuler un noyau précis du tronc cérébral, le locus coeruleus (le principal noyau noradrénergique), ce qui réduit le débit cérébral ipsilatéral du chat d’environ 20% par l’intermédiaire d’un mécanisme lié aux adrénorécepteurs. La réduction étant maximale au cortex occipital, permet d’expliquer la phase de l’aura migraineuse par perturbation vasculaire induite par des projections neuronales du tronc cérébral (3, 13, 22). Cette théorie neuronale ne peut à elle seule expliquer les différents phénomènes observés lors de la migraine. Pour expliquer la céphalée ellemême c’est l’hypothèse proposée par Moskowitz de l’inflammation neurogène des vaisseaux méningés, qui semble actuellement la plus pertinente (86).

La théorie neuro-vasculaire 

Moskowitz et Al ont proposé un modèle susceptible de rendre compte de la céphalée migraineuse : l’activation du système trigéminovasculaire. Chez l’animal, la stimulation antidromique des fibres de la branche ophtalmique du nerf du trijumeau, qui innervent les artères du cercle de Willis et leurs branches, provoque une libération de neuropeptides vasoactifs, en particulier le neuropeptide Y, la substance P, les tachykinines et le CGRP (calcitonine gene-related peptide), responsables d’une inflammation neurogène au niveau des méninges. Elle se traduit par une vasodilatation artérielle, une extravasation de protéines plasmatiques et de substances à l’origine d’une dégranulation mastocytaire. Cette inflammation neurogène est susceptible de stimuler de façon orthodromique les fibres de trijumeau. L’activation du tractus solitaire serait à l’origine des nausées et des vomissements et celle des voies thalamaocorticales à l’origine des phénomènes douloureux (22, 41). Les récepteurs sérotoninergiques sont étroitement impliqués dans le phénomène. La stimulation du récepteur 5-HT1D alpha, localisé sur les terminaisons nerveuses du trijumeau, entraîne le blocage de la libération neuronale de neuropeptides responsables de l’inflammation neurogène ; en revanche la stimulation du récepteur 5HT1D bêta, localisé sur les muscles lisses des vaisseaux, entraîne une vasoconstriction (41, 59). Le système nerveux central est également riche en récepteurs sérotoninergiques, en particulier dans les structures du contrôle endogène de la douleur. Les récepteurs 5HT1 sont à ce niveau des inhibiteurs de la transmission de la douleur, les 5HT2 des excitateurs (22). 15 Le monoxyde d’azote (NO), présent dans les fibres sensitives du trijumeau, jouerait un rôle dans le déclenchement de la crise de migraine en se liant à la guanylatecyclase des muscles lisses des artères. En mettant en jeu les récepteurs NMDA (N-méthyl-D-aspartate), la dépression corticale propagée stimule le système trijuminovasculaire et favorise la formation de NO (87). D’autres anomalies biochimiques et cellulaires ont été retrouvées chez le migraineux : une diminution de la concentration du magnésium dans le cerveau, une hyperactivité noradrénergique, des anomalies plaquettaires et une augmentation du taux des acides aminés excitateurs dans le sang. Il reste difficile de proposer une conception d’ensemble de la physiopathologie de la maladie migraineuse (17). Elle consisterait en une susceptibilité cérébrale anormale, responsable du déclenchement répétitif des crises. Ce «seuil migrainogène bas» pourrait être lié à une prédisposition génétique, à une hyperexcitabilité corticale, ou à l’existence encore hypothétique de centres générateurs des crises au niveau du tronc cérébral (59). 16 Chapitre IV : Etiologie de la migraine 1- Migraine et hérédité : Le caractère familial de la migraine était connu depuis longtemps mais ce n’est que très récemment que cette affection est entrée dans le champ de la recherche génétique (22). Cette recherche est rendue difficile du fait de certaines caractéristiques tenant compte de l’affection elle-même : variabilité clinique de la migraine, absence de marqueur diagnostic, prévalence élevée, rôle considérable des facteurs d’environnement. Les recherches ont débuté par l’étude d’une forme rare de migraine, la migraine hémiplégique familiale (MHF) qui possède un mode de transmission autosomique dominant et dont un premier gêne responsable a été localisé sur le chromosome 19 en 1993 puis identifié en 1996. Il code pour une sous-unité d’un canal calcique (CACNL 1 A4) qui s’exprime dans les neurones de certaines régions du cerveau et du cervelet. D’autres mutations de ce même gène sont responsables d’au moins deux autres affections neurologiques, l’une évoluant également par crises ; l’ataxie cérébelleuse paroxystique, l’autre évoluant de façon progressive l’ataxie cérébelleuse permanente. Les mutations faux-sens observées dans la migraine hémiplégique familiale touchent des régions impliquées soit dans la sélectivité du canal calcique, soit dans sa sensibilité potentielle, Il en résulte vraisemblablement un dysfonctionnement du canal qui pourrait interférer avec le contrôle de la libération de neuromédiateurs synaptiques. Ce gène est impliqué dans 60% des familles de MHF ; un autre gène impliqué dans 20% a été tout récemment localisé sur le chromosome1, ce qui 17 signifie que dans 20% des cas, le gène n’est localisé ni sur le chromosome19 ni sur le chromosome1 (22, 38). Il y a donc pour la seule MHF au moins 3 gènes dont il serait important de savoir s’ils codent tous pour des protéines de canaux ioniques et s’ils sont impliqués dans les autres formes de migraine, L’identification des gènes de la migraine, et l’élucidation des mécanismes qui conduisent des mutations observées aux divers phénotypes migraineux sont des voies de recherche essentielles pour comprendre la physiopathologie de la migraine et des autres affections dues à l’altération de ces mêmes gènes ainsi que pour améliorer le traitement de ces maladies (22, 59).

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Facteurs déclenchants

L’écoute des migraineux, l’utilisation de questionnaires systématisés incriminent divers facteurs comme favorisant la survenue ou la fréquence des crises. L’identification et l’élimination de ces facteurs pourraient, théoriquement, être un élément efficace au long cours sur le plan thérapeutique pour diminuer la fréquence des crises. De plus, une telle approche thérapeutique aurait l’avantage de ne pas mettre en œuvre de médicaments (7). Pradalier (1996), à partir de 294 réponses à 500 questionnaires adressés aux patients, note le rôle du stress dans 68% des cas, des règles dans 62%, de la fatigue dans 35%, du jeûne dans 8%, des boissons alcoolisées dans 54%, des aliments gras ou fruits dans 29% des cas .:

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : Données générales sur la migraine
Chapitre I : Rappels anatomiques
Chapitre II : Généralités
1. Historique
2. Eléments de définition
3. Epidémiologie
Chapitre III : Physiopathologie de la migraine
1. La théorie vasculaire
2. La théorie neuronale
3. La théorie neurovasculaire
Chapitre IV : Etiologie de la migraine
1. Migraine et hérédité
2. Facteurs déclenchant
Chapitre V : Etude clinique de la migraine
1) La phase pré céphalalgique
2) La phase céphalalgique
3) La phase post céphalalgique
Chapitre VI : La classification de la migraine
1. La Classification internationale de la migraine
a) La migraine sans aura
b) La migraine avec aura
c) La migraine ophtalmoplégique
d) La migraine rétinienne
e) Les syndromes périodiques de l’enfance
f) Les complications de la migraine
2. Les autres formes de la migraine
a) La migraine de l’enfant
b) La migraine cataméniale .
3. Les autres complications de la migraine
4. Le diagnostique de la migraine
a) Critères de diagnostic de la migraine (IHS)
b) L’interrogatoire
c) Les examens complémentaires
 l’électroencéphalogramme
 La thermographie
 Le test au Péribrédil
 Les autres examens complémentaires
d) Diagnostic différentiel
DEUXIEME PARTIE : Aspects thérapeutiques
Chapitre I : les antimigraineux
1. La Prise en charge du migraineux
2. Les Modalités du traitement de la migraine
a) Le traitement de la crise
b) Le traitement de fond
3. La Classification des antimigraineux
a) Les antimigraineux de la crise
b) Les antimigraineux du traitement de fond
4. La Pharmacologie des antimigraineux
a)Les antimigraineux de la crise migraineuses
a-1) Les antalgiques
-Le paracétamol
-L’aspirine
a-2) Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)
a-3) Les dérivés de l’ergot de seigle
-L’ergotamine
-Dihydroergotamine
a-4) Les triptans
-Les sumatriptans
-Les autres triptans
 Zolmitriptan
 Naratriptan
a-5) Les autres médicaments de la crise : les adjuvants
-La caféine
-Les anxiolytiques
-Les antiémétiques
b) Les médicaments de fond de la migraine
b-1) Les bétabloquants
b-2) Les stabilisants
-Les Dihydroergotamines
-Les clonidines
-Les inhibiteurs calciques
b-3) Les antimigraineux interférant avec les amines biogènes
-Les antiserotoninergiques
 Les méthysérgide
 Les pizotiféne
 L’oxétorone
 La cyprohéptadine
-Les anti-histaminiques
b-4) L’indoramine
b-5) Les inhibiteurs de l’agrégation plaquettaires
b-6) Les anti-inflammatoires non stéroïdiens
b-7) Les antidépresseurs, anxiolytiques
-Les antidépresseurs tricycliques
-Le lithium
b-8) Les antiépileptiques
b-9) Les œstrogènes
Chapitre II : Les traitements non médicamenteux
1. La médecine douce de la crise migraineuse
2. La phytothérapie et l’aromathérapie
3. l’homéopathie
4. Les cures thermales
5. Traitement à visée psychothérapique
Conclusion
Références bibliographiques

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