Le corps dans l’histoire des idées
Les enjeux éthiques dans le passage du mécanisme au vitalisme
Dans son texte intitulé La connaissance de la vie, Georges Canguilhem reprend l’observation qui a été celle de Jacques Monod à propos de l’étude du corps vivant. Les deux épistémologues sont unanimes pour reconnaître que sur la notion de corps, les chercheurs se sont toujours alignés sur l’une ou l’autre des positions majeures qui ont caractérisés la pensée humaine. Canguilhem écrit : « Depuis que 1 ‘on s’est intéressé en biologie à la constitution morphologique des corps, l ‘esprit humain a oscillé de l ‘une à 1 ‘autre des deux représentations suivantes : soit une substance plastique fondamentale continue ; soit une composition de parties, d’atomes organisés ou de grain de vie »1 cet auteur arrive à la conclusion suivant laquelle on est là en présence du même débat qui jadis en optique opposait les deux exigences intellectuelles que sont la continuité et la discontinuité. Précisément, à ses yeux, aucun aspect du corps n’a véritablement échappé à la controverse entre savants. « Mécanisme et vitalisme s’affrontent, soutient-il, sur le problème de la succession des formes ; Préformation et Épigenèse, sur le problème du développement de 1 ‘être ; Atomicité et Totalité, sur le problème de 1 ‘individualité »2. Comme nous 1′ avons signalé dès 1’ introduction de ce travail, la notion de corps est de celles qui suscitent des doctrines et théories qui à chaque moment de l’histoire des idées connaissent un rebondissement spectaculaire avec comme corollaire le renouvèlement de questions plusieurs fois millénaires. Il est même difficile aujourd’hui de parler d’une seule théorie du corps et ce, même à l’intérieur du mécanisme lui-même qui pendant longtemps avait nourrit l’espoir de pouvoir enfin saisir définitivement le corps dans ses différents aspects. Tout se passe comme si la théorie, tout comme ses rivales, est toujours remise à jour par ses partisans. Il faut dire que ceux-là trouvent dans toute nouvelle acquisition de la science et de la technique des moyens de légitimer leur théorie. Il en fut ainsi des automates, après les machines de guerre qu’étaient les catapultes qui avaient servi de modèle explicatif aux anciens grecs.
Les corps dans les théories mécanistes
Au XVIIe siècle par contre à la faveur non seulement du nouvel état d’esprit mais aussi des nouvelles acquisitions techniques, le modèle explicatif du corps change. On se réfère maintenant aux machines capables de s’auto-mouvoir. En somme le corps sera considéré comme une machine. François Jacob écrit encore que dans ce siècle« la théorie des animaux machines est [ .] imposée par la nature même de la connaissance. Elle représente une attitude qui est inconcevable chez un Fernel ou un Y ésale. » 1 Il précise cependant que cette idée n’est pas en soi nouvelle puisqu’on peut la trouver chez Aristote ou même chez les Atomistes. Par contre, à ses yeux, elle marque un changement radical par rapport aux conceptions que l’on s’est fait depuis le Moyen Âge jusqu’à la renaissance. Pourtant, contrairement à ce qu’affirme François Jacob, cette idée de la mécanisation du corps est déjà présente à la Renaissance, puisque 1′ anatomiste belge André Vésale, chez qui il estime qu’une telle conception n’est pas possible, donne comme titre à un de ses ouvrages le titre révélateur de Fabrique du corps. Or, qu’est-ce qu’une fabrique au XVIe siècle sinon un regroupement de machines qui concourent toutes à un seul but: la production d’un artefact. Déjà donc au XVIe siècle l’idée d’une assimilation de la structure et du fonctionnement du corps à une mécanique était présente. Cette idée connaitra son paroxysme au XVIIe siècle, avec surtout les travaux de René Descartes qui lui même sera influencé dans ce sens par les découvertes de William Harvey, qui fut le premier à assimiler la circulation sanguine à un système de canalisation hydraulique. Sous la plume de Julien Offroy de La Mettrie cette conception se prolonge au XVIIIe siècle. Comment Descartes, par exemple, concevait-il cette machinerie corporelle ?
Le corps dans la causalité mathématico-physique
De 1′ aveu de Leibniz, le XVIIe siècle, en Europe, est caractérisé, sur le plan de la connaissance, par deux attitudes dont 1 ‘une peut être considérée comme la conséquence de la première. Il s’agit du développement de la science et de l’essor technologique qui l’a accompagné. Mais, comme conséquence de cette avancée dans le domaine de la connaissance, un sentiment de l’inexistence de Dieu apparaitra progressivement. Autrement dit, les multiples victoires sur les éléments de la nature et les nouvelles découvertes en ce qui concerne les lois de la nature créent un sentiment de l’inexistence de Dieu, du moins de sa non nécessité. Dès lors, l’athéisme monte et l’impiété s’installe dans les milieux savants et gagne progressivement certaine couches populaires. En science on ne cherchait plus à expliquer, comme le faisaient les anciens, les phénomènes et les évènements qui se produisent en faisant recours à Dieu ou à toute autre cause surnaturelle, mais à la raison et au mécanisme. Les lois et les principes sont générés à partir de la nature elle-même. L’homme s’éloigne de Dieu et oublie très rapidement ce qu’il est convenu d’appeler« La Grande Alliance». L’impiété prend des proportions assez considérables sur un terrain défriché il est vrai par la science et la technique. Leibniz déclare : « grâce au développement remarquable des arts mathématiques et des essais de la chimie et de l’anatomie pour pénétrer l ‘intérieur des choses, que l’on peut, pour la plupart, en rendre raison par la figure et le mouvement des corps, pour ainsi dire mécaniquement- raisons que les Anciens avaient rapportées soit au créateur, soit à je ne sais quelles formes incorporelles, c ‘est alors que d’habiles esprits se mirent à chercher s’il serait possible de sauver et d’expliquer les phénomènes naturels sans supposer Dieu, ni le requérir pour le raisonnement. » 1 On voit bien que Leibniz incrimine les sciences pour cet état d’esprit qui éloigne de Dieu, ce qui n’était pas le cas des anciens. En un mot, le XVIIe siècle fut celui d’un optimisme mathématique, déjà présent chez certains grecs comme Pythagore et Platon, mais qui sera repris au XVIe siècle par Léonard de Vinci qui fut l’un des premiers à tenter une application des mathématiques à la connaissance de la nature. Par le biais des mathématiques on vise donc la rationalisation du Monde. Cette rationalisation atteindra un degré supérieur avec la physique de Galilée et de Kepler qui à la suite des travaux de Copernic, feront de la science un paradigme mais une science, en 1’ occurrence la physique ici ‘sera totalement mathématisée. Sur les cendres de la physique d’Aristote, jugée trop métaphysique, prendra forme une physique mathématique dans laquelle priment la mesure et le calcul. Quelle est alors la place du corps dans une telle atmosphère caractérisée par la ferme croyance aux principes mathématiques ? En l’absence de toute analyse chimique sérieuse (au XVIIe siècle, l’alchimie était encore pratiquée) l’ étude du corps ne pouvait que s’appuyer sur la physique qui semble procurer plus de certitude. L’analyse chimique était encore largement dominée par la théorie des quatre éléments constitutifs. Deux moments importants vont marquer l’étude du corps au XVIIe siècle. C’est d’abord une distinction radicale qui s’impose entre deux entités du même corps dont l’une est irréductible à la physique qui doit prendre en charge tout objet de science et enfm la réduction proprement dite du corps à la physique et particulièrement sa mécanisation. On comprend alors pourquoi Jacqueline Lagrée soutient que« l’étude du corps au XV!f siècle relève d’abord de la physique ».1 Cependant, on sait que depuis l’Antiquité grecque jusqu’à la Renaissance, le corps n’ a pas cessé d’être étroitement associé à l’âme. Cette dernière est irréductible à la physique mathématique puisque ne pouvant faire l’objet d’aucun calcul ou de mesure. C’est donc un objet métaphysique qui se trouve ainsi associé à ce qui, de toute évidence, pouvait être soumis aux lois mathématiques. Il devient donc nécessaire de procéder à une séparation, si l’on veut bien soumettre le corps à une étude scientifique. René Descartes fut celui qui, dans ce domaine, avait fait autorité. Il proposa, avec insistance, cette séparation afin de soumettre le corps à une étude physique. De l’avis de Geneviève Rodis-Lewis pour Descartes, « seule 1 ‘idée distincte de 1 ‘étendue assure la vérité de la science. De 1 ‘union vécue, on est renvoyé à 1 ‘intellection des deux natures en leur radicale distinction : la voie est libre pour le mécanisme. »2 Comment Descartes opère-t-il cette distinction entre les deux entités humaines pour soumettre l’une aux principes de la science ? La distinction entre le corps et 1’ âme découle directement du principe des idées claires, objet de la« méditation sixième». Si Descartes insiste tant sur cette séparation c’est parce que toute sa physique en dépend. Le cogito, nous l’avons dit, est en ce XVIIe siècle la mesure de toute chose. C’est le cogito qui délivre la nature des choses. Autrement dit, pour saisir la réalité des choses le cogito est incontournable aux yeux de Descartes. C’est ce même cogito par conséquent qui permet de concevoir le corps et l’âme « clairement et distinctement sans penser à 1 ‘autre »3 dit en substance Descartes dans les Principes de la philosophie. Précisément, le cogito consacre l’autonomie du corps par rapport à l’âme. Cette autonomie dont peuvent jouir l’âme et le corps permet à Descartes de les élever au statut de substance. Sous la plume de Descartes, est substance toute chose qu’on peut concevoir dans son existence et qui «n ‘a besoin que de soi même pour exister. »1 Or, le corps et l’âme, selon Descartes, peuvent exister indépendamment l’un de l’autre, sans penser à un quelconque lien qui les unirait. En faisant du corps et de 1′ âme des substances, Descartes donne ainsi un fondement métaphysique à son mécanisme. Cela se comprend d’ailleurs si l’on sait que chez lui, et suivant ce qu’il dit dans la «Lettre préface» aux Principes de la Philosophie toutes les sciences doivent avoir pour fondement la métaphysique. C’est le lieu de dire que contrairement à ce qu’avaient pensé certains historiens de la philosophie française, Descartes n’est pas le fondateur d’une distinction radicale entre les natures des deux composantes de l’homme. Au XIIe siècle un penseur musulman comme Shîhâboddîn Yâhyâ Sohravardî l’avait déjà fait et en des termes cartésiens avant Descartes2• Même si la perspective de fonder la physique sur le socle de la métaphysique n’a pas jamais convaincu l’un des successeurs de Descartes, en l’occurrence Julien Offroy de La Mettrie3, à propos de la mécanisation du corps, Descartes maintiendra sa conviction. Pour lui, l’homme est un composé de deux substances radicalement distinctes4 et dont l’une relève de la physique et l’autre de la métaphysique. Selon Descartes, c’est parce que je puis avoir clairement et distinctement une idée de moimême en tant que substance purement pensante, et cependant étendue, que je peux affirmer ma double composition. Au fond, cette double composition me permet, en même temps, de me concevoir comme une substance pensante distincte de mon corps. Par la même occasion, je ne peux attribuer une matérialité à mon âme, au risque de lui conférer un attribut qui ne correspond en rien à sa nature. En revanche, le corps lui se caractérise par sa matérialité. La spiritualité de 1′ âme 1’ oppose donc, quant à sa nature, à la matérialité du corps.
Le mécanisme de type physico-chimique
Si au XVIIe siècle le mécanisme a pour fondement une certaine conception mathématico-physique de tout ce qui peuple la nature, au XVIIIe siècle le cadre théorique change. Non pas que l’on abandonne les abstractions mathématiques, mais elles vont être plutôt renforcées par la naissance d’une nouvelle science. Le corps étant reconnu comme étant de la matière, c’est désormais à la physique et à la chimie naissante d’en dévoiler les profondeurs tout en décrivant les surfaces. On se souviendra que le mécanisme mathématico-physique qui empruntait ses concepts, sa méthode et son esprit à la géométrie, à la physique et à la technique, fut perpétué jusqu’au XVIIIe siècle avec notamment le mouvement des encyclopédistes au rang desquels on comptait Julien Offroy de la Mettrie, le Baron D’Holbach, Helvétius et même Diderot. Mais, à partir de ce même siècle, un changement de paradigme s’opère. S’installe l’ère du positivisme avec l’expérience comme seul critère de la vérité. Le corps ne s’interprète plus seulement à l’aide des figures et du mouvement, mais au moyen de concepts chimiques et physique. Il faut dire que le XVIIIe siècle est celui du triomphe de ce qu’il est convenu d’appeler les sciences physiques ou sciences expérimentales qui imposaient leur démarche, méthode, esprit et concepts à tout ce qui est censé être connu par 1′ esprit humain. Dans ce nouvel élan, à en croire François Jacob la physique de Newton fut d’un apport considérable. Elle changera la nature du mécanisme en 1′ adaptant aux nouvelles idées en cours qui parce que touchant le monde des substances et non plus restant à la surface visible et à ce qui peut en être déduit donne naissance à une chimie. S’il en est ainsi, c’est parce que comme le souligne François Jacob, la nouvelle physique combine, dans sa représentation du monde inanimé « les lois du mouvement et la nature corpusculaire de la matière. Celle-ci n ‘est plus un substrat homogène divisible à l’infini, mais se compose d’un nombre sans limite de particules isolées, séparées les unes des autres et non identiques. »1 Même si la notion de mouvement reste encore un des principes explicatifs du corps, la référence aux figures disparaît au profit de celui d’une matière composée d’éléments comme le soutenait par ailleurs les atomistes Leucippe, Démocrite, Épicure et Lucrèce dans l’antiquité grecque. François Jacob ajoute que l’élément nouveau qui différencie le monde de Descartes de celui de Newton est l’espace. En effet, à l’image de ce qui se déroule dans le système solaire, le monde newtonien admet la notion de vide qui permet comme chez les atomistes le mouvement des corpuscules. Descartes par contre n’admet aucune notion du vide.2 1 Jacob (F.): Op. Cit., pp. 49-50. 2 Descartes estime : « Pour ce qui est du vide, au sens que les philosophes prennent ce mot, à savoir un espace où il n’y a point de substance, il est évident qu ‘il n’y a point d ‘espace en l ‘univers qui soit tel, parce que l’extension de l’espace ou du lieu intérieur n’est point différente de l ‘extension du corps[ . ] nous devons conclure de même de 1 ‘espace qu ‘on suppose vide : à savoir, que puisqu ‘il y a de 1 ‘extension, il y a nécessairement aussi substance. » in Principes de la philosophie, Si 1’ on peut voir dans le mécanisme du XVIIe siècle le prolongement du mathématisme de Pythagore et de Platon, réactivé par Galilée et Descartes, le mécanisme du XVIIIe siècle peut être considéré comme un retour à l’atomisme tel qu’il fut défendu par Leucippe et ses successeurs. L’avènement de ce nouveau type de mécanisme a été rendu possible grâce à la déstructuration de la matière pour saisir, au moyen d’une instrumentalisation asse performante, ses éléments les plus « simples ». Par conséquent, dans la matière on peut découvrit qu’un agrégat de corpuscules. Autrement dit, la matière n’est plus une substance au sens aristotélicien du terme, mais un composé de corpuscules que lie entre eux l’affinité ou ce que Newton appelle «attraction». «C’est le concept d’attraction, dit François Jacob, qui fournit aux chimistes la force permettant de remplacer les influences astrales par quoi l’alchimie avait lié les métaux aux étoiles et aux planètes. »1 Cette attraction est pour Newton une sorte de puissance, qui comme un être intelligent, donne une certaine impulsion aux planètes. Elle représente la cause inconnue de tous les phénomènes et qui par analogie à la pesanteur terrestre recevra le nom de « gravitation universelle » ou attraction. Émile Bréhier soutient à ce propos que «l’attraction est [. ] pour les newtoniens une propriété incontestable de la matière, bien qu ‘on n ‘en puisse pas rendre raison. »Cette notion abstraite peut être considérée comme une espèce de trait d’union entre les particules qui se meuvent dans l’espace, garantissant ainsi une cohérence en celui-ci. Cette attraction n’est cependant pas un constituant de cet univers. Ne participant pas à la construction de 1 ‘univers, 1′ attraction tisse cependant des liens entre les atomes qui forment ainsi un réseau de dépendance qui donne au monde sa cohérence. Autrement dit, dans la physique newtonienne, pour une question de cohérence de l’univers, il est envisagé, au niveau macroscopique, un lien entre tous les éléments constitutifs au moyen de 1′ attraction. Cette notion d’attraction, qui les lie les éléments de l’univers entre eux, transposée à une échelle microscopique, prendra le nom d’affinité. En effet, le corps sera considéré comme un microcosme qui reflète ce qui se déroule dans au niveau macroscopique. Il revient donc à l’affinité de jouer le rôle que joue l’attraction dans l’infiniment grand. C’est désormais cette notion qui garantira toute cohérence entre les éléments. De la mécanique céleste, telle que la concevait Newton, et dont l’attraction est le facteur d’unité, on passe à la mécanique du corps dans laquelle l’affinité jouera le 1 Jacob (F.): La logique du vivant, Op. Cit., 50. 2 Bréhier (É) : Histoire de la philosophie, Op. Cit., p. 281. 194 rôle de l’attraction universelle. Et, tout comme l’attraction, l’affinité est une notion universelle en ce sens qu’elle est le principe unificateur de tous les phénomènes corporels. Cette affinité, à l’image de l’attraction est aussi une force dotée de la capacité d’unir les différents éléments du corps. En introduisant donc ces deux notions, l’attraction au niveau macroscopique et l’affinité au niveau microscopique, la physique de Newton rejette par là toute notion magique introduite par les alchimistes pour expliquer d’une part la mutation des éléments, en particulier les métaux, en d’autres éléments, mais aussi la liaison entre les corps. Pour les mécanistes du XVIIIe siècle, cette affinité n’est pas qu’une simple vue de l’esprit. Elle est au contraire une propriété même de la matière, qui plus est quantifiable. C’est grâce à elle que les corps interagissent les uns sur les autres. La conséquence de cette conception de 1′ affinité qui lie entre eux les éléments est la conception de la matière comme composée d’éléments, ce qui nous renvoie encore à la conception des atomistes grecs. De l’action de l’affinité il est important de souligner sa capacité à produire, à partir de la liaison qu’elle établit entre deux éléments au moins, un troisième, qui n’est ni une somme arithmétique, encore moins une juxtaposition, des éléments précédents. L’affinité a donc un pouvoir de synthèse de qualités des différents éléments reliés pour produire un troisième, dont les caractéristiques ne sont pas réductibles aux caractéristiques des éléments reliés. C’est cette notion de synthèse, qu’opère l’affinité, qui a conduit les alchimistes à penser à une transmutation des éléments. Dans le mécanisme du XVIIIe siècle toute idée de transmutation est récusée, au profit de la saisie de 1’ affinité. Pour les mécanistes, et contrairement à ce que pensaient les alchimistes qui faisaient appel à une force mystérieuse, seules les propriétés physiques, saisissables au moyen du calcul, expliquent ces «performances » des corps. C’est ainsi que, de la liaison d’une molécule (composée d’atomes) d’oxygène et d’une molécule d’hydrogène, on obtient une molécule d’eau, un corps qui qualitativement est différent de l’oxygène et de l’hydrogène qui entrent dans sa composition. Ce qui donne la formule 2H2+02 – 2H20, c’est-à-dire deux molécules d’eau. La synthèse produit un nouvel élément dans une proportion très rigoureuse, comme on peut le constater avec la production de cette molécule d’eau. En effet chimiquement il est prouvé que les liaisons covalentes se forment sur la base d’un équilibre entre les valences des éléments. Autrement dit, pour ce cas précis deux atomes d’hydrogène sont nécessaires pour un atome d’oxygène pour produire une molécule d’eau H20.
Chapitre 1 : Du réductionnisme matérialiste à l’animisme |