Le partenariat institutionnel une entité à capital mixte public-privé : la Joint-venture et/ou la S.E.M.
Les partenariats public-privé dits institutionnalisés sont des partenariats qui s’opèrent à travers la création d’une entité basée sur un capital mixte public-privé selon les attentes et les préoccupations des partenaires tels que la société d’économie mixte (S.E.M) ou la joint-venture. Cette dernière est une forme de contrats de partenariat entre des entreprises de pays différents dans un cadre international et/ou dans un cadre national. Elle peut se conclure soit entre partenaires publics et privés, soit entre des partenaires tous privés, soit encore entre des partenaires tous publics. En ce qui concerne la joint-venture, elle est considérée comme un mode de rapprochement et de coopération dans le commerce international entre les Etats, les entreprises et même entre les secteurs publics et privés, et cela pour une durée souvent longue. En général, dans la littérature ayant trait aux PPP institutionnels, la société d’économie mixte (S.E.M)33 est la plus répandue et la plus proche de la joint-venture dans le langage juridique des contrats. Le trait caractéristique de ce type de société mixte est la copropriété des actifs publics et privés. Aussi, le choix de création d’une société mixte entre les autorités publiques et le partenaire privé se traduit par le partage du capital entre les deux et ceci selon les spécificités de chaque Etat ou entreprise.
Aubert, B.A. & Party, M. (2004 : 80) expliquent que, dans certains cas, pour le partage du capital: « les autorités publiques choisissent de conserver le contrôle effectif de la société en prenant une part majoritaire dans la capitalisation de l’entreprise ». En fait, sous sa forme structurelle, ce type de partenariat public-privé associe les deux acteurs dans une nouvelle structure juridique ad hoc. Cette collaboration suppose la mise en commun des ressources des partenaires afin de gérer l’entreprise et partager les risques. La réunion des forces se réalise à travers une collaboration basée sur le dialogue et l’interaction entre les parties. Ce type de PPP ne repose pas uniquement sur une dimension contractuelle ou financière plus au moins formalisée. Le lien est fondamentalement sociétal car il se traduit par la constitution d’une personnalité juridique entre les deux acteurs public et privé en contribuant à la stabilité et la sécurité du partenariat.
Ce type de partenariat est très apprécié et il connaît un développement considérable dans les pays émergents et en développement car il permet de créer des entreprises conjointes locales en associant des partenaires étrangers. Ce type de partenariat répond vraisemblablement à des attentes économiques dans ces pays, car il leur permet d’introduire dans leurs structures publiques locales -sans avoir à les privatiser- les méthodes managériales des entreprises privées étrangères. C’est également un moyen de préserver leurs entreprises stratégiques. Cette protection est souvent imposée par la loi qui exige que le partenaire local soit majoritaire dans la participation au capital du partenariat lorsque celui-ci est conclu avec des entreprises étrangères qui sont, le plus souvent, des multinationales34. La plupart des pays qui ont choisi le modèle de partenariat public-privé institutionnalisé ont été touchés par la mutation vers l’économie de marché. Or, en faisant entrer les entreprises privées au capital du partenariat, la co-entreprise publique-privée favorise le savoir-faire et l’expertise de ces entreprises et leur permet d’apporter leur label au secteur public. Cela dit, les autorités publiques peuvent bénéficier de ce label en dehors de toute structure commune, en se contentant de déléguer la gestion de leurs services à une entreprise privée ? C’est-à-dire en recourant au contrat de gestion.
Le contrat de gestion ou Management Contract :
Dans ce type de contrat de partenariat, l’expression « Management ou gestion » est associée pour qualifier la gestion d’une entreprise par une autre entreprise spécialisée dans le même domaine comme son nom l’indique durant une période limitée. Selon Jeantin, M. (1989a), il est préférable d’opter pour l’expression : « Contrat de gestion d’entreprise ». Cette dernière, semble proche de la réalité recherchée par l’entreprise qui recourt au contrat de gestion d’entreprise. Dans un sens large, ce contrat issu du droit anglo-saxon est défini par le même auteur comme : « celui par lequel une société propriétaire des murs et des équipements en confie la gestion à une société spécialisée disposant à cet effet d’un important savoir-faire », (Jeantin, M. 1989b). Dans une approche public-privé, le contrat de gestion d’entreprise trouve une autre orientation. Pour Lorenzi, I. (2001) « la technique de contrat de gestion permet à un particulier ou une société de conclure avec l’Etat un contrat pour la gestion d’une entreprise publique étatique ». Selon Delmon, J. (2010) plusieurs appellations peuvent recouvrir cette expression du contrat de gestion : « les contrats de performance, le contrat de service, le contrat d’exploitation et de maintenance ».
Pour lui, le contrat de gestion « est un ensemble de structures selon lesquelles l’entreprise privée fournit des services à une entreprise de service public/concédant (par exemple des services de gestion, des services d’amélioration des activités de facturation et de recouvrement, des services de réduction de pertes ou de marketing) et où les paiements sont généralement liés aux résultats ». En parallèle, Benissad, M.H. (2004) considère le contrat de gestion comme : « le contrat par lequel une firme gère, pour le compte d’un établissement public, tout ou partie de son patrimoine ». Pour Mairesse, C. (2011 : 80) le recours au contrat de gestion, « permet à la société gérante de transmettre ses connaissances spécialisées au personnel de la société propriétaire ». Cela est très fréquent dans les pays émergents et les pays en développement. Ce choix de contrat de gestion se justifie aussi dans beaucoup de pays où les autorités publiques souhaitent garder la main mise sur leur patrimoine stratégique « les entreprises étatiques » et de maintenir un contrôle direct sur les services afin de renforcer leur gestion. En fait, les autorités dans ces pays cherchent, dans le cadre de la vague d’ouverture vers l’économie du marché qui les a touchés, à renforcer leurs sociétés étatiques par l’adoption de nouvelles techniques de gestion dans le cadre d’un PPP et de bénéficier du savoir-faire des entreprises privées spécialisés.
C’est ainsi que Mairesse, C. (2011 : 78) souligne dans le cadre d’une étude des PPP réalisée dans les pays en développement que « les contrats de gestion peuvent offrir une solution privilégiée aux pays qui cherchent à moderniser leurs services….à la fois rapidement et durablement car ils permettent de bénéficier du savoir-faire d’un opérateur privé compétent. Le service bénéficie d’outils et de méthodes innovants et efficaces mis en oeuvre par le secteur privé, et d’un transfert de compétences et de savoir-faire qui sont les fondements mêmes de la pérennité d’un tel service ». La légitimité du recours à ce type de partenariat par l’Etat se justifie à la fois, par la recherche de l’amélioration de l’esprit managérial de ses entreprises et l’offre d’une prestation de service de qualité meilleure. L’autorité publique, dans ce type de contrat, délègue la gestion d’une entreprise publique à une entreprise privée pour une période de 5 ans au maximum. D’ailleurs, c’est une forme plus complète de contrat de service. Toutefois, l’entreprise privée perçoit une rémunération pour l’exploitation. En outre, l’autorité publique transfère toute la responsabilité de l’exploitation et l’entretien du système de gestion à l’entreprise privée. De ce fait, l’entreprise privée dispose d’une large liberté dans les décisions, car elle n’a aucun investissement à réaliser. Pour réussir un tel contrat de gestion, il faut réunir les mêmes conditions que pour réussir un PPP. Mairesse, C. (2011 : 80) présente six facteurs essentiels de cette réussite :
Diminution et transfert d’une partie du risque au partenaire privé : Le partage des risques entre les partenaires public-privé représente un principe fondamental dans un PPP. En effet, les projets de ce type sont souvent des montages contractuels complexes en termes de réalisation pour les partenaires qui peuvent provoquer des risques lors de leur réalisation. Compte tenu de la multitude des risques qui entourent un projet de partenariat et de leur diversité, nous allons centrer notre analyse sur le choix du partenaire public qui fait appel au partenaire privé dans un cadre de projet. Dès lors, l’intention du partenaire public est de transférer une partie du risque à ce dernier. Rappelons qu’il existe plusieurs types de risques dans le cadre des PPP. Party, M. (2000) en relève deux : l’un est environnemental et l’autre relationnel. Le premier type de risque est lié à la performance des facteurs internes (risques de projet, risque organisationnel) et externes (risques socioéconomiques, risques technologiques et risques politiques). Le second type de risque est lié à une dimension contractuelle, dans laquelle le caractère opportuniste d’un partenaire ou de l’autre peut engendrer l’échec du projet35. La source de ces risques est souvent liée aux facteurs contextuels du projet d’une part, et au degré de la relation qui existe entre les partenaires d’autre part. Des différences peuvent apparaître entre les partenaires en termes de secteur d’activités, de culture, d’objectifs et de pouvoir. Ces différences sont porteuses de tensions et de conflits.
Dans le même ordre d’idées, Tourki, M. (2007) considère que les PPP sont des projets porteurs ayant un niveau très élevé de risque, en raison des incertitudes qui entourent de tels montages contractuels, notamment dans les aspects financiers et dans la définition du cadre juridique requis. De ce fait, le point commun dans un projet de partenariat est de faire supporter par le partenaire public, par le partenaire privé ou par les deux partenaires à la fois les obligations et les risques qui correspondent le mieux à leur rôle, leur mission et de choisir le plus apte, celui qui est en mesure de les assumer (Leclerc, M. 2008). Dès lors, « le montage en partenariat repose sur une allocation équilibrée de ces risques, une fois qu’ils ont bien été identifiés, et cela permet d’en transférer une certaine partie à l’opérateur privé lorsqu’il est à même de mieux les contrôler que l’autorité publique » (Tourki, M. 2007 : 133). La gestion du risque est différente selon les deux secteurs, en raison de leur réaction spécifique face à un risque quelconque. Ce choix de transférer une partie du risque au partenaire privé se traduit selon Préfontaine, L. (2008 : 216) par le fait que « les entreprises privées gèrent le risque selon une logique financière. […] Elles établissent donc une limite au risque, un niveau de coûts au-delà duquel elles abandonneront le projet. Tel n’est pas le cas des gestionnaires du secteur public qui sont centrés sur leur mission principale, à savoir protéger l’intérêt général des citoyens ». Dans un PPP, le partenaire privé a donc un rôle important en raison de sa souplesse en termes d’esprit managérial. Selon Aubert, B.A. & Party, M. (2004 : 78), « le résultat est que les entreprises privées contrôlent normalement mieux leurs coûts et ont une plus grande capacité à innover que les administrations publiques ». Le tableau (9) ci-dessous, offre une typologie des différents risques liés aux PPP pour la prestation de service public.
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