LE NÉOLITHIQUE À ROCHES VOLCANIQUES DE DIACK ET DU CAP MANUEL
Propriétés physico- minéralogiques et le polissage des roches volcaniques
Les propriétés physiques étudiées sont la porosité totale. Celle-ci est formée par l’ensemble des discontinuités existant dans la matrice de la roche. Ces discontinuités regroupent les vides (pores) et les fissures. Les pores dans les roches volcaniques (do1érites) correspondent à des vides laissés par le dégazage de bulles emprisonnées par la 1ave en solidification (A. Dia, 1980, 1982 ; Fraudet 1970). Elles forment généralement des vides interstitiels intergranu1aires. Cette fissuration peut être dans les roches volcaniques, d’ordre mécanique par contrainte de compression maximale ou simplement liée au refroidissement de la lave. En effet, au cours du refroidissement, il se produit des fentes de « retrait » délimitant une prismation, qui peuvent affecter même le réseau cristallographique des différents minéraux de la roche. Dans le cas du gisement de Diack, cette macro- fissuration est soulignée par des filonnets de zéolites (natronite) et de calcite (A. Dia, 1980, 1982 ; Fraudet 1970). La porosité augmente en rapport avec la taille du grain ; en d’autres termes, e11e est plus faible dans les faciès à structures microlitique ou microgrenue que dans les faciès à structure doléritique ou grenue (idem). Les roches polyminérales constituent des ensembles hétérogènes formés de minéraux et de discontinuités. Les minéraux ont des propriétés élastiques différentes ; ce qui se traduit par un degré d’adaptation différent des minéraux aux contraintes, et a pour résultats des effets différents sur la fissuration qui affecte le milieu polyminéral. Ces discontinuités qui affectent sensiblement les propriétés élastiques du milieu et, par conséquent, les caractéristiques mécaniques de la roche, constituent des éléments d’altération. La quantification de ces discontinuités est une donnée très appréciable dans le diagnostic du matériau à utiliser. 33 C. Descamps, 1979, op. cit, p. 242. 32 Les faciès de Diack montrent une bonne résistance à la fragmentation; une résistance très élevée dans les faciès pétrographiques à grain fin et moyennement élevée dans les faciès à grain moyen et à gros grain. Cette usure différentielle indiquerait que l’intensité de l’usure dépend de la dureté des minéraux et donc par là des caractères pétrographiques et minéralogiques des roches (A. Dia, id.). Cette corrélation entre composition minéralogique, abondance des différent: minéraux, a permis l’établissement d’une formule empirique permettant de déterminer le coefficient de polissage à partir de la composition minéralogique. Cette formule tient compte de la dureté moyenne des minéraux. (A. Dia, 1980,1982). III. Le Néolithique en Afrique de l’Ouest III.1. Néolithique : Définition et discussion du concept Il est commun de regretter le flou qu‘a un concept dès que plusieurs auteurs s‘en emparent. Nombreuses sont les recherches relatives au caractère expédient du Néolithique. Et bien évidemment, la pertinence du concept mobilisé ―s‘érode rapidement‖ (Perlés, 2011). Par conséquent, il convient avant d‘utiliser ce substantif, de souligner tout le malaise régnant dans le domaine qu‘il recouvre. La terminologie diffère d‘une région à l‘autre et, alors qu‘on use ailleurs des mêmes termes, il peut recouvrir des réalités différentes. (M. Thiam 1997). Le critère identifiant d‘une néolithisation (Néolithique) 34a et b, en dehors des bases techniques, repose sur l‘occupation permanente de l‘espace par un groupe ou des groupes humains. Donc, quelles qu‘en soient les causes, la sédentarisation des groupes humains est le premier phénomène visible de la néolithisation, avant même la domestication des animaux et des plantes. Les premiers établissements permanents datent du Natoufien (Testart 1982 ; Cauvin 1997; Perlés 2007; Chorin et Holl 2011). Si pour A. Testart (1982) la sédentarisation peut être vue ―comme une transformation première, […] importante sinon radicale”, J. Cauvin (1997, 2000), quant à lui, considère que la sédentarisation est un concept flou « inobservable », attesté par « certains cas de sédentarité dans le contexte paléolithique » qui n‘ont produit, même après des milliers d‘années, aucune 34a Définit au départ uniquement à partir du polissage (hache polie) puis de la céramique (Mauny 1957 ; Guitat 1972 ; Vernet 1996a et b ; Raimbault 1990, 1995 ; Raimbault et Commelin 2001, 2002, Huysecom 2006 ; Huysecom et al 2004d, 2009b ; Gallin 2007, 2010), avant de s‘enrichir d‘éléments matériels et économiques, à partir de cette étape, il revêt un caractère temporel (stades chronologiques) et spatial (entités culturelles (Sinclair et al, 1993 ; Ozainne, 2011). Cette « notion nouvelle » fondée sur le polissage des haches dans les tourbières de la Somme, sera « exporté » en Afrique. D‘où la critique formulée à l‘encontre de ce concept (Sinclair et al, 1993 ; Ozainne 2011). 29b Sinclair et al (1993) propose une définition fondée sur les modes de subsistance « pastoral », « Food producing », « framing ». Bref, pour eux, le terme Néolithique est à rejeter car revêtant une expression « eurocentrique démodée ». 33 économie agricole ni même de changements importants comme des hiérarchies puisque « les villages Néolithiques » ne garantissent pas une occupation permanente. Donc, la variable « sédentarisation » n‘est pas discriminante. Car, les dynamiques de mutation préhistorique (passage chasseur-cueilleur à agropasteur) résultent de déterminisme sociologique35 (et non économique) dont les activités agropastorales en sont les principales conséquences et non l‘innovation majeure. D‘autant plus que l‘agropastoralisme se manifeste par le stockage (ou non) d‘aliments, traits caractéristiques des sociétés néolithiques (sédentarisation partielle ou entière) dont les dynamiques évolutives aboutissent à la domestication des ressources de la nature. Donc, le « Néolithique » est l‘homme agropasteur. Et qu‘en matière de néolithisation, c‘était un changement psychique collectif qui a précédé et engendré la mutation technique (Cauvin 1978 : 44). De ce fait, les mutations matérielles fondamentales découlent d‘un saut qualitatif cognitif. Mais pour la « new archaeology », Binford par exemple, l‘homme s‘adapte à son environnement et que «la culture n’est chez l’homme que l’ensemble des moyens non somatiques pour s’adapter à son environnement » (Binford1968 ; J. L. Léonhardt 2002). Ce qui signifie que l‘environnement naturel détient ʺl‘initiative de dialogueʺ. Donc, décrypter le paysage, ses ressources disponibles ainsi que son évolution permettent de cibler son approche archéologique, car la satisfaction des besoins primaires de l‘homme est impérative (Deschamps, 2013). De ce fait, pour Childe, la mutation économique du Néolithique est d‘une importance telle qu‘il crée le concept de « Révolution néolithique »36, caractérisée par les premières manipulations du milieu naturel par les humains (passage du chasseur-cueilleur à l‘éleveuragriculteur), laquelle met en lumière les transformations environnementales induites par la déglaciation à l‘époque Holocène (Childe, 1961). Par conséquent, « seule une révolution économique et sociale » (Perlés 2011), par rapport à la vie ―nomade, hasardeuse et pleine de risques‖ des chasseurs-collecteurs, « pouvait permettre aux sociétés paléolithiques de sortir de l‘impasse où elles se trouvaient : les hommes devaient s‘associer à la nature et non plus en être les parasites » (Childe 1961 : 71). Ainsi, « L‘élevage et l‘agriculture furent des étapes révolutionnaires dans l‘émancipation de l‘homme vis-à-vis de l‘environnement extérieur » (G. Childe 1957 : 15). 35Les grandes inventions néolithiques ont un soubassement symbolique. Autrement dit, les activités économiques primaires dérivent de conceptions idéologiques: soumission à la divinité et aliénation de la nature, « mais sur le plan idéologique, non technique » (Cauvin 1997). 36séquence révolutionnaire qui s‘ordonne autour d‘un mode de vie sédentaire fondé sur les activités économiques qui autorisent à la fois un « contrôle » des ressources et une « sécurité » grâce au stockage des produits. 34 Si l‘on exclut les importants développements des techniques de débitages lithiques (débitages Levallois, laminaire, lamellaire, etc.), (Chorin et Holl 2011 : 159 § 2), le déterminisme climatique est le facteur déclencheur du processus néolithique à cause des contraintes économiques.En effet, « la période de péjoration climatique entre 11000 et 9800 avant notre ère, a appauvri les céréales sauvages et le gibier » (BarYosef 1998a, 1998b, Bar-Yosef 2002, Belfer-Cohen et Bar-Yosef 2000). Ce qui aboutit à l‘intensification des productions agricoles des populations sédentaires. Néanmoins, pour B. Wright (1960: 97): « Favorable habitats for animals and plants had long been available, but man had not reached the technological level to exploit them. … the gradual evolution of culture, with increasing complexity and perfection of tool technology may have been a more potent factor in bringing about this economic revolution than was the climatic change at the end of the glacial period ». Bref, les transformations environnementales ou « élément extérieur » ne sont pas les causes premières car, le facteur essentiel, « milieu intérieur » (A. Leroi Gourhan, 1957), de développement est la dynamique technologique. Pourtant, archéologiquement, il est admis que le cadre physique a un rôle prépondérant, « l‘homme est passif 37», c‘est le changement climatique « postulé » qui favorise les conditions nécessaires à la vie, dans la prise de conscience des possibilités pour l‘homme de manipuler les ressources de la nature. Ainsi, l‘essor techno-lithique et les activités économiques qui en découlent sont la consécration logico- naturelle d‘un processus « constant d‘intensification d‘exploitation des ressources naturelles » (Dennell 1983) entamé dès les prémices du Paléolithique. Les mutations révolutionnaires coévolutives d‘un système aux éléments autonomes mais interactifs favorisent des circonstances particulières dont l‘association inévitable38 (relation Nature/ humain) ―engendre une nouvelle donnée non prédictible‖ (Chorin et Holl 2011).
La question du macro- outillage dans la presqu’île du Cap- Vert et environs et la présentation des critères (culture matérielle) de classification du Néolithique sénégalais
Si les gisements macrolithiques du cap Manuel et de Diack sont assimilés à ceux des Mamelles et de Ngor (Descamps, 1972), l‘inventaire de Corbeil et al (1948 : 414- 418), les observations sur le terrain de Descamps (1972 : 237) et l‘examen des collections de l‘IFAN de ces sites, que nous avons réalisé, permettent un rapprochement avec les témoins à industries microlithiques. Car, à Ngor et aux Mamelles le silex est la matière première de base, alors que la basanite dont le « comportement à la taille est voisin de l‘ankaratrite est peu représentée » (Descamps, 1972) et « les pièces présentent rarement les formes typiques du cap Manuel » (Descamps, 1972). Par conséquent, les trouvailles qui évoquent le « faciès manuélien » se localisent à Bel- Air52, à la Médina (R. Richard : 1951), à la Patte d‘Oie53, «dans un contexte microlithique » (Descamps, 1972 : 238), à Ngor (Corbeil et al : 1948). 51 M. Ndeye, 2008 : ―Marine reservoir ages in Northern Senegal and Mauritania coastal waters‖ in Radiocarbon, Vol 50, Nr 2, pp. 281-288 52 Collection de l‘IFAN, SEN. 66- 45 : « cailloux, silex, basaltes du gisement néolithique en place » 41 Ainsi, le Néolithique macrolithique (les stations de Diack, Bandia, le Manuélien de Descamps, 1972,) de la presqu‘île du Cap- Vert et ses environs (de la façade atlantique aux confins sud et est de Thiès) s‘insère dans un ensemble microlithique, qualifié de capsien (Vaufrey, 1933), d‘ibéromaurisien (Corbeil et al, 1948), de Belairien (Richard, 1957), de Néolithique microlithique (Descamps 1972), de Néolithique dunaire (Lame, 1981), sur la base morphologique des vestiges lithiques et céramiques54 . Cette démarche typologique55, fondée sur des groupes de pièces (combinaisons complexes d‘attributs ou d‘attributs techniques, morphologiques, matières premières56), opère une hiérarchisation des caractères morphologiques et métriques qui permettent de résoudre des problèmes archéologiques précis : existence de plusieurs faciès contemporains (culturellement parlant), succession chronologique d‘ensembles archéologiques (C. Perlés, 1988 : 1127). Elle n‘englobe pas les facultés mentales (cognitives), techniques et socioorganisationnelles des Néolithiques de la presqu‘île du Cap- Vert. C‘est une classification ʺidentitaireʺ des Cultures fondée sur un outil analitique du site. Le problème de la complexité, et – a fortiori – de la non-complexité de certains comportements ou éléments des systèmes techniques, n‘échappe pas à ce qui s‘apparente à une règle (Bailly, 2006 : 36). La typologie lithique, en employant un mode de pensée analogique et inductif, fondée sur la morphologie des artefacts a fait preuve d‘un fort potentiel heuristique correspondant au développement initial de la discipline. Cette conception fondée sur la notion de « modèle idéal » (Brézillon, 1977 : 16) est adossée à une conception essentialiste de la culture matérielle et des cultures archéologiques. Ainsi, le Néolithique sénégalais fut confronté à un problème d‘identification culturelle. Les premières découvertes de cultures matérielles préhistoriques57, au Maghreb (Vaufrey, 1933 ; Alimen ; Tixier, 1963 ; C. Brahimi, 1970) constituent le socle d‘étude typologique des industries lithiques ouest-sénégalaises. Cette démarche s‘est traduite par la définition des séquences culturelles du Néolithique de la presqu‘île du Cap- Vert. C‘est sur cette base que R. Vaufrey (1933 : 478) considère qu‘il 53 SEN. 67- 60 : « outillage (néolithique) de silex blanc, tessons, haches polies, pièces en basalte », recueilli par C. Descamps, D. Mage, Fontaine, Dagan. SEN. 68- 44 «outillage de silex blanc, un tesson, un éclat en basalte… », Marquet, le 5 juin 1968. 54 Les squelettes humains sont inexistants. 55 Que F. Bordes définit comme « la science qui permet [dans un ensemble archéologique] de reconnaître de définir et de classer les différentes variétés d‘outils se rencontrant dans les gisements de cette longue période de l‘évolution de l‘humanité » (Bordes 1961 : 1). 56 C. Perlés, 1988 : 1127 57 Pour la période paléolithique : les terminologies acheuléen (inférieur), atérien, Moustier (moyen) renvoient à des séquences culturelles d‘origine nord- africaine. 42 dérive du capsien dont les caractéristiques (comme à la Patte d‘Oie58a , à Njenwattb , à Bel- Air, à Diakitéc ) sont les microlithes géométriques (trapèze, demi- lunes…) associées à des haches polies, des fragments de poteries ornées, dans la partie supérieure, d‘impressions. Cet ensemble constitue les éléments adjacents du Néolithique de tradition capsienne (R. Vaufrey, 1933). Et que « cette définition de construction monolithique nord- africaine » (Lame 1981 : 269) dépasse largement le cadre maghrébin pour s‘étendre dans l‘ouest sénégalais. La lecture conclusive de Vaufrey est sous – tendue par l‘étude (comparative avec Jaatcha en Tunisie) du matériel que Waterlot (1909) a récolté à Rufisque (mélanges d‘outils à macro- outillage en basalte –haches polies, herminettes ; à micro- outillage en silex –nucléus, éclats, burins rares et de la céramique). Les déductions analytiques de Vaufrey, « mise à part les dimensions des armatures, c‘est un Néolithique de tradition capsienne sous sa forme la plus pure que nous avons affaire » (1956 : 31), sont réfutées par Lame, car résultant de « l‘examen de la collection sélective59 de Waterlot à Rufisque» (Lame, 1981 : 271) constituée essentiellement de bâtonnets. Or, l‘incohérence et l‘hétérogénéité entre son assemblage, les séries de C. Descamps et le matériel de Waterlot l‘ont convaincu que « la collection doit être considérée comme un échantillon confectionné à partir de divers ramassages, effectués en différents endroits d‘un même secteur de grande étendue, en des périodes différentes ». (Lame, 1981, p. 273, §3). Ainsi, il postule à un « réexamen de la collection de Waterlot, conservée au musée de l‘homme » (Lame, 1981 : 272) et se trouve « dans l‘obligation de fonder son [notre ]travail sur des collections non sélectives de Descamps [ramassage] et de ses [nos] fouilles » (Lame : 273, §2) car «…l’abondance de certains types (mèches de forêt et bâtonnets) et la quasi inexistence d’autres (microburins et pièces esquillées) peuvent avoir eu pour cause l’inexpérience de l’inventeur qui n’était qu’au début de ses contacts avec cette industrie microlithique, finalement plus complexe qu’elle pouvait le paraître de prime abord. Au fond une nouvelle étude de la collection Waterlot se résumerait à notre avis à la réactualisation du vocabulaire typologique de Vaufrey » (Lame, 1981 : 273, §1). 58 Sites fouillés par Lame (1981), stratigraphies dégagées, mobilier lithique et céramique analysé et interprétation systémique des données (en lames minces) même si la stratigraphie de Diakité, relevée vers Tivaoune et non sur le gisement, est l‘œuvre de Descamps et Démoulin (1969) 59 ―Il semble que dés les premiers ramassages, malgré ses efforts d‘objectivité, Waterlot ait procédé …à une sélection de pièces récoltées » dont Vaufrey a fait l‘inventaire et une « étude parcellaire », Lame 1981 : 272 43 Etant donné que la représentativité archéologique d‘un corpus fourni, statistiquement parlant, se mesure, parfois, au volume du matériel recueilli, Lame considère que Vaufrey a fait un inventaire partiel du matériel de Waterlot, qui ne recoupe pas ses découvertes. Ces objections de Lame sont disqualifiées par le fait que « plusieurs ramassages consécutifs aient été effectués sur une grande étendue n‘impliquera jamais qu‘un site n‘est pas homogène » (Deschamps, 2013 : 92) et que, par conséquent, « M. Lame part de présupposés très forts qui ne permettent guère de donner de crédit à sa démonstration» (Deschamps, 2013). Lame, pour discriminer la thèse capsienne du Néolithique de l‘ouest sénégalais, part d‘une « idée préconçue » pour étayer sa thèse. Laquelle repose sur le fait que « la série ne lui semble pas correspondre à ce que lui connaît par ailleurs sur ses sites » (S. Deschamps, 2013 : 93), ce qui est problématique car « en dehors de tout contexte chronologique relatif et absolu bien défini comment peut-il préjuger de ce qui devrait être présent ? » (S. Deschamps, 2013). Pour Deschamps (2013 : 97), la méthode employée est toujours le fruit de son époque et que subséquemment M. Lame a une volonté farouche de faire coller sa propre théorie sur ce qu‘il a nommé le Néolithique microlithique dunaire avec la réalité de la collection de Waterlot. Mais, la théorie, si théorie il y a, elle repose sur des propretés scientificomathématiques non ? Autrement dit, les considérations conclusives de Lame sont- elles sousjacentes à ses découvertes dans leur contexte stratigraphique ? En rappel, les critères microlithiques et les pièces géométriques (exemple : burin Krukowski) constituant la trame de pensée de Lame et le fait matériel caractéristique du Néolithique microlithique dunaire de Rufisque, définit par Lame, écartent la théorie néocapsienne de l‘industrie microlithique ouest- sénégalaise. Car, « au fond une nouvelle étude de la collection de Waterlot se résumerait (…) à la réactualisation du vocabulaire typologique de Vaufrey… qui ne pourrait guère aboutir à une réévaluation statistique conséquente » (Lame : 273, §1). Pour S. Deschamps, une telle lecture est circulaire, car s‘il s‘agit d‘une « réactualisation sans réévaluation pourquoi en faire l‘économie » ? (S. Deschamps 2013 : 94). Bref, si l‘on suit le raisonnement de S. Deschamps, le paradigme scientifique et épistémologique de la fin des années 70 (que dire alors des travaux de Descamps, de Thilmans, d‘I. Diagne ?) a eu des conséquences fortes sur les recherches menées (2013 : 94). Selon une « approche circulaire », « en prenant de terribles raccourcis » (Deschamps, 2014 : 94), on tente par différents processus de montrer que l‘odyssée humaine, son 44 « industrialisation » primitive dans l‘ouest sénégalais est autonome, antérieure ( ?) et différentielle du Maghreb et de l‘occident préhistorique. De ce fait, « influencé par le paradigme dominant de l‘époque du panafricanisme et de l‘afrocentrisme, Lame tente par tous les moyens d‘introduire la notion de néolithisation locale et originale » (Deschamps, 2014 : 94). Pour nous, cette perception de Deschamps est linéaire, même si elle s‘en défend60 : la démarche de Lame n‘est en rien fondée sur un modèle « paramétré », soit disant une influence paradigmatique, du sceau d‘un repère culturel perdu ou retrouvé. Etant donné que les interprétations antithétiques et les points focaux (les outils analitiques) caractéristiques du matériel de Rufisque ne reposent pas sur un prisme ou sur un empirisme « paradigmatique » africain, mais d‘observations de terrain, fondées sur « l‘existant » ; de différents mobiliers d‘une même station. En effet, le matériel de Njenwatt se compose de plusieurs artéfacts. Il provient du ramassage de C. Descamps61 en 1975, le réexamen du matériel de Waterlot62 mais également les récoltes de lame63 (1981). Même si, elle constate et s‘en désole que, ―le raisonnement archéologique découle d‘observations plus ou moins empiriques selon les cas. Il agit dans un champ de validité qui minore les reconstructions fantaisistes. Les synthèses produites sont provisoires par définition‖64 . Le parallélisme réalisé entre ces différentes séries, la richesse du gisement et des collections sont, pour l‘auteur, la preuve qu‘une sélection au niveau des catégories d‘objet a été effectuée par Waterlot. Quels sont les éléments tangibles qui l‘attestent ? A travers le rappel des recherches archéologiques sur les stations du cap Manuel, de Diack, et par « expérience65 » il est évident que « l‘archéologie est une science du biais » (Deschamps, 2013).
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