Le frittage des ANB

Le frittage des ANB

Comme énoncé dans le chapitre bibliographique, le frittage est l’ensemble des transformations qui permettent l’obtention d’un matériau massif et cohérent à partir d’un matériau pulvérulent auquel on a donné la géométrie de la pièce à réaliser. La grande réactivité de surface des ANB, due à la présence d’espèces ioniques labiles, n’est plus à démontrer [Cazalbou2000,2004b, Eichert2001,2002]. Les différentes caractérisations physico-chimiques réalisées dans le chapitre précédent ont mis en évidence l’influence du temps de maturation de l’apatite en solution, sur la présence des différentes espèces nonapatitiques structurant la couche hydratée, siège de la réactivité. Eichert et al. ont compris le rôle de la grande mobilité ionique au cœur de la couche hydratée, et toute sa fonctionnalité lors de la formation de matériau massif [Eichert2002]. La Figure 47 illustre l’implication de la couche hydratée dans l’évolution des cristallites. Elles peuvent coexister indépendamment l’une de l’autre, avec chacune une surface hydratée (étape I), lorsque 2 cristallites sont à proximité, la grande mobilité des ions de surface leur permet de partager leur surface ionique (étape II) qui peut conduire à la maturation des cristallites (étape III) ou à leur consolidation à basse température (étape IV). Tandis que l’étape III correspond au phénomène observé par MEB-FEG, lors du rapprochement des filaments individuels qui paraissent s’assembler via leur couche hydratée, l’étude du mécanisme de consolidation (étape IV) fait l’objet de ce Chapitre, dans le cas du frittage par Spark Plasma Sintering à température typiquement inférieure à 200°C. Le phénomène de « fusion cristalline » qui a lieu au cours du frittage à « basse » température est particulièrement intéressant car il génère des liaisons fortes entre les cristaux, indispensable à la formation d’une biocéramique massive en vue d’être utilisée en tant que dispositif implantable (comme matériau de substitution osseuse). La conservation de la couche hydratée lors de la consolidation à basse température est particulièrement intéressante, car elle est non seulement capable d’échanger des espèces ioniques avec les fluides environnants, mais elle peut aussi adsorber des protéines, de la même façon que le minéral osseux. Ainsi, il paraît favorable de conserver cette propriété dans la biocéramique massive, afin de faciliter son intégration osseuse dans le site receveur, et favoriser la colonisation par les protéines et les cellules pour la reconstruction osseuse. Les méthodes de frittage classiques à haute température (1200°C) ne sont pas souhaitables pour consolider les poudres d’ANB, car la couche hydratée et la mobilité de surface induite seraient détruites et le caractère nanocristallin perdu. Différentes méthodes de frittage à basse température, présentées précédemment (Chapitre I, § I.2.3), se sont inspirées des méthodes conventionnelles, mais ne permettent pas de concilier les propriétés physico-chimiques de l’ANB et de bonnes propriétés mécaniques [Banu2005].Une technique non-conventionnelle de frittage a donné des premiers résultats encourageants pour l’élaboration d’une biocéramiques réunissant les propriétés mentionnées ci-dessus [Drouet2006,2009]. Le frittage par Spark Plasma Sintering communément appelé SPS ou « frittage flash » montre une consolidation des ANB possible à 200°C, avec des altérations (en termes de perte d’eau et d’augmentation de la taille des cristallites) moindres par rapport aux dommages créés par les techniques conventionnelles de frittage [Drouet2006,2009]. Dans ce chapitre, la consolidation des poudres d’ANB par SPS est approfondie pour chaque ANB maturée dont la caractérisation a été détaillée dans le Chapitre II. La caractérisation des biocéramiques obtenues seront comparées avec celles des poudres initiales pour essayer de mieux comprendre le mécanisme de consolidation par SPS.

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Le Spark Plasma Sintering ou SPS ou frittage flash

– le principe L’appareil utilisé pour les essais est un SPS SUMITOMO 2080 accessible à la Plateforme Nationale de Frittage Flash du CNRS (PNF2/CNRS) à Toulouse (Figure 48B). Contrairement au frittage conventionnel ou au pressage à chaud, pour lesquels l’énergie nécessaire au frittage est apportée thermiquement par chauffage du substrat (convection puis rayonnement), la particularité du frittage flash permet de réaliser l’opération de frittage en chauffant la poudre non pas thermiquement par rayonnement mais directement par effet joule. De nombreuses techniques permettant de fritter des poudres à partir d’un courant électrique ont été développées depuis 1933 (concept initié par Taylor). Il est maintenant assez accepté que le frittage activé par un champ électrique permet une densification plus rapide [Khor2003]. Mais c’est seulement au début des années 1960 que le procédé SPS a été réellement développé par l’équipe de Inoue [Honda1964]. Il permet d’obtenir des matériaux frittés en appliquant simultanément une pression et un courant électrique (Figure 48A). Les pulses de courant électrique du SPS SUMITOMO 2080 peuvent atteindre jusqu’à 8000 A alors que la différence de potentiel reste égale à quelques volts (10 V). L’ensemble presse uniaxiale se rapproche de l’architecture d’une presse hydraulique, qui peut développer de 5 à 200 kN en force uniaxiale. Les efforts appliqués via les pistons sont mesurés par une cellule de force qui est limitée à 200 kN.Le temps de frittage est généralement compris entre 2 et quelques dizaines de minutes, ce qui est largement inférieur au temps de frittage pour les procédés conventionnels qui peut atteindre plusieurs heures. Des temps de frittage courts permettent de conserver une microstructure fine. C’est l’un des avantages du frittage SPS par rapport aux autres procédés de frittage, permettant d’accroître les propriétés mécaniques en minimisant l’impact du traitement thermique. Les échantillons de poudre sont placés au sein d’une matrice en graphite et pressés entre deux pistons de diamètre identique. Une fine feuille de graphite (Papyex®) est insérée entre la poudre et les parois du moule « matrice + pistons » pour faciliter le démoulage de l’échantillon consolidé. Cet ensemble, placé à l’intérieur de la chambre, est positionné entre deux jeux de pièces cylindriques en graphite qui assurent ainsi une première protection thermique tout en favorisant l’amenée de courant électrique. Ces protections, qui sont des entretoises, sont généralement appelées « spacers ». 

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