Le succès du divorce relaye par l’avocat et le notaire

L’INTERVENTION RENFORCEE ET ADAPTATIVE DE L’ AVOCAT DANS LE DIVORCE

On ne peut divorcer sans avocat. Pour le tronc commun, la représentation est obligatoire sauf pour le défendeur jusqu’à l’ordonnance de conciliation (article 251 du Code civil). Dans le cadre du divorce par consentement mutuel, l’assistance est également obligatoire mais la représentation est impossible dès lors que la présence des époux est exigée (article 250).
L’article 4 de loi du 31 décembre 1971 dispose dans son alinéa 1 : « Nul ne peut, s’il n’est avocat, assister ou représenter les parties, postuler et plaider devant les juridictions (…). ». Le principe selon lequel toute personne a le droit de se défendre135 ou d’être défendu prend corps dans les règles d’assistance et de représentation. La défense passe donc par une double mission, la représentation et l’assistance. La représentation « emporte pouvoir et devoir d’accomplir au nom du mandant les actes de la procédure ».136 Et d’autre part, l’assistance « emporte pouvoir et devoir de conseiller la partie et de représenter sa défense sans l’obliger ».
Une procédure de divorce sans le ministère d’avocat a été proposée. Les époux auraient pu saisir le juge sans l’assistance d’un avocat. Ce projet a été évoqué selon certaines conditions, en cas d’absence d’enfant mineur ou de bien immobilier. Au regard des risques encourus par les candidats au divorce, risques découlant d’un divorce facilité, l’intervention de l’avocat est apparue comme indispensable. En effet, l’avocat assure d’une part, une protection renforcée des intérêts des époux dans le divorce gracieux et, d’autre part, une protection des intérêts et une modération des conflits dans le divorce contentieux (§2).

Protection renforcée des intérêts des époux dans le divorce gracieux

La procédure de divorce par consentement mutuel soumet la protection d’intérêts des parties à l’épreuve du temps (A) et au choix d’un avocat commun (B).

La protection des intérêts des parties à l’épreuve du temps

Selon le nouveau paysage procédural, il est dorénavant plus facile de divorcer. Face à l’engouement pour les accords de volonté entre époux, face aux aménagements des passerelles, face à l’accélération des procédures ; l’avocat exerce une fonction de sauvegarde des intérêts de ses clients qui sont de plus en plus livrés à eux-mêmes et il doit assurer la pacification entre les époux et il doit également garantir et préserver leurs intérêts. Il joue plus que jamais un rôle central dans la gestion des conflits. Les changements procéduraux doivent être accompagnés d’une certaine réflexion sur leur profession.
La mission de l’avocat dans la procédure de divorce par consentement mutuel est de satisfaire les époux tout en traduisant juridiquement leurs volontés communes. Sa mission commence par l’écoute puis le conseil et pour finir il matérialise en des termes juridiques les exigences des époux. Son travail relève essentiellement de la préparation et de l’assistance. En effet, le divorce par consentement mutuel n’est pas entaché de stratégies ou de rancoeurs, l’avocat guide les époux dans la procédure et relate les mesures nécessaires à l’organisation de leur vie post divorce dans la convention.
Le principe de la comparution unique modifie l’intervention de l’avocat. Pendant cette audience, le juge va s’assurer de la liberté et de la sincérité du consentement. Une fois confirmé, il prononce le divorce et homologue concomitamment la convention. La suppression de la deuxième comparution et du temps de réflexion influent sur le rôle de l’avocat. Une plus lourde responsabilité repose sur lui. Il n’y a plus d’audience de la seconde chance. Tout doit être prêt le jour de l’audience et même avant le jour du dépôt de la requête. Les époux désireux de divorcer doivent s’accorder sur l’ensemble des conséquences du divorce. C’est par le biais de la convention que se matérialise l’organisation post divorce. Le conseil doit par conséquent impérativement être minutieux lors de la préparation de la convention, il doit être complet dans le règlement des conséquences du divorce et il doit satisfaire la volonté des époux tout en respectant leurs intérêts et ceux des enfants. C’est pourquoi, dans un souci de rapidité et de pacification, l’avocat ne doit pas pour autant négliger la représentation des intérêts de son ou ses clients et il doit adapter sa mission d’assistance aux conditions procédurales et assurer un juste équilibre.
Le souhait des époux qui engagent une procédure du divorce par consentement mutuel est d’aboutir au prononcé du divorce. C’est essentiellement par le biais de la convention qu’ils peuvent se voir refuser l’homologation et en définitive le divorce. Elle doit contenir un certain nombre d’éléments indispensables afin d’être homologuée.
C’est à ce moment précis que repose sur l’avocat la lourde tâche de « respecter » les conditions légales nécessaires au prononcé du divorce. Il doit pour cela porter une attention accrue sur le projet de convention réglant les conséquences du divorce, afin de ne pas se voir reprocher le refus de l’homologation prolongeant ainsi la procédure de divorce. En effet, le juge peut refuser d’homologuer la convention et ajourner sa décision jusqu’à la présentation d’une nouvelle convention.
La mission de l’avocat peut être d’autant plus délicate, lorsque les époux choisissent d’un commun accord un avocat commun pour les assister dans le cadre du divorce par consentement mutuel (article 250 du Code civil). Le choix commun d’un avocat oblige parfois ce dernier à tempérer les époux par des négociations.

La protection des intérêts des parties et le choix d’un avocat commun

La loi a maintenu cette possibilité justifiée par l’inutilité d’imposer l’intervention de deux avocats dans une procédure présentant peu de difficulté et qui au contraire l’alourdirait. Avec la suppression d’une deuxième comparution, l’avocat unique doit redoubler de vigilance car il est le premier rempart face à l’éventualité d’une convention déséquilibrée. Sa tâche est d’autant plus difficile à accomplir, n’étant pas le conseil d’une partie mais de deux. En effet, le respect des « bornes » procédurales relatives à la convention doit être garanti par l’avocat. Le choix d’un avocat commun rend plus délicate la phase de préparation de la convention qui fera l’objet d’une habilitation du juge. Un divorce avec un seul avocat modifie la nature de son rôle. Cette confrontation à deux volontés influe sur sa mission qui peut dériver sur un rôle de médiateur. L’avocat doit informer ses clients des conséquences du choix d’un avocat commun. En effet, l’article 3 du décret du 12 juillet 2005 précise : « L’avocat exerce ses fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité, humanité et respecte les termes de son serment. Il respecte en outre, dans cet exercice, les principes d’honneur, de loyauté, de désintéressement, de confraternité, de délicatesse, de modération et de courtoisie. Il fait preuve à l’égard de ses clients, de compétence, de dévouement, de diligence et de prudence. »
Le choix de l’avocat unique peut mettre à mal de tels principes. L’avocat a des devoirs envers ses clients. Il peut lui être reproché dans une telle situation un conflit d’intérêts. Le conflit d’intérêt est une notion floue. L’article 4.2 de la décision du Conseil national des barreaux à caractère normatif n°2005-003 portant adoption du règlement intérieur national de la profession d’avocat énonce à propos du conflit d’intérêt, que lorsque l’avocat exerce sa fonction de conseil, il doit au jour de sa saisine, « donner une information complète, loyale et sans réserve à ses clients » pour ne pas compromettre les intérêts d’une ou plusieurs parties et lorsqu’ il exerce sa fonction de représentation et de défense, il ne faut pas que « l’assistance de plusieurs parties ‘conduise` l’avocat à présenter une défense différente, notamment dans son développement, son argumentation et sa finalité, de ce qu’il aurait choisie si lui avaient été confié les intérêts d’une seule partie ». Celui-ci doit par conséquent s’assurer que le choix d’un avocat commun est fait en connaissance de cause et obtenir l’accord de ses clients avant d’apporter son concours aux deux parties. L’information des époux est indispensable. L’avocat a donc un devoir d’information vis à vis de ses clients et il doit aussi s’assurer qu’il ne va pas défendre simultanément des intérêts divergents.
Selon certains auteurs, il semble parfois que le principe de délicatesse se confonde avec la notion de conflit d’intérêts138. L’avocat doit faire preuve de délicatesse dans tous les actes de sa vie professionnelle et à tous les stades de la procédure dans ses rapports avec ses clients. Le conflit d’intérêt comme le principe de délicatesse est fortement imprégné de la moralité et de la droiture. Ce risque de confusion impose donc de la part de l’avocat une anticipation parfois une abstention de sa participation. Suite à l’échec de la procédure de divorce par consentement mutuel, l’avocat ne peut plus être conseil ou le défenseur de l’une des parties dans une procédure de divorce pour faute, puisque les intérêts pécuniaires des deux époux sont en opposition selon le principe de délicatesse et l’accord de l’autre époux n’empêche par le manquement au devoir de prudence qui s’impose à l’avocat.

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L’effectivité des missions garantie par les règles de conduite inhérentes à la profession

L’avocat assure le suivi de la procédure. Il accomplit les actes de la procédure au nom de son client et sous sa responsabilité et il représente ses intérêts. La profession d’avocat s’exerce selon certains principes qui sont la garantie de l’intégrité de leur profession. L’avocat exerce ses fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité, honneur, loyauté délicatesse… Comme le souligne Monsieur Martin, les règles de conduite de l’avocat désignent « plutôt des valeurs morales, déclenchant des règles de bonnes conduites dans une société policée.»147 En matière de divorce, l’aspect relationnel et psychologique de l’avocat est exacerbé par l’intimité du conflit en cause.
Comme on a pu le relever, le praticien intervenant en droit de la famille ne peut exercer pareillement que dans les autres branches du droit. La particularité du droit de la famille pour la fonction d’avocat découle certes du fait que le droit touche le plus intime (la famille, les sentiments) mais en plus la réforme du divorce a posé des impératifs que l’avocat doit s’efforcer de réaliser.
Dans ce domaine, il est pourvu d’une mission supplémentaire, autre que celle de défendre son client. Il doit assurer l’effectivité des objectifs procéduraux. Et c’est par « le respect des valeurs essentielles de la profession, au nombre desquelles la loyauté, la confraternité, la délicatesse, la modération et la courtoisie et les devoirs de compétence, de dévouement, de diligence et de prudence » qu’il est « le meilleur garant de la pacification effective du divorce et de la préservation des droits et intérêts des époux en dépit de l’accélération de la procédure. » 148 Les diverses transformations procédurales ont eu un impact sur la profession d’avocat. L’adaptation du praticien aux nouvelles exigences légales ne peut se réaliser sans un réajustement des principes de déontologie. La lourde tâche de l’avocat dans la procédure de divorce lui impose une certaine droiture.
L’avocat permet de réaliser un passage réussi de chaque étape de la procédure.
Le passage réussi d’une étape conduit à l’étape suivante pour arriver à l’étape finale qui est le prononcé du divorce. L’avocat joue un rôle de filtre dans le processus procédural qui ouvre les portes à l’obtention du divorce. En effet, il est le seul qualifié pour garantir une traversée sans embûche. Pour réaliser cette traversée, le conseil doit tenir compte de deux considérations. D’une part, il doit assurer la défense des intérêts de son client et d’autre part, donner vie aux impératifs d’apaisement posés par la loi. C’est à juste titre que le Ministre de la justice de l’époque a appelé les avocats : « les intermédiaires de la complexité ».
Lui seul en tant que professionnel du droit a une entière connaissance du droit, de l’état des lois et des évolutions de la jurisprudence. « Il guide (l’époux) dans son approche en l’inscrivant dans la réalité juridique » et il est également le « vecteur de l’esprit des lois dans le sens où il est l’acteur incontournable non plus seulement du combat mais de la paix. ».
La loi a attribué une nouvelle fonction à l’avocat par la création de l’article 255(9°) du code civil qui prévoit que le juge peut « désigner tout professionnel qualifié en vue de dresser un inventaire estimatif ou de faire des propositions quant au règlement des intérêts pécuniaires des époux ». C’est une nouvelle déclinaison de l’intervention de l’avocat dans le divorce. Elle est similaire à celle prévu par l’ancien article 1116 du N.C.P.C., sauf qu’il peut intervenir dès la tentative de conciliation. Il peut établir un inventaire, formuler des propositions de règlements des intérêts pécuniaires. Il va envisager la liquidation du régime matrimonial dans son intégralité et prévoir les modalités d’une éventuelle prestation compensatoire. L’avocat en tant que professionnel qualifié va prévoir avec la collaboration des époux un projet réglant tous les aspects pécuniaires qu’engendre un divorce. Il va pour cela suggérer des solutions. Ces propositions globalisent le règlement financier et sont emprunts de consensualisme.
Elles facilitent le travail à vocation patrimoniale qui doit être accompli en aval de la procédure et permettent de préparer dès l’audience de conciliation la vie future des candidats au divorce. « L’objectif du rapport, au-delà de l’inventaire, est de permettre d’avoir une vision globale des différentes propositions possibles quant aux règlements pécuniaires des époux, liquidatifs et compensatoires. Le rapport devra synthétiser les positions ainsi que les propositions formulées de part et d’autre. Le professionnel qualifié formulera ses propres propositions en veillant à ce qu’elles puissent être judiciairement mises en oeuvre. ».

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