Le type d’EPCI
En 2010 les communautés urbaines regroupaient en moyenne 560 000 habitants et les communautés d’agglomération 124 000 habitants, elles semblent ainsi posséder la taille adéquate pour élaborer une véritable politique de l’habitat. En revanche, avec une population moyenne de 14 760103 habitants, une grande majorité des communautés de communes ne disposent pas d’assez de moyens. L’AdCF s’accorde également sur ce point, selon l’association, la délégation des aides à la pierre est principalement tournée vers les CU, CA. Pour l’essentiel des communautés de communes, si la préoccupation pour les questions de l’habitat existe, la question de la délégation, elle, ne se pose pas car celles-ci n’ont généralement pas les moyens d’ingénierie, humains, et financiers suffisants104. Un fait qui se vérifie dans les chiffres puisque sur les 2 223 communautés de communes que comptait la France au 1er janvier 2013105, seule 3 d’entre elles sont délégataires des aides à la pierre106 . Quant aux communautés urbaines, près de 90% d’entre elles sont délégataires. En effet, sur les 15 existantes, 13 d’entre elles se sont portés délégataires. Seules les CU d’Alençon et de Creusot-Montceau-les-Mines ne sont pas délégataires. Avec respectivement 51 210 et 93 347 habitants, elles sont 2 des 3 communautés urbaines qui affichent les plus petites tailles107 . Face à ces tendances, le choix a été fait ici de n’étudier que des communautés d’agglomération. C’est en effet parmi ce type d’EPCI qu’il semble y avoir le plus de délégataires potentiels et qu’il parait donc intéressant de savoir pourquoi certains d’entre eux ne se sont pas encore saisis de cette compétence.
La tension du marché
Un lien ayant été établi entre le niveau de tension du marché et la prise de délégation, et notre première hypothèse portant sur cette relation, il est nécessaire de prendre en compte ce critère pour le choix de notre échantillon. Nous avons ici préféré le zonage établi par l’AdCF au zonage Robien ou Scellier utilisé par l’Etat. Ce choix s’explique par le fait que plusieurs acteurs critiquent la pertinence de ce zonage. Le zonage établit par l’AdCF prend en compte divers indicateurs qui se veulent représentatifs des réalités économiques et résidentielles des intercommunalités. Ainsi, les communautés ont été classées en trois catégories : « marchés tendus », « marchés fluides » et « marchés détendus », selon, notamment, les critères repris dans le tableau suivant :Cette carte ayant été réalisée en 2011, il a d’abord fallu vérifier, avec des informations plus récentes109, que les agglomérations désignées comme non délégataires sur cette carte, ne l’étaient toujours pas. 108 Résidences principales construites avant 1949 46 Le but est de confronter cette typologie avec les résultats des entretiens et d’apprécier ainsi l’impact du marché local sur la décision des acteurs de se saisir ou non de la délégation des aides à la pierre. En dehors de ces deux critères, d’autres indicateurs ont également été pris en compte. S’ils n’ont pas constitué des critères pour le choix des intercommunalités, ils seront néanmoins utiles pour l’analyse des résultats. Notre troisième hypothèse portant sur l’existence ou non d’une vision politique commune au sein des intercommunalités, des informations pouvant rendre compte de l’intégration intercommunale ont également été utilisées. Nous avons ainsi considéré la date de création de l’EPCI et le nombre de compétences qu’ils possédaient déjà en matière d’habitat.
La Communauté d’Agglomération de Nevers Initialement, l’intercommunalité de Nevers était une communauté de commune, elle a acquis le statut de communauté d’agglomération il y a seulement dix ans et ne s’est saisie de la compétence habitat qu’à partir de 2008. L’agglomération est donc récente en matière d’habitat, son premier PLH n’a été voté qu’en fin d’année 2011. Lors de son élaboration, en 2009, la question de se saisir de la délégation des compétences des aides à la pierre s’est posée mais il s’avère que les élus n’y ont pas été favorables. Plus précisément, si l’avis du président de la communauté était positif, il n’a pas été suivi par l’ensemble des élus pour plusieurs raisons. Les élus ont souhaité que le premier PLH soit l’occasion de mettre en place une programmation concertée à l’échelle de l’agglomération ainsi que des financements communautaires pour la programmation HLM, ce qui est mis en œuvre depuis un peu plus de 2 ans. Toutefois, ces derniers n’ont pas encore forcément l’habitude de travailler en commun sur la question de l’habitat, ils ne souhaitent donc pas que l’agglomération possède le pouvoir d’accorder ou de refuser des agréments, notamment en termes de construction de logement social. Certains craignaient, notamment les petites communes, que si le président de l’agglomération prenait la main sur la gestion des autorisations de programmes et que celui-ci faisait face à une pénurie d’agréments, ceux-ci soient recentrés sur la ville-centre. De plus, les élus locaux sont satisfaits de la manière dont le préfet de département gère les autorisations de programme. Comme la programmation des aides se passe correctement ils ne jugent pas nécessaire de changer de fonctionnement. Une autre raison avancée qui justifie cette non prise de délégation est la tension du marché. Avec environ 70 000 habitants, l’agglomération est plutôt petite et son marché étant qualifié de détendu, la programmation HLM n’est pas très importante sur le territoire. Celle-ci est d’environ une soixantaine de logements par an112, ce qui ne constitue pas une enveloppe conséquente. Devenir délégataire signifierait pour l’agglomération un renforcement de ses équipes en matière d’ingénierie, d’instruction des dossiers, pour gérer une faible quantité d’agréments. Aussi, les élus ne jugent pas pertinent de se saisir de cette délégation de compétence. De plus, cette programmation tend plutôt à se réduire d’année en année. Les élus craignent donc de s’engager dans une délégation, d’y investir des moyens, sans pour autant avoir la garantie de réussir à conserver leur volume d’agréments. Par ailleurs, la délégation concerne à la fois le parc public et le parc privé, or, lorsque la question de se saisir ou non de cette compétence s’est posée, l’agglomération ne possédait pas de dispositifs programmés relatifs à l’ANAH.