L’EQUARRISSAGE EN FRANCE DES VAUTOURS ET DES ENTREPRISES.

L’EQUARRISSAGE EN FRANCE DES VAUTOURS ET DES ENTREPRISES.

L’objet de ce chapitre est de dresser un historique pour comprendre d’une part comment les vautours sont devenus des équarrisseurs, et d’autre part comment l’évolution de l’équarrissage classique peut avoir des répercussions sur l’équarrissage naturel. Ce chapitre débute par un bref rappel des caractéristiques écologiques des vautours, suivi de l’historique des populations de vautours et de la mise en place de dispositifs d’équarrissage naturel. Néanmoins, les connaissances concernant les vautours fauves (Gyps fulvus) ont été présentées dans de nombreux travaux (i.e. Mundy et al., 1992; Sarrazin et al., 1994; Terrasse et al., 1994; Sarrazin, 1995; Sarrazin et al., 1996; Ruxton and Houston, 2004; Gault, 2006; Le Gouar et al., 2008; van Beest et al., 2008; Deygout et al., 2009a; Deygout et al., 2009b), aussi, une attention plus grande à été portée sur les aspects réglementaires et financiers de l’équarrissage.

L’émergence de l’équarrissage naturel.

Le genre Gyps comprend cinq espèces de l’Ancien Monde dont le Vautour fauve (Gyps Fulvus), le Vautour du Cap (Gyps Coprotheres), le Vautour de Rüppell (Gyps rueppelli), le Vautour de l’Himalaya (Gyps himalayensis) et le Vautour indien (Gyps indicus). Ces espèces sont longévives ; un Vautour fauve maintenu en captivité peut vivre au moins 37 ans (Newton, 1979). Les vautours fauves sont les plus nombreux en France. Pour cette espèce particulière qui est notre modèle d’étude, les individus atteignent la maturité sexuelle à 4 ans (Terrasse, 1977; Mendelssohn and Leshem, 1983; Sarrazin et al., 1996). Le cycle de reproduction dure 9 mois, de décembre à août (Elosegui, 1989). Le sex ratio est équilibré (Bosè and Sarrazin, 2007) et les couples produisent un œuf unique entre janvier et février. L’incubation dure environ 54 jours, durant lesquels une ponte de remplacement peut avoir lieu. Le poussin reste au nid de 110 à 140 jours, au cours desquels il peut atteindre sa taille Ce rapace présente des adaptations morphologiques et métaboliques au régime alimentaire à la consommation de charognes (Mundy et al., 1992). Il peut jeûner plusieurs jours (Mundy et al., 1992). Il consomme notamment les parties molles (organes, viscères) de cadavres d’ongulés. Ses besoins alimentaires ont été estimés à 0,5 kg/jour (Friedman and Mundy, 1984) et à 0,750 kg/jour en période de reproduction (Hiraldo, 1984; Chassagne, 1998). Sa capacité d’ingestion maximum est de 1,5 kg (Mendelssohn and Leshem, 1983).

Le Vautour fauve est grégaire, et dès la maturité sexuelle, il est généralement sédentaire. Il niche en falaise et utilise majoritairement le vol à voile pour se déplacer avec les thermiques2. Ce rapace diurne peut parcourir de longues distances (Houston, 1974; Mundy et al., 1992; Donázar, 1993), avec une vitesse moyenne de vol d’environ 40 km/h (Pennycuick, 1972). Chez les animaux sédentaires, occupant donc un domaine vital, les déplacements de longue distance sont généralement limités à la dispersion post natale (Mueller and Fagan, 2008) ; les individus juvéniles partent de leur site de naissance de manière définitive. Pour le Vautour fauve, les déplacements en vue de l’approvisionnement consistent généralement à partir et revenir au site de nidification (Carrete, 2005).

Contrairement aux vautours du Nouveau Monde qui repèrent leurs ressources grâce à l’odorat, ceux du genre Gyps les détectent grâce à la vision (Houston, 1974). Leurs bulbes olfactifs sont peu développés (Bang and Cobb, 1968) tandis que leur acuité visuelle serait exceptionnelle (Gensbol, 1984). Lorsqu’un individu a repéré des ressources alimentaires, il exécute de larges cercles en diminuant progressivement son altitude. Ceci peut alors constituer une information pour les congénères qui le repèrent. Ce phénomène est appelé recrutement local (« local enhancement » (Turner, 1964; Houston, 1974; Pöysä, 1992). Par exemple, pour le Vautour de Rüppell (Gyps rueppellii), Houston (1974) estime que, par ce phénomène, les individus peuvent être attirés depuis une distance d’au moins 35 km de la ressource. Ainsi, sa bonne acuité visuelle et le phénomène de recrutement local confèrent au Vautour fauve des atouts pour une recherche efficace de nourriture.

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La dynamique d’une population, soit l’évolution des effectifs la constituant, résulte des disponibilités en ressources (alimentaires, sites de reproduction..) et des interactions intra et interspécifiques (compétition pour les ressources, coopération, prédation, …). Le Vautour fauve a peu de prédateurs. Lorsque la capacité d’un lieu, en terme de sites de nidification, n’est pas atteinte, la disponibilité alimentaire apparait être le principal facteur influençant la dynamique de population (Sarrazin, ; Fernandez et al., 1998). Il a été montré que le nombre de couple reproducteurs de vautours peut être positivement corrélé avec des changements d’abondance dans les cheptels (Parra and Telleria, 2004).

La compétition pour les ressources alimentaires est un important facteur de régulation de population (Newton, 1998; Lewis et al., 2001). Si en Afrique, les grands carnivores ont souvent la priorité sur les carcasses (Mundy et al., 1992), en Europe, les compétiteurs les plus fréquents des vautours fauves sont les autres espèces de vautours, d’autres rapaces, des corvidés et des renards (Bosè, 2006 ). Dans le cas de la compétition entre des vautours de différentes espèces, « la taille semble jouer un rôle important dans la détermination d’une hiérarchie ; en général les espèces les plus grandes sont dominantes sur les plus petites (König, 1983; Hiraldo et al., 1991). Il existe aussi une compétition de type intraspécifique. Lors de la prise de nourriture, appelée curée pour les vautours, ces derniers peuvent se compter par centaines (Houston, 1974; Fernandez, 1988; Mundy et al., 1992). Les vautours fauves juvéniles semblent désavantagés vis-à-vis des individus plus âgés et subissent une compétition intra-spécifique par exploitation et interférence (Bosè and Sarrazin, 2007). La compétition par exploitation signifie que la ressource utilisée (ici consommée) par des individus n’est plus disponible pour d’autres individus. La compétition par interférence a lieu lorsque l’accès aux ressources encore non consommées pour des individus est empêché par d’autres individus. Contrairement à la première, il y a une action directe entre les individus. Ce pattern de compétition entre les juvéniles et les individus plus âgés est en accord avec la stabilité de la survie adulte chez les populations longévives (Bosè, 2006) ; il est possible chez une telle espèce longévive de prédire qu’un phénomène de densité-dépendance pour l’accès aux ressources alimentaires affecterait d’abord les juvéniles, en réduisant leur taux de survie (Gault, 2006). Une diminution du taux de survie juvénile a été mise en évidence lors du programme DIVA 1, pour la population de vautours des Grands Causses (Sarrazin et al., 2006 ; Mihoub et al. In prep).

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