Les agents infectieux responsables des ESST

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La protéine prion

La protéine prion fut extraite pour la première fois à partir de la purification de fractions infectieuses de cerveaux de hamsters (Prusiner, 1982). Cette protéine existe sous deux formes, une forme normale ou PrPc et une forme infectieuse ou PrPres.

Le gène de la protéine prion, polymorphismes et mutations

Le gène codant pour la protéine prion a été décrit par lʼéquipe dʼAlan Dickinson dans les années 70 et fut baptisé Sinc (pour Scrapie INCubation period) (Dickinson et al., 1972). En 1985, Oesch isole le gène de la PrP de hamster (Prnp) (Oesch et al., 1985). Ce sont les travaux de Westaway et Moore qui ont permis de montrer que les gènes Prnp et Sinc étaient identiques (Moore et al., 1998).
Les deux isoformes, PrPc et PrPres, sont codées par le même gène. Celui-ci est localisé sur le chromosome 20 chez lʼhomme (PRNP), sur le chromosome 2 chez la souris (Prnp) et sur le chromosome 13 chez lʼovin (Prnp). Ce gène est très conservé chez tous les mammifères, avec plus de 80 % dʼhomologie entre les espèces (Oesch et al., 1991, Westaway et Prusiner, 1986).
Plusieurs polymorphismes ont été identifiés à lʼétat normal dans la séquence codante du gène Prnp. Chez lʼHomme tout dʼabord, le polymorphisme le plus connu se situe au niveau du codon 129 (Méthionine ou Valine) (Deslys et al., 1998). Un polymorphisme sur les codons 219 et 171 a également été décrit. Chez les ovins ensuite, le polymorphisme des codons 136, 154 et 171 est très bien connu puisquʼil détermine la sensibilité des animaux à la tremblante classique (Voir II- C- 1- La tremblante des petits ruminants).
Des mutations peuvent évidemment avoir lieu sur le gène codant pour la PrP, pouvant occasionner la conversion spontanée de la PrPc normale en PrP pathologique, déclenchant ainsi une ESST. Mais le rôle exact des mutations ne semble pas si simple et reste controversé. En effet:
– Le comportement de la protéine varie en fonction de la nature de la mutation. Dans certains cas, seul lʼallèle muté participe à la conversion de la PrPc en PrPres, alors que dans dʼautres, ce sont les deux allèles mutés et non mutés qui participent à cette conversion (Chen et al., 1997).
– Il existe des interactions entre certaines mutations et la nature du polymorphisme sur le gène : ainsi, la mutation asparagine 178 sʼassocie soit à la MCJ soit à lʼIFF selon la nature du codon 129 sur lʼallèle muté (Goldfarb et al., 1992).
– Chez des souris transgéniques exprimant des gènes mutés de la protéine prion, on observe pour certaines mutations une neurodégénérescence sans nécessairement conduire à la présence de PrPres (Hsiao et al., 1989, Muramoto et al., 1997).
Le polymorphisme et les mutations du gène codant pour la PrP ont donc un rôle important dans le déclenchement des ESST mais le mode dʼaction reste encore méconnu.

La structure de la protéine prion

La PrPc

La protéine prion normale est une sialoglycoprotéine diglycosée composée de 253 acides aminés chez lʼHomme, 254 chez la souris, 256 chez le mouton et 269 chez la vache.
La PrPc contient une majorité dʼhélice α (42%) et très peu de feuillets β (3%) (Pan et al., 1993). Sa moitié N-terminale nʼest pas structurée et a la forme dʼune queue de composition variable. Cependant, des études menées sur des souris transgéniques ont révélé que la région comprise entre les acides aminés 32 et 121 joue un rôle physiologique important. La queue pourrait acquérir sa conformation finale après fixation à la membrane plasmique (Aguzzi et Polymenidou, 2004). La partie C-terminale est structurée de manière globulaire et est composée de trois hélices α et de deux feuillets β antiparallèles (Figure 17). Cʼest cette partie qui possède un glycosyl phosphatidyl inositol (GPI), qui va sʼattacher à la face externe des membranes cellulaires (Cohen et al., 1994).
Figure 17: Structure tertiaire de la PrPc (Source: Riek et al., 1996)

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La PrPres

La structure primaire de la PrPres est identique à la PrPc. En revanche la structure secondaire et tertiaire sont différentes. La première différence notable est le contenu élevé de la PrPres en feuillets β (43%) et moins dʼhélices α (30%). Les études pour déterminer sa structure tertiaire ont indiqué que la PrPres est constituée de deux hélices α et de 4 feuillets β (Figure 18) (Cohen et al., 1994, Huang et al., 1996).
Figure 18: Structure tertiaire de la PrPres
(Source: Huang et al., 1996)
Les différences biochimiques entre la PrPc et la PrPres sont résumées dans le tableau 4. Les caractéristiques les plus importantes sont la solubilité et la résistance à la protéinase K pour les deux formes. Ainsi la protéine prion cellulaire est soluble, alors que la protéine prion pathologique est insoluble lui conférant des propriétés d’agrégation sous forme de fibrilles, appelées SAF (Scrapie Associated Fibrils), décelables sur des coupes histologiques de cerveaux infectés.
La PrPc est sensible à la protéinase K et se trouve complètement dégradée en sa présence (Oesch et al., 1985). La PrPres est quant à elle partiellement résistante à la protéinase K. Cette différence est couramment utilisée pour différencier la PrPc de la PrPres par la méthode de Western-Blot ou en test ELISA.
Tableau 4: Différences biochimiques entre la PrPc et la PrPres

La conversion de la PrPc en PrPres

Le mécanisme par lequel la PrPres pathologique permet la conversion de la PrPc normale en PrPres est encore inconnu. Trois modèles sont proposés: la nucléation-polymérisation, lʼauto-catalyse et la nucléation assistée.

Modèle de nucléation-polymérisation

Selon ce modèle, la PrPc est en équilibre thermodynamique avec la PrPres, en faveur de la PrPc. Après la création lente dʼun noyau stable de PrPres cet équilibre est déplacé vers la formation de PrPres. Enfin l’agrégation de monomères de PrPres conduit à la formation de fibrilles capables de se fragmenter (Aguzzi et Polymenidou, 2004) (Figure 19).
Figure 19: Modèle de nucléation-polymérisation
(Source : Toupet, 2009)

Modèle auto-catalytique

Ici la conversion de la PrPc en PrPres passe par la formation dʼun hétérodimère PrPc-PrPres. La PrPc convertie en PrPres sʼagrège alors avec dʼautres molécules de PrPres formant ainsi des fibrilles ou forme de nouveau un hétérodimère avec une autre PrPc (Aguzzi et Polymenidou, 2004) (Figure 20).
Figure 20: Modèle auto-catalytique

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