Le contrôle judiciaire de la clause résolutoire

L’EXAMEN DU CONTENU DE LA CLAUSE RÉSOLUTOIRE

Un évitement d’une rupture abusive.- L’examen du contenu de la clause permet au juge de bien définir les manquements, qui pourraient provoquer la rupture du contrat, le but étant d’être équitable envers les deux parties et en même temps de protéger leurs intérêts. Article 1225 de l’ordonnance de 2016 précise en effet, « La clause résolutoire précise les engagements dont l’inexécution entraînera la résolution du contrat ».
L’insertion d’une clause résolutoire dans un contrat écarte d’emblée le recours préalable au juge pour le rompre. Cette situation pourrait laisser le créancier invoquer l’existence d’un manquement sans que celui-ci soit forcément visé dans le contrat et, par conséquent, anéantir les liens contractuels sans raison valable, l’aménagement des pouvoirs du juge va alors permettre d’éviter une rupture inutile et infondée( §1 ).
Cependant, la détermination la portée de la clause résolutoire, a pour but de protéger la partie la plus faible du contrat ( §2 ).

L’AMÉNAGEMENT DES POUVOIRS DU JUGE

Le juge dépourvu de son pouvoir.- En insérant une clause résolutoire dans le contrat, les parties écartent le pouvoir d’appréciation du juge de l’opportunité de la résolution du contrat qu’elles ont conclu.
Dans un arrêt du 3 novembre 2011, de la 3ème chambre de la Cour de cassation, affirme qu’un contractant peut renoncer à son droit à la résolution judiciaire si une clause rédigée d’une façon claire et sans équivoque est insérée dans le contrat306. La Cour de cassation a eu plusieurs fois en effet l’occasion de rappeler cette règle très importante en matière de clause résolutoire. Elle a, en effet, reconnu aussi la licéité de la clause résolutoire et affirmé que le juge ne dispose d’aucun pouvoir de modifier ses effets, elle rajoute que « La résolution prononcée par l’article 1184 est la consécration de cette règle d’équité qui ne permet pas de laisser un des contractants dans les liens du contrat dont l’autre partie ne lui fournirait pas l’équivalent »307.
Pour bien comprendre le mécanisme de la clause résolutoire il est avant tout préférable de commencer par une définition de la notion de ladite clause (A).
Afin de maîtriser au mieux cette notion, et d’éviter ainsi toute éventualité recours judiciaire, il est important de connaitre la procédure de sa mise en oeuvre (B).

LA NOTION DE CLAUSE RÉSOLUTOIRE

L’origine de la clause résolutoire.- Selon Monsieur MALAURIE on trouve des clauses résolutoires dans « La moitié des contrats ».
La clause résolutoire se définit comme « La clause par laquelle les parties, adoptant une condition résolutoire expresse, décident à l’avenir dans un contrat que celui-ci sera de plein droit résolu, du seul fait de l’inexécution par l’une des parties de son obligation, sans qu’il soit nécessaire de le demander au juge et que celui-ci, s’il est saisi, dispose en principe d’un pouvoir d’appréciation» .
La clause résolutoire évite au créancier d’avoir à recourir à la résolution judiciaire, seule voie en principe offerte, et écarte l’application du droit commun de la résolution pour inexécution qui fait du recours au juge un passage obligatoire. Elle apparaît ainsi comme une convention dérogatoire au droit commun de la résolution pour inexécution. Convention dérogatoire au droit commun, la clause résolutoire pour inexécution avant qu’elle soit admise dans la plupart des contrats civils et commerciaux, était le seul moyen pour résilier un contrat de vente, elle ne pouvait être insérée dans les autres contrats.
L’origine de la clause remonte au droit romain, dans  » l’ex commissoria  ».
Toutefois,  » l’ex commissoria  » n’était admise que dans la vente car « De manière générale, la résolution des contrats pour inexécution était inconnue en droit romain. Hormis la vente, certains contrats nommés connaissaient une telle action, qui n’était cependant pas l’expression d’une règle généralemais une action propre à chaque contrat »311.
Seul le vendeur pouvait résilier un contrat de vente lorsque l’acheteur ne payait pas le prix.  » l’ex commissoria » était alors un moyen efficace pour parvenir à ses fins, le vendeur pouvait par conséquent récupérer l’objet vendu dont l’acheteur n’avait pas payé le prix, et replacer la clause dans sa situation initiale.
L’admission de la clause résolutoire.- Le principe de la clause résolutoire a été érigé en droit positif par un arrêt de principe de la Cour de cassation du 2 juillet 1860 dans lequel elle affirme « Qu’il n’est pas défendu aux parties d’attacher à l’inexécution, constatée dans une certaine forme, les effets d’une condition résolutoire précise, absolue et opérant de plein droit, qu’une pareille convention n’a rien d’illicite, qu’elle tient lieu de loi à ceux qui l’ont faite, que les tribunaux ne peuvent pas la changer et qu’ils doivent se borner à vérifier si, en effet, il y a eu réellement inexécution du contrat313 dans le sens prévu et réglé à l’avance par les parties »314.
On comprend très bien que la Cour de cassation a autorisé l’insertion d’une clause résolutoire dans un contrat et que le juge n’a cependant aucun pouvoir, et ne peut en aucun cas arrêter le jeu de la clause résolutoire ou l’empêcher si l’inexécution prévue dans le contrat, est avérée.
Actuellement, la clause résolutoire est reconnue dans la plupart des droits étrangers et son principe est partout le même : elle constitue un raccourci vers une rupture des contrats sans passer par le juge.
« L’originalité de la clause résolutoire par rapport à la résolution judiciaire s’affirme à deux égards. La clause résolutoire et la résolution judiciaire sont de nature différente. En stipulant une clause résolutoire, les parties ont institué un lien de cause à effet entre l’inexécution et la résolution, lien dont l’origine ne réside pas dans la loi, mais dans leurs volontés distinctes parleur nature ; la clause résolutoire et l’article 1184 du code civil se distinguent également par leur mécanisme. Tandis que l’article 1184 du code civil permet au contractant envers lequel l’obligation n’a pas été exécutée de demander au juge de prononcer la résolution du contrat, la clause résolutoire lui confère le droit de résoudre le contrat ».

LA MISE EN OEUVRE DE LA CLAUSE RÉSOLUTOIRE

LIRE AUSSI :  Le contrôle de gestion médicalisé 

Présentation.- La clause résolutoire permet à une partie de rompre le contrat de plein droit, sans l’intervention préalable du juge, dans le cas où l’inexécution reprochée à son débiteur est bien précisée dans le contrat.
Même si cette rupture est de plein droit, cela n’empêche pas que ce droit à la résolution est soumis au respect des règles imposées par le législateur, et qui permet au juge de retrouver son pouvoir, autrefois perdu par l’insertion d’une clause résolutoire dans le contrat.
Néanmoins, l’auteur de la rupture n’est pas tenu de mettre en demeure son créancier pour lui demander de s’exécuter car en insérant une clause résolutoire le débiteur est déjà averti de l’anéantissement du contrat en cas de manquement (1).
En revanche, le titulaire du droit de résolution doit notifier sa décision à son cocontractant afin de l’informer de sa volonté de mettre fin à leur collaboration (2).

L’ABSENCE DE LA CONDITION DE MISE EN DEMEURE

Une obligation facultative.- En droit positif français, la clause résolutoire est réputée acquise lorsque les conditions de sa mise en oeuvre sont réunies, rien ni personne ne peut la contester voire l’annuler.
La Cour de cassation dans son arrêt du 27 novembre 2008 précise en effet que « les sommes seront de plein droit exigibles si bon semble à la banque, sans formalité ni mise en demeure : – en cas de non-paiement à son échéance d’une quelconque somme devenue exigible ; (…) – plus généralement, à défaut du paiement à bonne date par la partie débitrice ou la caution, d’une somme due à quiconque ; (…) – en cas d’exigibilité
Nous reviendrons sur ce point dans le développement suivant. anticipée de tout autre concours financier consenti à la partie débitrice, et d’une manière générale en cas d’inexécution par la partie débitrice de l’un de ses engagements ou d’inexactitude de ses déclarations ».
La seule condition qui pourrait annuler sa mise en oeuvre est que l’inexécution reprochée au débiteur n’est pas visée dans la clause, lecréancier ne peut sanctionner son cocontractant pour une inexécution qui n’est pas prévue et définie préalablement.
La mise en demeure ne constitue pas une obligation essentielle qui, en cas d’absence, pourrait mettre en cause le jeu de la clause. Il a été jugé dans une affaire que « La résiliation d’une convention en vertu d’une clause résolutoire expresse peut intervenir sans mise en demeure préalable, dès lors que cette dispense est expressément prévue dans le contrat ».
Dans une autre affaire, la Cour de cassation avait précisé que « Lorsque les parties adoptent, dans un acte de vente d’immeubles, la clause selon laquelle la vente sera résolue de plein droit en cas de non-paiement du prix lors de la passation de l’acte authentique, la mise en demeure reste néanmoins de rigueur et le simple fait de l’expiration du délai prévu pour la passation de l’acte notarié n’entraîne pas la résolution de la vente »326.
Car, dans le cas contraire la résolution du contrat aura un caractère abusif; mais en général, le créancier – et contrairement aux autres modes de rupture des contrats- n’a pas besoin de mettre son débiteur préalablement en demeure pour exercer, la mise en oeuvre de la résolution, le fait qu’il constate que son contractant n’exécute pas une obligation prévue dans la clause, entraine la rupture immédiate du contrat.

LA NOTIFICATION

Une condition essentielle.- La résolution par la mise en oeuvrede la clause résolutoire s’opère de plein droit328 mais « Même si une mise en demeure n’est pas nécessaire , une manifestation de volonté du créancier victime de l’inexécution est toujours requise ».
Si la mise en demeure reste un acte non nécessaire, la notification est indispensable voire obligatoire, elle colmate la brèche laissée par la nonobligation de mise en demeure, en quelque sort, elle la remplace.
Etant donné que le jeu de la clause résolutoire reste toujours un acte unilatéral, il est indispensable que celui qui l’a mise en oeuvre, informe soncocontractant de sa volonté de rompre le contrat.

UNE PORTÉE ÉTROITE

Une reconnaissance limitée .- Dans le droit positif français, « il n’est pas défendu aux parties d’attacher à l’inexécution constatée dans une certaine forme, les effets d’une pareille convention ; cela n’a rien d’illicite, cette convention tient lieu de loi à ceux qui l’ont faite, les tribunauxne pas la changer et ils se bornent à vérifier si, en fait, il y a eu réellementinexécution du contrat dans le sens prévu et réglé àl’avance par les parties ».
La clause résolutoire est admise dans de nombreux contrats, toutefois les contractants n’opèrent pas librement.
Les limites.- Les parties au contrat sont libres dans la rédaction de leur convention, et cette liberté est légale, ils ont tous les mêmes droits et libertés. Cette liberté est limitée par certaines règles et conditions, dans le but de protéger les intérêts des parties et éventuellement ceux des tiers. « Le juge vérifie systématiquement la réalité du consentement donné par un contractant à la clause résolutoire en exigeant une stipulation expresse, si l’écrit ne constitue pas là une condition de validité de la clause, il le devient en revanche, lorsque le législateur impose, à peine de nullité, sa mentiondans le contrat vu dans un document précontractuel »333.
Le contrat de bail d’habitation.- En matière de bail d’habitation, le législateur a fait en sorte que les effets de la clause soit moins rigoureux, dans la loi du 1er septembre 1948, Il a été précisé en effet dans l’article 80 que cette loi a mis en place un mécanisme qu’on peut toutefois retrouver dans la loi du 22 juin 1982, et qui consiste à alléger la rigueur de la clause résolutoire dans le contrat de bail.
L’article précise que : « toute clause prévoyant la résolution de plein droit du contrat de location pour défaut de payement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non versement du dépôt de garantie ne produit son effet que deux mois après qu’ un commandement de payer est demeuré infructueux .

Formation et coursTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *