Définition de la sédentarité
L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) définit la sédentarité comme étant l’absence ou le manque de pratique d’AP régulière et l’adoption de comportements sédentaires (Organisation mondiale de la Santé, 2018b). La sédentarité est donc associée au caractère sédentaire du mode de vie actuel des adultes. L’augmentation des comportements passifs tels que les modes de transport utilisés (p. ex. : auto versus vélo), les emplois en station assise, sans compter les activités de loisirs passives (p. ex. : télévision, cinéma, etc.), influencent négativement le niveau d’AP.
Prévalence et impact économique de la sédentarité
En 2008 (Statistique Canada, 2017a), la prévalence de la sédentarité s’élevait à 40% chez les hommes en Amérique du Nord. Même s’ils se montrent plus actifs que les femmes, ce taux demeure très élevé. En 2011, les adultes canadiens présentaient quotidiennement environ 9,5 heures par jour de comportements inactifs associés à la sédentarité. L’OMS (2018b) décrit cette problématique comme étant le résultat de l’urbanisation croissante, de l’augmentation de la pauvreté, de la violence ou encore de l’absence d’installations sportives/de loisirs.
L’impact économique de la sédentarité est d’ailleurs de plus en plus important. L’absence d’activité physique représentait, en 2009, environ 6,8 milliards de dollars (environ 2,4 milliards en coûts directs et environ 4,3 milliards en coûts indirects), soit 3,8 % des coûts de santé globale au Canada (Janssen, 2012; Yu & Schwingel, 2019), alors qu’en 2001, les coûts étaient estimés à 5,3 milliards de dollars.
Définition de l’activité physique
Afin d’être considéré comme présentant un mode de vie actif, un individu doit pratiquer plus de 150 minutes d’activité physique par semaine (Dishman, Heath, & Lee, 2018; Statistique Canada, 2017a). Seulement 35 % des Canadiens âgés de 18 à 39 ans répondent à ces critères (Statistique Canada, 2019). Pour atteindre cette quantité de minutes d’AP, l’OMS (2018c) suggère de pratiquer plusieurs périodes de 10 minutes d’activité d’endurance et de pratiquer le renforcement musculaire minimalement deux fois par semaine. Dans un même ordre d’idées, l’American College of Sports Medicine et l’American Heart Association recommandent la pratique d’environ 30 minutes d’AP modérée (danser, faire du vélo, jardiner, etc.) (Marcus & Forsyth, 2009) cinq fois ou plus par semaine, ou la pratique d’environ 20 minutes d’AP intense trois fois ou plus par semaine (American College Health Association, 2013 ; Haskell et al., 2007 ).
Selon Tudor-Locke et al. (2011), le nombre de pas recommandé dans une journée est d’un minimum d’environ 10 000 pour un adulte en santé. De ces 10 000 pas à effectuer, de 30-40 % de ceux-ci (3000-4000) devraient se faire à un rythme rapide d’environ 4,8 à 6,4 km/h (Tudor-Locke, Hatano, Pangrazi, & Kang, 2008). L’index suivant a été proposé par Tudor-Locke et al. (2011) afin d’observer le niveau d’activité physique de différentes populations : 1) < 5000 pas/jour définiraient le mode de vie se rapprochant le plus de la sédentarité; 2) 5000 à 7499 pas/jour définiraient un niveau très faible d’activité physique ; 3) 7500 à 9999 représenteraient les individus qui sont un peu actifs ; 4) ≥ 10 000 pas/jour définiraient les individus actifs. Les auteurs suggèrent également qu’un individu pratiquant ≥ 12 500 pas/jour est hautement actif. De plus, les auteurs d’une autre étude suggèrent que les individus qui accumulent plus de 10 000 pas par jour ont moins de graisse corporelle et une tension artérielle plus basse que les individus moins actifs (Dishman et al., 2018).
Prévalence d’activité physique
Selon l’OMS (2018b), seulement 19,5 % de la population adulte américaine évaluée avait pratiqué une AP d’intensité modérée d’un minimum de 30 minutes dans les 5 à 7 derniers jours et seulement 29,3 % s’étaient engagés dans une AP intense d’au moins 20 minutes dans les 3 à 7 derniers jours (American College Health Association, 2013). De plus, seulement entre 7 % et 9 % de la population canadienne déclare prendre leur temps de loisirs pour être actif (Statistique Canada, 2016). Au Québec, le quart, voire près du tiers (29,7 %) (Camirand et al., 2016) des adultes de 18 ans et plus sont sédentaires durant leurs loisirs et leurs transports alors que seulement 41 % sont actifs (Ministère de la Santé et des Services sociaux, Institut national de santé publique du Québec, & Institut de la statistique du Québec, 2011). Les autres québécois se positionnent soit comme peu actifs (18,7 %) ou moyennement actifs (10,6 %) dans leurs loisirs et leurs transports. À l’échelle régionale, 29,1 % des hommes de 18 ans et plus au Saguenay-Lac-Saint-Jean en 2007-2008 étaient sédentaires durant leurs loisirs (Ministère de la Santé et des Services sociaux et al., 2011). Par conséquent, une proportion importante d’adultes québécois présente un mode de vie sédentaire.
Facteurs de risque de la sédentarité et de protection associés à l’activité physique
Plusieurs études ont été réalisées afin de documenter les conséquences de la sédentarité et les bénéfices de l’AP chez les adultes. Non seulement des problèmes physiques sont générés par un mode de vie sédentaire, les impacts sont également présents aux plans psychologique et de la santé générale.
Facteurs de risques associés à la sédentarité
Les impacts au plan physique sont largement reconnus dans les écrits. Deux recherches systématiques ont d’ailleurs conclu qu’il y avait une association positive entre les comportements inactifs associés à la sédentarité et les maladies cardiovasculaires (n = 236 700 sédentaires (Grontved & Hu, 2011) et n = 794 277 sédentaires (Wilmot et al., 2012)), chez les hommes ou femmes ayant présenté dans le temps soit le diabète de type 2, soit des maladies cardiovasculaires mortelles ou non ou soit des risques de mortalité toutes causes confondues. Selon l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) (Agence de la santé publique du Canada, 2016), 84,4 % de la population de 20 ans et plus présentent au moins un des principaux facteurs de risque de développer des maladies chroniques (maladies cardiovasculaires ou respiratoires, cancer, diabète) ainsi que des troubles anxieux et de l’humeur (Bucksch & Schlicht, 2006; Fine, Philogene, Gramling, Coups, & Sinha, 2004; Nunan, Mahtani, Roberts, & Heneghan, 2013; Prentice, 2004). Ces facteurs de risque sont notamment l’obésité, l’absence d’activité physique, la mauvaise alimentation, la consommation excessive (d’alcool ou le tabagisme quotidien ou occasionnel), ce qui s’avère très onéreux pour la société comme souligné plus haut.
Le temps passé devant les écrans (2h/jour) et le temps passé assis augmentent les risques d’évènements cardiovasculaires de 5 % et 17 % respectivement (Ford & Caspersen, 2012). Les impacts musculosquelettiques des comportements sédentaires (p. ex. : être assis sur de longues périodes) se manifestent par les maux au bas du dos, les douleurs au cou, aux épaules, aux mains et aux bras (Chen, Liu, Cook, Bass, & Lo, 2009; Ijmker et al., 2006; Waersted, Hanvold, & Veiersted, 2010). Le risque de mortalité augmente selon un ratio de 2 % pour chaque heure passée en position assise (Chau et al., 2013; Thivel et al., 2018). Lorsqu’un individu présente environ huit heures passées assises dans une journée, le risque de mortalité peut augmenter jusqu’à 8 % par heure supplémentaire (Thivel et al., 2018). Ces informations révèlent d’importants risques associés à la sédentarité, ce pour quoi les facteurs de protection sont pertinents à expliquer.
Facteurs de protection associés à l’activité physique
Les écrits suggèrent que l’AP apporte des bénéfices à plusieurs échelons. Principalement, l’AP agirait comme un facteur de prévention et de traitement de maladies comme les maladies du cœur, les accidents vasculaires cérébraux, le diabète et le cancer du sein ou du côlon. L’AP est un facteur de protection contre l’hypertension, le surpoids et l’obésité (Organisation mondiale de la Santé, 2018a), l’ostéoporose et les syndromes métaboliques (Benhaberou-Brun, 2012). Ainsi, l’AP contribue au maintien ou à une légère perte de poids. De plus, des méta-analyses permettent d’observer l’association entre l’AP et une réduction importante des maladies cardiovasculaires, de cancer et de mortalité en tout genre (Kelly et al., 2014; Lollgen, Bockenhoff, & Knapp, 2009; Nocon et al., 2008; Wilmot et al., 2012), et donc à l’amélioration de la santé cardiaque, de la capacité à l’effort et de la capacité fonctionnelle. La marche serait une activité physique préconisée pour les personnes ayant des comportements associés à la sédentarité qui désirent s’activer (Kelly et al., 2014). Finalement, deux revues systématiques et méta-analyses suggèrent que l’AP pourrait permettre de régulariser le taux de sucre et de lipides dans le sang, de diminuer la tension artérielle systolique, d’améliorer l’endurance, la force musculaire et la flexibilité (Benhaberou-Brun, 2012; Fong et al., 2012) et de réduire les risques de lombalgie (Shaheed, Maher, Williams, Day, & McLachlan, 2016). L’AP serait potentiellement un élément clé pour le vieillissement sain et actif (Hupin et al., 2015). En somme, la pratique fréquente d’activité physique permet à l’individu de maintenir une santé globale tout en diminuant les risques de développer les maladies liées à la sédentarité.
Ce n’est pas seulement au plan physique que les impacts se font ressentir puisque les impacts psychologiques sont d’autant plus présents. Deux études transversales ont démontré l’association entre les comportements sédentaires et les symptômes dépressifs (Teychenne, Ball, & Salmon, 2010; Thorp, Owen, Neuhaus, & Dunstan, 2011). En effet, selon une méta-analyse et une recension systématique des écrits, le faible niveau de pratique d’activité physique au quotidien est associé à l’augmentation des problématiques de santé mentale telles la dépression ou l’anxiété (Catalan-Matamoros, Gomez-Conesa, Stubbs, & Vancampfort, 2016; Teychenne et al., 2010). En ce sens, la fréquence de problématiques de santé mentale décroit lorsque le temps de pratique d’activité physique atteint les normes de santé physique (Thorp et al., 2011). Pour les individus souffrant de dépression ou étant à risque d’en souffrir, l’intensité d’une AP pourrait également avoir un rôle à jouer dans la réduction des symptômes dépressifs (Paolucci, Loukov, Bowdish, & Heisz, 2018).
En outre, l’activité physique permettrait à l’être humain de bénéficier d’une meilleure santé mentale. Par exemple, les écrits démontrent que l’activité physique régulière est associée à une meilleure qualité de vie (Aquatias et al., 2008b; Mammen & Faulkner, 2013), une augmentation du bienêtre psychologique (Lotan, Merrick, & Carmeli, 2005), une meilleure humeur (Aquatias et al., 2008b; Byrne & Byrne, 1993; Lotan et al., 2005; Plante & Rodin, 1990), moins de stress (Fong et al., 2012; Plante & Rodin, 1990), moins d’anxiété (Byrne & Byrne, 1993; Plante & Rodin, 1990), moins de dépression (Byrne & Byrne, 1993; Mammen & Faulkner, 2013; Plante & Rodin, 1990), une meilleure estime de soi (Mammen & Faulkner, 2013), un plus grand sentiment d’efficacité (Aquatias et al., 2008b; Mammen & Faulkner, 2013) ainsi que de meilleures performances cognitives (p. ex. : mémoire, temps de réaction, résolution de problèmes et concentration) et motrices (Aquatias et al., 2008a; Biddle, 2006; Feltz & Landers, 1983; Fong et al., 2012; Mammen & Faulkner, 2013). Elle aurait également des bénéfices sur le sentiment de compétence et le sentiment de contrôle de l’individu (Plante & Rodin, 1990). Une méta-analyse suggère également que l’AP pourrait être bénéfique afin de diminuer la fatigue et d’augmenter l’énergie (Fong et al., 2012). En lien avec l’échantillon à l’étude, Valtonen et al. (2009) ont démontré que les hommes qui se sentent moins confiants à propos de leur futur et de l’atteinte d’objectifs personnels sont moins actifs et moins en forme. La sédentarité et la mauvaise condition cardiorespiratoire seraient associées à la détresse et à un sentiment de malêtre chez les hommes d’âge adulte (Valtonen et al., 2009). De plus, une étude transversale portant sur 824 jeunes hommes (M = 25 ans ± 4 ans) participant au service militaire obligatoire a permis de démontrer qu’une bonne condition cardiorespiratoire (VO2 max) et qu’une bonne musculation sontassociées à un stress moindre et de meilleures ressources cognitives chez les hommes qui présente un IMC de < 25 (Kettunen, Kyröläinen, Santtila, Vuorimaa, & Vasankari, 2016). En somme, l’individu qui pratique des activités physiques régulièrement en tire profit sur sa santé mentale.
Toutefois, afin de maximiser les bienfaits psychologiques de l’exercice, un minimum de 20 minutes d’AP d’intensité modérée (p. ex : randonnée pédestre, jardinage, etc.) 3 à 5 fois par semaine serait nécessaire (O’Connor, Raglin, & Martinsen, 2000; Poirel, 2017). Plusieurs chercheurs affirment que les symptômes dépressifs ou anxieux sont associés avec une faible participation sportive, une faible activité physique générale et un mode de vie sédentaire élevé (Penedo & Dahn, 2005; Teychenne, Ball, & Salmon, 2008; Teychenne et al., 2010; Van Dyck, Teychenne, McNaughton, De Bourdeaudhuij, & Salmon, 2015). De ce fait, plusieurs études démontrent des effets comparables entre les anxiolytiques, les techniques de relaxation, la pratique de la natation (Berger, Prapavessis, Grove, & Butki, 1997), le yoga (Berger & Owen, 1992), la course à pied ou l’entrainement musculaire (McGowan, Pierce, & Jordan, 1991). De plus, de façon ponctuelle, la pratique d’AP d’intensité modérée (entre 50 % et 70 % de la capacité maximale de l’individu) durant au moins 20 minutes aurait un effet psychologique positif d’une durée de deux à sept heures (O’Connor et al., 2000). Afin de ressentir les effets positifs sur celle-ci de façon durable, il faut maintenir un minimum de 20 minutes de pratique régulière (3 à 5 fois par semaine) durant huit semaines (Poirel, 2017).
À la lumière de ces conséquences et de ces bénéfices, il devient impératif d’observer quelles interventions pourraient être réalisées afin d’augmenter l’adoption d’un mode de vie actif.
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