Le développement des principes de protection de l’environnement

Le développement des principes de protection de l’environnement

Le droit de l’environnement a une nature particulière : il est un droit qui a une unité en lui-même et des principes qui le guide mais aussi une dimension transversale forte qui le conduit à s’incorporer, à s’adapter pour se fondre dans différentes autres branches du droit. Son développement propre s’est par conséquent retrouvé dans l’ensemble des droits qu’il irrigue et notamment dans le droit de la commande publique. Son influence en cette matière est double puisque ce sont les principes du droit de l’environnement qui se trouvent pris en compte, ce qui induit secondairement des modifications des procédures de passation. La difficulté en la matière est que le développement du droit de l’environnement s’est fait en parallèle en droit international, européen et interne (A), ce qui n’est pas sans poser le problème de la valeur de ces principes, même si dans l’ensemble ils ont au moins la même consistance pour ceux qui concernent le droit de la commande publique (B). A) Les sources des principes du droit de l’environnement 1003. Le droit de l’environnement est soumis, en parallèle, à l’évolution de nombreuses sources qui avancent chacune un certain nombre de principes visant à donner un sens ou une assise juridique particulière aux règles précises qu’elles édictent. Il en est ainsi aussi bien du droit international (1) que du droit communautaire (2) ou bien entendu du droit français (3) 1) Les principes internationaux du droit de l’environnement 1004. Le droit international de l’environnement est une matière récente  qui est en expansion constante depuis le début des années 19702. Beaucoup des règles du droit international de l’environnement sont des mesures sectorielles de protection ; elles ont pour objectif de protéger les espaces maritimes3, les eaux douces4, la faune ou la flore, notamment sous l’angle de la diversité biologique5, l’atmosphère et l’espace6. D’autres ont des assiettes géographiques comme la protection zones polaires ou d’autres régions du globe7. Très peu parmi ces conventions font référence à des principes communs, mais un certain nombre d’autres conventions ont tenté de reconnaître en la matière des « principes » du droit international8. 1005. Il en est notamment ainsi de deux Traité issus de conférence internationales relatives à la protection de l’environnement organisées par les Nations Unies9 : la première est la Conférence de Stockholm qui a abouti à la Déclaration de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement du 16 juin 19720, la seconde est la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement du 14 juin 19921. Toutes deux se présentent en respectivement 26 et 27 « principes » dans lesquels on retrouve pour l’essentiel ceux que l’on trouve aussi en droit interne ou communautaire. Le droit à un environnement de qualité y est même reconnu comme un droit de l’homme2. Leur nature de droit mou (ou Soft Law) lié à leur caractère non contraignant a depuis 1972 été fortement nuancé par la reconnaissance de certains de ces principes comme étant des coutumes internationales, ce qui en fait des normes internationalement sanctionnables3. 1006. À ces sources écrites et ces principes, il faut aussi ajouter la jurisprudence internationale4. L’un des premiers arrêts du droit international de l’environnement concerne un contentieux entre les États-Unis et le Royaume-Uni à propos dans l’affaire de la Fonderie de Trail. À partir de 96 une fonderie au Canada a émis des substances sulfureuses jusqu’aux États-Unis, cet État a alors demandé réparation au Royaume-Uni puis au Canada. Dans la décision de l’International Joint Commission du 7 août 1928 comme dans la sentence arbitrale de 1941, le Canada est condamné à payer une indemnité sur le fondement d’une due diligence que l’on a du mal à ne pas comparer aujourd’hui à un principe du pollueur payeur. Le droit international se développe donc nettement dans le sens d’une reconnaissance rapide non seulement d’un corpus de règles de droit de l’environnement de plus en plus nombreuses, mais en plus vers le développement de principes internationaux du droit de l’environnement. Sur point, on peut penser que le droit communautaire saura apporter sa propre expansion dans les traités à venir dans la mesure où ses instances participent de plus en plus aux traités internationaux sur l’environnement)

Les principes européens du droit de l’environnement

Le droit communautaire a lui aussi connu une extension particulièrement forte de son droit de l’environnement7. Les Traités originels ne contenaient pas de dispositions spécifiques au droit de l’environnement, ce dernier apparaissant comme inapproprié à l’objectif d’un marché commun essentiellement libéral. La véritable prise en compte de cette préoccupation date du Traité de Maastricht qui crée les articles 130 R à T constituant le Titre XVI du Traité CE intitulé « environnement ». Ces articles fixent les objectifs poursuivis par la Communauté dans la politique de l’environnement, les principes applicables et les procédures à suivre. Devenus les articles 4 à 6 du Traité CE après le Traité d’Amsterdam – et III-129 à III-131 du Traité de Constitution pour l’Europe –, ils sont intéressants à un double égard. Le premier est la reconnaissance d’une série de principes qui guident la politique de l’environnement, désormais officiellement fondée sur « les principes de précaution et d’action préventive, sur le principe de la correction, par priorité à la source, des atteintes à l’environnement et sur le principe du pollueur-payeur ». 8 On retrouve, comme en droit international et, on le verra, comme en droit interne, la volonté de principes fondateurs. Cette liste prend pourtant toute son importance par un deuxième aspect : la recherche d’effectivité du droit de l’environnement en droit communautaire. 1008. Cette recherche d’effectivité a été symboliquement marquée avec le Traité d’Amsterdam qui a déplacé d’un des paragraphes de l’article 130 R9 pour le recodifier non pas à l’article 4 mais à l’article 6 du Traité CE190 ; puis par le Traité de Nice, cet article ayant depuis été repris à l’article 37 – intitulé « protection de l’environnement » – de la Charte des droits fondamentaux de l’Union dont on sait qu’elle constitue la deuxième partie du Traité établissant une Constitution pour l’Europe191. Ces articles constituent une officialisation de l’ensemble de l’esprit du droit de l’environnement tel que cela a été vu au début de ce paragraphe : il est à la fois une matière qui cherche une autonomie et une unité, notamment par la référence à des principes propres, mais aussi une matière qui n’a de sens que prise en compte dans l’ensemble des autres politiques. Cette approche permet de considérer que les principes « du droit de l’environnement » sont non seulement des principes généraux mais qu’en plus ils s’appliquent spécialement dans telle ou telle matière. Ils sont en quelque sorte « incorporés » dans ces matières comme des principes qui doivent y prendre une forme en tout état de cause particulière parce que résultant de conciliations avec les autres principes de la matière. C’est ainsi que l’on peut considérer que les principes du droit de l’environnement sont partiellement des principes de la commande publique en ce qu’ils y prennent une forme particulière, fonction des autres principes de la commande publique. 1009. La Commission a pris conscience de la nécessité d’incorporer dans les directives régissant le droit des marchés publics les considérations environnementales, mais elle a aussi rapidement pris en compte les difficultés que cela représentait du fait de la différence d’esprit qui existait entre les principes déjà reconnus et les préoccupations de préservation de la nature. La Communication interprétative de la Commission sur le droit communautaire applicable aux marchés publics et les possibilités d’intégrer des considérations environnementales dans lesdits marchés du 5 juillet 2001 montre bien le souci d’équilibre et d’appropriation des principes du droit de l’environnement par la commande publique192. Si elle pose les bases, on retrouve aujourd’hui dans les directives 2004/ et 2004/ non seulement l’esprit, mais également des dispositions qui vont encore plus loin193. À cette extension telle qu’on la remarque dans les textes s’est ajouté un renforcement de ces principes par la Cour de justice qui contrôle le respect de ces principes par les mesures adoptées au titre de la politique de l’environnement ; même si ce contrôle est limité à celui de l’erreur manifeste d’appréciation, contrôle on ne peut plus logique au regard de la conciliation inhérente, comme on vient de le voir, à ces principes environnementaux194. La reconnaissance de principes du droit de l’environnement en droit communautaire ainsi que le développement d’une politique de l’environnement par des directives spécialisées dans d’autres domaines a bien entendu eu une influence sur le droit interne, d’autant que sa tendance va aussi dans le même sens. 

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