Le noyau subthalamique et le contrôle moteur
Le traitement dopaminergique et complications
L’essentiel du traitement médicamenteux, afin de réduire les symptômes moteurs de la MP, vise à compenser le déficit dopaminergique reconnu comme à l’origine de la MP. Il s’agit d’un traitement symptomatique. Pour compenser le déficit dopaminergique, plusieurs options existent, ne s’excluant pas mutuellement : apporter de la Lévodopa exogène, stimuler directement les récepteurs dopaminergiques (agonistes dopaminergiques) et réduire le catabolisme de la dopamine (inhibiteurs enzymatiques). La dopamine ne passe pas la barrière hémato- encéphalique. Cependant, son précurseur, la Lévodopa, passe cette barrière hémato-encéphalique. Il est reconnue comme le ’gold standard’ des médicaments pour traiter les symptômes à tous les stades de la maladie. [Fahn & Sulzer 2004, Kalinderi et al. 2011]. Après quelques années de traitement, en raison d’une part de l’évolution de la maladie et d’autre part de la pharmacologie des molécules utilisées, apparaissent les complications motrices induites par le traitement antiparkinsonien. Deux phénomènes différents sont observés : les fluctuations motrices correspondant à la réapparition des symptômes moteurs en lien avec les fluctuations d’efficacité du traitement, et les dyskinésies ou mouvements anormaux involontaires qui surviennent après la prise de Lévodopa [LeWitt 2008]. Ces complications motrices touchent 40 à 50% des patients après 4-6 ans de traitement. Les mouvements anormaux sont de plusieurs types et apparaissent avec des délais variables par rapport au moment de la prise du traitement : 1) les dyskinésies dites de « début-fin de dose » ou biphasiques, de nature volontiers dystonique et/ou ballique, prédominant aux membres inférieurs et marquant le début ou la fin de l’effet thérapeutique et 2) les dyskinésies dites de « milieu de dose » survenant à l’acmé de l’effet thérapeutique, de nature choréo-dystonique touchant préférentiellement la partie céphalique du corps et les membres supérieurs. Les effets secondaires non moteurs les plus fréquents de la levodopa sont après l’administration du médicament (phase ON-DOPA) : l’agressivité, l’impulsivité, une addiction à la Lévodopa, une hypomanie ou une addiction au jeu, à la nourriture ou au sexe, ils font partie des troubles du contrôle et de l’impulsion et peuvent être mesurés par l’échelle d’Ardouin [Ardouin C, Chéreau I, Llorca PM, Lhommée E, Durif F, Pollak P 2009]. Ces symptômes touchent 3,4 à 4,1% des patients Parkinsoniens [Mestre et al. 2013].
La stimulation cérébrale profonde
Mise au point par Alim-Louis Benabid en 1985, la stimulation du NST est une technique largement utilisée pour le traitement des formes sévères de la MP [Limousin-Dowsey et al. 1999, Benabid et al. 2000]. La SCP consiste en l’implantation bilatérale d’électrodes invasives dans le NST de patients parkinsoniens. Ces électrodes sont ensuite reliées à un stimulateur placé en sous-cutané au niveau de la région claviculaire, qui délivre une stimulation en continue à haute fréquence. La stimulation est ajustée pour chaque patient par le neurologue. FIGURE 2.1: Présentation de la stimulation cérébrale profonde du noyau subthalamique. Les électrodes de stimulation sont reliés au stimulateur placé en sous-cutané. Le stimulateur délivre un courant continu à haute fréquences (130 Hz), Source : St Judes Medical Le traitement neurochirurgical de la maladie de Parkinson, indépendamment de la technique utilisée, ne s’applique qu’à 15% des patients, principalement ceux présentant une MP invalidante (score de Hoehn & Yahr > 3 et échelle de Schwab & England < 70% en phase OFF-DOPA (à jeun de traitement dopaminergique), et plus de 50% d’amélioration lors du test à la Lévodopa). Ce caractère invalidant peut-être lié soit à la persistance d’un grand tremblement non contrôlé par un traitement médicamenteux bien mené, soit à la présence de complications motrices de la dopathérapie, fluctuations et dyskinésies, et ce, malgré un traitement optimal. Avec le succès de cette thérapie, les indications se sont progressivement élargies au cours des dernières années et concernent les sujets plus jeunes, en activité, dont le handicap moteur est moins sévère. Une intervention précoce permettrait de limiter le risque de retentissement socio-professionnel péjoratif lorsque la maladie évolue [Schüpbach et al. 2007, Moro et al. 2010, Welter et al. 2014].
La sélection des patients parkinsoniens
Afin d’obtenir les meilleurs résultats possibles, les patients parkinsoniens en attente d’une intervention de SCP du NST à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière doivent répondre à des critères strictes qui sont présentés dans la partie II Patients & méthode [Welter et al. 2002].
Les résultats de la stimulation du noyau subthalamique
La stimulation du NST permet de réduire les scores moteurs obtenus sans traitement de l’échelle UPDRS de l’ordre de 60% [Krack et al. 2003, Limousin et al. 1998]. L’amélioration de l’état moteur permet de réduire les doses moyennes quotidiennes des traitements à visée dopaminergique de l’ordre de 50 à 80%. Cette diminution du traitement médicamenteux contribue à la réduction, au long cours, des dyskinésies liées à la Lévodopa, alors que les dystonies associées à l’état OFF-DOPA sont améliorées, vraisemblablement par l’intermédiaire d’un effet direct de la stimulation du NST [Krack et al. 1998, Russmann et al. 2004]. Un effet modérément délétère de l’âge sur les résultats a été rapporté, avec une amélioration moindre des scores moteurs chez des patients âgés de plus de 60 à 70 ans que chez des sujets plus jeunes et, avec un retentissement sur la qualité de vie et l’humeur [Gerdelat-Mas et al. 2007, Russmann et al. 2004]. La stimulation subthalamique n’altère pas les fonctions cognitives si celles-ci n’étaient pas altérées avant l’intervention [Wood et al. 2002]; on peut cependant observer parfois un discret syndrome dysexécutif. Ces résultats sont maintenus cinq ans après l’implantation pour la majorité des patients [Krack et al. 2003]. L’aggravation de l’akinésie ou l’apparition secondaire de troubles axiaux dopa-résistants, tels l’instabilité posturale, le freezing, peuvent être la conséquence de l’évolution naturelle de la maladie. Ces troubles semblent parfois précipités par la stimulation subthalamique, sans qu’il soit possible à l’heure actuelle de prévoir une telle évolution. Les résultats de la SCP du NST sur 309 patients avec MP opérés entre 1996 et 2009 à l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière ont été rapporté [Welter et al. 2014]. La relation entre les scores de l’état moteur, cognitif, et psychiatrique des patients à un an, les scores cliniques préopératoires des patients, l’IRM, la procédure chirurgicale, et la localisation des contacts a été étudiée. Il a été montré qu’en moyenne le score moteur s’améliore de 64%. Le meilleur résultat de la stimulation est obtenu lorsque le contact thérapeutique se trouve dans le NST. 18% des patients présentent un déclin cognitif à un an post-opératoire avec peut être une localisation plus antérieure d’un contact de stimulation. 19% des patients présentent une hypomanie induite par la stimulation quand elle est trop ventrale mais ceci uniquement lorsqu’ils sont jeunes, avec une durée courte de la maladie et une très bonne réponse à la Lévodopa
I Introduction |