Le poids économique de la dégradation

 VÉHICULES ÉLECTRIQUES HYBRIDES

Les véhicules électriques hybrides (VEH) (Fig. 2.1.1) sont un développement né des limitation technologiques qui contraignent les performances des véhicules électriques (VE). En effet) dans l’attente de solutions purement électriques de VE capables de rivaliser directement avec les moteurs à combustion interne (MCI) en termes de puissance [13J) d’autonomie [14J) de durée de vie [15J et de coût [ 16 J) la combinaison de vecteurs énergétiques hétérogènes au rendement adéquat selon certains aspects mais insatisfaisants dans d’autres dans l’objectif d’obtenir une solution supérieure à la somme de ses parties se présente comme une avenue de rechange prometteuse. La flexibilité des transports électrifiés donne également naissance à des concepts impossibles à réaliser avec des MCI) comme par exemple le freinage régénératif [17 J ou la recharge par branchement au réseau public [18 J) qui offrent un potentiel significatif d’améliorer l’efficacité de ces nouveaux systèmes.

Nin d’exploiter cette flexibilité d’échanges énergétiques à bord d’un même véhicule) leur architecture inclut typiquement une forme d’accumulateur électrique) comme les batteries électrochimiques rechargeables ou les supercondensateurs) associée à une ou plusieurs composantes énergétiques de nature différente. Une large variété de combinaisons est proposée) incluant de multiples permutations de systèmes à base d’une vaste gamme de chimies de batteries) comme les populaires lithium-ion [19 J) nickel-cadmium) hydrures métalliques ou les vénérables acide-plomb [20J) de supercondensateurs [2Ù de piles à combustible de toutes technologies) comme les piles à membrane polymère électrolyte (PEMFC) alimentées à l’hydrogène [u J) les piles à oxyde solide (SOFC) [23 J)les MCl de différentes puissances et dans différents rôles [24 J de même que des solutions plus exotiques) comme l’air comprimé [25 J ou les moteurs Stirling [26]. Évidemment) l’objectif premier de ces nouvelles classes de véhicules est de supplanter les MCl polluant et les problématiques liées à l’exploitation des combustibles fo ssiles) donc les solutions proposées privilégient cette panoplie de technologies émergentes et font usage d’un moteur électrique capable d’assister ou d’assumer complètement la propulsion du véhicule.

Par contre) de par leur état immature de développement) ces dispositifs s’accompagnent souvent d’un lot de problématiques) comme le stockage du carburant et les infrastructures de distribution [27 J) le coût élevé [28 J et les normes de sécurité [29 J) pour ne nommer que ceux-là) dont l’exploration exhaustive sort du cadre proposé par cette recherche. La particularité de chacun de ces vecteurs énergétiques) tel que mentionné cidessus) est d’offrir une bonne performance spécifique dans une des facettes requises par l’opération d’un véhicule mais de faillir sur d’autres aspects tout aussi critiques. Par exemple) une batterie au lithium-ion offre une bonne densité de puissance) essentielle aux fortes accélérations) mais une basse densité d’énergie [30 J) limitant l’autonomie des véhicules électriques à batterie (VEB) à quelques dizaines de kilomètres [31]. À l’inverse) une pile à combustible PEM est très sensible aux changements brusques de puissance) donc inadéquate pour propulser un véhicule rapidement) mais peut fournir autant d’énergie que peut en contenir son réservoir de carburant [32J. Par conséquent) un VEH de bonne conception utilisant batteries et pile saura manipuler judicieusement le partage de puissance entre ces deux composantes afin d’en obtenir à la fois une bonne performance de conduite et une autonomie prolongée.

BATI »ERIES ACIDE-PLOMB

La technologie acide-plomb dans sa forme actuelle (Fig. 2.2.3) fut initialement proposée il y a plus de 150 ans par le physicien français Gaston Planté [58]) ce qui en fait la première chimie de batterie rechargeable commercialement viable. Par conséquent) cette technologie de base et l’infrastructure qui l’entoure profite d’une maturité inégalée. Bien que sa conception de base soit demeurée essentiellement inchangée depuis son invention) le développement connexe de matériaux modernes ont stimulé l’apparition d’amélioration incrémentales comme l’utilisation d’un électrolyte gélifié) d’un feutre absorbant (absorbent glass mat ou AGM) [59] ou d’un contenant scellé (valve-regulated lead-acid ou VRLA) [60]) alors que des efforts plus récents ont tenté d’en améliorer leur densité énergétique par des constructions au contenant pressurisé ou par des cellules à enroulement cylindrique [61]. Bien que les batteries acide-plomb présentent certains attributs techniques intéressants, comme une d~nsité de puissance élevée et un taux d’auto décharge bas, qui en font les favoris pour les applications stationnaires [62], leur coût extrêmement bas demeure de loin leur atout principal et est responsable de leur popularité qui perdure depuis plus d’un siècle et demi en face d’alternatives beaucoup plus performantes.

C’est donc ce coût d’acquisition minime, associé à l’infrastructure mature de fabrication, de distribution et de recyclage dont elles bénéficient, qui contribue à faire de cette technologie vénérable une option intéressante pour les concepteurs de véhicules électriques [63]. Par contre, leur faible densité énergétique limite leur application de masse au domaine des véhicules à basse vitesse de nature industrielle, bien que certains irréductibles vantent toujours la faisabilité de VEH commerciaux basés sur cette technologie [10]. Le premier article scientifique présenté au Chapitre 3 fut réalisé à partir d’une plate-forme expérimentale de VEH basse vitesse à base de batteries acide-plomb dont la dégradation accélérée a mené au développement du thème central de cette thèse BATTERIES LITHIUM-ION La technologie au lithium-ion, dont un exemple de cellule cylindrique est présenté à la Fig. 2.2.4, est à l’avant-garde de l’essor industriel et académique qui propulse le domaine des batteries rechargeables. Du point de vue technique, ce type de chimie se positionne parmi les plus performantes offertes sur le marché, offrant à la fois une haute densité d’énergie et de puissance ainsi qu’une auto décharge et un effet de mémoire négligeable [64]. On note toutefois certaines problématiques de sécurité liées à ce type de cellule [29] ainsi que des inquiétudes quant à la viabilité de ces composantes à grande échelle vis-à-vis les réserves limitées de lithium disponibles [31, 65]. De plus, étant au coeur d’une métaphorique ruée vers l’or visant le développement d’une insaisissable batterie idéale, cette technologie est à l’origine de multiples raffinements de son électrochimie de base; ainsi, à l’encontre de ses compétiteurs principaux, le terme « lithium-ion » représente une famille de composantes à base de lithium plus qu’une chimie unique [66, 67]. À titre illustrati~ la Fig. 2.2.5 résume la performance en énergie spécifique des différentes chimies à base de lithium actuellement disponibles, un paramètre critique dans les applications mobiles telles que les VEH.

COURANT DE DÉCHARGE

Le courant électrique produit par la réaction électrochimique d’une batterie est un reflet direct de l’intensité des phénomènes d’oxydo-réduction qui prennent place lors de sa connexion à une charge externe} ce qui engendre un déplacement énergique des électrons libres dans les éléments conducteurs de telles charges. Ce déplacement d’électrons est la fonction primaire d’une batterie mais engendre toutefois une foule d’effets secondaires incluant la résistance ohmique} les variations de températures et la diffusion inégale des ré actants} pour ne nommer que ceuxlà} ayant un impact négatif sur sa durée de vie. Afin de réduire ces phénomènes chimiques complexes à des concepts plus maniables} des chercheurs ont proposé le concept du Ah-throughput [96} 97 J} aussi appelé le Coulomb-counting ou chargeprocessing [12 J par lequel une batterie donnée est conceptualisée comme un accumulateur présentant une capacité finie à retourner de l’énergie suite à une recharge. Cette énergie est mesurée en cumulant le courant électrique qu’on « retire » de la batterie durant son utilisation activej une fois ce cumul de courant égal à la capacité finie estimée au préalable} la batterie atteint sa fin de vie. En somme} ce concept prédit que de retirer à une batterie chargée une certaine intensité de courant durant une période donnée propulse celle-ci chaque fois un peu plus en avant sur le chemin de sa dégradation terminale. Bien que l’utilisation d’un pack de batteries soit impératif à bord d’un VEH} l’application judicieuse d’un second vecteur énergétique pourra permettre de réduire l’intensité du courant demandé à la batterie} par exemple en partageant la charge électrique d’une partie de pics de courant les plus élevés rencontrés durant la conduite} et ainsi exercer une mesure de contrôle active sur cette facette de leur dégradation.

PROFONDEUR DE DÉCHARGE

L’avantage central des batteries secondaires est sans contredit leur caractéristique rechargeable. Cette dernière est née d’une réaction chimique particulière capable de générer un courant électrique en présence d’une charge mais qui} à l’imposition d’un courant de source externe} renverse cette même réaction jusqu’à la retourner à son état d’équilibre original, prête à générer du courant à nouveau. Toutefois,le caractère réversible de ce type de réaction n’est pas idéal: ainsi, à chaque cycle de charge-décharge d’une cellule, une infime portion des ré actants en jeu se trouvera incapable de reformer les liens chimiques permettant le retour à leur état original [S 3, 89]. La proportion de ces réactants ainsi « cristallisés » dans un état inactif est influencée à son tour par une multitude de facteurs, notamment la température, et peut même être partiellement réversible si des conditions propices sont rencontrées. Malgré tout, il demeure simplement logique que plus la proportion des ré actants d’une cellule se retrouvant dans un état déchargé durant un cycle est importante, plus la probabilité que des éléments de ceux-ci demeurent figés dans un état inactif au moment de la recharge sera grande: en somme, plus une cellule est déchargée profondément, plus une proportion importante de sa capacité est dégradée [98]. On note également que le temps passé influence la formation de ces réactions nuisiblesj ainsi, une batterie entreposée à bas état de charge durant une période prolongée verra sa capacité diminuée davantage d’une dont l’état de charge est plus élevé (jusqu’à une certaine limite propre à chaque chimie) au moment d’une recharge [99, 100].

Table des matières

1.1 Contexte et motivation
1.2 Problématique de recherche
1.3 Objectifs
1.4 Méthodologie.
1.5 Organisation
2 REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
2.1 Véhicules électriques hybrides
2 .2 Batteries rechargeables
2.3 Piles à combustible
2.4 Optimisation. . .
2.5 Éléments complémentaires
2.6 Revue bibliographique condensée
2.7 Du même auteur
3 LE POIDS ÉCONOMIQUE DE LA DÉGRADATION
3.1 La viabilité économique de la gestion active
3.2 Jeter les bases de la gestion active de la dégradation
3.3 Article 1: Optimal economy-based battery degradation management dynamics for fuel-cell plug-in hybrid electric vehicles
4 AGIR EFFICACEMENT POUR DURER LONGTEMPS
4.1 Mesurer la dégradation à sa juste valeur
4.2 Une mise à jour significative
4.3 Article 2: Long-term assessment of economic plug-in hybrid electric vehicle battery lifetime degradation management through near optimalfuel cellioad sharing
5 PRÉVOIR LA FIN
5.1 Prévenir plutôt que guérir
5.2 Une nouvelle corde à notre arc
5.3 Article 3: Preemptive degradation-induced battery replacement for hybrid electric vehicles in sustained optimal extended-range driving conditions
6 DISCUSSION GÉNÉRALE
6.1 Répondre aux grandes questions
6.2 Un travail de longue haleine
6.3 Améliorer concrètement la durée de vie des batteries
6.4 Une richesse dans les résultats
6·5 Perspectives d’avenir
7 CONCLUSION
RÉFÉRENCES

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