Le stress oxydant

D’où viennent les radicaux libres ?

Listées de manière non exhaustive dans le tableau II, les sources de radicaux libres sont multiples. Elles peuvent être aussi bien exogènes (mode de vie, environnement) qu’endogènes (mécanismes biochimiques).

La respiration mitochondriale

Plus connue sous le terme de « chaine respiratoire », la respiration mitochondriale consiste en un transport d’électrons réalisant l’oxydation de coenzymes réduites, produites principalement dans les mitochondries. Elle est indispensable pour les organismes aérobies (organismes ayant besoin d’oxygène pour vivre) qui y puisent leur énergie.
La figure 6 illustre la succession des oxydations de coenzymes tels que NADH et coQ10 générant ainsi des protons qui seront utilisés pour la production d’énergie.
Les oxydations de la chaine respiratoire vont permettre en final la production d’énergie sous forme d’ATP (Adénosine Triphosphate) dans la membrane interne de nos mitochondries. Elles fournissent à nos cellules 36 molécules d’ATP à haut potentiel énergétique grâce à la réduction de l’oxygène qui s’y déroule. (Haleng).

La phagocytose

La phagocytose permet de tuer et digérer les bactéries et champignons lors d’épisodes infectieux. Les cellules phagocytaires, que sont les macrophages, les monocytes, et les polynucléaires neutrophiles et éosinophiles, constituent la première ligne de défense de l’hôte contre les microorganismes.
La phagocytose s’accompagne d’un phénomène appelé « explosion oxydative ». (Baldridge) Le complexe de la NADPH (Nicotinamide Adénine Dinucléotide Phosphate réduit) oxydase ou Nox-2 s’active et produit une énorme quantité d’anions superoxydes (O2°). Lorsqu’elle est contrôlée, cette production de radicaux libres joue un rôle majeur dans la microbicidie.

Une autre voie d’oxydoréduction

Les cytochromes P450 sont des enzymes intervenant dans les réactions d’oxydoréduction de nombreuses molécules, aussi bien de métabolites que de molécules étrangères à l’organisme (xénobiotiques). Ces enzymes peuvent aussi bien oxyder les acides gras insaturés que des xénobiotiques comme les médicaments, produisant dans tous les cas des radicaux libres. Ces oxydations peuvent être incriminées pour expliquer la toxicité de produits étrangers, comme le tabac, les pesticides, mais elles peuvent être aussi favorables au métabolisme de certains médicaments qui verront alors leur élimination favorisée. On retiendra surtout que par leur action enzymatique, les cytochromes P450 participent à la production d’espèces réactives de l’oxygène.
Il a été démontré par Granville et son équipe le bénéfice d’un inhibiteur de cytochrome cardiaque dans l’infarctus du myocarde, limitant ainsi l’effet du stress oxydant dans cette pathologie. (Granville) Plus spécifiquement, c’est le cytochrome 2E1 qui joue un rôle dans la survenue de stress oxydant lié à l’apparition des complications du diabète. Il a été démontré que l’inhibition de cette cytochrome entrainait une diminution importante de la production de ROS. (Raza)

La réaction de Fenton

La réaction de Fenton est une réaction d’oxydation de H2O2 par des sels métalliques qui va générer des espèces radicalaires. Elle est importante à connaître dans la génération d’espèces radicalaires. (Savel)
Ainsi, les métaux toxiques (chrome, cuire, vanadium), mais aussi le cuivre et le fer libre (existant lors de surcharges générales ou localisées) génèrent des radicaux hydroxyles, très réactifs, à partir du peroxyde d’hydrogène, par la réaction de Fenton :

Les radicaux libres sont – ils indispensables à la vie ?

Susceptibles d’engendrer de nombreuses pathologies, les radicaux libres remplissent néanmoins de nombreuses fonctions physiologiques dont voici quelques exemples.
La phagocytose, vue précédemment.
Les ROS constituent aussi un système de transmission des signaux, sans doute apparu très tôt dans l’évolution de la vie. Les radicaux libres pouvant être considérés comme de véritables messagers intra et extracellulaires.
Ils permettent d’induire une réponse cellulaire face à de nombreux stress (thermiques, ultraviolets, xénobiotiques), en induisant l’expression de gènes de défense antioxydants.
L’inductibilité de ces gènes explique en partie la capacité des cellules et des animaux à s’adapter à la présence de ROS. Les ROS peuvent aussi activer des gènes de fonctions cellulaires autres que ceux de la lutte contre les radicaux libres, par l’intermédiaire de facteurs redox sensibles comme AP1, HIF-1, ou NF-KB. (Haddad)
Enfin, on peut citer le processus de fécondation, au cours duquel les spermatozoïdes sécrètent de grandes quantités de ROS pour percer la paroi membranaire de l’ovule.

Maintenir l’équilibre : Les défenses antioxydantes

Afin de contrer l’action oxydante des radicaux libres, l’organisme dispose de plusieurs mécanismes protecteurs qui vont permettre la détoxification des radicaux libres. Néanmoins, il est important de noter que l’organisme ne cherche pas à les éliminer totalement, mais à contrôler leur niveau. La thérapeutique antioxydante ne doit d’ailleurs pas oublier leurs activités utiles sous peine d’échec, voir d’effets toxiques paradoxaux.

Les systèmes enzymatiques antioxydants

Les systèmes de défense enzymatiques font intervenir trois enzymes clés : La superoxyde dismutase (SOD), la catalase (CAT), et la glutathion peroxydase (GPx). (Fig 11)

Les superoxydes dismutases (SOD)

Les SOD sont des enzymes présentent chez tous les êtres vivants aérobies. Elles représentent l’une des premières lignes de défense en agissant dès le début de la cascade oxydative par action directe sur l’anion superoxyde (O2°). En effet, elles catalysent la réaction de dismutation de l’anion superoxyde (O2°) en peroxyde d’hydrogène (H2O2), prévenant ainsi l’accumulation de l’anion superoxyde (O2°). (Fig 12) (Haleng).

Les glutathion peroxydases (GPx) et la glutathion réductase (GR)

Les GPx sont activées par le sélénium. Elles catalysent la décomposition du peroxyde d’hydrogène (H2O2) en couplant sa réduction en eau (H2O) avec l’oxydation du glutathion réduit (GSH) en bisulfure de glutathion (GS-SG). Cette oxydation de glutathion permet « d’éponger » de nombreux radicaux libres.

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Les systèmes non-enzymatiques

Un certain nombre de substances, d’origine endogène ou alimentaire s’opposent à l’accumulation de radicaux libres dans l’organisme. Quelques exemples sont développés ci dessous.

Les antioxydants endogènes

Le glutathion et les protéines thiol

Le glutathion (GSH) est le composé thiol (-SH) majoritaire au sein de nos cellules qui agit comme antioxydant. Dans les conditions physiologiques, sa forme oxydée (GSSG) est en concentration très faible. La plupart des protéines qui contiennent des groupements « thiols » possèdent des propriétés réductrices et piègent facilement les ROS, il est donc intéressant que ces protéines soient préservées et c’est une des fonctions de GSH. En biologie, le taux de glutathion oxydé est un marqueur du stress oxydant. Aussi, le rapport GSH/GSSG permet d’objectiver l’importance du stress. Au cours du vieillissement ou lors d’un exercice intense par exemple, ce rapport tend à diminuer.

Le coenzyme Q10

De la famille des ubiquinones, le coenzyme Q10 peut être endogène ou apporté par l’alimentation. Ce coenzyme possède un caractère lipophile qui lui permet de s’insérer dans les membranes, dont celles des lipoprotéines. Il constitue un puissant inhibiteur de la peroxydation lipidique, en synergie avec la vitamine E. Il a été démontré que, par son effet sur le stress oxydant, le CoQ10 diminuait le besoin en insuline. (Fazakerley)

L’acide lipoïque (LA)

L’acide lipoïque (LA), est un composé di thiol aujourd’hui commercialisé comme complément alimentaire et thérapeutique pour ses propriétés antioxydantes.
Il fonctionne comme un cofacteur enzymatique pour l’alpha-céto-glutarate et la pyruvate déshydrogénase mitochondriale, qui détiennent un rôle important dans le métabolisme oxydatif de nos cellules. (Reed) Dans l’organisme humain, le LA provient de la synthèse mitochondriale de novo à partir de l’acide gras octanoïque et de la cystéine sous l’action d’une enzyme : L’acide lipoïque synthase  mitochondriale (LASY). (Morikawa, Padmalayan) Il est à noter que cette synthèse de novo est capable à elle seule de fournir le LA nécessaire pour remplir son rôle de cofacteur. Néanmoins, notre alimentation peut aussi être une source de LA. Concrètement, on le retrouve surtout dans les viandes au niveau des tissus à haute activité métabolique (muscles, coeur, foie), et à un degré moindre, dans les fruits et légumes.

Les antioxydants d’origine alimentaire

La vitamine E (tocophérol)

Le terme « vitamine E » désigne en réalité un ensemble d’isomères différents appelés tocophérols (α, β, γ, δ) et tocotriénols (α, β, γ, δ). D’un point de vue biologique, seuls l’ et le - tocophérol sont particulièrement intéressants et constituent de véritables antioxydants. Liposolubles, ils s’incorporent facilement dans les membranes cellulaires qui, étant riches en acides gras polyinsaturés facilement oxydables, sont très exposées aux dommages causés par les radicaux libres. Les tocophérols réagissent avec les radicaux peroxyles (ROO°), empêchant ainsi la propagation de la peroxydation lipidique. (Fig 15)

La vitamine C (ascorbate)

Connue pour ses nombreux bénéfices (contribution au bon fonctionnement du système immunitaire, implication dans la synthèse de collagène et des globules rouges, etc), la vitamine C est avant tout un excellent antioxydant. Elle est capable de réduire l’anion superoxyde (O2°), les radicaux hydroxyles (OH°) et peroxyles (ROO°), et de régénérer la vitamine E. Comme la plupart des vitamines, elle est apportée par l’alimentation. Un taux bas correspond soit à un déficit d’apport, soit à une consommation excessive de tabac, ou encore à certaines pathologies. La vitamine C peut être régénérée par le NADPH ou par le glutathion.

Le bêta-carotène

Le bêta-carotène est le chef de file du groupe des caroténoïdes comportant plus de 600 molécules différentes. Après une hydrolyse hépatique, il donne naissance à deux molécules de vitamine A, on l’appelle donc aussi « pro vitamine A ». C’est un piégeur non stoechiométrique d’oxygène singulet très avantageux, puisqu’une seule molécule de bêta-carotène est capable d’inactiver des centaines de molécules d’oxygène singulet.

Les polyphénols flavonoïdes

Responsables de la flaveur, de la couleur, et de la texture des aliments, les polyphénols constituent une famille importante d’antioxydants présents dans les végétaux. Globalement, ce sont d’excellents piégeurs de ROS et de très bons chélateurs des métaux de transition, comme le fer et le cuivre.

Le sélénium

Le sélénium n’est pas un antioxydant en tant que tel, mais joue un rôle primordial dans les défenses antioxydantes en étant le cofacteur de la GPx.

Le cuivre

A concentration physiologique, le cuivre est le cofacteur de nombreuses enzymes, dont la SOD, citée plus haut. Cependant, lorsque sa concentration est trop élevée, il joue un rôle important dans le déclenchement de réactions, comme la réaction de Fenton, qui conduisent à la production de ROS. En tant que métal de transition, il peut donc devenir pro oxydant.

Le zinc

Comme le cuivre, le zinc est un des cofacteurs essentiels de la SOD. Il est aussi capable d’inhiber les réactions de formation de ROS induites par des métaux de transition comme le fer ou le cuivre. Aussi, le rapport Cu/Zn, normalement inférieur à 1,5, est un excellent indicateur de l’état de stress oxydant d’un individu.

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