Le processus d’Ornstein-Uhlenbeck relativiste (ROUP)
Presentation du ROUP
Le processus d’Ornstein-Uhlenbeck relativiste (ROUP) decrit la di ffusion d’une particule ponctuelle relativiste dans un fluide en l’absence de gravitation [46]. Ce fluide est suppose a l’ équilibre thermodynamique a la temp érature Θ et sa 4- vitesse est notee W. Puisque le fluide est a l’ équilibre thermodynamique et que l’espace-temps est plat, il existe un reférentiel inertiel dans lequel le fluide est globalement au repos. Ce reférentiel, que l’on notera RW, constitue un reférentiel d’etude naturel pour le mouvement de la particule qui di ffuse ([46]). Soit CW un systeme de coordonn ées inertiel appartenant a RW, et soient X = (T, X), ou X represente ( X i ), i = 1, 2, 3, les coordonnees associ ées a C. Les composantes de l’impulsion de la particule dans CW sont: P = (γ(P), P), ou P represente (Pi), i = 1, 2, 3, et γ(P) est l’energie de la particule, c’est- a-dire le facteur de Lo- rentz, exprime ici comme une fonction de la 3-impulsion P: γ(P) = √ 1 + P2 , (2.1) avec P 2 = −PiP i . On considere dans CW le systeme d’ équations di fferentielles stochastiques suivant [46]: dXi T = η i j Pj, T γ (Pt) dT dPi, T = −α Pj, T γ (PT ) dT + √ 2D dBi, T , (2.2) avec α et D deux constantes reelles positives, et ( Bi, t), i = 1, 2, 3 trois browniens independants. La premi ére équation de (2.2) est la d éfinition relativiste de 37 Le processus d’Ornstein-Uhlenbeck relativiste (ROUP) l’impulsion de la particule en fonction de la vitesse, et la deuxieme est l’ équation du mouvement. L’action du fluide environnant sur la particule qui diffuse se de- compose en deux contributions distinctes: une contribution deterministe et une contribution stochastique. La contribution deterministe prend la forme d’une 3- force de frottement fd, dont l’expression est donnee par [46]: fd = −α P γ(P) , (2.3) ou α est un coefficient de frottement, suppose constant. Cette contribution d é- terministe represente l’action moyenne du fluide sur la particule qui di ffuse. La contribution stochastique correspondrait a une force fs qui s’ecrirait de la fac¸on suivante: fs = √ 2D dBT dT , (2.4) avec D un coefficient de bruit, suppose constant, et dBT /dT representant (dBi,T /dT), i = 1, 2, 3, ou chaque dBi,T /dT est ce qui est souvent appele un bruit blanc gaussien. Cette ecriture est bien s ur abusive, puisque la d ˆ eriv ée d’un brow- nien n’est pas definie. Une écriture correcte serait plut ot: ˆ dfs = √ 2DdBT , (2.5) avec BT representant les trois browniens ind épendants ( Bi, T ), i = 1, 2, 3. Le systeme d’equations di fferentielles stochastiques (2.2) d éfinit le ROUP dans le syst éme de coordonnees CW. Considerons le fibr é couche de masse, d éfini par la relation η µνpµ pν = 1, et note FM. La carte CW induit sur FM une carte (CW)FM , de coordonnees associ ées (T, X, P). Remarquons que, comme l’espace-temps est plat et que le systeme de coordonnees CW est inertiel, le domaine de (CW)FM co¨ıncide avec le fibre couche de masse, et (T, X, P) decrit donc R 7 . Il est pratique, en physique statistique relativiste, de definir l’espace des phases de la particule dans CW comme l’espace des (T, X, P). La repartition de la particule dans les tranches T = cte de cet espace est decrite par une fonction de distribution ΠCW ; ainsi, la probabilite de trouver a l’instant T la particule en X et P a d 3X et d 3P pres vaut ΠCW (T, X, P)d 3Xd3P. L’equation de transport correspondant au syst éme (2.2) s’ écrit alors [46]: ∂ ∂T ΠCW − ∂ ∂X . P γ(P) ΠCW ! − ∂ ∂P . α P γ(P) ΠCW ! = D∆P ΠCW . (2.6) Puisque le fluide est a l’ équilibre thermodynamique global a la temp érature Θ, et que l’on se trouve dans le reférentiel propre de ce fluide, on s’attend a ce que la distribution de Juttner ¨ ΠJ a la temp érature Θ [80, 40], ΠJ(P) = 1 4π β K2(β) exp (−β γ(P)) , (2.7) 38 ou β = 1/Θ, qui est l’equivalent relativiste de la distribution de Maxwell a la temperature Θ, soit une solution stationnaire de l’equation (2.6). Les coe fficients α et D caracterisant le processus sont alors reli és a Θ par, D mα = kBΘ. (2.8) Notons que pour ecrire la relation (2.8), nous avons r éintroduit momentan ément la constante de Boltzmann kB ainsi que la masse m de la particule. Cela permet de faire apparaˆıtre clairement les deux quantites homog énes a une énergie: la quantite kBΘ, associee a l’ état d’ équilibre thermodynamique global du fluide a la temp érature Θ, et la quantite D/mα, qui fait intervenir les caracteristiques microscopiques de la diffusion. La relation (2.8) constitue ainsi un theor éme de fluctuation-dissipation relativiste. Le systeme d’ équations di fferentielles stochastiques (2.2), ou, de mani ére é- quivalente, l’equation de transport (2.6) associ ée a ce syst éme d’ équations sto- chastiques, definissent le ROUP dans RW.
Le ROUP dans un reférentiel inertiel quelconque
Considerons maintenant un r éférentiel inertiel quelconque R. Soit C un systeme de coordonnees inertiel appartenant a R, et soient x = (t, x) les coordonnees associ ées a C. Comment peut-on decrire le ROUP dans R? Une demarche naturelle consiste a e ffectuer une transformation de Lorentz sur systeme d’ équations (2.2) introduit dans RW. Cette approche est toutefois difficile a mettre en oeuvre, car e ffectuer des changements de coordonnees sur des equations differentielles stochastiques s’av ére étre une op ˆ eration d élicate. Les differentes étapes n écessaires pour transcrire un syst éme d’ équations di fferentielles stochastiques d’un systeme de coordonn ées a un autre sont pr ésent ées en d étail dans la section 4.1. Nous presentons ici uniquement le r ésultat final: le nou- veau systeme d’ équations di fferentielles stochastiques obtenu dans C a partir du systeme d éfini dans CW, est de la forme: dxi t = η i j pj, t γ(pt) dt d pi, t = fi(t, xt , pt)dt + σi j(t, xt , pt)dBj, t , (2.9) ou fi et σi j s’expriment en fonction de la force de frottement et du bruit introduits dans CW. Les fonctions fi sont les composantes de la 3-force deterministe exerc ée par le fluide sur la particule dans C. Les fonctions σi j sont les composantes du coefficient de bruit dans C 0 . Dans un reférentiel R inertiel quelconque, ce coefficient est en genéral anisotrope. Le syst éme (2.9), de m éme que le syst ˆ eme (2.2), 39 decrit une di ffusion dans l’espace des impulsions; il definit ainsi le ROUP dans le systeme de coordonn ées C. En effet, un processus stochastique relativiste est necessairement une di ffusion dans l’espace des impulsions [52, 46]. Soit CFM le systeme de coordonn ées induit par C sur le fibre couche de masse FM; les coordonnees associ ées a CFM sont (t, x, p). Comme l’espace-temps est plat et que le systeme de coordonn ées C est inertiel, les coordonnees ( t, x, p) decrivent R 7 . L’espace des phases de la particule dans C est defini comme l’espace des (t, x, p). La repartition de la particule dans les tranches t = cte de cet espace est decrite par une fonction de distribution ΠC; ainsi, la probabilite de trouver a l’instant t la particule en x et p a d 3 x et d 3 p pres vaut ΠC(t, x, p)d 3 xd3 p. L’equation de transport pour ΠC correspondant au systeme (2.9) est alors de la forme [8, 34, 27]: ∂ΠC ∂t + ∂ ∂x i p i γ(p) ΠC ! = ∂ ∂pi (ψi ΠC) + ∂ ∂pi Ai j ∂ΠC ∂pj ! , (2.10) ou les expressions exactes ψi et de Ai j sont donnees par (4.35) et (4.36) respecti- vement. Comparons maintenant les fonctions ΠCW et ΠC. La probabilite de trouver a l’instant T la particule en X et P a d 3X et d 3P pres est donn ée par ΠCW (T, X, P)d 3Xd3P. De fac¸on analogue, la probabilite de trouver a l’instant t la particule en x et p a d 3 x et d 3 p pres est donn ée par ΠC(t, x, p)d 3 xd3 p. Les coordonnees d’espace-temps (t, x) sont reliees aux coordonn ées ( T, X) par la transformation de Lorentz qui permet de passer de CW a C. L’instant t dans C depend donc de l’instant T dans CW, mais aussi de la partie spatiale X des coordonnees d’un point de l’hypersurface T = constante. De meme, ˆ T depend a la fois de t et de x. Il s’en suit que les hypersurfaces T = constante ne co¨ıncident pas avec les hypersurfaces t = constante. Ainsi, il n’est pas trivial, en physique relativiste, que les fonctions de distribution d’une particule dans deux systemes de coordonn ées inertiels di fferents soient égales. Soit Π˜ CW = ΠCW ◦ CW et Π˜ C = ΠC ◦ C. On a, par definition, pour tout point M du fibre couche de masse: Π˜ CW (M) = ΠCW (T(M), X(M), P(M)), (2.11) et Π˜ C(M) = ΠC(t(M), x(M), p(M)). (2.12) On peut montrer, pour toute carte C, que [40, 48]): Π˜ CW = Π˜ C. (2.13) Ainsi, la fonction Π˜ C est independante du syst éme de coordonn ées C. Les fonctions de distribution ΠCW et ΠC sont donc egales. A partir de maintenant, nous 40 adopterons la notation Π pour la fonction Π˜ C. La fonction ΠC des coordonnees (t, x, p) associees a un syst éme de coordonn ées CFM quelconque de FM est la representation de Π dans ce systeme de coordonn ées. Afin d’ étre en accord avec ˆ les notations habituellement utilisees en physique, nous allons appeler cette fonc- tion, par abus de langage, non plus ΠC mais egalement Π. Ainsi, Π(t, x, p) designe la valeur de la representation de Π dans CFM en (t, x, p). Notons que, dans les termes usuels de physique, l’egalit é (2.13) s’interpr éte comme le fait que Π est un scalaire. Les equations di fferentielles stochastiques (2.9), ou, de fac¸on équivalente, l’ é- quation de transport (2.10) qui en decoule, d éfinissent pleinement le ROUP dans C. Le systeme (2.9) est obtenu a partir du syst éme (2.2) dans CW. Le ROUP dans un reférentiel inertiel quelconque est donc pleinement d éfini par le syst éme d’equations di fferentielles stochastiques (2.2) (ou par l’ équation de transport (2.6) correspondant a (2.2)), introduit dans le r éférentiel propre du fluide.
Formulation manifestement covariante du ROUP
En pratique, determiner les équations di fferentielles stochastiques, puis l’ équation de transport associee, pour le ROUP dans un r éférentiel inertiel autre que RW en suivant le cheminement evoqu é ci-dessus est long et compliqu é. Il existe une fac¸on plus simple de decrire le ROUP dans un r éférentiel inertiel quelconque. Cette methode consiste a obtenir l’ équation de transport dans le r éférentiel souhait é pour la fonction de distribution Π de la particule sans passer par l’etape d’ écriture des équations di fferentielles stochastiques dans ce r éférentiel. On est amen é pour cela a d évelopper une formulation manifestement covariante du ROUP [7]. La fonc- tion de distribution Π est definie sur le fibr é couche de masse FM. Or, comme nous l’avons vu precédemment, seulement trois degr és de libert é associ és a l’impulsion, par exemple les trois composantes spatiales (pi), i = 1, 2, 3 de l’impulsion dans C, correspondent, sur FM, aux quatre degres de libert é d’espace-temps, par exemple les quatre coordonnees ( x µ ) = (t, x), µ = 0, 1, 2, 3, associees a C. Pour traiter la 4-impulsion d’une particule de fac¸on manifestement covariante, il est donc necessaire de s’extraire du fibr é couche de masse. Dans l’espace des impulsions hors de la couche de masse, les quatre composantes p = (p0, p) de la 4-impulsion dans un systeme de coordonn ées C sont independantes. On se place donc dans le fibre cotangent T ∗S pour construire une formulation manifestement covariante du ROUP. On considere un domaine P de T ∗S. Ce domaine P a huit dimensions et contient necessairement la couche de masse. La d éfinition exacte de P sera precis ée dans la suite. Le domaine P est appele espace des phases étendu. On introduit alors une nouvelle fonction de distribution, notee f , definie sur P. La fonction de distribution f n’est bien sur pas physique, mais on impose que sa res- ˆ 41 triction sur la couche de masse soit egale a la fonction de distribution physique Π [76, 7]. Considerons le syst éme de coordonn ées CT ∗S sur T ∗S, avec les coordonnees associ ées ( t, x, p0, p). Par abus de language, on notera la representation de f dans CT ∗S f egalement. On a la relation suivante entre f et Π dans CT ∗S: Π(t, x, p) = Z p∈P f(t, x, p0, p)δ (p0 − γ(p))d p0. (2.14) La distribution de Dirac intervenant dans (2.14) permet la restriction sur la couche de masse. La relation (2.14) ne fait pas correspondre a une densit é Π fixee une unique densite f . Il existe une infinite de fonctions f dont la restriction sur le fibre couche de masse peut etre ˆ Π. Etant donne que la densit é physique Π est un scalaire et que l’operation de restriction sur la couche de masse est invariante par change- ment de coordonnees, il est naturel de consid érer f scalaire [40, 76, 48]. Dans ce cas, l’equation de transport v érifi ée par la densit é f sera obtenue en ecrivant que f appartient au noyau d’un operateur lin éaire invariant de Lorentz. En transposant én dehors de la couche de masse l’equation de transport (2.6) d éfinissant le ROUP dans le systeme de coordonn ées CW, on obtient l’equation suivante [7]: Z R 1 P0 L(f)δ(P0 − γ(P))dP0 = 0, (2.15) avec L(f) = ∂ ∂x µ (η µνpν f) + ∂ ∂pµ Fd, µ f + K µ β ρ ν ∂ ∂pρ D pµ pβ p.W ∂ ∂pν f ! , (2.16) ou l’on rappelle que W represente la 4-vitesse du fluide dans laquelle a lieu la diffusion. La 4-force Fd est l’ecriture manifestement covariante de la force de friction deterministe exerc ée par le fluide sur la particule: Fd, µ = −λ ν µ pνp 2 + λ αβ pα pβ pµ, (2.17) λ ν µ = α (p.W) 2 ∆ ν µ , (2.18) On note ∆ le projecteur sur l’orthogonal a la 4-vitesse W: ∆µν = ηµν − WµWν, (2.19) et finalement, le tenseur K est defini par: K µρβν = WµWβ∆ ρν − WµWν∆ ρβ + WρWν∆ µβ − WρWβ∆ µν . (2.20) On choisit donc finalement comme equation de transport manifestement cova- riante: L(f) = 0, (2.21) 42 Abordons maintenant le choix du domaine P. On peut voir dans les expressions (2.16) et (4.55) que certains coefficients de l’equation de transport manifestement covariante ne sont pas definis si le produit scalaire p.W s’annule. Il convient de choisir P comme un domaine de T ∗S ou tous les coe fficients de l’equation de transport manifestement covariante sont definis; on choisit donc P comme etant le domaine de T ∗S tel que p.W > 0; notons que P contient bien la couche de masse.