Le développement et le changement de la perception et de l’attitude chez les jeunes
Il semble que le jeune enfant n’a pas d’attitude préconçue en bas âge. Ainsi, il perçoit des faits par ses sens, mais ses attitudes envers des objets ou personnes se développent vers l’âge de sept ou huit ans (Baron, Byrne, & SuIs, 1989). Les attitudes proviennent de la socialisation, en grande partie par les parents, lorsqu ‘ ils parlent d’expériences vécues ou d’ un sujet concernant un objet ou un groupe de personnes en y associant un affect (Baron, Byrne, & SuIs, 1989). Par la suite, les amis et les propres expériences sont des facteurs importants dans l’ acquisition d’attitudes (Baron, Byrne, & SuIs, 1989). Chez les jeunes, l’adolescence est la période cruciale pour le développement des attitudes et des perceptions envers le monde et plus précisément envers la loi et les policiers. C’est à ce moment-là que l’adolescent peut confirmer ses attitudes ou ses perceptions en rencontrant le vrai policier et non pas l’ image policière projetée par les membres de sa famille ou de son environnement (Bouma, Williams, International Association of Chiefs of police, & United States of America, 1972; Dirikx, Gelders, & Parmentier, 2012; Portune, 1971 ; Rusinko, Johnson, & Homung, 1978).
À l’ adolescence, plus précisément entre 12 et 16 ans, les pairs et l’environnement ont une plus grande influence que les parents sur les perceptions et les systèmes de valeurs des parents sont mis à l’épreuve (Hinds, 2007; Portune, 1971). Lorsque l’ adolescent a une perception positive envers les policiers, cette perception risque de perdurer à l’âge adulte (Hinds, 2007). Il est important que le policier tienne compte que l’adolescent n’a pas toute la maturité de l’ adulte pour réagir correctement lors de situations de crises en présence de policiers (Rusinko, Johnson, & Homung, 1978). Le policier peut donc adapter son comportement envers le jeune et ainsi faire en sorte d’améliorer les perceptions du jeune face à lui (Rusinko, Johnson, & Homung, 1978). Selon douze groupes de discussion aux Pays-Bas sur les différents types d’ attitude envers les policiers (de performance, procédurale et distributive) et des questionnaires en Australie, c’est la manière dont les policiers agissent, donc leur procédure et leur professionnalisme, qui est le plus important chez les jeunes adolescents (Dirikx, Gelders, & Parmentier, 2012; Hinds, 2007). Qu’en est-il pour le développement et le changement de perceptions et d’ attitudes chez les policiers? La prochaine section aborde ce questionnement.
Le développement et le changement de la perception et de l’attitude chez les policiers
Le policier a les mêmes processus de perceptions et d’ attitudes que les citoyens. Ainsi, lorsqu ‘ il aperçoit un jeune pour la première fois, il est possible que sans information antérieure sur le jeune, qu ‘ il utilise ses catégorisations, ses schémas et ses stéréotypes. Il est possible que le policier se fie à ses connaissances antérieures des jeunes selon ses affiliations, son sexe, son âge, son origine ethnique, le quartier dans lequel il se trouve, bref, tous les facteurs qui déterminent la perception des jeunes envers les policiers (Rusinko, Johnson, & Homung, 1978; Schade, 1970). Une étude (Schade, 1970) qui évalue la perception que les policiers ont des jeunes envers eux indique que les policiers ont une perception des jeunes comme étant plus négative que ce qu ‘ elle est réellement. Ainsi, alors que seulement le tiers des jeunes pensent que les policiers s’en prennent davantage aux jeunes de la communauté noire, les trois quarts des policiers pensent que c’ est ce que les jeunes perçoivent (Schade, 1970). Il est alors important que le policier puisse lui aussi approfondir ses connaissances et sa relation envers les jeunes de son secteur de patrouille pour éviter d’ utiliser la catégorisation. Les concepts d’ attitude et de perception ainsi que de changement d’ attitude et de perception sont maintenant définis selon les approches de psychologie sociale et cognitive. Comment est-ce que les théoriciens s’y prennent pour mesurer ces attitudes et perceptions? Les méthodes directes et indirectes de mesures des attitudes et perceptions, ainsi que la création d’échelles, leurs évolutions, leurs constructions, leurs validités et fidélités sont explicitées dans la prochaine section. De plus, les échelles de mesure en lien avec les policiers et leurs limites sont également décrites dans la prochaine section.
Mesure du changement de perception ou d’attitude
La plupart des auteurs qui décrivent les méthodes qui peuvent être utilisées pour mesurer le changement de perception ou d’attitude nous proviennent des années 1960 et 1970. Une recension des recherches sur la question montre qu ‘ il existe des méthodes directes et indirectes. Les méthodes directes incluent tous les types d’ échelles d’énoncés (Petty & Cacioppo, 1981 a). Les méthodes indirectes font référence aux méthodes projectives par l’évaluation d’ images traduites par des histoires, par des questionnaires à choix multiples sans bonne réponse et par des techniques physiométriques (EEG, réponse pupillaire, réponse de sudation de la peau, etc.) (Petty & Cacioppo, 1981a). La plupart des recherches sur le changement d’attitude et de perception utilisent des méthodes directes d’ échelles de mesure, ainsi ces méthodes seront examinées plus en détail dans les prochains paragraphes. Trois méthodes permettent de mesurer directement le changement de perceptions ou d’ attitudes. Il s’agit du questionnement direct qui peut être individuel ou en groupe de discussion. Cette méthode ne permet pas toujours d’avoir une bonne version des faits puisqu’ il faut que l’ intervieweur soit qualifié pour ne pas influencer le jeune et aller chercher le sens complet de son raisonnement (Portune, 1971).
Il y a également la méthode de l’observation directe où il est plus difficile de déterminer l’ attitude ou la perception de la personne. Avec l’ observation directe, il est possible d’observer le changement de comportements de la personne, mais non pas le changement de perception ou d’ attitude interne qui est sous-jacent (Portune, 1971). La personne a peut26 être adapté son comportement sans nécessairement avoir changé sa façon de penser. La troisième méthode pour vérifier le changement de perceptions ou d’ attitudes se fait par des échelles mesurant les perceptions ou les attitudes (Portune, 1971). Ce sont des méthodes plus fiables qui permettent de comparer plusieurs groupes de jeunes entre eux, de comparer un groupe expérimental à un groupe contrôle ou de mesurer les mêmes jeunes à plusieurs moments de leur vie (test – retest) (portune, 1971). La méthode directe de mesure d’ attitude ou de perception par des échelles sera explicitée en termes de type d’échelles, de validité et de fidélité, de ce qu’ elles mesurent et de son lien avec la police.
Échelles de mesure des concepts de perception ou d’attitude Depuis les cinquante dernières années, plusieurs échelles de perceptions ou d’attitudes envers les policiers sont élaborées, la plupart des chercheurs créés leur propre échelle de mesure des perceptions pour répondre à un objectif spécifique. La première échelle est créée par Louis Thurstone (échelle de Thurstone) en 1928 (Petty & Cacioppo, 1981 a; Portune, 1971 ; Thurstone, 1927). La personne lit les énoncés et coche les énoncés pour lesquels elle est en accord (Petty & Cacioppo, 1981 a). Chaque énoncé est évalué auparavant et jugé par plusieurs juges pour en déterminer la valeur selon l’ accord interjuges. Les énoncés choisis par la personne sont comptabilisés selon leurs valeurs déterminées et la médiane des scores détermine l’ attitude de la personne (petty & Cacioppo, 1981 a). En 1932, Rensis Likert a inventé sa propre échelle d’attitude (Likert, Rowlow, & Murphy, 1993; Petty & Cacioppo, 1981a). Pour les échelles de Likert, la personne décide de son degré d’accord envers l’énoncé ainsi que de l’ intensité (Très d ‘accord, Peu d ‘accord, etc.) (Petty & Cacioppo, 1981a; Portune, 1971). L’échelle de Thurstone ne permet pas d’ avoir un continuum d’ attitudes et ne permet pas de faire des inférences d’un énoncé à l’autre (Allport, 1932; Petty & Cacioppo, 1981a; Thurstone, 1927). En raison du fait que l’échelle de Likert peut être construite et utilisée sans groupe d’échantillon à part, elle est encore utilisée de nos jours alors que l’échelle de Thurstone est moins populaire.
En 1957, Osgood, Suci, et Tannenbaum développent l’ échelle sémantique différentielle (Petty & Cacioppo, 1981a). C’ est une échelle qui mesure la bipolarité des attitudes, d’un côté de l’échelle, il y a une caractéristique positive et de l’ autre côté, son opposé négatif tel que intelligent/idiot, téméraire/prudent, etc. (Petty & Cacioppo, 1981 a). La personne doit choisir et faire un trait sur un des deux mots polarisés selon que son attitude est davantage en faveur d’une polarité ou de l’ autre ou si elle est indécise. Il existe également une échelle à un seul énoncé. Pour certaines recherches, cela est suffisant bien qu’ elle mesure une seule attitude et non pas un ensemble d’attitudes (Petty & Cacioppo, 1981a). Aujourd’hui, les échelles d’ attitude sont souvent composées d’ une échelle de Likert allant du Fortement en désaccord au Fortement d ‘accord en passant par le Neutre (l ‘ intensité) (Portune, 1971). Ainsi, dans les énoncés présents, il doit y avoir des énoncés qui visent les affects positifs, les affects négatifs et les affects neutres (direction) (Portune, 1971). L’ accessibilité peut être mesurée par le temps que la personne prend avant de répondre à l’ énoncé lorsque le questionnaire se fait en ligne. Ces échelles font référence aux quatre caractéristiques de la définition d’ attitude. La construction d’ échelles de mesure sera abordée dans le prochain paragraphe.
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