Le sacré : un espace et un moment

Nous devons nous interroger sur la pertinence de laisser entre les mains de quelques religieux et intellectuels de l’art le loisir de déterminer l’espace du sacré dans notre culture. Les vestiges d’une culture religieuse demeurent présents et nourrissent notre intérêt porté pour la diversité des courants de spiritualité qui marquent notre époque. Notre besoin de sacré, s’exprime aussi, dans notre besoin de trouver sens à tout ce qui semble dénué de réalité, et trouble notre illusion de vivre une existence pleine et satisfaisante.

L’art demeure un véhicule privilégié pour questionner notre rapport au monde et j’irais jusqu’à dire, pour questionner le monde réel. Je propose une aventure du sacré en exposant mon cheminement personnel et professionnel à travers l’espace de création numérique. En effet, le numérique sera le véhicule d’une exploration interdisciplinaire qui propose un dialogue entre différents espaces de création, qui fera appel à une multitude de médiums (théâtre, danse, performance, vidéo), ceci afin de tenter une expérience du sacré, de situer celle-ci dans une rencontre avec les arts d’interprétation.

Dans le théâtre que nous voulons faire, le hasard sera notre dieu, car se qui importe, c’est moins le spectacle, que l’action de celui-ci sur le spectateur. Chaque spectacle deviendra par le fait même une sorte d’événement.

Il s’agit de retrouver l’essentiel d’un geste symbolique, pas n’importe lequel : celui qui porte sens et fait signe, celui qui est saisi par le regardeur, et ce de façon subjective. Je voudrais réanimer la notion de spectateur-visiteur de l’œuvre, lorsque celui-ci pénètre dans le lieu sacré du théâtre et en accepte les conventions, lorsqu’il se prête au jeu d’un rituel revisité et profane.

C’est donc dans la mémoire phénobiographique de mes expériences personnelles et professionnelles, que j’ai revisité les différents chemins de création qui ont marqués mon histoire, autour de ce questionnement qui m’intéresse : le sacré. J’entends par phénobiographie une démarche qui me permet d’isoler des éléments de mon expérience biographique pour les considérer indépendamment du contexte social, familial et culturel, de leur émergence, c’est-à-dire en tant qu’expérience fondée dans la sensibilité et l’intuition. Mon intuition et le chaos de la création, les vécus à travers ma subjectivité, m’ont mené à témoigner de mes expériences sensibles. Je partage les découvertes qui ont guidé mes expériences et mes intuitions vers la création de mon œuvre interdisciplinaire. C’est donc à la découverte de ce parcours expérientiel singulier, que je convie le lecteur à travers ce mémoire, pour découvrir dans son aboutissement, la représentation visuelle de mon œuvre. Une œuvre qui fait objet de mon corps comme écran de projection afin de transporter le regardeur vers un univers allégorique, symbolique et hypnotique, où la réalité et le rêve se confondent, l’éveil et le cauchemar se rencontrent dans un espace performatif du sacré.

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À terme je peux établir clairement que l’ensemble des dispositifs interdisciplinaires qui s’articulent autour de cette œuvre, sans oublier les références symboliques du sacré et celles de notre culture judéo-chrétienne, ainsi que la force et la densité du texte produit, en arrivent à créer ce que je nomme l’espace du sacré.

Le moment du sacré

Nous avons besoin que le spectacle auquel nous assistons soit unique, qu’il nous donne l’impression d’être aussi imprévu et aussi incapable de se répéter que n’importe quel acte de la vie . Bernard Dort

Mais pour arriver à ce moment unique, il nous faut rechercher une vérité et questionner celle-ci, il nous faut tenter un chemin émotionnel construit à partir de notre vécu. Ce voyage intérieur, exigé par les arts d’interprétations, demande un abandon de la part de l’interprète, un lâcher-prise qui lui permettra d’y trouver sa vérité et son acte de vie.

Je ne saurais évoquer le moment du sacré sans mentionner la présence de la mort dans le parcours de ma vie. J’ai perdu ma mère à l’âge de 18 mois, autant dire que je ne l’ai pas connue de conscience, et pourtant, elle jouera un rôle majeur dans ce qui m’a construit comme individu. Cette réalité teintera ma réflexion sur la vie au sens général. Dès mon enfance, j’étais attiré par la scène, je prenais plaisir à écrire et monter de petites saynètes que je présentais au voisinage avec le plaisir des jeux d’enfants.

Ce plaisir demeurera pour moi essentiel à la pratique de cet art du moins celui que j’ai produit, ce plaisir du travail de création. Mon chemin sera celui d’un être curieux, je n’aurai de cesse d’explorer les différentes sources du savoir théâtral, de questionner les différentes écoles de pratique de cette forme d’art que nous nous plaisons à nommer « art du vivant » .

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 LE SACRÉ : UN ESPACE ET UN MOMENT
1. 1 Le sacré est un espace
1.2 Le moment du sacré
CHAPITRE 2 CHEMIN DE CRÉATION
2.1 Le chemin émotionnel
2.2 L’écriture expérientielle
CHAPITRE 3 UN CHEMIN DE RECHERCHE
3.1 L’objet s’anime : ces objets qui prennent vie
3.2 Ce geste qui appelle au sacré
3.3 Un besoin de liberté : la création d’une compagnie
3.4 Une expérience d’impression. Une théorie sur la surpopulation
CHAPITRE 4 LE RELIGIEUX ET LES SYMBOLES DU SACRÉ
4.1 L’univers du sacré
4.2 Trace d’une fondatrice, une sacrée rencontre
4.3 Muséologie et arts de la scène.
4.4 Marie, une inspiratrice, un culte et des trésors.
4.5 Ecce homo – voici l’Homme.
CHAPITRE 5 UNE VIRTUALITÉ SACRÉMENTIELLE
5.1 La chute perpétuelle, une représentation de la finitude
5.2 Le projet Manque
5.3 Projet final Le bord de l’eau de la mort
CONCLUSION

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