Les contours de l’économie sociale ne sont pas faciles à circonscrire. En effet, il existe plusieurs définitions au Québec et au Canada pour circonscrire les organisations de l’économie sociale. On parlera de l’action bénévole et communautaire ou du secteur sans but lucratif et bénévole. L’extrait suivant du document << Analyse comparative du secteur sans but lucratif et bénévole du Canada >> témoigne des différentes définitions courantes : << Au Canada, on utilise de nombreux termes pour décrire cet ensemble d’organismes, y compris secteur bénévole, secteur sans but lucratif, secteur caritatif, secteur de l’économie sociale (tiers secteur), société civile et organismes communautaires >> (HALL et al. 2005) .
On s’entend généralement pour dire que << la sphère de l’économie sociale englobe toutes les activités et les initiatives des organismes à but non lucratif, des coopératives et des associations >> (DEVAMCO et al. 2004). Ainsi, l’économie sociale regroupe les organisations que l’on retrouve dans cet ensemble situé entre, d’une part, les organisations de l’économie de marché (secteur privé à but lucratif), et d’autre part, les organisations du secteur public.
L’économie sociale en Abitibi-Témiscamingue
L’étude de l’impact social et économique du milieu associatif, communautaire et coopératif en Abitibi-Témiscamingue (COLLIN! et THOMAS 1999) recensait 2 332 organismes associatifs, communautaires et coopératifs sur le territoire de I’Abitibi-Témiscamingue en 1999.
Ces organisations génèrent des revenus d’environ 160 millions par année pour les milieux associatif et communautaire et de 125 millions pour le milieu coopératif. Ce sont par ailleurs 5 400 emplois qui proviennent de ces organisations.
Bien entendu, il existe de grands écarts de revenus entre les organismes, certains pouvant compter sur un soutien gouvernemental plus important ou dont les revenus reposent sur un projet d’affaires bien ficelé. Ces écarts de revenus provoquent également des variations importantes dans les conditions de travail bénévole (encadrement, etc.) et les conditions de travail rémunéré (statut d’emploi, rémunération, ancienneté).
Ces organisations font preuve d’un ancrage à la communauté manifeste ayant en moyenne 22 années d’existence. On est loin de la moyenne de durée de vie de l’entreprise privée. En effet, seulement 35 % des entreprises privées passent le cap des cinq ans (CHANTIER DE L’ÉCONOMIE SOCIALE 2004). L’existence de ces organisations repose par ailleurs sur l’implication de 26 000 bénévoles, l’équivalent à 732 personnes travaillant à temps plein (COLLIN! et THOMAS, 1999) .
Les entreprises d’économie sociale
On apporte une nuance importante entre l’économie sociale, qui se situe entre les secteurs public et privé; et le domaine des entreprises d’économie sociale, qui est une section de cette sphère et qui concerne des organismes présentant les valeurs de l’économie sociale appliquées au contexte de marché (vente de biens et de services).
Le Chantier de l’économie sociale (2001, p. 28) définit ce domaine comme étant l’ensemble des activités et organismes, issus de l’entrepreneuriat collectif, qui s’ordonnent autour des principes et règles suivants :
1) L’entreprise d’économie sociale a pour finalité de servir ses membres ou la collectivité plutôt que de simplement engendrer des profits et viser le rendement financier/
2) Elle a une autonomie de gestion à !egard de l’État/
3) Elle intègre dans ses statuts et façons de faire un processus démocratique impliquant usagères et usagers/ travailleurs et travailleuses/
4) Elle défend la primauté des personnes et du travail sur le capital dans la répartition de ses surplus et revenus/
5) Elle fonde ses activités sur le principe de la participation/ de la prise en charge/ de la responsabilité individuelle et collective.
Ces entreprises fonctionnent comme des entreprises privées et produisent des biens et des services pour l’économie de marché (ce qui implique la vente et la tarification de ces produits et services), mais gèrent leurs activités et réaffectent leurs excédents de manière à appuyer la réalisation d’objectifs sociaux et environnementaux. Elles revêtent le statut juridique de coopérative, de mutuelle ou d’association à but non lucratif et certaines existent depuis le milieu du 19e siècle. En fonction de la définition précédente, ce domaine exclut les organisations de l’action communautaire autonome (troisième sous-secteur de la sphère de l’économie sociale), qui ne vendent ni ne tarifent leurs produits ou services.
Aujourd’hui, lorsqu’on parle d’entreprises d’économie sociale, on s’attarde particulièrement aux organisations du deuxième sous-secteur, soit les coopératives et les OBNL du secteur marchand, telles que représentées en grisé dans le tableau précédent. Pour D’Amours (2006), la nouvelle économie sociale correspond à l’ensemble des entreprises collectives, coopératives ou OBNL du secteur marchand, de petite taille et dont l’émergence débute vers 1970. Cet ensemble exclut les coopératives d’épargne et de crédit, les mutuelles d’assurance et les grosses coopératives agricole qui font plutôt partie de ce que D’Amours présente comme « ancienne économie sociale ». C’est aux entreprises de ce secteur que la présente étude s’attardera.
Les formes juridiques des entreprises d’économie sociale et leur modalités
Les entreprises de la nouvelle économie sociale au Québec reposent sur deux cadres juridiques principaux: les organismes à but non lucratif (OBNL) les coopératives (coop). Bien qu’ayant de nombreuses similitudes, les lois qui en déterminent les fondements sont différentes, impliquant des nuances au niveau du fonctionnement prescrit.
L’association
On définit l’association comme << un groupement plus ou moins organisé de personnes qui s’unissent dans un but déterminé en vertu des lois et dans les limites du droit d’association reconnu par les chartes >> (REGISTRAIRE DES ENTREPRISES 2008 [en ligne]) et dont les membres << poursuivent un but autre que le partage entre les membres des bénéfices pécuniaires >> (CSMO ÉCONOMIE SOCIALE ET ACTION COMMUNAUTAIRE, 2007, p.68). L’association peut être personnifiée, c’est-à-dire constituée en entité juridique (personne morale) en vertu d’une loi qui lui confère la pleine jouissance des droits civils. Il existe une multitude de lois sous lesquelles une association peut se constituer, les plus courantes étant l’organisation à but non lucratif (OBNL) fondée selon la Loi sur les compagnies et la coopérative (COOP) constituée selon la Loi sur les coopératives. L’OBNL et la COOP peuvent aussi être fondées en vertu de lois fédérales, soit la Loi sur les corporations canadiennes et la Loi canadienne sur les coopératives.
L’organisation à but non lucratif (OBNL)
L’organisation à but non lucratif se définit comme << une société sans capital-actions regroupant des personnes (membres) qui poursuivent un but à caractère moral ou altruiste et qui n’ont pas comme intention de faire des profits >> (CSMO ÉCONOMIE SOCIALE ET ACTION COMMUNAUTAIRE, 2007, p. 70). Cette définition est très semblable à celle donnée ci-dessus pour l’association.
Coopérative et mutuelle
Pour le Conseil québécois de la coopération et de la mutualité (2008), coopérative et mutuelle sont synonymes. On les définit comme << des associations autonomes de personnes, volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et culturels communs au moyen d’une entreprise dont la propriété est collective et où le pouvoir est exercé démocratiquement>> .
Spécifiquement, la coopérative est << la combinaison originale d’une association et d’une entreprise dont la raison d’être est la satisfaction des besoins des membres. L’association permet à chaque coopérateur de grandir humainement et socialement alors que l’entreprise lui fournit des moyens et des occasions de développement >> (CONSEIL QUÉBÉCOIS DE LA COOPÉRATION ET DE LA MUTUALITÉ 2008 [en ligne]). La définition cidessous met en exergue l’importance de la dimension humaine au sein de la coopérative comme contrepoids à l’aspect économique.
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