DÉFINITION ET PLACE DE L’ENTREPRENEURIAT DANS LA SOCIÉTÉ
Gagnant de plus en plus du terrain au fil du temps, l’activité entrepreneuriale occupe aujourd’hui une place importante au sein de nos sociétés. Cela s’expliquerait avant tout par ses nombreuses retombées positives se matérialisant par la création de richesse, de stabilité et de développement économique sans oublier son côté innovateur. Il contribuerait grandement aussi au développement et au dynamisme d’une région ou d’un territoire (Julien, Vaghely, et Brousseau, 2008). De ce fait, il suscite beaucoup d’intérêts à travers les recherches qui tentent de comprendre le phénomène qu’est l’entrepreneuriat. Faisant donc l’objet de nombreuses recherches, l’entrepreneuriat s’est vu scindé en deux comprenant les recherches portant sur la compréhension de la création et du développement des entreprises et d’un autre côté sur la compréhension de l’individu qu’est l’entrepreneur (Bruyat, 1994; Filion et Fortin, 1991). Il s’est vu attribué de nombreuses définitions et thématiques. C’est dans ce sens que W. B. Gartner (1990) définit l’entrepreneuriat comme le processus par lequel un individu crée une nouvelle organisation. D’autres contrairement à lui, partent du principe que l’entrepreneuriat ou la décision de création d’une entreprise serait possible grâce à l’ interaction d’un certain nombre de facteurs. C’est ainsi que Greenberger et Sexton (1988) affirment que la décision de création d’une nouvelle entreprise est basée sur l’ interaction d’un certain nombre de facteurs parmi lesquels peuvent être inclus l’esprit d’ entreprise, le désir de liberté, celui de décision, certains traits de personnalité, des variables de situation, la connaissance de soi et le soutien social (Hernandez, 1995). L’acte de création d’une entreprise serait donc le résultat de la combinaison de variables individuelles et environnementales (Greenberger et Sexton, 1988; Lewin, 1935).
Motivée donc par diverses causes, la création de nouvelles entreprises ne serait pas sans conséquence. En effet, la création de ces nouvelles entreprises passe nécessairement par la fermeture ou la sortie de quelques-unes d’entre elles, quel que soit leur âge. Il s’avère important de comprendre que la fermeture des entreprises fait partie intégrante du processus entrepreneurial, mais aussi que la vie économique d’un pays est alimentée par ces mouvements d’ entrées et de sorties d’entreprises (Wennberg et al., 2010). Comme nous l’avons dit plus haut, la fermeture des entreprises n’étant toujours pas volontaire, celle-ci serait due à de nombreuses causes et aurait des conséquences majeures sur l’individu c’ est-à-dire l’entrepreneur (Bandura et Locke, 2003). Soulevant ainsi le concept d’échec entrepreneurial, dans le cas échéant certaines personnes ayant échoué prendront acte de leur échec, concluront qu’ ils ne sont pas faits pour entreprendre des projets et se tourneront vers une autre profession ou une carrière (Baldwin, Bian, Dupuy, et Gellatly, 2000a).
D’autres, par contre, tireront profit de cette expérience infructueuse, reconnaitront leurs erreurs, et tenteront de se relever et bâtir quelque chose de nouveau sur la base de leur expérience et de leur savoir acquis (Nielsen et Sarasvathy, 2011 ; Wagner, 2002). Il existerait donc une certaine forme de remotivation et de reprise de goGt à l’entrepreneuriat chez certaines personnes (Cardon et McGrath, 1999). Des chercheurs ont nommé ce phénomène « d’engagement du second souffle» ou de « rebond entrepreneurial » (Krauss, 2016; Valéau, 2007a). D’autres qualifient celui-ci de « réentrée entrepreneuriale après une sortie entrepreneuriale » (Baù, Sieger, Eddleston, et Chirico, 2017). Aux vues de tout ce qui vient d’être dit, nous nous proposons d’ aborder l’une des étapes du processus entrepreneurial qui est l’ intention entrepreneuriale. Par la suite, nous tenterons d’expliquer l’échec en lui-même, cela en retournant à la littérature traitant des causes et conséquences liées au phénomène qu’ est l’échec entrepreneurial. Puis nous étudierons brièvement pour la suite la manifestation de l’ intention entrepreneuriale après un échec, ce qui nous emmènera au concept du rebond entrepreneurial. À travers ce concept, nous déterminerons les différentes caractéristiques favorisant le rebond entrepreneurial.
Le concept de l’intention entrepreneuriale : avant l’acte
L’ intention entrepreneuriale pourrait se définir comme un état d’esprit conscient qui précèderait l’ acte entrepreneurial et qui consisterait au démarrage d’une nouvelle entreprise (Moriano, Gorgievski, Laguna, Stephan, et Zarafshani, 2012). Se basant sur des travaux précédents (Bird, 1992; Bruyat, 1993; Shapero et Sokol, 1982), d’autres redéfinissent l’intention entrepreneuriale comme une volonté individuelle qui s’ inscrit dans un processus cognitif, et qui exige une perception à la fois de la faisabilité et de la désirabilité du comportement entrepreneurial (Tounés, 2006). Cependant, l’ intention n’est pas à assimiler au comportement. Le comportement entrepreneurial lui désigne l’acte entrepreneurial, c’ est-à-dire le travail de création d’une entreprise (Gartner, 1988). Dans la partie qui suit, nous allons tenter de nous pencher sur la notion de l’intention entrepreneuriale. Nous tenterons d’expliquer l’avènement ou la manifestation de l’ intention d’entreprendre à travers diverses théories élaborées par les chercheurs au fil du temps. Notamment par la théorie du comportement planifié (Ajzen, 1991), dans laquelle l’auteur conclut que l’intention entrepreneuriale précède effectivement l’action entrepreneuriale.
En effet, l’acte entrepreneurial ou le comportement n’aboutira que si l’intention comportementale est assez forte. Cette théorie du comportement planifié d’Ajzen (1991) a été mise en place dans le but de mieux comprendre et de prédire le comportement humain (Emin, 2004). Nous allons également porter notre attention sur le modèle de Shapero et Sokol (1982) qui, quant à lui, explique la naissance de l’ intention d’ entreprendre chez un individu. Ce modèle évoque la naissance d’une intention entrepreneuriale grâce à la perception positive de la désirabilité et la faisabilité de l’ acte entrepreneurial. La littérature portant sur l’intention entrepreneuriale présente les modèles de Shapero et Sokol (1982) et celui du comportement planifié d’ Ajzen (1991) comme les deux modèles qui ont servi de base scientifique pour les recherches sur l’explication de la naissance de l’intention entrepreneuriale. Le modèle de Shapero et Sokol (1982) provient du champ de l’ entrepreneuriat, tandis que le second lui provient de la psychologie sociale. Tous deux postulent que dans le cadre d’un comportement planifié (dont la création d’une entreprise), l’intention est un antécédent de l’acte et constitue donc un excellent indicateur du passage à l’ action (Schlaegel et Koenig, 2014).
La perception de la désirabilité Shapero et Sokol (1982) affirment que la perception de la désirabilité renvoie au degré d’attrait qu’un individu perçoit pour un comportement donné (en l’occurrence l’évènement entrepreneurial). Et cette variable englobe deux facteurs principaux que sont la culture et la société. Ceux-ci agissent à leur tour sur les principales valeurs de l’individu (Tounés, 2006) et sur son attitude étant donné que l’attitude a une nature évaluative et affective. Faisant également référence au social, nous pouvons évoquer la classe ou le niveau social de l’individu et de la famille dont il est issu. Au niveau culturel, nous devons noter que certaines cultures sont plus tournées vers l’ entrepreneuriat contrairement à d’autres (Fortin, 1992). Notons également que les expériences entrepreneuriales antérieures sont des facteurs qui influencent également les intentions entrepreneuriales (Kent, Sexton, et Vesper, 1982; N. Krueger, 1993). Et par intention entrepreneuriale, il faut voir la perception de la désirabilité du projet.
Cela peut s’expliquer par le cas des personnes ayant eu une mauvaise expérience en entrepreneuriat. Mais comme nous le disions plus haut dans notre travail, tout dépend de la personnalité de l’entrepreneur et d’autres facteurs tels que son environnement et sa culture. D’après d’autres recherches portant sur la variable de désirabilité, celle-ci se constituerait de deux composantes à savoir l’attitude personnelle et la perception de l’attitude de l’environnement social (Emin, 2004). Selon cette autrice, ce sont les croyances des individus qui déterminent leur attitude envers l’action. La désirabilité perçue se définit comme étant le degré auquel l’individu s’engage dans la création d’entreprise. La création d’entreprise relève donc d’un comportement désiré et désirable pour un individu. Tout cela nous renvoie d’une certaine façon aux facteurs de société et de culture évoqués plus haut par Tounés (2006). Dans la même veine, Fortin (1992) affirme que lorsqu’une société valorise les valeurs entrepreneuriales et les réalisations des entrepreneurs des entrepreneurs, ceux-ci deviennent des modèles et des mentors pour la jeunesse ou encore pour les personnes désireuses de faire leur entrée dans l’ entrepreneuriat
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