La transition écologique : une assurance pour l’avenir
L’activité économique actuelle exploite les ressources naturelles à un rythme incompatible avec leur renouvellement et le bien-être des générations futures
La nature, une ressource de la croissance au même titre que le travail et le capital
Les ressources naturelles regroupent les matières premières, les espèces vivantes et leur diversité, l’eau, les sols et les énergies d’une part, les cycles du carbone, de l’azote et de l’eau, le climat et le fonctionnement des écosystèmes d’autre part. Cette simple énumération souligne l’étendue des apports qu’elles constituent pour les économies, au même titre que le capital et le travail. D’ici à 2050, les sociétés devront être capables de répondre à une demande de 9,3 milliards d’habitants (d’après le scénario médian de la division « Population » des Nations unies) et devront alors s’assurer de la disponibilité et du renouvellement équilibré de ces ressources tant aux niveaux local et national qu’européen et mondial. Cela suppose des actions spécifiques, d’efficacité, de substitution et de préservation, alors que les impacts du changement climatique commencent à se faire sentir et que les ressources et régulations naturelles sont souvent déjà très utilisées et dégradées voire surexploitées. Il devient essentiel d’étendre la notion de capital au-delà du champ habituel du capital productif ou du capital humain pour tenir compte également du capital naturel. Cette prise de conscience est relativement récente8 alors même que les acteurs ont pu considérer comme inépuisables ou indéfiniment renouvelables certaines ressources pourtant menacées, sans, par conséquent, veiller à leur pérennité. Faute de prise en compte du coût socio-économique de la perte de ces ressources et cycles naturels, leur pérennité n’est pas spontanément assurée.
En cas d’inaction, la mise à mal des régulations et ressources naturelles hypothèquera lourdement les conditions de vie et pourrait affecter également la croissance, avec une chronologie et une amplitude variables selon les pays .De nombreux rapports internationaux ont déjà montré que l’évolution climatique induite par l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre, largement liées à l’utilisation des énergies fossiles, était susceptible de dépasser rapidement un seuil dangereux pour les écosystèmes et les ressources hydriques et biologiques dont dépendent étroitement les sociétés humaines. Les phénomènes climatiques extrêmes, l’acidification des océans, la montée du niveau des mers se font déjà sentir, avec pour certains des impacts économiques déjà sensibles (dégâts sur le patrimoine bâti, pertes de rendements agricoles, incendies, inondations, tempêtes, salinisation des sols, assèchements et risques physiques liés à la fonte accélérée des glaciers…). Eviter les plus graves conséquences de ce dérèglement climatique9 suppose que les émissions mondiales atteignent un pic au plus tard en 2020. Le rapport Stern estimait que le réchauffement climatique conduirait à l’équivalent d’une perte de consommation par habitant, définitive et irréversible, comprise entre 5% et 20% selon les scénarios et selon la prise en compte (ou non) des impacts non marchands au cours des deux prochains siècles par rapport à un scénario tendanciel (dit de croissance équilibrée).
Le progrès technique ne suffirait pas pour assurer le renouvellement du capital naturel face à l’ampleur et à l’irréversibilité des chocs climatiques et sur la biodiversité
En matière climatique, les programmes d’économies d’énergie lancés suite aux chocs pétroliers des années 1970 ont certes permis de réduire l’intensité énergétique du PIB, en particulier dans les principaux pays développés. Mais ils n’ont pas été suffisants pour contrecarrer la hausse globale des émissions de gaz à effet de serre, qui ont crû de 70% entre 1970 et 2004 (source : GIEC, 4ème rapport d’évaluation), notamment du fait du développement économique accéléré des grands pays émergents. L’extraction annuelle de matériaux de construction a été multipliée par 34 au cours du XXème siècle, celle de minerais par 27, celle des énergies fossiles par 12. Cet accroissement a en grande partie été dicté par la croissance du PIB mondial. Cette dernière a toutefois été plus rapide (multiplication du PIB par 23) que l’augmentation globale des quantités de matériaux extraites (multiplication par 8)17, ce qui suggère une forme de découplage entre la richesse et la pression sur les ressources. Ce découplage semble toutefois insuffisant pour assurer la soutenabilité du rythme d’utilisation des matières premières, notamment en termes d’impacts sur l’environnement..