L’hydrogène est un vecteur énergétique suivi par des technologies en rupture avec les procédés traditionnels. Le véhicule Pile à Combustible (PàC) en fait partie. Aujourd’hui, le véhicule PàC apparaît bel et bien sur le marché de l’ automobile, notamment grâce à l’impulsion des constructeurs japonais Toyota et Honda et sud-coréen Hyundai. Ceux-ci couplent une batterie à la PàC, et mettent en vente des modèles de série à des tarifs concurrentiels. Ce couplage avec une source énergétique secondaire est essentiel. Il permet de récupérer l’ énergie de freinage et de préserver la PàC des dynamiques de traction. Choisir de coupler la PàC à un banc de Super Condensateurs (SC) est également intéressant. Ce choix conserve les avantages précédents et permet d’atteindre des puissances élevées.
Une technologie de rupture?
Le concept de l’automobile à hydrogène
L’augmentation de la température moyenne de la planète est observée depuis le début du XXe siècle, et plus précisément depuis l’ ère industrielle (1880-1899). Les transports participent largement à ce changement climatique [Chan 04]. Les gaz à effets de serre créés par la combustion des carburants fossiles activent ce phénomène. Dans 50 ans, le nombre d’automobiles pourrait augmenter de 360 % [Zhong 14]. L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) appelle ainsi à réduire de 60% les émissions des transports en 2050 par rapport à 1990 pour limiter la hausse de température à 2°C par rapport à l’ère préindustrielle [Corn. Européenne Il]. Des moyens de transport plus propres doivent être proposés.
L’hydrogène (ou plus précisément, le dihydrogène H2) est un vecteur énergétique alternatif prometteur. Ce gaz possède une énergie massique importante de 33,3 kWh/ kg et est perçu comme « propre» car l’eau est la seule émission locale de sa combustion avec 1 ’02. À titre de comparaison, les hydrocarbures et les batteries lithium-ion possèdent respectivement une énergie massique de 12,7 kWh / kg et de 0,14 à 0,28 kWh / kg [Ni 05] [Khaligh 10]. Ainsi, pour une même masse de carburant, l’ autonomie d’une automobile électrique à hydrogène est supérieure à l’autonomie d’ une automobile électrique à batterie. L’ hydrogène n’ est cependant que très peu présent à l’état naturel. Ses méthodes de production sont variées mais nécessitent de l’ énergie pour dissocier les molécules dans lequel il est présent. Cette énergie peut être issue de carburants fossiles, de sources renouvelables ou même du nucléaire. Bien que ces procédés génèrent des pertes ou éventuellement de la pollution, l’hydrogène reste un moyen efficace de stockage de l’ énergie [Gahleitner 13]. Il peut donc être envisagé comme « tan1pon » d’ énergie dans une société où le mix énergétique repose de plus en plus sur des énergies renouvelables intern1ittentes [Walker 15].
Dans le domaine du transport, et plus particulièrement pour les automobiles, le réservoir d’hydrogène prend généralement la forme d’une bonbonne résistante et légère en plastique renforcée par fibres de carbone et par une enveloppe interne métallique (<< liner ») [Durbin 13]. L’hydrogène y est compressé entre 350 et 700 bars. Une bonbonne de 105 kg contient alors environ 5,5 kg d’H2 pressurisé et se recharge en station en quelques minutes [Hua 10] [Richardson 15]. Ainsi, même si la densité énergétique de l ‘hydrogène est élevée, les techniques de stockage actuelles permettent d’en transporter qu’une quantité limitée. Des formes de stockage liquides ou organiques existent mais restent cantonnées aux prototypes et à la recherche [Verhelst 12].
La PàC alimente ensuite une motorisation électrique. Les Machines Asynchrones (MAS) et Synchrones à Aimants Permanents (MSAP) ou à Rotor Bobiné (MSRB) équipent la plupart des véhicules à traction électrique. Les MAS ont longtemps été les plus populaires pour la traction des véhicules lourds comme les camions, les bus, ou les trains [EI-Refaie 13]. Elles sont capables de fournir des puissances élevées, sont silencieuses, robustes et peu coûteuses. Leur rendement est toutefois pénalisé par les courants induits dans le rotor et le courant statorique de magnétisation qui affecte également leur facteur de puissance [Espanet 10]. Les MS ont traditionnellement été utilisées pour des puissances moins élevées, notamment pour les Voitures Électriques (VE) et Électriques Hybrides (VEH) [Williamson 06]. Elles possèdent un bon rendement, sont plus légères, développent des couples plus élevés, mais sont plus coûteuses que les MAS du fait du bobinage pour les MSRB ou des matériaux des aimants (Néodyme ou Samarium) pour la MSAP. Le choix de la traction utilisée est donc une affaire de compromis, par exemple, dans les années 80, des moteurs synchrones équipaient les Trains à Grande Vitesse (TGV) Français. Ces derniers ont été remplacés par des MAS dans les années 90 du fait de leur coût. Aujourd’hui, les progrès dans le domaine tendent à rétablir la parité MAS/MSAP pour la traction des VE.
Les enjeux de l ‘automobile à PàC
Le conducteur de l’automobile PàC sera convaincu de la « propreté» de son véhicule parce que celui-ci ne rejette que de l’ eau. Son impact environnemental ne se mesure toutefois pas uniquement à sa simple utilisation. Ainsi, la plupart des études considèrent les rejets émis « du puits à la roue ». Les méthodes de production et le cycle de vie complet de l’automobile sont également à prendre en compte . En effet, la production des matériaux, l’assemblage, l’utilisation et la fin de vie du véhicule ont un impact sur l’environnement, mais aussi sur la santé [Messagie 14]. Par exemple, 90 % de l’H2 mondial est aujourd’hui produit par vaporeformage de gaz naturel, comme le méthane (CH4), dont la réaction chimique dégage 10 kg de C02 par kg d’H2 produit [Hwang 13] [Beeker https://www.clicours.com/]. La production du catalyseur de platine de la PàC, qui est un minerai rare, rejette également des NOx, des sulfures, des fluores et de l’ acide chlorhydrique qui favorisent l’ acidification de l’air et les maladies respiratoires [Lu 16]. Ces impacts sont toutefois compensés par le processus de recyclage de la voiture. Dans le cas de l’ automobile électrique à batterie, la comparaison des impacts est un problème complexe car l’ analyse dépend fortement du mix énergétique local. Il est donc difficile de comparer ces impacts avec l’ automobile PàC.
Des soutiens politiques sont primordiaux pour le développement d’une mobilité à l’hydrogène. Dans ce cadre, l’IPHE (Partenariat International pour l’Économie de l’Hydrogène) compte 18 pays qui détiennent des programmes d’études dédiés aux méthodes de production, de stockage, aux utilisations, à la distribution et enfin aux emplois créés par le vecteur énergétique de l’hydrogène [Iphe 16]. Par exemple, la France et l’Allemagne ont signé, en mars 2015, une initiative commune pour le déploiement de projets d’ automobiles PàC et la création d’infrastructures de distribution d’H2. Dans ce cadre, le programme NIP (National Innovation Pro gram for Hydrogen and Fuel Cell Technologie) en Allemagne et le plan de reconquête industrielle en France prévoient la création de 440 stations de charge d’H2 d’ici à 2020, et la création de 25000 emplois d’ici à 2030 pour la France. La politique énergétique du Québec prévoit d’ accompagner financièrement l’ achat d’ automobiles à hydrogène. Aussi, des projets pilotes, comme la station de charge en hydrogène de l’Institut de Recherche sur l’Hydrogène (IRH) à l’UQTR, préparent la région à accueillir des stations multi-carburant pour 2030 [Couillard 16]. L’ ambitieux programme japonais NEDO (New Energy and Industrial Technology Development Organization), quant à lui, envisage de produire, distribuer et utiliser de l’H2 décarboné en 2040.
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