L’ entrée fracassante dans l’enseignement
Baillauquès et Breuse (1993) de même que Gervais (1999) sont d’accord pour dire que l’entrée dans la profession est souvent très brusque. Les enseignants déplorent le fait d’obtenir leur affectation au dernier moment, rendant ainsi leur début plus ardu. Certains la reçoivent même la veille de la rentrée scolaire. Ils se trouvent alors parachutés dans une classe sans préparation matérielle ni mentale. De plus, ils ajoutent que plusieurs sont envoyés loin de chez eux, ce qui serait lin obstacle à une bonne insertion professionnelle pour 50% des novices. À l’ inverse, 40% s’éloigneraient dans le but d’acquérir de l’expérience (Martineau & Portelance, 2007). Ceux-ci seraient aussi confrontés à de fréquents changements de classe ou de milieu. On peut penser aux tâches exigeant un changement de classe à tous les jours ou même dans la journée : des classes de différents niveaux et dans différentes écoles. Or, certains éprouvent des difficultés d’adaptation, de stress et d’ inquiétude (Martineau et al., 2010). Ainsi, l’ enseignant dans cette situation n’ a pas le lien d’appartenance nécessaire à sa motivation, à son investissement et à son engagement (Baillauquès & Breuse, 1993).
Bref, Martineau et al. (2010) résument bien cette entrée fracassante dans l’enseignement. Ils définissent celle-ci comme soudaine et ajoutent qu’on transfère au débutant la même responsabilité qu ‘ à l’enseignant ayant beaucoup d’expérience. D’ ailleurs, on peut lui confier les pires classes. Pour Baillauquès et Breuse (1993), le nouvel enseignant aura aussi à faire face à une responsabilité qu’ il n’avait pas auparavant, une prise en charge solitaire de son emploi du temps et de celui des élèves.
L’ étape de l’ insertion professionnelle
Même si l’ insertior. professionnelle est ioin d’être un concept nouveau, il n’en demeure pas moins que depuis une dizaine d’ années, on y accorde plus d’attention, notamment en recherche. C’est dans cette optique qu ‘ a notamment été créé le CNIPE, le Carrefour national de l’ insertion professionnelle en enseignement (Martineau, 20 Il). Or, certaines études récentes comme celles de Vifquin et Watthez (2013), Mukamurera et al. (2013), Martineau et Mukamurera (2012), Martineau (2011) s’attardent donc à en étudier les retombées. Vifquin et Watthez (2013) parlent alors de sortir de l’ isolement et du sentiment de culpabilité. Pour Mukamurera et al. (2013) c’ est surtout aux niveaux du développement professionnel et de la socialisation organisationnelle que se font sentir davantage les bénéfices des programmes d’ insertion professionnelle (PIP). Plus particulièrement, dans le développement professionnel, on pense à la gestion de classe ou à l’ engagement dans la formation continue. En ce qui concerne la socialisation organisationnelle, on y retrouve outre le sentiment d’appartenance, l’insertion dans l’ équipe-école et l’ adhésion aux valeurs de l’école. De plus, Devos, Mouton, et Marigliano (2013) ajoutent que le mentorat, plus précisément, apporterait un soutien émotionnel au débutant.
Pour Gervais (1999), l’ insertion professionnelle est le passage entre la formation initiale et la formation continue. Quant à Portelance, Mukamurera, Martineau, et Gervais (2008), l’ insertion professionnelle fait référence aux débuts dans l’ enseignement, à l’ adaptation de même qu’ à l’évolution du nouvel enseignant. Ces derniers précisent qu’au Québec, l’ insertion professionnelle est problématique. Comme mentionné précédemment, les nouveaux enseignants seraient confrontés à un taux de décrochage élevé, à un manque de soutien, à l’ épuisement professionnel, au sentiment d’incompétence, etc.
Selon Riopel (2006), il existe un continuum de la formation pour un enseignant. En effet, quatre étapes sont présentes: la formation antérieure, la formation initiale, l’ insertion professionnelle et la dernière, la formation continue.
Programme d’insertion professionnelle : PIP
Une étude de Royer et al. (2001) révèle que les enseignants, à près de 90%, ont accès à des mesures de soutien non structurées. On peut penser à l’aide des pairs, de la direction, du personnel non enseignant ou du syndicat. Toutefois, lorsqu ‘il est question de soutien structuré, par exemple le mentorat, il est moins présent. Pour 45% des enseignants, les services de soutien sont: le service d’aide ponctuel sur le plan pédagogique, sur le plan psychologique et le programme d’ aide aux employés. Étonnamment, selon cette enquête, les enseignants considèrent plus satisfaisante l’ aide non officielle qu’officielle.
Récemment, plusieurs mesures d’ insertion professionnelle ont été recensées dans 19 commissions scolaires qui possèdent un programme d’ insertion professionnelle (PIP). En effet, le mentorat s’avère le plus utilisé avec 89% d’utilisation. Viennent ensuite les ateliers de formation, le temps de libération, la trousse d’ accueil, l’accès à une personneressource et les groupes de discussion (Martineau & Mukamurera, 2012). D’autres mesures ont été recensées, sans toutefois être populaires auprès des commissions scolaires. De plus, on remarque que parmi elles, plusieurs jumèlent plus d’une mesure et ce, dans le but d’ une meilleure effic2.cité de celles-ci tout en répondant à la diversité des besoins des débutants (Duchesne & Kane, 2010; Martineau & Mukamurera, 2012; Mukamurera et al., 2013).
On y dénombre certains thèmes plus populaires abordés lors des ateliers de formation. Principalement, le thème de la gestion de classe est récurrent, mais on parle aussi des rencontres de parents et de l’évaluation (Martineau & Mukamurera, 2012). Or, cela peut être dû au fait que les enseignants débutants, avec peu d’expérience, éprouvent plus de difficultés à résoudre les problèmes rencontrés au quotidien, principalement en ce qui a trait à la gestion de classe. Ceci expliquerait la récurrence du sujet (Martineau et al., 2010).
Selon une étude de Mukamurera et al. (2013), 46% des commIssIons scolaires participantes possèdent un programme d’ insertion professionnelle datant de moins de cinq ans, étant ainsi encore en période d’ ajustement. Dans une recherche de Lamontagne, Arsenault, et Marzouk (2008), on précise que les commissions scolaires ont leurs propres critères de sélection pour la participation à leur programme d’ insertion professionnelle. Dans les commissions scolaires sondées, une seule permet l’ accès à son programme à tous les novices, indépendamment du nombre de jours travaillés ou des contrats obtenus, tandis que certaines admettent les novices après 400 jours de travail ou lors de l’obtention d’ un contrat. Ils constatent que la formule la plus utilisée dans leur programme d’ insertion est celle de la rencontre de groupe. Les répondants précisent que ce type d’ accompagnement serait efficace et prometteur. De plus dans 75% des organisations consultées, il y a un volet mentorat. Ce dernier serait utilisé à 91 % sur une base volontaire et les commissions scolaires auraient en moyenne 18 débutants par année. Selon eux, le risque est grand pour les enseignants débutants n’ ayant pas accès au programme d’insertion de se rabattre sur l’improvisation pour survivre (Leroux & Mukamurera, 2013).
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