L’éloignement par réseau, solution radicale
L’eau courante à tous les étages, moteur du tout-à-l’égout
La garde-robe anglaise, un nec plus ultra
Les garde-robes dites à l’anglaise, également nommées cabinets à soupape, à clapet ou à chasse, ont pour origine le mot anglais du milieu du XVIIIe s. water-closets, qui signifie cabinet à eau. Ces dispositifs sont équipés d’un petit réservoir d’eau d’où l’on amène une conduite, à l’extrémité de laquelle est un robinet, nommé flageolet, qui sert à laver . Divers auteurs britanniques contemporains ont analysé les conditions de développement de la chasse d’eau conjointement avec le tout-àl’égout 478 . A une échelle plus large, historiens et urbanistes français s’intéressent à la question des réseaux, à Paris 479 , ou à Strasbourg, avec le travail pionnier de Viviane Claude sur la lente transition du système des fosses vers le tout-à-l’égout 480 . Précurseur de la chasse d’eau, le poète John Harrington, neveu excentrique de la reine Elizabeth I, décrit en 1596 dans Les Métamorphoses d’Ajax une commodité fixe équipée d’un réservoir permettant une chasse hydraulique. Pour satisfaire les besoins de sa Majesté sa tante, un prototype de latrines à l’anglaise ou garde-robe hydraulique (voir Figure 106), est installé au sud-ouest de Londres, au Palais Royal de Richmond, en bordure de la Tamise, mais la Reine préfère sa chaise-percée.Conçue par l’architecte Blondel en 1738 et s’appuyant du savoir-faire français en fontainerie, une version intégrée des lieux à l’anglaise se distingue parmi les 160 planches gravées par l’auteur dans un de ses ouvrages de références (Figure 107). Figure 107 – lieux à soupapes à la française (1738) Près de deux siècles plus tard, Alexandre Cummings, horloger écossais établi à Edinburgh passionné de mécanique et de sciences, dépose en 1775 le premier brevet pour une soupape de vidange avec un tuyau en forme de S formant un verrou d’eau empêchant la pénétration de l’odeur dans la pièce, dispositif toujours employé à ce jour. L’étanchéité est assurée par l’eau immobilisée, qui scelle la sortie de la cuvette, et une valve coulissante au niveau de la sortie de la cuvette au-dessus du siphon.
Développement des réseaux d’assainissement de Lyon
Le réseau d’assainissement gravitaire de Lyon Sur la base des anciens égouts recevant les eaux de ruissellement des chaussées et toitures, mené conjointement avec les embellissements de la ville de Lyon, un vaste réseau souterrain se met progressivement en place (voir la Figure 114). Entre 1852 et 1896, près de 70 km d’égouts sont ainsi construits pour une dépense de 3,5 millions de francs dans le 3 ème et 6ème arrondissement de Lyon 505 . En 1891, Lacassagne estime à 100 km environ la longueur des égouts sur la ville506 . Illustration des efforts consentis par la collectivité, la proportion de rues dotées d’un égout, voisine de 5% en 1852, atteint les 75% en 1910. Figure 114 – évolution du linéaire d’égouts en mètres à Lyon507 (1852-1896) Dans ce contexte, pour les grands travaux d’urbanisation de la Presqu’Ile de Lyon et de la rue Impériale (aujourd’hui rue de la République), la ville convient dans un premier temps la mise en place d’un système mixte, avec un égout pour les eaux pluviales, dans l’axe de la rue, et une fosse d’aisance par immeuble. Mais, au cours des travaux, le raccordement des fosses à l’égout est décidé et la construction des fosses abandonnée508 . Malgré la réticence de l’Administration à laisser couler aux cours d’eau les matières de vidange, les nouveaux édifices de la prestigieuse rue Impériale sont branchés sur des égouts connectés au Rhône. Cette décision, prise en 1855, marque le début, très hésitant, du « tout-à-l’égout à la lyonnaise », et met en évidence que l’administration de la ville de Lyon, malgré les risques associés à un rejet direct des déjections humaines produites sur la Presqu’Ile au milieu naturel dans le Rhône et la Saône, s’est engagée 40 ans avant Paris dans le régime de l’écoulement direct obligatoire à l’égout .