LE RHABDOMYOSARCOME

LE RHABDOMYOSARCOME

INTRODUCTION

Le rhabdomyosarcome (RMS) appartient aux sarcomes des tissus mous qui a une différenciation musculaire striée et peut se développer presque dans n’importe quelle partie du corps humain, y compris dans des sites où il n’existe normalement pas de tissu musculaire strié [54]. Le rhabdomyosarcome est plus fréquent chez les jeunes enfants de moins de 5 ans et les adolescents. Il représente 60 à 70% des tumeurs mésenchymateuses malignes de l‘enfant et 5 à 8% des cancers de l’enfant [65, 71]. Mais il est moins commun chez les adultes représentant 2 à 5% de tous les sarcomes des tissus mous [19]. Les sites les plus fréquents de rhabdomyosarcomes sont la tête et le cou (40%) incluant les tumeurs de l’orbite et les tumeurs para-méningées, l’appareil génitourinaire (25%), les membres (20%) et le tronc (10%) [54]. Les signes évocateurs d’un rhabdomyosarcome dépendent de la localisation initiale et de l’atteinte des organes voisins ; d’où l’intérêt de l’imagerie dans le diagnostic. L’échographie, le scanner et l’imagerie par résonance magnétique jouent un rôle capital dans la détection et la caractérisation d’une masse. Ces examens permettent ainsi de reconnaitre l’origine de la tumeur et d’orienter la prise en charge et le suivi post-thérapeutique. Le diagnostic de certitude d’un rhabdomyosarcome repose sur l’histologie et la positivité de marqueurs musculaires en immunohistochimie (desmine et myogénine). L’étude histologique permet de distinguer trois formes histologiques principales: les RMS embryonnaires, les RMS alvéolaires et les RMS pléomorphes. Le pronostic du rhabdomyosarcome est lié à l’histologie, à l’absence de métastase au moment du diagnostic, à l’âge du patient, à la localisation, à la taille et à l’opérabilité de la tumeur.Nous nous sommes intéressés au profil épidémiologique et histologique des rhabdomysarcomes à Dakar grâce à l’exploitation des données de patients recensées dans les laboratoires d’anatomie et de cytologie pathologiques (ACP) de l’hôpital Aristide Le Dantec et de l’hôpital Général de Grand Yoff entre le 1er Janvier 2011 et le 31 Décembre 2018. Dans une première partie, nous ferons la revue de la littérature, puis nous décrirons les patients et méthodes d’étude, enfin nous présenterons nos résultats. Ces résultats seront commentés et comparés aux données rapportées par divers auteurs avant de conclure

Embryologie du tissu musculaire 

Le muscle squelettique provient embryologiquement du mésoderme somatique. Le mésoderme para-axial apparait au 17e jour du DIU et est à l’origine des somites qui seront complétement formés vers le 30e jour. A ce moment, 42 à 44 paires de somites arrondis peuvent être trouvés, adjacents à la notochorde dans la ligne médiane. A la quatrième semaine, les somites mésodermiques se séparent en dermatomes et en myotomes. Ces derniers donnent naissance aux muscles de la paroi du corps. La division dorsale des myotomes donne les épimères, qui sont à l’origine des muscles du dos, tandis que les hypomères issus de la division ventrale se différencient pour donner les muscles latéraux et ventraux de la paroi du corps, y compris les intercostaux, les obliques abdominaux et les sangles du cou. Les muscles des extrémités proviennent des bourgeons qui se forment à partir de la plaque latérale mésodermique qui est aussi à l’origine des os, des tendons des ligaments et des vaisseaux sanguins. Les cellules musculaires les plus immatures sont des myoblastes. Ceux-ci sont formés à partir du mésoblaste para-axial à la 3e semaine, par migration des cellules des somites vers les différentes régions de l’embryon. Les myoblastes sont des cellules mononuclées, fusiformes avec des nucléoles proéminents et une forte activité mitotique. A la 8e semaine, les myoblastes se fusionnent et se transforment en tubes donnant les myotubes. La différenciation des myotubes aboutit à la formation des myofibrilles ou fibres musculaires striées (figure 1). Le nombre de cellules musculaires striées est défini à la naissance. 5 Figure 1 : Formation du rhabdomyocyte 

Histologie du tissu musculaire 

 Structure générale 

Les muscles striés sont formés de cellules musculaires juxtaposées parallèlement, organisées en faisceaux. Le muscle est entouré de tissu conjonctif vasculaire (épimysium) d’où partent des travées conjonctives (périmysium) qui divisent le muscle en faisceaux. Ce tissu conjonctif est le support du réseau vasculaire et entoure l’ensemble des éléments nerveux (figure 2). Chaque fibre musculaire est également entourée de tissu conjonctif (endomysium) provenant du périmysium. Les cellules musculaires ne se divisent pas. En cas de lésion, elles sont remplacées par division des cellules satellites, cellules souches inactives non visibles en microscopie optique. En microscopie électronique, elles apparaissent petites et 6 fusiformes, situées entre la lame basale et la membrane plasmique des myocytes (figure 1). Figure 2 : Structure générale du tissu musculaire strié 

 Microscopie optique 

En microscopie optique, les cellules musculaires striées apparaissent comme des éléments allongés, plurinucléés qui présentent une striation transversale régulière. Ces cellules mesurent 10 à 100 μm de diamètre et ont une longueur variable allant de quelques centaines de μm (muscles oculaires) à plusieurs centimètres pour certains muscles squelettiques. 7 Figure 3 : Coupe longitudinale des fibres musculaires striées HE X 40. o La membrane plasmique La membrane plasmique entoure la cellule et est doublée d’une lame basale, l’ensemble forme le sarcolemme. o Les noyaux Plusieurs centaines de noyaux sont en périphérie de la cellule et contre la membrane plasmique. Ils sont ovoïdes allongés dans le sens de la fibre. o Le sarcoplasme Il est caractérisé par les myofibrilles, ainsi que par l’abondance des mitochondries, et la présence d’un réticulum sarcoplasmique lisse organisé de façon spécifique. o Les myofibrilles Elles occupent la majeure partie du cytoplasme et se regroupent en faisceaux qui forment en coupe longitudinale des colonnes (les colonnes de Leydig) et des polygones en coupe transversale (les champs de Cohnheim). Il existe entre les myofibrilles, des bandes étroites de sarcoplasme qui contiennent les organites de 8 la cellule. La striation apparaît comme une alternance de bandes claires et de bandes sombres (figure 3).

 Microscopie électronique 

Les myofibrilles s’organisent en cylindres disposés parallèlement et présentant une striation périodique caractérisée par l’alternance de bandes sombres A (anisotropes) et de bandes claires I (isotropes). La partie centrale des disques I est marquée par la strie Z. La zone plus claire qui apparaît au milieu du disque A est la strie H, elle-même centrée par la ligne M. L’élément répétitif et fonctionnel de base est le sarcomère délimité par deux stries Z (figure 4). Figure 4 : Représentation schématique du sarcomère en microscopie électronique [39] o Système sarcotubulaire Le réticulum sarcoplasmique est un réticulum lisse disposé en tubules longitudinaux dont l’extrémité est dilatée en regard de la jonction disque A – 9 disque I. Les tubules sont reliés les uns aux autres par des tubules transversaux en regard des stries Z (figure 4). Le système T est un ensemble de canalicules transversaux qui sont des invaginations tubulaires de la membrane plasmique entourant les myofibrilles aux jonctions bande A-bande I. A ce niveau, le système T, associé aux extrémités dilatées du réticulum, forme les triades. La lame basale passe en pont au-dessus des systèmes T. De nombreuses mitochondries sont présentes entre les myofibrilles et sous la membrane plasmique. Elles assurent l’énergie nécessaire à la cellule. Le glycogène est relativement abondant, apparaissant sous la forme de particules dispersées dans les bandes de sarcoplasme.

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Structure moléculaire 

o Myofilaments fins Les myofilaments fins ont un diamètre de 8 nm et sont composés principalement d’actine. Chaque filament actine F est formé par la polymérisation de nombreuses molécules d’actine globulaire G. Ces myofilaments sont fixés deux par deux par leur extrémité caudale sur les stries Z à de l’alpha-actinine et l’ensemble forme une hélice sur laquelle se logent des molécules de tropomyosine (protéine longue en forme de bâtonnet qui s’enroule autour d’un filament d’actine pour le stabiliser et le raffermir) et des complexes de troponine (complexe composé de trois polypeptides différents fixés sur la tropomyosine). o Myofilaments épais Les filaments épais de myosine sont constitués par l’association de 200 à 300 molécules de myosine native. Chaque molécule a un poids moléculaire d’environ 470 000 daltons et présente une longueur de 140 à 170 nm. Chaque molécule est 10 composée de deux chaînes lourdes en forme de club de golf dont les queues s’enroulent l’une autour de l’autre et de quatre chaînes légères fixées sur les têtes des chaînes lourdes. Plusieurs molécules se rassemblent en rangées régulières pour former le filament. o Protéines accessoires Le fonctionnement du muscle squelettique dépend de l’alignement précis des myofilaments d’actine et de myosine dans la myofibrille. Ceci est permis grâce à des protéines qui lient entre eux les myofilaments et leurs confèrent l’élasticité nécessaire leur permettant de retrouver leur forme initiale après la contraction. Ces protéines sont :  l’alpha-actinine qui est située sur la strie Z  la myomésine qui fixe la myosine dans la région de la strie M  la titine est une protéine élastique très longue (1 μm) parallèle aux myofilaments et qui fixe les extrémités des filaments épais à la strie Z. La titine a des propriétés élastiques.  la nébuline est également une longue protéine qui s’étend le long des filaments fins dont elle maintient la structure hélicoïdale.  la desmine (qui fait partie du cytosquelette) lie entre elles les myofibrilles et à la membrane plasmique.  la protéine C lie la myosine. o Protéines du sarcolemme Différentes protéines jouent un rôle important dans les relations entre le cytosquelette des cellules musculaires et la matrice extra-cellulaire. Il s’agit de :  la dystrophine qui intervient dans les relations entre les myofilaments et un complexe glycoprotéique membranaire.  les complexes des dystroglycanes et des sarcoglycanes 11  la laminine qui fait le lien avec les éléments de la matrice extracellulaire 

Epidémiologie des rhabdomyosarcomes 

Le rhabdomyosarcome est l’un des plus fréquents sarcomes du tissu mou de l’adolescent et de l’adulte jeune. Il représente 3 à 4% de tous les sarcomes de l’enfant et de l’adulte jeune avec une incidence de 4,5/1000000 et par an [50]. Aux Etats-Unis, dans le groupe d’âge entre 0-19 ans, 350 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année avec une incidence annuelle du rhabdomyosarcome estimée à 8/1000000. L’incidence chez les filles afro-américaines est de 4.0/1000000 ce qui constitue la moitié de celle des filles caucasiennes (8.5/1000000), tandis que le taux pour les garçons était le même pour les deux groupes ethniques [54]. En Europe, une étude a été faite sur 2071 cas de RMS âgés de 0 à 14 ans grâce à l‘Automated Child Hood Cancer Information System (ACCIS) sur une période de 10 ans allant de 1988 jusqu’à 1997 dans le but d’évaluer l’incidence du rhabdomyosarcome. Elle a conclu que le plus grand nombre de RMS provient de la région ouest de l’Europe avec une incidence annuelle de 5.4/1000000[52]. En France, on note environ 100 nouveaux cas de rhabdomyosarcome chaque année [10]. En Asie, deux études ont été menées : – la première est une étude multicentrique rétrospective faite en chine sur 161 cas, allant de 2001 à fin 2014, et qui a montré que le RMS représente approximativement 6.5% de toutes les tumeurs solides de l’enfant [40], – la deuxième faite à Singapore entre 1993 et 2010 a montré que le RMS constitue 4% de l’ensemble des cancers solides pédiatriques [3]. En Afrique on ne dispose pas de beaucoup de données épidémiologiques sur le rhabdomyosarcome.   Le RMS est rare chez le sujet de plus de 45 ans, estimé entre 2 et 5% de tous les sarcomes de l’adulte [29]. La répartition selon l’âge est variable suivant les sous types de RMS. Le RMS embryonnaire affecte principalement, mais pas exclusivement, les enfants âgés entre 0 et 15 ans. Le type alvéolaire intéresse exclusivement les patients plus âgés avec un pic entre 10 et 25 ans. Le RMS pléomorphe survient presque toujours chez l’adulte âgé de plus de 45 ans. Il existe une corrélation entre la localisation de la tumeur et l’âge du patient. Les RMS de la vessie, de la prostate, du vagin et de l’oreille moyen intéressent le jeune âge (âge médian = 4 ans) ; de la région paratesticulaire (âge médian = 14ans) ; des extrémités (âge médian = 14ans) [26]. Les RMS intéressent plus fréquemment l’homme que la femme avec un sexe radio de 1,5. Cette légère prédominance masculine est moins prononcée chez l’adolescent et l’adulte jeune pour le RMS alvéolaire.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
I. RAPPELS
1. Embryologie du tissu musculaire
2. Histologie du tissu musculaire
2.1. Structure générale
2.2. Microscopie optique
2.3. Microscopie électronique
2.4. Structure moléculaire
3. Epidémiologie des rhabdomyosarcomes
II. DIAGNOSTIC POSITIF
1. Clinique.
1.1. Circonstances de découverte
1.2. L’examen clinique
2. Paraclinique
2.1. Imagerie
2.1.1. Tomodensitométrie
2.1.2. Imagerie par résonnance magnétique
2.1.3. Scintigraphie osseuse
2.1.4. Tomographie par émission de positrons (TEP scan)
2.2. L’anatomie et la cytologie pathologiques
2.2.1. Types de prélèvements
2.2.2. Les techniques anatomopathologiques
2.2.3. Les techniques complémentaires
3. Classifications des rhabdomyosarcomes
3.1. Classification histologique
3.2. Classification en stades des RMS
4. Variantes histologiques.
4.1. Rhabdomyosarcome embryonnaire
4.1.1. Rhabdomyosarcome embryonnaire conventionnel
4.1.2. Rhabdomyosarcome botryoïde
4.1.3. Rhabdomyosarcome à cellules fusiformes
4.2. Rhabdomyosarcome alvéolaire
4.2.1. Type conventionnel
4.2.2. Type solide
4.3. Rhabdomyosarcome pléomorphe
4.4. Autres types de rhabdomyosarcomes
4.4.1. Rhabdomyosarcome sclérosant .
4.4.2. Rhabdomyosarcome épithélioïde
III. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
IV. FACTEURS ETIOLOGIQUES
V. EXTENSION TUMORALE ET FACTEURS PRONOSTIQUES
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
I. OBJECTIFS
1. Objectif général
2. Objectifs spécifiques
II. TYPE ET PERIODE D’ETUDE
III. CADRE D’ETUDE
IV. MATERIEL ET METHODE
1. Matériel d’étude et paramètres étudiés
2. Méthodologie
3. Critères d’inclusion
4. Critères de non inclusion
5. Limites de notre étude.
V. RESULTATS
1. Aspects épidémiologiques
1.1. Prévalence
1.2. Répartition des patients selon l’âge
1.3. Répartition des patients selon le sexe
1.4. Répartition des RMS selon le siège
2. Aspects anatomo-pathologiques
2.1. Types de prélèvement.
2.2. Taille tumorale
2.3. Types histologiques
2.3.1. Rhabdomyosarcome embryonnaire
2.3.2. Le rhabdomyosarcome pléomorphe
2.4. Marges de résection
2.5. Classification IRS
VI. DISCUSSION
1. Aspects épidémiologiques
2. Aspects anatomo-pathologiques
2.1. Les types de prélèvement
2.2. La taille tumorale
2.3. Le type histologique
2.4. Les marges de résection
2.5. La stadification IRS
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES

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