Le modèle de performance des parties prenantes d’Atkinson, Waterhouse et Wells

Prédominance de l’aspect financier dans l’opérationnalisation de la performance

L’évaluation de la performance de l’entreprise a longtemps reposé sur les résultats financiers, par le biais des indicateurs financiers, et en se basant sur le critère de rentabilité des investissements (Return On Investment). Ces éléments ont toujours tenu une place dominante dans les techniques d’évaluation de la performance (Cauvin et Bescos, 2005). Mais si la performance de l’entreprise a d’abord été mesurée dans le domaine financier, il a été observé que cet angle ne permet pas de refléter la véritable performance de l’entreprise. Si comme le dit Henri Ford : « une Entreprise qui ne gagne que de l’argent est bien pauvre », la performance globale recherchée au niveau des organisations ne peut être évaluée uniquement à partir d’indicateurs financiers ou économiques.

Apparition des indicateurs non financiers

Pour Brulhart et Moncef (2010)1 citant plusieurs auteurs, il existe plusieurs limites aux indicateurs financiers qui ne rendent compte que d’une vision à court terme de la performance. Pour eux, ces indicateurs ne proposent qu’une vision synthétique de la performance globale de l’entreprise et ne considèrent pas les éléments intangibles de la valeur de l’entreprise. Ils ne permettent pas non plus d’apporter des explications sur la stratégie mise en œuvre par l’entreprise et ne reflètent pas immédiatement les effets des actions managériales. Enfin, ces indicateurs sont incapables de prendre en compte l’investissement dans les actifs intangibles tels que la satisfaction du client ou l’innovation. Les auteurs en concluent donc qu’il est impossible de couvrir le champ des indicateurs de performance des entreprises en s’appuyant sur les seules données financières.

Le modèle de performance des parties prenantes d’Atkinson, Waterhouse et Wells (1997)

Présentation du modèle

Atkinson, Waterhouse et Wells (1997)4 ont présenté un modèle de performance en mettant l’accent sur les parties prenantes (ou parties intéressées) et leur rôle dans la performance de l’entreprise. Pour ce faire, ils ont intégré quatre types de parties prenantes. Il s’agit notamment des actionnaires, des clients, des employés et de la communauté dans laquelle s’insère l’entreprise.
Les actionnaires influencent la performance de l’entreprise par le biais du rendement sur les investissements.
Les clients constituent des parties prenantes pour lesquelles, les activités sont menées au sein de l’entreprise.
Les employés sont des acteurs internes qui garantissent l’accomplissement des différentes activités et de la satisfaction des clients. Dans ce cadre, leur engagement, leur compétence et leur productivité comptent beaucoup dans le cadre de la performance de l’entreprise.
La communauté : ce sont les groupes de citoyens, les associations de protections de l’environnement, etc….

Les implications managériales

Le modèle de performance des parties prenantes d’Atkinson et al (1997) permet aux dirigeants d’identifier les parties prenantes qui agissent sur la rentabilité de leurs entreprises. D’après les enquêtes menées par ces auteurs, les actionnaires sont les plus importants dans le cadre de la rentabilité de l’entreprise. Dans 40% des cas, ils interviennent dans les différentes décisions de l’entreprise. Ensuite, viennent les clients qui, dans 30% des cas conditionnent aussi la rentabilité de l’entreprise. La performance organisationnelle de l’entreprise dépend à 20% des employés qui font le travail et qui assurent de ce fait la qualité des services ou des produits délivrés aux clients. La décision de la communauté joue une faible part (10%) dans la performance organisationnelle et la rentabilité de l’entreprise (Mandzila, 2006).
Ce modèle de la performance permet aussi de mettre en relief l’image de l’entreprise et son implication sociétale. Ainsi, l’entreprise peut définir les différents axes de pilotage de ses activités. Il permet entre autre de déterminer les différentes missions que l’entreprise doit accomplir, les objectifs qui sont relatifs à ces différentes missions et les moyens pouvant être déployés pour atteindre ces objectifs.
Le modèle d’Atkinson et al (1997) met bien en relief trois différents types de performance que nous allons analyser : la performance financière (actionnaires), la performance commerciale (clients), la performance humaine (employés) ou la performance sociale (communauté). D’autres types de performances comme la performance de production ou la performance stratégiques vont aussi être analysés. Ci dessous, nous allons reprendre les différentes approches de la performance qui vont nous aider à comprendre l’ampleur du champ d’analyse du concept ainsi que les différents facteurs qui peuvent l’influencer et les indicateurs qui permettent de la mesurer.

Les différentes typologies de la performance

La performance financière

La performance financière pourrait être définie comme étant la réalisation d’une bonne rentabilité, d’une croissance satisfaisante, et de création de valeurs pour l’actionnaire (Guérard S. 2006). Elle vise à assurer la stabilité du financement de l’entreprise afin de recourir le moins possible à des crédits.
La performance financière de l’entreprise dépend de la gestion des ressources financières à la disposition de l’entreprise. Cette gestion conditionne la rentabilisation des fonds investis à l’origine et le renouvellement des opérations les plus profitables à l’entreprise. Aujourd’hui l’entreprise ne cherche plus à générer des profits pour son seul compte, mais doit aussi penser aux retombées de ses activités sur l’ensemble de ses parties prenantes.
Il est à noter que la performance financière de l’entreprise est corrélée avec la gouvernance de l’entreprise. Comme le dit Miloud (2003)5 , une mauvaise gouvernance peut impacter négativement sur la performance financière de l’entreprise. La bonne gouvernance permet d’établir une plus large responsabilisation, une meilleure gestion et un meilleur contrôle de l’entreprise (corporate governance) et d’établir un comportement responsable au sein de l’entreprise.

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Les indicateurs de la performance financière de l’entreprise

Avant les années 1990, les entreprises se sont principalement focalisées sur les indicateurs financiers pour évaluer leur performance. Les principaux indicateurs financiers qui ont été exploités pendant cette période étaient les retours sur investissements ou ROI (Return On Investment), les chiffres d’affaires et les résultats.
Ces indicateurs portent à croire que la performance de l’entreprise est principalement appréhendée au niveau de la richesse des actionnaires. Les données financières et comptables ont donc permis de refléter la performance boursière de l’entreprise.

CFROI

Le Cash Flow Return On Investment (CFROI) correspond à la moyenne des taux de rentabilité interne des investissements actuels de l’entreprise. Le CFROI est le taux de rentabilité interne qui égalise l’actif économique de l’entreprise, pris en montant brut, c’est-à-dire avant dotations aux amortissements et réévalué du taux d’inflation, et la série des excédents bruts d’exploitation après impôt, calculée sur la durée de vie des actifs immobilisés en place. Cette dernière s’estime en divisant la valeur brute des immobilisations par la dotation aux amortissements de l’année. Le CFROI est alors comparé au coût moyen pondéré du capital.
CFROI : Cash flow/ valeur du marché du capital employé.
Le CFROI peut être comparé au coût du capital à évaluer si l’investissement de l’entreprise est bon, neutre ou pauvre. Pour améliorer la valeur de l’entreprise, celle-ci doit donc augmenter la différence entre le coût de son capital et son CFROI (Venanzi, 2012).

ROE

Le Return On Equity (ROE) est un indicateur qui donne une information concernant la profitabilité de la société et sa capacité à donner du bénéfice en partant des investissements des actionnaires. Il permet aussi de définir les différents leviers de la performance, de mesurer les capitaux investis ainsi que le résultat économique par objet d’étude (Berland et Simon, 2010).
Toutefois, il a été observé que le ROE pouvait être volatile par rapport à d’autres indicateurs du fait que les frais financiers reposent sur une dette fixe. Les éléments de revenus et de coûts sont variables (Ponssard J. 2005).

ROI

Le ROI est le pourcentage du retour des capitaux investis. Il mesure l’utilisation des actifs de l’entreprise pour générer des profits. Dans cette optique, il est principalement exploité pour connaître si les investissements consacrés au lancement d’un projet sont bien justifiés par les résultats obtenus (Pinardon, 1989). Il correspond au rapport entre les coûts et les bénéfices.
Le ROI a été depuis toujours considéré comme étant une mesure complète et synthétique de la performance de l’entreprise. Dans cette optique, il permet de mettre à jour les différents éléments qui affectent les états financiers de l’entreprise. C’est un indicateur facile à calculer et à comprendre par l’utilisateur. D’autre part, il peut être appliqué à toute organisation et permet par conséquent, de déterminer les différents centres de profit de l’entreprise voire même, de l’organisation.

Intérêts et limites de la performance financière par rapport aux autres types de performance

Les indicateurs de la performance financière que nous venons d’aborder présentent cependant des limites. Les données financières tiennent compte des actionnaires de l’entreprise et négligent de ce fait, les autres parties prenantes. D’autre part, ces données pourraient pousser le gestionnaire à fonder ses analyses sur le court terme, en oubliant les investissements en termes de recherche et développement, ou en marketing. Il a été constaté entre autre, que les données comptables et financières donnent des indications concernant la performance de l’entreprise dans le passé, ce qui fait que les dirigeants ne peuvent pas se fier à ces données pour prendre une décision.
Certes, les résultats comptables des entreprises dans le passé leurs permettent de connaître la rentabilité de leurs activités et de leurs actifs. Cependant, cette connaissance n’a pas toujours permis aux entreprises de faire des évaluations permettant d’anticiper leur performance financière dans le futur. Ceci est dû au fait que les besoins et les attentes des clients changent au fil du temps. Ainsi, il est bien probable qu’une activité dont la rentabilité a été éprouvée depuis plusieurs années ne puisse plus afficher une meilleure performance maintenant.
En effet la performance financière à long terme de l’entreprise ne tient pas uniquement compte de la situation financière passée de l’entreprise, mais également, de sa situation actuelle et une anticipation de sa situation dans le futur. De ce fait, et comme le disent Cumby et Conrod (2001)11, la performance financière ne peut pas être évaluée en tenant compte des seuls indicateurs financiers, mais aussi, des indicateurs non financiers tels que la fidélité des clients, les processus internes et le degré d’innovation de l’entreprise. La satisfaction des clients peut par exemple constituer, un indicateur de performance économique et de performance boursière de l’entreprise.
Dans ce cadre, la performance financière de l’entreprise ne constitue donc pas une approche suffisante pour appréhender la performance de l’entreprise. D’autres types de performance méritent d’être analysés.

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