Le rôle grandissant de l’innovation à l’ère du capitalisme cognitif
Crises du Fordisme et émergence du capitalisme cognitif
Les fondements du Fordisme : L’invention de la notion du « Fordisme » à la fin des années 1920, revient au leader communiste italien Antonio Gramsci, qui l’a utilisée pour décrire non seulement une méthode de production, mais un mode de vie et un système complet de production, marquant une rupture avec les modes précédents d’organisation industrielle1 . Selon B.Patrice, le fordisme est une rationalisation des idées du Taylorisme, en formant des chaînes de montage de production de séries standardisées2 . a. Origines et développement du Fordisme : Le système de production de masse connu par le « Fordisme » a fait son apparition au début du 20ème siècle, en l’année 1913, grâce à l’industriel américain Henry Ford Néanmoins, Ford n’est pas l’initiateur de la chaîne de montage, mais l’acteur principal de sa diffusion, car ce principe est dû à l’américain Frédérick Taylor qui l’a publié dans son ouvrage sur la division du travail (Principles of Management, 1911). Une chaîne de montage, consiste à ordonner les tâches nécessaires à l’assemblage d’un produit, de façon à réduire les délais de production. Ce principe a permis l’émergence d’un nouveau système de production qui a été rapidement adopté par plusieurs entreprises. Le fordisme en tant que système de production repose sur deux concepts fondamentaux : les économies d’échelle et les économies d’agglomération3 . * Les économies d’échelle : consistent à abaisser les coûts de production et à augmenter les unités produites par la chaîne de montage. 1 : G.Murray et al, « L’organisation de la production et du travail : vers un nouveau modèle ? », Ed. Amazon, Paris, 2004. 2 : B.Patrice, « Ingénierie des processus métiers, de l’élaboration à l’exploitation », Ed. Amazon, Paris, 2008. 3 : J.P Rodrigue, « L’espace économique mondial : les économies avancées et la mondialisation », Presse de l’université de Québec, Québec, 2000. Chapitre (II) : Le rôle grandissant de l’innovation à l’ère du capitalisme cognitif – 45 – Figure (4) : Gains de productivité sur une chaîne de montage : Source : J.P Rodrigue, op.cit. P : 5 Sur cet exemple, sans division du travail un ouvrier peut produire une unité pour une journée de travail. Il doit réaliser tout seul les quatre étapes nécessaires à l’assemblage de l’automobile. Par contre, avec une division du travail le long d’une chaîne de montage, quatre ouvriers arrivent à produire huit voitures par jour, soit un niveau de productivité deux fois plus élevé. * Les économies d’agglomération : consistent à diminuer les coûts de distribution, en situant une activité près de ses marchés et ressources. En outre, les coûts de production peuvent être réduits, en structurant les activités connexes en un grand complexe industriel. Par ailleurs, le modèle fordiste se caractérise selon C.Gendron par trois éléments principaux 1 : – un principe d’organisation du travail, reposant sur la séparation entre la conception et l’exécution des tâches, visant la réalisation d’une production de masse et des gains de productivité importants. – un régime d’accumulation où les salariés accordent un droit de gérance aux capitalistes, en contrepartie d’un partage des gains de productivité. – un mode de régulation, résultant des conventions collectives et de l’état providence, qui garantit aux salariés un revenu régulièrement croissant .
L’âge d’or du Fordisme
A la fin de la 2ème guerre mondiale, le Fordisme a fortement contribué à la croissance économique de plusieurs pays développés et en voie de développement. En fait, les trente glorieuses représentant les 30 années qui se sont écoulées entre la fin de la 2ème guerre mondiale (1945) et le premier choc pétrolier (1973-1974), ont été marquées selon J.P Rodrigue, par une période de croissance économique presque continue pour l’ensemble des pays industrialisés et pour plusieurs pays en voie de développement. Au cours des années 1950, le modèle fordiste est considéré comme un élément fondamental de l’économie, surtout avec l’augmentation de la consommation de véhicules individuels et de produits électroménagers.
Les grandes innovations du Fordisme
A l’ère du fordisme, l’amélioration des techniques existantes comme la turbine à vapeur de Parson en 1884, s’est accompagnée vers la fin du 19ème siècle et le début du 20ème siècle d’une accélération de l’innovation technologique dans plusieurs domaines, dont les plus notables touchent l’agriculture, le transport routier, maritime, aérien et les hydrocarbures2 . * L’agriculture : Sous le système de production fordiste, l’agriculture a enregistré une production croissante, due essentiellement à quatre facteurs : la mécanisation agricole, la spécialisation de la production, l’agrandissement de la taille des exploitations et l’application rationnelle des méthodes scientifiques. Concernant la mécanisation agricole, elle a été employée à une grande échelle, en requérant un nombre restreint de main d’œuvre pour une production élargie. Pour ce qui est de la spécialisation de la production, elle entraîne à la fois une spécialisation de la main d’œuvre, ainsi que de l’équipement employé. Quant à l’agrandissement de la taille des exploitations qui requière une somme importante de capitaux, l’agriculteur devient assujetti aux institutions financières publiques ou privées, pour le financement de son exploitation. Enfin, l’application rationnelle des méthodes scientifiques, concerne l’utilisation d’engrais et de nouvelles techniques qui doivent être maîtrisées par l’agriculteur avec lequel collabore le milieu scientifique. Transport routier : Le moteur à combustion interne est l’une des innovations technologiques, ayant un impact très puissant sur le transport routier. En fait, l’apparition du moteur à gazoline ainsi que le moteur diesel, ont ouvert la voie vers de nouveaux secteurs industriels comme le secteur automobile où la Ford T représente de nos jours, le premier véhicule construit à grande échelle à partir de 1913. * Les hydrocarbures : A côté du combustible offert par le secteur des hydrocarbures aux moteurs à combustion interne (gazoline, diesel, mazout), ce secteur a permis également de nouvelles possibilités industrielles concernant la synthèse des matières plastiques. En 1909, Baekeland a réussi la production des tous premiers plastiques artificiels. Au cours de la Deuxième Guerre mondiale, la production de matières artificielles dérivées des hydrocarbures comme le caoutchouc synthétique, le polyester et le nylon, se faisait à grande échelle. * Transport maritime : L’innovation du moteur à mazout a fortement contribué à l’augmentation de la vitesse et de la capacité du transport maritime, ce qui a permis l’émergence de grandes villes portuaires. Le mazout permettait des économies d’énergie très importantes, à savoir une réduction de la consommation des navires selon un facteur de 90% relativement au charbon1 . * Transport aérien : Après la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, le transport aérien a connu une véritable révolution. L’année 1958 est marquée par l’entrée en service du premier avion à réacteurs à vocation commerciale, le Boeing 707, une véritable innovation qui a révolutionné le transport aérien dans le monde entier .