L’EDUCATION A LA CITOYENNETE ET AU
CIVISME
Approche psychocognitives de l’ECC
Etant donné que notre étude se rapporte aux représentations sociales et pratiques de l’ECC, nous avons jugé opportun de faire référence aux théories psychocognitives. La psychologie en effet, a beaucoup influencé les recherches en éducation et le nombre d’études portant sur les processus d’apprentissage, sur le traitement cognitif de l’information et sur les caractéristiques de l’apprenant ne cesse d’augmenter. Selon Y. Bertrand, les théories psychocognitives se préoccupent du développement des processus cognitifs chez l’élève tels que le raisonnement, l’analyse, la résolution de problèmes, les représentations, les conceptions préalables, les images mentales, etc.27 ». Dans cette étude, notre approche théorique porte sur les conceptions préalables de l’apprenant et les obstacles aux apprentissages.
Les conceptions préalables
En s’intéressant aux conceptions préalables des habitants du Fokontany de Talatamaty, nous nous sommes inspiré de ce qu’avait écrit Bachelard dans la formation de l’esprit scientifique (1938) : « Ils ( les enseignants) n’ont pas réfléchi au fait que l’adolescent arrive dans la classe de physique avec des connaissances empiriques déjà constituées ; il s’agit alors, non pas d’acquérir une culture expérimentale mais bien de changer de culture expérimentale, de renverser les obstacles déjà amoncelés par la vie quotidienne28 . » Cette idée fut reprise par plusieurs chercheurs dans différents pays et a donné lieu à diverses applications didactiques surtout dans l’enseignement des sciences. On a voulu tenir compte des connaissances préalables de l’étudiant. Certes, cet ensemble de connaissances peut être le plus souvent éloigné voire opposé à la connaissance scientifique. Mais nous pensons pourtant que, ces modèles construits par les apprenants semblent efficaces et pertinent au regard de la vie courante. C’est d’ailleurs cela qui en fait parfois de véritables obstacles à l’apprentissage. 27 Y.BERTRAND, Théories contemporaines de l’éducation, Ottawa, Ed. Agence d’Arc, 1993, p.16. 28 BACHELARD cité par Y.BERTRAND, op.cit,p.63 22 1.2.2.2 – Les obstacles aux apprentissages Il est important de connaître les conceptions préalables de l’apprenant, pour arriver à déterminer, dans certains cas, ce qui fonde leurs erreurs. Mais les représentations sociales (conceptions préalables) de l’apprenant ne sont pas simplement une accumulation d’erreurs. Ces connaissances « spontanées » ou « naturelles » sont véritablement une construction opérée par l’apprenant en interaction active avec son environnement. Il ne faut pas oublier qu’un apprenant, n’est nullement un sac vide que l’on peut remplir de connaissances, mais encore leurs représentations sociales sont de véritables structures conceptuelles organisées. Ainsi, pour De Vecchi cité par A. Beitone et al. : « lorsqu’on néglige de s’appuyer sur les conceptions des élèves, on construit des stéréotypes, des mots vides de sens et, sans y prendre garde, on renforce les représentations fausses : en un mot, celles-ci font écran et ne permettent pas à un savoir nouveau de se construire ou de s’affiner29 . » Dès lors, dans notre démarche, nous avons pris en compte toutes ces considérations afin d’identifier toutes les connaissances et pratiques « non scientifiques » sur l’ECC. Ce qui nous permet en conséquence d’apporter les solutions y afférentes. 1.2.3- Approche sociocognitives de l’ECC Les théories sociocognitives insistent sur les facteurs culturels et sociaux dans la construction de la connaissance. Ces théories décrivent les conditions sociales et culturelles de l’enseignement et de l’apprentissage. Ainsi, le point de départ des théories sociocognitives se situe dans la prise de conscience, par les enseignants, de la nécessité de tenir compte des conditions culturelles et sociales de l’apprentissage. De nombreuses analyses et constatations effectuées par les pédagogues concluent à la nécessité de tenir compte de ces conditions culturelles et sociales si on souhaite obtenir un apprentissage durable.
Les incidences culturelles et sociales sur l’apprentissage
La plupart des auteurs, tels que Giroux (1992), Bowers (1993), Gores (1993), soutiennent que notre quotidien porte en son sein des indices sérieux d’une crise culturelle et sociale. C’est pourquoi l’éducation doit tenir compte de ces composantes de la culture quotidienne. Dans cette optique, les notions de culture et de contexte prennent désormais une place importante dans les réflexions sur l’éducation telle que l’ECC. Prenons l’exemple de Y.Bertrand pour mieux expliquer ce propos. Il a fait allusion à l’enseignement du français dans un pays multiethnique. Ainsi, l’enseignement du français au Québec constitue et au Canada constitue un excellent exemple de la nécessité d’une analyse sociale et culturelle des conditions d’apprentissage. Il faut, en effet, tenir compte de plusieurs facteurs sociaux et culturels comme, par exemple, l’existence d’une minorité anglophone dans une province à majorité francophone à l’intérieur d’un pays à majorité anglophone. Une telle situation culturelle vient modeler et donner un sens très différent à l’apprentissage d’une langue. Les enfants vont-ils véritablement apprendre le français s’ils sont d’une souche nonfrancophone et s’ils sont plus attirés par la langue anglaise, langue de la minorité au Québec mais de la majorité au Canada ? C’est la raison explique, pourquoi nous avons pris compte dans le cadre de notre étude de présenter le Fokontany de Talatamaty à travers ses caractéristiques culturelles et sa dynamique sociale afin de repérer les problèmes qui pourraient mettre en conflit l’ECC avec ses caractéristiques culturelles et sociales.
La théorie du conflit sociocognitif
Un courant francophone de recherches sur l’éducation s’est attardé à la notion de conflit sociocognitif dans l’apprentissage. Un conflit sociocognitif rend compte, dans le cadre d’une interaction sociale, de réponses à une question, socialement et logiquement incompatibles. Ce qui sous-entend que le conflit sociocognitif pourrait être à la source de l’apprentissage. Selon Doise et Mugny (1981) cités par Y. Bertrand : « Il faut avoir des conflits pour apprendre. Cela stimule la pensée. » En effet, un conflit sociocognitif peut être efficace dans l’apprentissage pour les raisons suivantes : • « il permet à l’apprenant de prendre conscience de réponses autres que les siennes et de la diversité des points de vue ; cela l’oblige à se décentrer par rapport à sa réponse initiale ; • l’apprenant apprend à découvrir des informations (intéressantes, imprévues, connues, rassurantes, fausses, peu importe) dans les réponses des autres qui lui seront utiles dans la construction de sa connaissance ; • le conflit peut amener l’apprenant à accepter d’être en situation de changement et à coopérer pour la résolution de problèmes31 . Ainsi, la prise en compte de cette théorie du conflit sociocognitif, dans le cadre de cette étude, nous a permis de comprendre les contradictions qui s’articulent autour de l’ECC et d’apporter les solutions y afférentes dans la troisième partie de ce travail.
DES METHODES BASEES SUR L’IDEE DE PARTICIPATION
Les recherches peuvent faire appel à des méthodologies d’une grande diversité. Dans une éducation qui réfracte de tels enjeux de société que l’ECC, nous avons tenu à associer les habitants du Fokontany de Talatamaty à toutes les phases de notre étude. Ainsi, la méthode employée pour parvenir à cette étude est la « Méthode Accélérée de Recherche Participative » (MARP). 1.3.1 – Pourquoi la MARP ? Nos réflexions sur les atouts de la MARP ont permis de constituer quelques éléments de réponse à cette question.
La MARP pour l’implication de la population
Elaborée dans les années 70-80 pour pallier les carences des enquêtes classiques (trop lourdes ou trop légères, problème de fiabilité de l’information relative à certaines questions dites sensibles ou controversées, cette méthode « intermédiaire » allie rigueur, mais aussi flexibilité et une certaine « dose d’informel » (travail qualitatif) et ce pour une meilleure connaissance des conditions et problèmes des populations. Le principe directeur de la MARP est de stimuler la participation des populations et d’établir un véritable partenariat avec elle dans le processus de recherche et d’étude, avec comme finalité d’identifier un projet porté et/ou approprié par la population. Certes, la MARP peut être diverse dans ses applications mais les principes méthodologiques de base restent les mêmes : association des populations dans un processus donné, rejet de toute idée préconçue, esprit d’ouverture et d’écoute, interactivité, adaptation, évolutivité, prise en compte des savoirs traditionnels…
LA MARP pour l’étude multidisciplinaire
« La MARP s’appuie sur une approche pluridisciplinaire des problèmes. Cette option se justifie par le fait que la complexité des problèmes de développement dépasse les limites d’une seule discipline32 » En effet, pour l’étude des problèmes aussi complexes qui s’articulent autour de l’ECC, l’utilisation de la MARP s’avère opportune.
LA MISE EN ŒUVRE DES OUTILS DE LA MARP
La MARP offre une riche gamme de choix de techniques de collecte d’information et d’analyse des problèmes. Ainsi, nous avons opté pour les outils suivants :
Un pré-diagnostic du Fokontany
L’utilisation de cet outil nous a permis d’avoir une vision globale de notre champ d’étude et de ses problèmes, d’analyser par ailleurs, les caractéristiques physiques du Fokontany ainsi l’analyse de sa dynamique sociale pouvant nous permettre d’identifier les traces de l’ECC dans la vie quotidienne de ses habitants
INTRODUCTION |