Le Nunavik, un cadre particulier

Le Québec, par sa vaste étendue, possède une quarantaine de réseaux électriques autonomes desservis par Hydro-Québec. Majoritairement situés dans les régions de la Côte-Nord et du Nord-du-Québec, il s’agit principalement de villages nordiques isolés et des îles. À leurs besoins quotidiens en énergie, il faut ajouter la demande des installations d’exploration et d’extraction minières. Actuellement, tous ces besoins énergétiques sont comblés au moyen de groupes électrogènes diesels. Le coût de production de l’électricité est donc soumis aux variations du prix du baril et l’impact sur l’environnement et la santé des résidents est non négligeable.

Les projets de production d’électricité libre d’énergie fossile commencent à émerger au Nunavik suivant l’exemple des autres provinces du Canada légèrement en avance sur le sujet. L’éolien et le solaire présentent de bons potentiels. En revanche la production d’énergie thermique est un sujet peu ou pas étudié jusqu’à présent dans ce contexte, il s’agit du cœur de ce projet. En effet, deux tiers de la consommation d’énergie des habitations du Nunavik sont destiné au chauffage et il serait inefficace et peu fiable de pallier cette demande par des énergies renouvelables intermittentes. Les solutions techniques pour remplacer les fournaises au mazout existent et continuent de se développer. Les défis dans la mise en place d’une solution différente résident dans l’implantation, les coûts et l’acceptation locale.

Le Nunavik, situé au-delà du 55ème parallèle nord est la région la plus septentrionale du territoire du Québec (voir Figure 1-1). Territoire occupé par l’être humain depuis plus de 3 000 ans, il est aujourd’hui habité par 14 communautés réparties le long des côtes des baies d’Hudson et d’Ungava qui rassemble une population d’environ 12 000 individus. 90% de cette population est Inuit (Duhaime, Caron et Lévesque, 2015).

Relié au Sud du Québec par aucune route ou voie ferroviaire, le transport est majoritairement assuré par voie maritime durant la période libre de glace qui dure d’Octobre à Avril. Une liaison aérienne est assurée par Air Inuit tout au long de l’année. Cet éloignement géographique entraîne des difficultés logistiques et une faible concurrence dans l’approvisionnement menant à un coût de vie bien plus élevé que pour le reste du Québec (Duhaime, Caron et Lévesque, 2015).

L’économie du Nunavik est divisée en différents types, une économie des ressources, une économie mixte et enfin une économie sociale. La première est le principal moteur financier de la région, il s’agit de l’exploitation des ressources naturelles, principalement par et pour le Sud du Québec. Située près de Salluit, la mine Raglan est l’une des plus importantes exploitations. L’économie mixte allie l’économie de subsistance et l’économie salariale, directement issue d’un mélange entre tradition et modernité, elle permet par exemple de concilier un salaire avec l’achat d’outils pour la chasse et la pêche. Enfin l’économie sociale, contrairement à l’économie marchande, vise à réinvestir le profit directement dans la communauté. Au-delà de la valeur financière des gains, un profit en termes d’emplois générés ou de formation disponible est considéré comme un apport de richesse dans une communauté. Il existe de forts écarts avec le reste du Québec, le taux de chômage s’élève à 14.1% contre 7.2% dans le reste du Québec et près de 68.8% des inuits n’ont aucun diplôme.

La gestion administrative et politique de la région a un statut particulier qui a été définit avec la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ) en 1975 entre le gouvernement du Québec et les représentants Cris et Inuits de la région Nord-du-Québec. Cette convention vise à protéger l’environnement et le milieu social de ces régions ainsi qu’à donner aux communautés une plus large autonomie.

Au Nunavik, la gestion est divisée en plusieurs entités et un projet tel que le chauffage ne peut être implanté qu’en impliquant chacune d’entre elles. L’encadré ci-après décrit les trois principales structures gérant le Nunavik (Makivik Corporation, 2017b).

Dans l’imaginaire collectif le Nunavik est un vaste territoire presque entièrement vide. L’éloignement, le climat et l’étalement des communautés sur tout le territoire rend l’exploitation des ressources naturelles difficile. La végétation est divisée entre la Taïga de l’Est du Bouclier canadien, la Toundra du Bas-Arctique, la toundra du Moyen-Arctique et enfin la Toundra des monts Torngat. Toutes caractérisées par une faible densité de végétaux, le territoire entier du Nunavik est situé au-delà de la limite nordique des forêts attribuables délimité par un comité scientifique à la demande du Ministère des Ressources naturelles du Québec en 2013 (Jobidon et Bergeron, 2013). Aucun végétal ne peut donc être prélevé ni exploité dans un contexte énergétique. Le réseau hydrique est vaste et complexe mais présente un potentiel limité par l’éloignement entre les communautés entre elles. En revanche le vent et le soleil constituent des sources relativement prédictibles.

La gestion des déchets au Nunavik est une problématique prioritaire en ce moment. La société Kativik a sorti en 2013 un plan de gestion des matière résiduelles (PGMR) visant à améliorer la situation dans chaque communauté (Barrett et Gagné, 2013). Les objectifs sont d’améliorer leurs connaissances sur le sujet, de privilégier des modes de gestion respectant les contraintes du Nunavik, d’assurer un suivi régional dans chaque village tout en limitant les coûts de traitement et de gestion. Différentes mesures de tri sélectif sont prévues, ce qui faciliterait la mise en place d’une valorisation des matières résiduelles combustibles. Une estimation des coûts totaux pour la mise en place du projet s’élève à 1 000 000$ et seul le financement par les instances gouvernementales permettrait au projet de voir le jour. Dans le cas particulier de Kuujjuaq, un projet de serre a déjà instauré la récupération de matière végétale (Plan Nord, 2017a).

Table des matières

INTRODUCTION
REVUE DE LITTÉRATURE
1.1 Le Nunavik, un cadre particulier
1.1.1 Portrait
1.1.2 L’habitation au Nunavik
1.1.3 L’énergie au Nunavik
1.1.4 Barrières à surmonter
1.2 Production thermique en milieu isolé
1.2.1 Combustibles fossiles
1.2.2 Combustibles issus de la biomasse
1.2.3 Recherches et travaux
1.3 Les méthodes d’analyse multicritère d’aide à la décision
1.3.1 Généralités
1.3.2 Choix de la méthode
1.3.3 Les méthodes Prométhée
1.3.4 Analyses de sensibilité
1.3.5 Logiciel Visual Prométhée
1.4 Conclusion de la revue de littérature
MULTI-CRITERIA DECISION ANALYSIS RANKING ALTERNATIVE HEATING SYSTEMS FOR REMOTE COMMUNITIES IN NUNAVIK
2.1 Introduction
2.1.1 Context
2.1.2 Objectives
2.1.3 Content
2.2 Methods
2.2.1 Multi-Criteria Decision Making (MCDM)
2.2.2 PROMETHEE methods
2.3 Case study
2.4 Different alternatives
2.4.1 Wood pellets
2.4.2 Natural gas
2.4.3 Waste
2.5 Criteria matrix
2.5.1 Environmental criteria
2.5.2 Social criteria
2.5.3 Economics criteria
2.5.4 Input data
2.5.5 Assumptions
2.6 Results and discussion
2.6.1 Results
2.6.2 Discussions and recommendations
2.7 Conclusion
2.8 Acknowledgments
SYNTHÈSE DES RECOMMANDATIONS
3.1.1 La réalité Nordique
3.1.2 La biodiversité
3.1.3 La décroissance
3.1.4 Économie circulaire
3.1.5 Étalement urbain
CONCLUSION

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