Le mémoire professionnel
Ce chapitre aborde deux points inspirés de Florent Gomez2 en ce qui concerne le mémoire classique. Ensuite est abordé le mémoire professionnel en la forme de projet d’intervention sociale. Devant articuler connaissances pratiques (de terrain, de situation) et connaissances théoriques (livresques), et constituant une initiation à la recherche, le mémoire se présente généralement comme un travail écrit (mais il peut aussi être audiovisuel) à propos d’une question professionnelle. Réalisé comme il se doit, selon les règles de l’art, le mémoire professionnel reflète en principe la capacité du praticien d’écrire sur sa pratique pour l’améliorer ; il manifeste aussi ses capacités d’analyse et de réflexion. Il ne peut donc pas être réduit à une production centrée exclusivement sur la pratique ou sur la recherche. A cet égard, la circulaire 91-102 du 2 juillet 1991, créant le mémoire professionnel en même temps que les IUFM en France, au sein d’universités, en donne un balisage : ni mémoire de recherche, ni descriptif, ni récit, ni dissertation. Quoiqu’il en soit, s’il n’est pas directement une formation à la recherche, il est inévitablement une formation par la recherche, car s’impose à lui une référence scientifique. La position de J. P Simon (1997) est explicite : le mémoire professionnel est d’abord un exercice de formation par la recherche et ensuite une démarche d’initiation à la recherche.
Des auteurs refusent au mémoire professionnel le statut de travail de recherche même s’il sollicite l’interrogation des pratiques (C. Alin1995) et la réflexion sur soi (J. M Van Der Maren et J. G Blais 1994). D’autres (J. Bisault et A.Larvarde 1995 et M. Rey et al. 1994) ont du mémoire une approche expérimentale, avec des hypothèses, avec une recherche de contrôle de variables. Le mémoires’ éloigne ainsi de la préparation au métier et a une visée scientifique. A la vérité, le mémoire professionnel n’a pas la prétention ni la vocation de contribuer à faire progresser les cadres conceptuels des disciplines de la formation, les méthodes d’analyse ou les dispositifs méthodologiques. Il n’en demeure pas moins exact qu’il est un travail d’étude, d’analyse, d’examen, de réflexion, mené avec les précautions nécessaires pour conduire des investigations à terme. En fin de compte, le tout est que le mémoire professionnel contribue à la lucidité des acteurs sociaux (stagiaires, étudiants en formation) sur des théories qu’ils devront connaitre, sur des évènements ou des phénomènes dont ils seront les témoins. Cela signifie que le mémoire professionnel doit nécessairement s’appuyer sur l’analyse des pratiques afin d’identifier les problèmes, les élucider et proposer des pistes de réflexion pour les résoudre.
Bien entendu, analyser des pratiques ne veut pas dire décrire des séquences d’apprentissage dans une formation donnée ni décrire de manière désordonnée les tenants et aboutissants de pratiques. L’analyse doit évidemment porter sur des topiques créatrices de tensions pouvant exister entre les cadres (les personnes, les groupes, les contextes, les habitus, les institutions), sur les curricula (contenus et supports de formation, méthodes d’enseignement et d’évaluation), sur les séquences d’actions (déroulement de séquences d’enseignement, avec les objectifs, les habitus des praticiens).Le mémoire professionnel est une production qui met en jeu l’écriture, traite de situations professionnelles évoquées, s’applique à les clarifier, les rendre intelligibles en analysent des éléments à mettre en perspective avec des valeurs, des usages, des acquis théoriques ou méthodologies. Il enclenche un processus de production de savoir. écrit », etc., et les compétences de processus qui mêlent les connaissances, leur mise en œuvre et la mobilisation de l’acteur, telles que la capacité de produire des règles d’action, de répondre aux fluctuations de l’environnement.
Il s’agit, à la vérité, de compétence de gestion du processus de production du mémoire professionnel, de la manière de saisir les démarches, les interrogations et les savoirs à l’œuvre. Concentré sur le processus qui mène à prendre conscience d’un problème, à tenter de le traiter, l’auteur du mémoire est sensible aux étapes de la recherche. Florent Gomez peut écrire : « Le mémoire professionnel bien compris favorise la conscientisation des problèmes, leur analyse, la recherche d’information, l’évaluation de la pratique transformée, l’exposé des démarches, autant d’étapes à parcourir pour un processus créatif[…] d’auto-formation orientée vers l’adaptation à l’environnement, le désir d’agir sur cet environnement et la faculté de remise en question permanente de soi- même ».Le titre même doit révéler le souci professionnel. A titre d’exemples, voici les titres de mémoires de CAFCO (Certificat d’Aptitude à la Fonction de Conseiller d’Orientation) de deux étudiants, mémoires soutenus le 10 juillet 2008 : BIBI Ohiri Yolande, Le métier de conseiller d’orientation à l’épreuve du terrain ; KOUASSI Assouan Bruno, La maturation du choix professionnel : cas des élèves conseillers d’orientation de la promotion 2006-2008. Un autre exemple est celui du mémoire de fin de cycle de l’Ecole des Assistants Sociaux (à l’INFS) soutenu le 31 juillet 2014 : MEA Akassi Marie-Yvonne, Amélioration des prestations d’un service, moyen de la réduction des perdus de vue : cas de la prévention de la transmission mère enfant de la PMI de Daloa (Côte d’Ivoire).