Les anasheed l’importance des chants pour amplifier les émotions du spectateur

Les anasheed l’importance des chants pour amplifier les émotions du spectateur

L’islam tel que pratiqué par les courants les plus radicaux du salafisme interdit l’écoute et la pratique de la musique instrumentale417. La musique est définie classiquement par la 417 Pamart Lina, « L’Etat Islamique, la musique et la guerre », Inflexions, 2017/2, n°35 pages 175 à 187 Les anasheed l’importance des chants pour amplifier les émotions du spectateur 155 mélodie symphonique produite par un ou des instruments sur laquelle peut être juxtaposé un chant. Ainsi, la pratique d’un instrument tel que le piano ou encore la guitare et le violon est illicite, de même que l’écoute de tous types de musique instrumentale. Ces interdictions excluent logiquement toutes les formes de musiques occidentales.

La musique est associée par les radicaux au diable et à la mécréance. Cette interdiction de la musique repose sur la sourate 31 verset 6 du Coran, « Et parmi les gens il y en a qui, dénués de science, achètent de plaisants discours pour égarer hors du chemin d’Allah et pour le prendre en raillerie. Ceux-là subiront un châtiment avilissant ». Si celle-ci ne désigne pas directement la musique, plusieurs compagnons et cheikhs ou « savants », auraient ensuite établi que cette sourate la visait418. Si plusieurs hadiths rapportés par des compagnons interdisent plus explicitement la musique, celui qui menace d’être transformée en porc et en singe est surement le plus célèbre « Des instruments de musique seront joués devant eux, et des chanteuses (seront également présentes). Allah les ensevelira dans le sol et transformera certains d’entre eux en singes et en porcs. » .

D’autres au contraire semblent partiellement autoriser la musique, notamment certains rares instruments à percussion type tambourins, comme le Duff420. La problématique de la musique dans l’islam est sujette à controverses et désaccords, mais aussi à compromis dans les courants plus modérés. Les djihadistes de l’Etat Islamique, adeptes d’un islam salafiste ultra radical interdisent logiquement la musique, associée au vice occidental421. Cette interdiction a été explicitement établie dans un communiqué de l’organisation, ne laissant aucune place à l’interprétation « l’État islamique en Irak et au Levant a rendu une décision prohibant la vente de chansons sur disques et d’instruments de musique, ainsi que les chansons de divertissement […] en tout lieu. Tout transgresseur s’exposera aux répercussions requises par la charia » 422. Ses membres et sympathisants étrangers ne sont donc pas autorisés à jouer ou écouter la musique dans laquelle ils ont souvent grandi.

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Présentation : formats, langues et usages

Comme pour les vidéos et les revues, la production d’anasheed par l’Etat Islamique est dense, variée et vise un panel de cibles large. Dans le cadre du corpus, il s’agit essentiellement des cibles étrangères, surtout occidentales. Si la majeure partie de ses chants est en arabe : « il existe aujourd’hui plusieurs centaines d’anasheed djihadistes diffusés en différentes langues : arabe, français, anglais, allemand, bengali, afghan, turc, chinois, russe, indonésien,sorani, etc. » 429 . Ceux étudiés dans le corpus, au nombre de vingt-deux, sont en anglais et en français. Certains figurent sur des vidéos de propagande dans la même langue, qui sont également étudiées dans le corpus. S’ils figurent en grand nombre sur les vidéos, leur utilité se décline au-delà du contenu audiovisuel. Ils représentent un support de propagande à part entière. A l’instar des vidéos et des revues, ils cherchent à persuader et convaincre, mais également à manipuler. Ils reposent en général sur des formats assez courts, entre deux et quatre minutes. L’Etat Islamique s’est doté de sa propre maison de production d’anasheed, appelée jnād Foundation For Media Production430, mais les chants étudiés dans le corpus ont tous été relayés par la chaine Al Hayat Media. Ils viennent remplacer la musique instrumentale au sens strict, totalement absente de la propagande.

Le contenu des anasheed : ce qu’ils disent, comment et vers quels objectifs

Il existe ici aussi différents types d’anasheed avec des objectifs variés qui concentrent à la fois le recrutement, l’enracinement et la terreur. Ils sont presque toujours directement ou indirectement à la gloire de dieu, son prophète et ses combattants, mais ils se focalisent aussi sur l’ennemi. Le champ lexical se rapportant au divin et à l’islam est très présent. Dieu et le prophète, l’imagerie djihadiste comme le lion et les martyrs, sont fréquemment abordés. On retrouve ici aussi cette double dimension théologique et guerrière : si le chant est à la gloire de dieu, le message récurent est un appel à combattre sans concession. Cet appel va jusqu’au meurtre de civils, ici aussi justifié par le contexte et les textes. Les anasheed de l’Etat Islamique peuvent être analysés sous l’angle des catégories proposées par Saïd Benham : les martyrs, la bataille et les louanges à Dieu sont des thématiques centrales.

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